Superphénix (voir: Les surgénérateurs)

 

 

www.bastamag.net, 7/11/2011:

Le Post - Peut-on vraiment démanteler une centrale nucléaire ?

Que la France décide ou non de sortir du nucléaire, elle sera tôt au tard confrontée au démantèlement de ses 58 centrales nucléaires vieillissantes. Une problématique que connaît bien l'anthropologue et philosophe Christine Bergé, qui a enquêté sur le chantier de déconstruction du surgénérateur Superphénix. Pour elle, démanteler une centrale, c'est entrer dans un rapport au temps particulier, où mémoire et informations se perdent face à une tâche gigantesque. Et on ne « déconstruit » pas une centrale : on enrobe, on éparpille, on disperse. Entretien.

Basta ! : Pourquoi avoir écrit Superphénix, déconstruction d'un mythe ?

Christine Bergé: C'est le premier livre qui décrit de façon tout à fait lisible, pour le grand public, le fonctionnement d'une centrale nucléaire ainsi que son démantèlement. Dans cet ouvrage, je déchiffre les aspects symboliques qui entourent ce qui était considéré à l'époque comme le plus grand surgénérateur du monde [1]. Ayant beaucoup travaillé sur la réanimation en milieu hospitalier, j'ai abordé Superphénix comme un organisme vivant que l'on accompagne en fin de vie. Quand je suis entrée pour la première fois dans les bâtiments de la centrale, j'ai tout de suite remarqué qu'aucune horloge n'était à l'heure. C'était comme si la centrale somatisait. Pour les travailleurs du site, cela veut dire qu'il y a un arrêt du temps dans leur existence. J'ai également saisi qu'ils avaient du mal à avancer dans le temps de la déconstruction.

Quel enseignement principal tirez-vous de votre enquête ?

J'ai veillé à être extrêmement réaliste dans ma description des travaux et de la réalité vécue par les travailleurs, tout en analysant l'arrière-fond « inhumain » : avec le nucléaire, nous sommes dans des temps très longs, immémoriaux, qui sont hors de l'histoire et dépassent tout le monde. Malgré toutes les précautions prises lors de tels chantiers, le temps des radionucléides ­ qui peuvent durer jusqu'à plusieurs millions d'années ­ est ingérable. Le problème de la mémoire se pose inévitablement.

Comment se gère ce rapport au temps dans le cadre de la déconstruction d'une centrale ?

Tout est archivé, sur ordinateur ou sur papier, mais lire toutes les archives est strictement impossible. Une partie de l'information se perd. Par exemple, nous n'avons pas pu retrouver la trace de tous les architectes de Superphénix ! Or, pour la déconstruction, revoir entièrement ce qui a été fait dans le passé est une obligation. Entre la construction et la déconstruction d'une centrale, il peut s'écouler un demi-siècle. De plus, les centrales nucléaires ne sont pas conçues pour être déconstruites. Autrement dit, on déconstruit à partir de rien, on est obligé de tout inventer.

La perte de mémoire est inhérente à la déconstruction et, plus encore, au fonctionnement même des humains. Et dans l'industrie nucléaire, cela peut s'avérer dramatique. Pour Superphénix, les choses se passent relativement bien, car c'est une centrale jeune, en bonne santé et qui a très peu fonctionné. Mais la centrale de Tchernobyl ne peut pas être déconstruite. Et personne ne pourra jamais déconstruire Fukushima non plus.

En quoi Superphénix est-il un mythe ?

Le nom de Superphénix renvoie à une figure mythique : c'est l'oiseau qui renaît de ses cendres. Avec ses 1 200 MW, le surgénérateur de Creys-Malville devait être le plus puissant du monde, capable de se régénérer en permanence. Il était présenté comme le fin du fin de la technologie nucléaire. Et la déconstruction même d'une centrale est un mythe. On déconstruit mais on ne résout pas le problème de la radioactivité pour autant. Une centrale est en réalité une gigantesque poubelle dont on disperse les éléments. Du moindre gant en latex jusqu'à certains composants pouvant mesurer 15 m de long et qui ont baigné dans du sodium irradié. Tout cela ne peut pas être déconstruit. Les déchets de déconstruction sont enrobés et mis en terre ou envoyés dans des filières dédiées. Mais on ne fait qu'enrober.

Qu'est-ce qui vous a le plus marqué lors de vos visites de Superphénix ?

En premier lieu, le gigantisme et la beauté de la technique nucléaire, qui sont proprement fascinants. Je pense que les personnes qui y travaillent sont constamment dans un vertige de puissance. Ensuite, c'est l'extrême rigueur à laquelle sont soumis les travailleurs. Il y a une culture de la sûreté très exigeante. Mais, en réalité, on est obligé de tirer financièrement par tous les bouts : EDF fait appel à la sous-traitance, qui à son tour est mal payée, etc. Ce qui m'a frappée, c'est la disproportion entre la bonne volonté des humains et la réalité de la tâche à accomplir, qui est absolument monstrueuse.

Quelles sont les pressions exercées sur ceux qui déconstruisent ?

Il existe des pressions financières énormes au niveau des directions car le démantèlement est horriblement coûteux, et l'argent, rare. Au niveau des prestataires également, puisque sera choisi celui qui fera le meilleur travail au moindre coût. Il y a aussi une pression sur l'information : on ne peut pas tout dire. Les partisans de l'atome aiment à faire croire que le nucléaire est incompréhensible. Mais c'est faux. On veut cacher au public la compréhension de la technologie. Plus encore, on ne peut pas tout se dire. Au-delà des contraintes réglementaires, les travailleurs qui oeuvrent en zone contaminée ne peuvent pas à la fois gérer le danger et accepter de prendre de la dose. Parmi ceux qui travaillent avec la claire conscience du danger, certains vont jusqu'à se suicider.

Au vu de ces constats, le nucléaire est-il selon vous une aberration dans nos sociétés ?

Absolument. On développe des techniques sans jamais mesurer leurs impacts sur les humains. Cela est vrai pour toutes les industries dangereuses. Mais, avec le nucléaire, c'est pire encore puisque les radionucléides, dont certains peuvent se révéler mortels, ont des durées de vie comparables à celle de la planète Il est donc tout simplement impossible de les gérer. Prenons le cas du plutonium. Nous sommes en train d'en accumuler partout dans le monde, mais nous ne savons absolument pas quoi en faire. Si vous en inhalez ne serait-ce que quelques grammes, vous êtes mort [Non on est mort bien avant!!! on estime qu'une quantité de l'ordre d'une dizaine de milligrammes provoque le décès d'une personne ayant inhalé en une seule fois des oxydes de plutonium, et 1/1 000 000 ème de gr de plutonium inhalé suffit à provoquer un cancer]. Il est important de dire que les radionucléides naturels les plus dangereux ne sont rien à côté des radioéléments fabriqués artificiellement dans les curs des réacteurs.

Quels sont les principaux risques nucléaires ?

Les accidents représentent la première dangerosité. Ils peuvent avoir plusieurs causes : la négligence humaine, l'attentat terroriste, la catastrophe naturelle, comme à Fukushima. Le calcul de la probabilité de survenue d'un accident nucléaire n'est en réalité que le calcul des facteurs de risque, ce qui veut donc dire que l'on ne peut pas prévoir l'accident, lequel, par définition, surviendra à un endroit et à un moment que l'on n'avait pas prévus. Le danger pour le corps humain est également gravissime. Les radionucléides pénètrent dans tous les organes. Là aussi, les institutions internationales, comme l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), qui marchent main dans la main, nous noient dans un océan de calculs. Après l'accident de Tchernobyl, ils ont relevé les seuils de radioactivité que les individus pouvaient recevoir. C'est affreux. Au lieu d'admettre qu'ils ne pouvaient pas gérer la situation, ils ont augmenté les seuils de supportabilité humaine

Et troisième risque, la contamination radioactive, chronique et accumulative. À la différence de la fumée, qui s'évapore dans l'air, la radioactivité, elle, ne disparaît jamais totalement. Elle s'éparpille. Même si l'activité nucléaire mondiale s'arrêtait aujourd'hui, nous sommes condamnés à vivre dans un environnement virtuellement mutagène. L'irradiation radioactive est une pollution. Et nous sommes dans une inertie polluante. Le véritable problème est cette acceptation de l'irradiation chronique, car on est en train de transformer la notion d'accident : il devient un simple aléa du nucléaire. On le dédramatise, à l'instar de ce qui est fait avec les effets des faibles doses. Pour preuve, on ne parle déjà plus aujourd'hui de Fukushima, alors que Tchernobyl, en son temps, était une catastrophe effroyable.

