La Provence, 16/10/2009:

Les dossiers noirs du nucléaire en Provence

Au-delà de l'affaire de Cadarache, d'autres dossiers montrent que le nucléaire conserve toujours sa part de danger dans notre région...

Sans risque, la filière atomique ? L'affaire de Cadarache vient de prouver que la sécurité est loin d'être aussi exemplaire que voudraient nous le faire croire ses défenseurs. D'autres dossiers montrent que le nucléaire conserve toujours sa part de danger dans notre région...

1/ Le CEA Cadarache déjà pointé par l'Autorité de sûreté nucléaire
Dans son rapport sur l'activité 2008 rendu public en avril dernier, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) pointait déjà le CEA de Cadarache, qui avait fait l'objet de 48 inspections en un an. Certes, l'ASN portait "un regard assez positif sur la sûreté du site", selon Laurent Kueny, chef de la division de Marseille, qui parlait de "progrès notables" dans l'organisation de la sûreté des
18 installations nucléaires civiles du centre. Elle n'en relevait pas moins que "des fragilités subsistent", dans le suivi des prestataires extérieurs, la maîtrise et la connaissance des rejets autorisés et sur les infrastructures électriques, à l'origine de deux pannes totales d'alimentation du site, en août 2006 et novembre 2008.

2/ L'été noir de l'usine de retraitement de la Socatri à Bollène
En 2008, le rapport national de l'ASN mettait à l'index la société Socatri, qui gère à Bollène une usine spécialisée dans le traitement des résidus, qui produit des centaines de tonnes de déchets, de boues et de liquides contenant des dérivés d'uranium. Quelques mois plus tard, dans la nuit du 7 au 8 juillet, une cuve était touchée par une fuite de substances uranifères. L'uranium se déversait dans la Gaffière, un affluent du Rhône... Même si, à l'époque, l'Agence de sûreté nucléaire avait évalué le "risque à faible dangerosité", la lenteur avec laquelle les informations sont arrivées jusqu'au grand public a provoqué une vive émotion. La consommation d'eau des captages, la pêche, la baignade et l'irrigation agricole avaient été stoppées. La mairie de Bollène avait vivement condamné le manque de communication d'Areva, d'autant que d'autres incidents allaient émailler l'été, sans toutefois dépasser le niveau 1 sur une échelle qui en compte 7.

3/ Pierrelatte et Marcoule dans le collimateur des associations de défense de l'environnement
Ce gigantesque complexe est étendu sur deux sites, dont le Tricastin, où des filiales d'Areva et du CEA fabriquent et retraitent du combustible nucléaire. Ces deux entités stockent d'énormes quantités de déchets de très haute activité. Elles sont régulièrement mises en cause par les associations de défense de l'environnement pour leurs rejets gazeux et liquides, qu'ils soient autorisés ou accidentels.

4/ Solérieux, Monteux et Bellegarde, ces décharges qui font peur
Jusqu'en juillet 1999, la décharge de Solérieux a accueilli près de 34.000 tonnes de fluorines issues de l'usine de Pierrelatte, ce qui a alors été interdit par la réglementation. A la même date était fermée la décharge de Monteux. Elle stockait 51.000 tonnes de silicates de soude, issues de la chimie. Un matériau affichant une teneur 37 fois supérieure à la radioactivité normale... Enfin, la décharge de Bellegarde recueille la fluorine de la Socatri, dans une proportion de 17.000 tonnes. Sa teneur en uranium est mille fois supérieure à la normale.

[Lire: Exemples de sites pollués suite à une activité industrielle (voir la carte des poubelles nucléaires):
-
Gif-sur-Yvette (Essonne).
-
Lotissement contaminé à Gif-sur-Yvette
-
La halte-garderie du 12 rue Chomel à Paris
- Un ancien
laboratoire Curie au centre ville d'Arcueil
- Les peintures luminescentes au radium:
L'affaire Bayard

Le Bouchet:
-
L'histoire du Bouchet
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20 000 tonnes de déchets nucléaires dorment près de Paris
(une "poubelle" radioactive voisine avec les onze mille habitants de trois communes de l'Essonne, Ballancourt, Itteville, Vert-le-Petit)

La décharge de Saint-Aubin (Essonne) et les fûts fissurés de Saclay

Gueugnon:
-
Le nouvel arrêté régissant la décharge radifère
- Près de 30 000 tonnes de déchets radioactifs sous le parking du stade de foot !
Criirad, Trait d'Union n°40, avril 2008 (en PDF)

A voir: "Pièces à conviction", le scandale de la France contaminée par les résidus de 210 mines d'uranium]

5/ Les bâtiments contaminés de Ganagobie
Cette ancienne usine chimique des Alpes-de-Haute-Provence qui travaillait avec du carbone 14 a été fermée en 1996 par arrêté préfectoral. A l'époque, des condamnations ont ét é prononcées. Toujours contaminés, ses bâtiments sont placés sous la responsabilité de la mairie.

6/ Les failles du nucléaire de "proximité"
Sous le vocable de nucléaire "de proximité" se cachent les appareils de radiologie, de radiothérapie et de radiographie industrielle, ainsi que les laboratoires utilisant des matériaux radioactifs. Dans son rapport d'avril dernier, l'Autorité de sûreté nucléaire livrait des conclusions très contrastées. Si aucun incident majeur n'a été relevé dans les unités de radiothérapie de la région en 2008, les gendarmes de l'atome n'en pointaient pas moins "une rigueur