Les responsables politiques français sacralisent-ils l'énergie nucléaire ?

Ce qui est sacré pour qui maîtrise l'énergie nucléaire, c'est le pouvoir qu'elle confère : les lignes de force des alliances, la potentialité de guerre, la possibilité de menacer l'autre à égalité. Ce n'est pas l'énergie nucléaire elle-même. Cette dernière, en revanche, est sacralisée par les acteurs du nucléaire ­ les ingénieurs des Mines, du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), des organismes de recherche sur l'atome, les militaires, etc. ­, qui pensent réellement qu'on ne peut pas faire autrement. Il y a cinquante, soixante ans, régnait une grande mythologie du nucléaire. C'était l'énergie irradiante de l'avenir. Maintenant que sa dangerosité est avérée, il est forcément moins sacralisé. Le nucléaire reste néanmoins encore aujourd'hui la dragée qu'il faut porter le plus haut possible. Par conséquent, le seul argument qui rend le nucléaire si incontournable en France est l'argument de puissance.

Anthony Laurent

À lire :

Superphénix, déconstruction d'un mythe,
Christine Bergé (photographies de Jacqueline Salmon),
Les empêcheurs de penser en rond, La Découverte, octobre 2010, 150 p., 13 euros.


Notes

[1] Superphénix est le réacteur de la centrale nucléaire de Creys-Malville, en France. Lancé par le Premier ministre Jacques Chirac en 1976, il est mis en service en 1985, et arrêté définitivement en 1998. Les travaux de démantèlement devraient durer jusqu'en 2027. Soit dix ans de construction, trente ans de déconstruction, pour une durée de vie utile de onze ans au total, en comptant les périodes d'arrêt. À lire, sur l'histoire du réacteur : Superphénix, des braises sous la cendre, Le monde diplomatique, avril 2011.

 


Le Monde, 30/7/2007: 

Le lent démantèlement de Superphénix continue en Isère
[Ou comment le journal Le Monde essaie quand même avec l'échec de Superphénix de faire la promo du nucléaire]

Le 31 juillet 1977, plusieurs dizaines de milliers d'antinucléaires convergeaient sous la pluie, au milieu des champs de maïs, vers le site de Malville, en Isère. Ils voulaient s'opposer à la construction, commencée l'année précédente, de ce qui devait être le fleuron de la technologie électronucléaire française : le surgénérateur Superphénix. Au cours des affrontements avec les forces de l'ordre, un manifestant, Vital Michalon, était blessé mortellement par l'explosion d'une grenade offensive et deux autres étaient blessés. Pour commémorer ce drame, un rassemblement, auquel appelle le réseau Sortir du nucléaire, doit avoir lieu, mardi 31 juillet à 15 heures, dans la commune voisine de Faverges.

Les réacteurs du futur seront, eux aussi, des surgénérateurs

L'EPR (European Pressurised Reactor), réacteur [dit] de 3e génération qui doit succéder aux centrales actuelles, n'est jamais qu'une version améliorée de ces dernières. Les installations de 4e génération, dont l'exploitation est prévue à partir de 2040, marqueront en revanche une rupture, en reprenant la technologie de la surgénération expérimentée avec Superphénix. Le CEA concentre ses recherches actuelles sur deux filières à neutrons rapides, refroidies par du sodium [Le sodium liquide est une substance très délicate à manipuler car elle s'enflamme au contact de l'air et explose au contact de l'eau] ou par du gaz.

L'intérêt de la surgénération est de brûler non seulement l'uranium 235 (fissile), mais aussi l'uranium 238, dont est composé à 99,3 % le minerai naturel. Ce qui, avec les réserves mondiales connues à ce jour, assurerait plusieurs milliers d'années de fonctionnement du parc, contre 250 années avec les centrales actuelles [faux, actuellement les réserves sont de 50 à 70 ans de consommation !]. Autre avantage : ces réacteurs, à cycle fermé, sont conçus pour brûler une partie de leurs propres déchets : les actinides mineurs, très radiotoxiques, sont recyclés, les résidus ultimes se limitant aux produits de fission. [Rappel: SuperPhénix comportait environ 35 tonnes de combustible nucléaire, dont 5 tonnes de plutonium et 1/1 000 000 ème de gr de plutonium inhalé suffit à provoquer un cancer et 8 kilos sont suffisant pour faire une bombe atomique de type Nagasaki]

Le CEA assure que ces nouvelles centrales bénéficieront, par rapport à Superphénix, de "progrès déterminants" [car les incidents à Superphénix étaient si nombreux qu'il était presque toujours en arrêt technique].

Trente ans après, l'ombre de Superphénix plane toujours sur le nucléaire français. Couplé au réseau électrique en janvier 1986, le réacteur prototype à neutrons rapides, victime d'incidents à répétition, n'aura été en service qu'un peu plus de dix mois en neuf ans, avant de finir par fonctionner de façon à peu près satisfaisante en 1996 [faux]. L'année suivante, le gouvernement de Lionel Jospin - dont Dominique Voynet était ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - décidait de mettre fin à l'expérience.

Depuis le décret de mise à l'arrêt, le site de Creys-Malville s'est transformé en chantier pilote de démantèlement. Car, par rapport aux réacteurs nucléaires classiques, dont huit sont également en cours de déconstruction (à Bugey, Brennilis, Chinon, Chooz et Saint-Laurent), celle d'un surgénérateur pose des problèmes particuliers, liés à la nature du combustible, contenant du plutonium, et à celle du liquide de refroidissement, constitué de sodium.

Dans un premier temps, les éléments combustibles, soit 364 assemblages fissiles comportant 4,8 tonnes de plutonium et 233 assemblages fertiles d'uranium, ainsi que diverses pièces de protection et barres de commande, ont été retirés du réacteur. Ils ont été mis à "refroidir" en piscine, sur le site, dans un Atelier pour l'évacuation du combustible (APEC) qu'EDF a été autorisée à exploiter pour trente ans. Y est également entreposé un deuxième coeur tout neuf, non brûlé, qui avait été commandé avant la fermeture.

La destination finale de ces combustibles n'est pas encore arrêtée, indique Serge Klaeylé, directeur du Centre d'ingénierie, déconstruction et environnement d'EDF. Il avait été envisagé de les retraiter dans les usines de la Hague (Manche) d'Areva. Mais EDF considère aujourd'hui ces éléments non comme des déchets, mais comme "des réserves de combustible susceptibles d'être valorisées", soit dans les filières MOX (mélange d'uranium et de plutonium), soit dans les futures centrales.

Ne subsistent dans la cuve du réacteur que des éléments ne présentant pas de risque de "criticité", c'est-à-dire de déclenchement de réaction nucléaire. Ils sont eux aussi en cours d'extraction et rejoindront la piscine. Dans le même temps, la salle des machines a été vidée de ses turbines et de ses pompes, soit 150 000 tonnes de déchets non radioactifs.

Reste l'épineux problème du sodium fondu, dont le circuit primaire de refroidissement, les boucles secondaires et diverses installations recelaient 5 500 tonnes. La difficulté vient de ce que ce matériau s'enflamme à l'air et détone au contact de l'eau. Une unité spéciale de traitement, composé de deux réacteurs chimiques, est en cours d'installation sur le site et devrait démarrer en 2008.

Le principe, expérimenté sur la centrale de Dounreay, en Ecosse, et validé par les ingénieurs du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), consiste à faire tomber au goutte-à-goutte le sodium liquide dans de l'eau, dans un environnement neutre d'azote. Le produit de cette réaction est de la soude, qui sera incorporée à du béton. Quatre à cinq années seront nécessaires pour neutraliser la totalité du sodium et il faudra attendre vingt ans pour que les 70 000 tonnes de béton accumulés sur le site, dont la radioactivité "sera comparable à celle du granit", précise Serge Klaeylé.

Entre 2013 et 2023 devrait alors être réalisée la dernière partie de la déconstruction : la démolition du bâtiment réacteur, où la cuve et certaines structures métalliques, chargées en cobalt 60, restent très irradiantes. EDF, dont le scénario de démantèlement prévoyait au départ de laisser la radioactivité décroître pendant un demi-siècle, a finalement décidé, pour toutes ses centrales fermées, de les raser au plus vite, afin de rendre le site "à l'herbe".

Alors seulement, à l'issue de un milliard d'euros de travaux, sera tournée la page de ce qui demeurera dans les mémoires comme l'un des épisodes les moins glorieux de l'aventure nucléaire nationale.



Gazette nucléaire n°235/236, février 2007:

Déconstruction de Superphénix: où en est-on?
Georges DAVID

     En juin 1997, le gouvernement JOSPIN décidait d'arrêter définitivement Superphénix, la centrale nucléaire surgénératrice de Creys-Malville (Isère). Un décret du 30 décembre 1998 confirmait cet arrêt.
     Voilà maintenant plus de six ans, que la déconstruction a été engagée. Avant d'arriver au terme de celle-ci il faut savoir qu'il reste au minimum 20 ans à parcourir...
     Voyons ce qu'il en est de cette déconstruction, tant au plan de ce qui a été réalisé que de ce qu'il reste à réaliser. Comme nous le verrons, de gros obstacles restent à surmonter. Cette déconstruction est une grande première en la matière: tout ou presque, est apprentissage et découverte sur le tas.
     Et puis, derrière cette déconstruction que nous cache-t-on? De quoi sera fait l'après Superphénix? Une chose est sûre: pour EDF, pas question d'abandonner un si beau site...

Une déconstruction qui avance...
     Depuis 1998 divers travaux ont été réalisés. Pour l'essentiel, il y a eu: 
     - Le déchargement des 650 assemblages présents dans le coeur du réacteur et leur entreposage dans la piscine de l'APEC (Atelier Pour l'Entreposage des Combustibles). À l'origine, dans la phase de fonctionnement de Superphénix, cette structure avait été conçue pour entreposer, à titre provisoire, des assemblages combustibles irradiés ou neufs en piscine ainsi que des objets métalliques usés et irradiés en conteneurs.
     - la déconstruction des 6 pylônes de 35 m. de hauteur et des 5 km de lignes 400.000 volts et des 48 cheminées. La dépose de 1.200 m de tuyauteries des circuits eau-vapeur. Au total 950 tonnes d'acier.
     - Déconstruction de la salle des machines et du bâtiment des auxiliaires mécaniques. Au total, 15.000 tonnes de matériel ont été ainsi évacuées. A la place est prévu l'installation de deux unités de traitement du sodium (TNA). 
     - Déconnexion de la ligne 225.000 volts et mise en place d'une nouvelle ligne, enterrée celle-là, de 20 Kvolts chargée de pourvoir aux besoins électriques du chantier
(des besoins énormes: l'équivalent de la consommation électrique d'une ville de 20.000 habitants), en particulier pour  assurer le maintien à l'état liquide du sodium primaire de l'installation. 
     - Divers travaux, notamment en vue de préparer et rendre possible la vidange puis le traitement du sodium. Ainsi, les 8 échangeurs ont été vidangés et le sodium correspondant stocké dans des réservoirs isolés et spécialement prévus à cet effet.
Le sodium primaire, radioactif, soit 4.000 tonnes, se trouve toujours dans la cuve principal. Il y est maintenu à l'état liquide (à 180°C, d'où l'importante consommation électrique), sous un ciel de gaz neutre (argon), afin de rendre possible sa vidange ultérieure.

Une déconstruction programmée...
     Le décret du 30 décembre 1998 de mise à l'arrêt de la centrale ne couvrait pas la totalité des opérations de démantèlement. Suite à l'enquête publique du printemps 2004, le gouvernement a signé le 20 mars dernier deux décrets d'application définissant les conditions réglementaires de la suite de la déconstruction du réacteur. Le premier de ces décrets concerne le démantèlement complet du réacteur, avec notamment le traitement du sodium et toutes les opérations ultérieures de déconstruction du bâtiment réacteur. Le second, autorise l'extension des missions de l'Atelier Pour l'Entreposage du Combustible (APEC): entreposage des assemblages neufs (à savoir le second coeur fabriqué par la COGEMA, avant que la décision d'arrêter la centrale ne soit prise) ainsi que des blocs de béton issus du traitement du sodium (voir plus bas). 
     Au total il est encore prévu 20 ans de travaux, qui se décomposent en trois grandes étapes: le traitement du sodium, d'abord, la déconstruction du bloc réacteur, ensuite et la démolition des bâtiments, enfin.
Le traitement du sodium constitue une phase très délicate. Rappelons qu'à l'état liquide le sodium est un produit extrêmement dangereux: il  explose au contact de l'eau et s'enflamme au contact de l'air. Au total il y a 5.500 tonnes de ce produit à neutraliser: les 4.000 tonnes (radioactifs) du circuit primaire (cuve) et les 1.500 tonnes du circuit secondaire des échangeurs de chaleur.
     Ce sodium sera d'abord vidangé, c'est-à-dire acheminé liquide et donc potentiellement très dangereux, par pompage et via des tuyaux "sécurisés", de ses lieux de stockage actuels- cuve principale (4.000 T.) et réservoirs isolés annexes (1.500 T.) - vers l'installation de traitement du sodium (TNA) qui est actuellement en construction dans ce qui était la salle des machines.
     Dans un second temps, ce même sodium sera traité en vue de sa transformation en soude. Il le sera, grâce à un procédé développé par le CEA. Procédé qui aurait été validé industriellement sur le site de Cadarache en 1993 et qui, par ailleurs, serait actuellement utilisé sur le site de la centrale surgénératrice de Dounreay en Écosse. Deux lignes de traitement permettront de traiter au total 5 tonnes de sodium par jour, soit 1825 tonnes par an.  Incorporée à du béton comme eau de gâchage, la soude radioactive se retrouvera fixée et confinée sous la forme de blocs de béton. Les 5500 tonnes de sodium à traiter engendreront 24.000 m3 de soude et au final 36700 m3 de béton soit 70.000 tonnes.
     Afin de laisser s'apaiser la radioactivité de ces blocs et pour permettre également un étalement dans le temps des navettes des nombreux camions chargés  de l'évacuation sur un autre site  des autres déchets (radioactifs : 25.000T. et autres: 423.000 T.) issus de la déconstruction, il est prévus dans un premier stade l'entreposage sur place et sur, environ, 5.000 m2, de ces blocs. 
     On ne sait rien, pour l'instant, du lieu de stockage définitif de ces différents déchets à risques générés par cette déconstruction. Ce que l'on sait c'est que leur acheminent vers deux sites à définir par l'ANDRA, est prévu, au rythme de 20 à 25 transports quotidiens, entre 2008 et 2018, passant à 25-30 au-delà et jusqu'en 2026. Ce qui se traduira par une croissance du trafic routier des routes avoisinantes, la D19 et la N75 notamment, de l'ordre de 9%...
     Viendra ensuite, vers 2010, la phase de déconstruction du bloc réacteur qui devrait s'étaler sur une dizaine d'années, soit jusqu'en 2020.
     Ensuite et jusqu'en 2025 il est prévu de procéder à la démolition des bâtiments. A lui tout seul, compte tenu de sa taille impressionnante : 80 m de haut et 60 m de diamètre, le bâtiment réacteur, demandera au moins trois ans de travaux
     Au plan de l'emploi, il convient de souligner que ce chantier de déconstruction induit un nombre conséquent d'emplois, même s'il s'avère très inférieur à ce qu'il était au temps de l'exploitation du réacteur (1.200 personnes). Actuellement 350 personnes, dont 150 agents EDF regroupés au sein du CIDEN (ingénierie de déconstruction) et 200 agents d'entreprises prestataires, oeuvrent à cette déconstruction.
     En termes de coûts, cette déconstruction est au total évaluée, selon EDF, à 1 milliard Euros. Selon Monsieur Montané, l'actuel directeur du chantier cette somme serait bien estimée  et déjà provisionnée dans la comptabilité d'EDF. À voir...

     Pour les antinucléaires, la victoire est en demie teinte
     La victoire des opposants à Superphénix n'est encore qu'une victoire en demie teinte et ceci pour deux raisons essentielles. 
     Faute d'avoir été pensée et analysée dès la phase même de conception du projet, cette déconstruction est source d'improvisation permanente. Laquelle improvisation, compte tenu de la gravité des problèmes à traiter, n'est pas sans générer une certaine inquiétude. 
     Ainsi en est-il avec le déchargement et le traitement du sodium, un produit particulièrement dangereux: tout se passe comme si les concepteurs, en faisant le choix du sodium comme fluide caloporteur ne s'étaient nullement préoccupés de savoir ce qu'il adviendrait de ce produit- comment l'extraire de la centrale et qu'en faire? 
     Pour l'instant, le démontage du puzzle s'est déroulé sans incidents, ni accidents majeurs. Il faut s'en féliciter, sans pour autant être assuré qu'il continuera à en être ainsi. Il est certain que tant que le sodium n'aura pas été totalement neutralisé, Superphénix demeurera une menace importante pour les habitants de la région.
     En marge de cette déconstruction, il faut savoir que la contre attaque des nucléocrates s'organisent. 
     Ne nous a-t-on pas dit que les assemblages combustibles usagés déchargés du coeur du réacteur et entreposés temporairement dans la piscine de l'APEC, au même titre qu'un second coeur neuf, constituent "une réserve énergétique pour l'avenir", à l'horizon 2020-2030, en fonction des choix politiques en la matière.
     Monsieur Montané, l'actuel directeur du chantier, a même déclaré, lors de la dernière assemblée générale d'AMEN (1): "le site de Creys-Malville peut très bien, compte tenu de sa grande superficie, accueillir une reconstruction parallèlement à une déconstruction". Il n'a fait que nous confirmer dans l'idée que la probabilité est grande de voir se construire une ou plusieurs autres tranches sur
ce site d'un total de 173 ha. EDF, en refusant de se déposséder des terres agricoles situées en bordure du site d'exploitation actuel et confiées, dans l'attente d'une utilisation, en location à des agriculteurs, affiche ainsi clairement la couleur : maintien de l'option d'une ou plusieurs nouvelles tranches nucléaires sur le site.
     Il serait imprudent de croire que le livre de l'histoire de la centrale nucléaire Superphénix s'est terminé sur la décision politique de l'arrêter. Un autre chapitre, celui de la déconstruction, une opération délicate et qui peut nous réserver des surprises, reste à écrire.
     Il ne faut pas non plus exclure une suite à cette histoire, celle de la nouvelle tranche que l'on se prépare en douce à engager.
     En somme, la vigilance reste de rigueur.

(1) En juin 2000, à l'initiative d'anti-nucléaires locaux, se mettait en place l'association AMEN (Après Malville les Énergies Nouvelles). Laquelle se fixait comme objectif principal d'assurer le suivi du démantèlement de la centrale. Dans cette perspective, une visite du site et des rencontres avec les différents directeurs qui se sont succédés à la tête du chantier depuis 2000 ont été organisées. 

COMMENTAIRE
     A noter l'affirmation à propos de la neutralisation du sodium: "Il le sera, grâce à un procédé développé par le CEA. Procédé qui aurait été validé industriellement sur le site de Cadarache en 1993 et qui, par ailleurs, serait actuellement utilisé sur le site de la centrale surgénératrice de Dounreay en Écosse"
     1 - En 1993 la neutralisation des 100 derniers kilogrammes de Rapsodie a donné lieu à une explosion brisant une dalle de plusieurs dizaines de tonnes et entraînant la mort d'un des opérateurs. Il faudrait plus de renseignements sur la technique employée. Il y a 5.500 tonnes soit 5 millions cinq cent mille kilogrammes à traiter.
Quel est le procédé? Comment est-il géré à Dounreay?
     2 - Qu'envisage-t-on sur ce site ? le mélange construction -déconstruction n'est jamais favorable à la déconstruction et surtout au démantèlement.


Le taux de déconstruction de Superphénix a atteint 38%

19/12/2006 - EDF a annoncé mardi que 38% du surgénérateur nucléaire Superphénix, situé à Creys-Malville (Isère), avaient été déconstruits, et que l'étape 2006-2013 allait consister à éliminer "le risque sodium" du réacteur. Le gouvernement a décidé en juin 1997 de fermer et supprimer la centrale nucléaire Superphénix "à cause de son coût excessif". Elle doit être totalement déconstruite en 2025. "Nous allons construire une chaîne de traitement des 5.500 tonnes de sodium liquide (une substance délicate à manipuler car elle s'enflamme au contact de l'air et de l'eau) qu'utilisait le réacteur pour évacuer la chaleur, afin de transformer ce produit en soude qui sera incorporée à des blocs de béton", a indiqué le futur directeur (à partir du 1er janvier prochain) de la centrale, Jean-Pierre Thomas. "Cette chaîne de fabrication sera testée en 2007, entrera en production en 2008 et devrait traiter tout le sodium d'ici 2012-2013", a-t-il ajouté. "A la fin de l'opération, cela représentera 70.000 tonnes de béton très faiblement radioactif stocké sur place. Au bout de 30 ans, ce béton aura la même radioactivité que celle du granit et pourra être utilisé comme matériau de construction", a ajouté M. Thomas. Le procédé de transformation du sodium en soude a été créé par le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) et utilisé en Ecosse pour retraiter le sodium de la centrale de Dounreay. Sur le plan social, le préfet de l'Isère, Michel Morin, a indiqué que le fonds de 13,9 M d'euros destiné à créer des emplois après la fermeture -- financé à un tiers par EDF et deux tiers par l'Etat -- avait permis de créer autour de la centrale 1.121 emplois et d'en maintenir 171. Actuellement, 100 agents EDF et 300 salariés d'entreprises extérieures travaillent à la déconstruction de la centrale, une opération dont le coût est évalué à 940 M EUR. Le démantèlement de la cuve du réacteur, fortement radioactive, s'étalera entre 2013 et 2020. La démolition du bâtiment réacteur devrait durer 5 ans. EDF évoquait un "retour à la pelouse" à Creys-Malville, mais ce gazon abritera quand même en 2025 un bâtiment avec une piscine contenant 14 tonnes de plutonium, une substance particulièrement dangereuse [1/1 000 000 ème de gr de plutonium inhalé suffit à provoquer un cancer]. Sept tonnes provenant du coeur du surgénérateur déjà vidé sont sur place et 7 tonnes du deuxième coeur, qui devait alimenter la centrale, sont en cours de transfert à Creys-Malville. Selon un ancien directeur de Superphénix, Marc Leurette, ces coeurs ne sont pas un déchet mais constituent une réserve énergétique pour l'avenir [quel plaisantin !]. "Un coeur neuf représente une production théorique d'une puissance de 1.300 mégawatts pendant 2 ans et le stockage donnera du temps pour prendre une décision à son sujet", avait-il dit. Le directeur du centre d'ingénierie déconstruction et environnement (CIDEN), Serge Klaeyle, a évoqué l'avenir des terrains de Superphénix, bien situés au bord du Rhône. "EDF souhaite y reconstruire des moyens de production", a-t-il dit, sans donner de précision.


EDF présente une nouvelle étape de la déconstruction de Superphénix en 2025

CREYS-MALVILLE (20 avril 2004) - EDF a présenté mardi la nouvelle étape, avec une enquête publique du 26 avril au 26 mai, qui doit conduire à la déconstruction totale en 2025 du surgénérateur nucléaire Superphénix situé à Creys-Malville (Isère).
Une nouvelle enquête publique est nécessaire car quand le gouvernement avait décidé en juin 1997 de fermer et supprimer la centrale nucléaire Superphénix "à cause de son coût excessif", il s'était donné initialement un délai de 50 ans, réduit par la suite à 25 ans, mais son décret de décembre 1998, n'avait pas tranché sur la façon de traiter, conserver ou éliminer certains éléments radioactifs.
L'enquête publique a pour objet d'autoriser le traitement des 5.500 tonnes de sodium liquide qu'utilisait le réacteur pour évacuer la chaleur, alors qu'initialement seule la vidange était autorisée.
EDF veut installer deux chaînes de production sur le site permettant de transformer
le sodium (une substance délicate à manipuler car il s'enflamme au contact de l'air et de l'eau) en soude qui sera incorporée à des blocs de béton. Ces derniers seront faiblement radioactifs (2 à 3 fois plus que le granit naturel) et facile à transporter, a indiqué le directeur de la centrale, Marc Leurette.
L'opération devrait déboucher sur la production de 70.000 tonnes de béton. Le procédé de transformation du sodium en soude a été créé par le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) et est utilisé actuellement en Ecosse pour retraiter le sodium de la centrale de Dounreay.
L'enquête doit aussi demander le droit d'exploiter pendant 30 ans, un atelier pour l'entreposage du combustible (APEC) ou seront placés le coeur qui avait servi pendant l'exploitation de la centrale et le coeur neuf qui devait le remplacer. Ces coeurs sont composés d'assemblages combustibles qui contiennent chacun 7 tonnes de plutonium, une substance particulièrement dangereuse. "Ce combustible n'est pas adapté pour les réacteurs nucléaires de 3e génération à eau pressurisée (EPR)", a indiqué M. Leurette.
Pour lui, "ces coeurs ne sont pas un déchet mais constituent une réserve énergétique pour l'avenir". "Un coeur neuf représente une production théorique d'une puissance de 1.300 mégawatts pendant 2 ans et le stockage donnera du temps pour prendre une décision à son sujet", a-t-il dit.
EDF estime que la "valorisation éventuelle de ce combustible dans de futurs réacteurs utilisant le plutonium, sera envisagée à l'horizon 2020/2030, en fonction des choix politiques énergétiques du gouvernement", a indiqué le directeur délégué de la centrale, Christian Montane.
Le traitement du sodium devrait durer 4 ans. Le démantèlement de la cuve du réacteur, fortement radioactive, s'étalera entre 2010 et 2020. La démolition du bâtiment réacteur devrait durer 5 ans. Alors qu'EDF évoquait un "retour à la pelouse" à Creys-Malville en 2025, il y aura quand même un bâtiment avec une piscine contenant 14 tonnes de plutonium.
Le coût pour le démontage de la centrale a été révisé en légère baisse à 880 M EUR au lieu de 900 M EUR.
"La déconstruction de Superphénix ne signifie pas que le site ne sera plus utilisé à l'avenir pour la fabrication d'énergie", a ajouté Marc Leurette.

 

Le surgénérateurs nucléaire Superphénix vidé de son combustible

GRENOBLE, 1er avr 2003 - Le dernier des 650 assemblages combustibles a été extrait le 18 mars du coeur du réacteur Superphénix de Creys-Malville (Isère), ouvrant la voie à une nouvelle étape de la déconstruction du surgénérateur nucléaire, a annoncé mardi la direction de la centrale dans un communiqué.
Pour l'instant, ces assemblages fortement radioactifs sont stockés sur place dans des piscines.
La prochaine étape de la déconstruction de ce surgénérateur sera l'évacuation des 1.250 assemblages en acier de la cuve d'ici 2006, a indiqué la chargée de communication de la centrale Véronique Ferdinand.
Le chantier de démontage du matériel de la salle des machines a par ailleurs commencé début mars et devrait s'achever dans 18 mois. Cela permettra alors de construire à la place une machine pour vider le sodium liquide contenu par la cuve.
Le sodium liquide est une substance délicate à manipuler car elle s'enflamme au contact de l'air et explose au contact de l'eau.
Le gouvernement avait décidé en juin 1997 de fermer la centrale nucléaire Superphénix "à cause de son coût excessif".
EDF s'est donné un délai de 25 ans avant "le retour à la pelouse", c'est-à-dire la déconstruction totale de n'importe quelle centrale nucléaire de son parc.

 


Superphénix est officiellement mis à l'arrêt

En 1998 la mise à l'arrêt de Superphénix était dans l'air. C'était considéré par les antinucléaires comme un début de victoire. Il est pourtant évident que Superphénix ne pouvait continuer qu'en produisant des pannes et des problèmes, tout en consommant de l'énergie électrique. En dehors du réalisme technico-économique qui réclamait la mise à mort de ce monstre, les pannes à répétition portaient atteinte à la crédibilité de la technocratie nucléaire.
Le décret n°98-1305 du 30 décembre 1998 est relatif " à la première étape de la mise à l'arrêt définitif de l'installation nucléaire de base ". On est encore loin de la phase finale de l'arrêt définitif et de démantèlement. L'article 2 de ce décret n'autorise que :
"- le déchargement du réacteur ;
- la vidange et l'entreposage du sodium ;
- le démontage d'installations non nucléaires définitivement mises hors service
Les autres étapes de la mise à l'arrêt définitif de l'installation, groupées ou non, devront faire l'objet d'approbations ultérieures par décret ".
Cette première phase de la mise à l'arrêt définitif n'est pas sans risques. L'article 3-1 du décret l'exprime clairement :
" L'entreposage et toute manutention des éléments déchargés seront réalisés de manière à exclure tout risque de criticité et à limiter les risques d'échauffement ou de chute pouvant endommager le combustible ".
Les risques d'incendie du sodium et d'explosion du plutonium ne sont pas exclus pour cette première phase. Remarquons qu'il est curieux que ce décret recommande de ne pas laisser tomber trop violemment par terre les éléments combustibles ! Ces chutes pourraient avoir des conséquences graves.
L'article 1er demande que soit " mis à jour le plan d'urgence interne du site de l'installation " et l'article 3 précise : " L'exploitant établira les consignes de sécurité et les procédures détaillées à respecter relatives aux opérations de manutention du combustible, de vidange et d'entreposage du sodium conformément aux règles générales de surveillance et d'entretien de l'installation mentionnées à l'article 1er ". Cet article cité en référence est suffisamment " général " et creux pour ne pas imposer de contraintes réelles à l'exploitant. C'est finalement l'exploitant lui-même qui définira les normes de sûreté.
Enfin l'article 3-7 " Gestion des déchets " a échappé à l'attention des anti-enfouisseurs. Il précise : " Aucun stockage définitif de déchets radioactifs ne sera réalisé dans le périmètre de l'installation ". Admirons la précision que les signataires de ce décret, Lionel Jospin, Dominique Strauss-Kahn, Dominique Voynet, Christian Pierret, ont imprimé au texte. Ainsi dans le même article " Le délai d'entreposage des déchets de toute nature devra être aussi court que possible ".
L'affaire Superphénix est loin d'être terminée et il est assez dangereux de s'en désintéresser comme le fait le mouvement antinucléaire sous prétexte que l'arrêt définitif a été acquis.
Les employés de Superphénix n'ont pas à manifester contre les licenciements intempestifs qu'on observe généralement lorsqu'une entreprise industrielle est amenée à fermer suite à une faillite. Ceci devrait réconcilier les syndicats de l'industrie nucléaire avec la mise à l'arrêt définitif du parc électronucléaire !

(Extrait de la préface de Sortir du nucléaire c'est possible avant la catastrophe,
Bella et Roger Belbéoch,
Ed. Esprit Frappeur, 2002)


 

Le Matin, 3/11/02:

Encore un quart de siècle pour démanteler Creys-Malville
Une centrale nucléaire de la taille de Super-Phénix ne se démolit pas comme une usine de boîtes de conserve. Sa «déconstruction» va encore durer 25 ans et coûter 4 milliards de francs

Super-Phénix est à l'arrêt depuis février 1998. Pourtant, l'aspect extérieur de ce réacteur à neutrons rapides, installé sur les bords du Rhône, ne s'est guère modifié. Et des centaines d'employés continuent de s'activer quotidiennement sur le site. Le photographe du «Matin» n'est pas le bienvenu. «Tout cliché est strictement interdit. Vous ne vous rendez pas compte, avec le plan Vigipirate de lutte contre le terrorisme?» lui lance un fonctionnaire d'Electricité de France (EDF), propriétaire des lieux. Les autorités françaises imaginent-elles qu'Oussama ben Laden, ou l'un de ses acolytes, s'intéresse encore à cette filière de réacteurs à neutrons rapides, mise au rancart par Lionel Jospin depuis près de cinq ans? Bref, il est interdit de commencer à sortir un objectif, même à l'intérieur d'un simple bureau. Christian Bonzon n'aura guère plus de chance à l'extérieur de la centrale de Creys-Malville. Deux gendarmes l'interpellent alors qu'il prend des photos d! es bâtiments depuis la route nationale! Nous avions pourtant prévenu longtemps à l'avance la direction d'EDF de notre visite.

Mobilisation des écologistes

Pendant deux décennies, de 1976, date du début de la construction de la centrale, dans une région isolée de l'Isère, à 1997, et l'annonce de l'abandon de Super-Phénix, ce prototype a mobilisé contre lui des milliers d'écologistes européens, et notamment suisses. La centrale n'est guère qu'à une heure de voiture de Genève. Pour les adversaires du nucléaire, Creys-Malville, c'est un Tchernobyl en puissance, capable de contaminer un million d'individus. Ce surgénérateur, créé pour produire plus de plutonium qu'il n'en consomme, accumule les pannes. Le réacteur diverge, le sodium liquide se fait la belle. Le plus grand chantier de la République se révèle un gouffre financier. Il ne va fonctionner que quelques semaines à pleine puissance et coûter 13 milliards de francs suisses.

Une piscine pour les déchets

Alors comment la France - mais aussi l'Italie, qui possédait 33% de Creys-Malville, et l'Allemagne, 16 % -, se débarrasseront-elles de ce monstre? Mais, au fait, désirent-elles véritablement démanteler Super-Phénix? Ce n'est pas un secret: la filière nucléaire n'a pas digéré cette fermeture, décidée par Lionel Jospin, sous la pression des Verts. Elle pourrait être tentée de faire repartir discrètement la centrale avec la bénédiction d'un gouvernement de droite, très favorable au nucléaire. «C'est impossible. Creys-Malville ne peut plus redémarrer. Le coeur du réacteur comptait 650 assemblages combustibles. Début 2003, nous aurons fini de les décharger et de les entreposer dans une piscine», explique Jean-Louis Regairaz, directeur de cabinet et responsable de la communication de Creys-Malville. Il s'agit d'une piscine réalisée en béton armé, d'une profondeur de 16 mètres, et dont l'étanchéité est assurée par un revêtement en acier inoxydable. La piscine de l'! Atelier pour l'évacuation du combustible (APEC) est installée sur le site même de Creys-Malville.

«Les produits contaminés sont entreposés dans de l'eau. Mais cette eau va devenir à son tour contaminée. Et que va-t-on en faire?» s'inquiète Chaim Nissim, membre du Parti écologiste genevois et député vert pendant quatorze ans. Sa formation politique va d'ailleurs présenter une motion au Grand Conseil genevois. La centrale de Creys-Malville, même à l'arrêt, offre-t-elle à la Suisse toutes les conditions de sécurité ?

Des milliers de tonnes contaminées

«Et comment vont-ils retraiter les 5500 tonnes de sodium qui servaient au refroidissement?» s'interroge Chaim Nissim, ingénieur de l'EPFL. En fait, le sodium ne sera traité qu'entre 2006 et 2010. La «déconstruction» de Creys-Malville (pour reprendre le terme employé par EDF) est un travail de titan qui va encore prendre un quart de siècle et coûter près de 4 milliards de francs suisses. En effet, on ne démolit pas une filière de réacteurs à neutrons rapides comme une usine textile ou de boîtes de conserve. A côté des déchets hautement radioactifs, comme le plutonium (qui met 24 000 ans pour perdre la moitié de son activité), il faut aussi se protéger contre des dizaines de milliers de tonnes de déchets plus conventionnels: acier, béton, tuyauteries, câbles électriques, produits chimiques, utilisés dans la centrale.

«Le démantèlement d'un petit réacteur expérimental en Bretagne réclame plus de vingt ans. Alors pour Creys-Malville, ils ne sont pas près d'en venir à bout!» estime Philippe Gobet, membre du comité de ContrAtom. Des exemples? Super-Phénix compte plus de 60 000 kilomètres de câbles électriques, plus de 20 000 robinets et vannes. «Nous préférons encore que tous ces déchets restent sur le site de Creys-Malville. Le danger, c'est que l'acier, par exemple, ne soit vendu discrètement à des ferrailleurs, qu'il se disperse dans la nature et passe les frontières», ajoute le responsable de ContrAtom.

Plus de quatre ans après son arrêt, la centrale salarie toujours un demi-millier de personnes.

Ian Hamel


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Superphénix et le Japon (voir: L'accident survenu dans le surgénérateur de Monju en décembre 1995)

 


Déconstruction de 48 cheminées de Superphénix

GRENOBLE, 6 sept 02 - La déconstruction de 48 cheminées, situées sur les générateurs de vapeur du surgénérateur nucléaire Superphénix de Creys-Malville (Isère), a commencé et devrait s'achever dans trois mois, a annoncé vendredi la direction de la centrale.
Ces cheminées représentent un total de 950 tonnes d'acier. Certaines avaient une hauteur de 75 et 80 m et leur démontage va changer la physionomie de la centrale.
Le démontage du surgénérateur se poursuit et, à ce jour, 500 assemblages de combustible situés dans le coeur du réacteur, sur un total de 650, ont été évacués. Le réacteur devrait être vidé de l'ensemble de son combustible à la fin 2002 ou en janvier 2003, a indiqué le chef de cabinet de la centrale, Jean-Louis Regairaz.
Le gouvernement avait décidé en juin 1997 de fermer la centrale nucléaire Superphénix "à cause de son coût excessif".
EDF s'est donné un délai de 25 ans avant "le retour à la pelouse", c'est-à-dire la déconstruction totale de n'importe quelle centrale nucléaire de son parc.

 



Le démontage du surgénérateur Superphénix avance

CREYS-MALVILLE (Isère), 18 mai - Le démontage du surgénérateur Superphénix de Creys-Malville (Isère) vient de franchir une étape importante, avec le déchargement d'un tiers du combustible situé dans le coeur du réacteur, ce qui rend impossible dorénavant "la réaction en chaîne propre à un réacteur nucléaire", a annoncé la direction de la centrale.
203 assemblages fissiles, sur un total de 640, ont été retirés du coeur, et entreposés dans une piscine remplie d'eau prévue à cet effet, a précisé le directeur de la centrale, Bruno Coraça, avant l'ouverture au public vendredi et samedi, pour la première fois de son histoire, de cette usine.
Ces assemblages se présentent sous la forme de barres longues de 5,40 m et d'un poids de 580 ou 740 kilos. Ils contiennent de la matière fissible et une quinzaine de kilos de plutonium et sont immergés au sein du coeur du réacteur dans un bain de sodium.
Ce métal liquide a la particularité de s'enflammer au contact de l'air ou de l'eau. Il faut donc "laver" ces éléments et enlever toute particule de sodium avant de les entreposer dans la piscine remplie d'eau.
L'opération est délicate, et on retire en moyenne 4 assemblages par jour ouvrable du coeur du réacteur à neutrons rapide d'une puissance de 1200 MW.
"Ces assemblages dégagent 700 watts, c'est à dire la moitié de la chaleur dégagée par un fer à repasser. Comme la centrale est à l'arrêt depuis 1996, ils ont le temps de refroidir" explique M.
Coraça.
Le déchargement du coeur sera achevé mi 2002. 350 agents EDF et 200 salariés de prestataires de service (gardiennage, nettoyage ...) travaillent actuellement sur le site.

 

Matériel contaminés à vendre

Le passage sous le seuil de criticité de la centrale permet d'arrêter certains matériels de surveillance du coeur et de cesser leur maintenance. L'intérieur de la centrale ressemble maintenant, dans certains endroits, à un immense hangar abritant des machines d'occasion. De multiples pompes, moteurs et autres armoires électriques sont en cours "de mise hors service définitive", c'est à dire vidangés et nettoyés, avant d'être vendus ou mis à disposition d'autres centrales EDF.
"Nos diesels sont à vendre. On a trouvé preneur pour trois chaudières électriques. Les deux alternateurs de 600 MW pourraient aller l'un à la centrale du Havre (Seine-Maritime), l'autre à celle de Cordemais (Loire Atlantique). Pour EDF, ça permet d'éviter d'acheter du neuf", explique M Coraça.
Pour lui, ce travail de démontage a aussi sa noblesse, car "EDF doit savoir non seulement construire et exploiter, mais aussi déconstruire une centrale".
EDF se donne un délai de 25 ans avant "le retour de la pelouse", c'est à dire la deconstruction totale d'une centrale nucléaire, quel que soit son type.
Concernant Superphénix, dont Lionel Jospin avait annoncé en juin 1997 la fermeture "à cause de son coût excessif" et "la réussite très aléatoire" de la technologie des surgénérateurs, le retour à la pelouse pourrait prendre d'autres formes. Malgré la demande d'une commune pour du terrain, EDF cherche à garder son emprise foncière.
"Ce site, au bord du Rhône, prés des réseaux haute tension et d'un poste d'interconnexion, est stratégique. Si on veut implanter un centre de production d'électricité, pas forcement nucléaire, prés de la grande zone de consommation de Lyon, ici ça sera trés facile", explique M. Coraça.


Superphénix est officiellement mis à l'arrêt

Vous en souvenez-vous? Dans les années 70, le CEA et l'EDF prévoyaient qu'en l'an 2000, le quart de la puissance nucléaire installée serait délivré par des surgénérateurs. Francis Sorin, l'un des chantres du nucléaire, indiquait, dans le numéro de mars-avril 1976 de la «Revue Générale Nucléaire», que «leur puissance totale pourrait être de 10.000 MWe en 1990 selon les projets d'EDF». Alors que Superphénix (1.200 MWe) n'était pas encore fermement décidé, Monsieur Dürr, dans une note EDF-REAL/GIN 1976, précisait «Dès à présent, nous préparons le palier ultérieur de puissance, celui de 1.800 MWe, dont nous pensons qu'il correspond à la taille la plus avantageuse pour les réacteurs à neutrons rapides».
     Cette mégalomanie débridée s'accompagnait de pressions de type mafieux de la part des promoteurs du projet. Ainsi, dans une note confidentielle destinée à l'information de Monsieur Marcel Boiteux, alors Directeur général d'EDF, un certain EdR, d'EDF/NERSA, écrivait carrément le 10 septembre 1976: «Nous ressentons de la manière la plus vive que la meilleure façon de contrecarrer la contestation se développant est d'engager au plus vite, de manière irréversible, l'opération (N.B. Superphénix) et de rendre publique cette décision». Suivaient des conseils précis quant à l'acquisition de la «Déclaration d'Utilité Publique», au désenlisement du «Décret d'Autorisation de Création», à la distribution massive d'un bulletin de propagande («Creys-Malville Informations»), à la non-interruption du chantier, etc... Pressions suivies d'effet puisque le projet était définitivement adopté, et placé sous la protection des Ministères de l'Intérieur et de la Défense: la grande manifestation de l'été 1977 était durement réprimée, et Vital Michalon abattu.



Chronologie des événements:

1945
Enrico Fermi propose le concept de surgénérateur

1946
Construction du petit réacteur rapide américain Clementine (refroidi au mercure)

1951
Divergence du premier réacteur (US) refroidi au sodium, EBR1
29 novembre 1955 - Excursion de puissance du petit surgénérateur en raison de fausses manoeuvres sur les barres de contrôle. La puissance double tous les deux dixièmes de seconde. Le processus est arrêté par retrait de la couverture en uranium naturel. Fusion de 40 à 50 % du coeur. Pratiquement pas d'irradiation du personnel.

1959
Mise en service à Obninsk d'une centrale à neutrons rapides (12 MW électriques).

1959
Lancement de la construction de Rapsodie (20 Mwatts thermiques)

1959
Ecosse, mise en service du DFR (Dounreay Fast Reactor), arrêté en 1977.

1963
Surgénérateurs Enrico Fermi (USA, 66 MWe)

1965
Mise en service d'EBR2, RNR d'une puissance de 20 Mwatts électriques. Arrêt en 1995.

5 octobre 1966 - "On a failli perdre Detroit" - Une pièce de métal ayant entravé la circulation du sodium, deux assemblages d'éléments combustibles du surgénérateur fondent. Pendant un mois les ingénieurs n'osent pas intervenir de peur de former une "masse critique" dans le coeur. La réparation durera quatre ans. L'activité relâchée dans le sodium et le gaz de couverture a été estimée à environ 10 000 Curies.

1967
Divergence de Rapsodie, voir la présentation de cette première pile française au plutonium dans Science & Vie n°595 d'avril 1967 (en PDF).
(Le démantèlement de Rapsodie s'est avéré fort délicat, a conduit à une grave explosion sodium avec mort d'homme.)

1968
Début de construction de Phénix (250 Mwatts électriques)

1968
Divergence de BOR60 (URSS) RNR de 12 Mwatts électriques (60 Mwatts thermiques). Encore en fonctionnement.

1970
Arrêt pour cause de mauvais fonctionnement du RNR Enrico Fermi (60 Mwatts thermiques)

1972
Divergence de BN350 (URSS) RNR de 1000 Mwatts thermiques et 150 Mwatts électriques. Fonctionnement irrégulier.
(Le sodium est une substance délicate à manipuler car il s'enflamme au contact de l'air et explose au contact de l'eau)
Septembre 1973 - 400 kg d'eau passent dans le circuit secondaire de sodium (non radioactif), d'où explosion sodium-eau, rupture des membranes d'éclatement, rejet à l'atmosphère et inflammation spontanée de l'hydrogène produit. L'incendie a été détecté par les satellites américains. On ignore le nombre des victimes éventuelles.
Février 1975 - Introduction de 800 kg d'eau dans le circuit secondaire de sodium, détérioration d'un générateur de vapeur, feu de 300 kg de sodium.

1973
Divergence de Phénix. Il a connu un début remarquable en 1974-1975, mais ses performances se sont dégradées sans cesse depuis.... Arrêt du 24.11.75 au 13.12.75 pour fuite dans un générateur de vapeur, fonctionne à puissance réduite de juillet à octobre 1976 pour fuite de sodium secondaire; arrêt complet depuis le 5 octobre 76 pour fuite de sodium dans un autre échangeur...

1973
Début de construction du RNR US de Clinch River (400 Mwatts électriques). Contestation anti-nucléaire aux USA.

1973
Création de la société NERSA réunissant EDF (51%), ENEL (analogue italien d'EDF) (33%) et RWE (analogue d'EDF pour l'état de Rhénanie-Westphalie) (16%). NERSA est chargée de la réalisation et de la future exploitation de Superphénix. Une autre société, avec des parts symétriques des partenaires allemands et français, était créée pour réaliser un réacteur similaire en Allemagne, réacteur qui ne vit jamais le jour.

1974
Divergence de la centrale PFR (Prototype Fast Reactor) sur le site de Dounreay en Ecosse d'une puissance de 250 Mwe, analogue à Phénix. Cette centrale sera arrêtée en 1994. [Lire: Le surgénérateur tel que le critiquent officiellement les Anglais, Science & Vie n°711 (en PDF), décembre 1976 et Si un surrégénérateur explosait..., Sciences & Avenir n°373 (en PDF), mars 1978.]

1976
Début de la construction de Superphénix
"IL N'EST PAS DERAISONNABLE DE PENSER QU'UN GRAVE ACCIDENT SURVENANT A SUPERPHENIX POURRAIT TUER PLUS D'UN MILLION DE PERSONNES."
Extrait d'
un article de J-P. PHARABOD dans Sciences et Vie n. 703 avril 1976 p. l01.
Pour ceux qui douteraient de la compétence de l'auteur de ces lignes, nous indiquerons que J-P. PHARABOD a travaillé pendant sept ans et demi au CEA et à EDF. Il a participé aux essais des réacteurs Chinon I et Saint Laurent I et à de nombreuses études de contrôle et de sûreté. Il a démissionné d'EDF en 1970 et est actuellement ingénieur au Laboratoire de Physique Nucléaire des Hautes Energies à l'Ecole Polytechnique.

2 mai 1977
Décret de déclaration d'utilité publique de la centrale de Creys Malville.

12 mai 1977
Décret d'autorisation de création de la centrale de Creys Malville.

30 et 31 juillet 1977
60 000 manifestants contre 5 000 gendarmes, sous un déluge de pluie et 2 500 grenades à effet de souffle. Un mort, Vital Michalon (un jeune professeur de physique, non-violent). Deux mutilés, Michel Grandjean et Manfred Schultz. Une centaine de blessés.

En 1977 au Japon, mise en marche de Joyo, le surgénérateur expérimental qui ne produit pas d'électricité; par la suite, construction du surgénérateur Prototype Monju; mise en marche en août 95 de sa production d'électricité.

Mai 1981
Selon des informations, non confirmées officiellement, la cuve principale aurait été fêlée lors de son installation. Il aurait fallu pratiquer des soudures de rattrapage.

Juin 1981
Début de la livraison du sodium sur le site.

Novembre 1981
Une charge du pont tournant tombe d'une quarantaine de mètres sur le couvercle en béton, qui résiste.

1984
A la suite de travaux de consolidation du pont tournant, une étude montre que ce pont ne résisterait pas à certains types de tremblements de terre et pourrait tomber d'une hauteur de soixante mètres sur le réacteur. La direction n'en tient pas compte.

Royaume-Uni, 1984 - Réacteur PFR, rupture de tuyaux au générateur de vapeur... fermeture définitive du surgénérateur.

Allemagne, 1984/85 - Fuites et incendie de sodium au réacteur Kalkar, non démarrage du réacteur, fermeture définitive.

Début 1985
Un robot, chargé de la vérification des soudures, tombe entre les deux parois de la cuve principale. Le programme se poursuit.

Septembre 1985
Mise en marche du surgénérateur.

Janvier 1986 à février 1987
Suite à divers incidents techniques, arrêts provisoires du réacteur.

8 mars 1987
Début de la fuite de 20 tonnes de sodium du barillet, dispositif permettant la charge et la décharge des éléments combustibles. La fuite ne sera décelée que trois semaines plus tard.

26 mai 1987
Arrêt de la centrale.

Mars 1988
Des clichés, réalisés par le robot détecteur de fuites avant sa chute en 1985, se révèlent douteux. Ils n'avaient pas attiré l'attention à l'époque.

12 janvier 1989
Remise en marche du réacteur, qui atteint sa pleine Puissance en septembre.

2 octobre 1989
Chute d'un engin de 1.300 kg sur le dôme du réacteur.

1989
Saute de puissance pour raison inconnue au surgénérateur Phénix.

1989
La résistance des habitants de Genève contre la remise en marche de Superphénix se manifeste de nombreuses façons.

Avril 1990
Le surgénérateur de Dounreay est arrêté après qu'une fuite de sodium liquide ait eu lieu à partir du secondaire et qu'il se soit enflammé au contact de l'air. Les autorités affirment qu'il n'y a pas eu de fuite de radioactivité dans l'environnement. Il a fallu plusieurs semaines avant que l'accident ne soit rendu public.

29 avril 1990
Alors que Superphénix était à l'arrêt, fuite de sodium sur un des 4 circuits principaux d'évacuation de puissance imposant la vidange immédiate de tout le sodium du circuit incriminé (400 tonnes).

Juillet 1990
Arrêt de Superphénix pour cause de défaut électrique.

Août 1990
Troisième arrêt de l'année pour cause d'oxydation du sodium. Cet arrêt se prolongera quatre années.

Septembre 1990
Les citoyens suisses approuvent lors d'un référendum le moratoire nucléaire sur le sol de la Confédération.

Décembre 1990
Effondrement du toit de la salle des machines sous le poids de 80 cm de neige.

1986, le surgénérateur SuperPhénix est achevé. C'est sans aucun doute une machine des plus dangereuses au monde. Le bâtiment qui l'abrite est conforme aux normes de sécurité. Le tout a coûté 25 milliards de francs et dix ans de travaux.
13 décembre 1990, le toit de la salle des machines, contenant les turboalternateurs, s'effondre sous le poids de la neige. Ce n'est pas grave, disent les porte-parole d'EDF: le surgénérateur était dans la pièce à côté.

Mai 1991
Le Conseil d'État français conclut à l'illégalité des décisions de redémarrage de l'année précédente.

Avril 1992
Le conseil régional Rhône Alpes demande une nouvelle enquête d'utilité publique avant toute nouvelle remise en marche.

Juin 1992
Le gouvernement Bérégovoy suspend le redémarrage à la réalisation de travaux pour faire face aux feux de sodium.

Libération, 2 juillet 1992.

1993
Multiples manifestations contre le redémarrage en France et en Suisse.

31 mars 1994
Démantèlement de Rapsodie:
Une centaine de kilos de sodium provoquent une explosion à Cadarache, soufflent une dalle de béton de 300 m2 et tuent le principal expert français de feux de sodium (lire: La justice bienveillante avec le CEA)
Au centre de Cadarache, le 1er avril 1994, au lendemain de l'explosion qui a fait un mort et quatre blessés.

11 juillet 1994
Décret autorisant le redémarrage en laboratoire de recherche pour une incinération des déchets radioactifs.

4 août 1994
Redémarrage de Superphénix.

Novembre 1994
Arrêt de Superphénix suite à des fuites de vapeur et d'argon.

7 décembre 1994
Redémarrage de Superphénix

25 décembre 1994
Nouvel arrêt. Une fuite d'argon a été détectée.

22 août 1995
Redémarrage de la centrale à 30 %.

23 octobre 1995
Nouvel arrêt. Au dixième anniversaire de la mise en service, le bilan s'établit à 174 jours de fonctionnement durant les cinq premières années et à deux jours durant les cinq années suivantes.

Japon, 8 décembre 1995
Incendie au surgénérateur de Monju. Nous fûmes là à un tout petit doigt d'une explosion hydrogène. Si cet accident s'était produit à côté du coeur où se trouve condensée plus d'une tonne de plutonium quelles auraient pu être les conséquences ?

22 décembre 1995
Redémarrage à 30 %. Plus tard, passage à 60 % et 90 %.

24 décembre 1996
Superphénix est arrêté en vue de sa transformation en incinérateur de plutonium.

28 février 1997
Annulation par le Conseil d'État de l'arrêté du 11 juillet 1994

5 mars 1997
Corinne Lepage, ministre de l'environnement dans le gouvernement d'Alain Juppé, s'élève contre le projet consistant à faire redémarrer Superphénix Abandon du projet d'incinération afin d'éviter une nouvelle enquête publique.

Juin 1997
Dominique Voynet, ministre de l'environnement dans le gouvernement Jospin, annonce l'abandon de Superphénix et l'étude d'un plan pour dédommager les partenaires européens, résoudre les problèmes sociaux et sauvegarder les intérêts des communes concernées.

Janvier 1998
Le Conseil des Ministres confirme que Superphénix ne redémarrera pas.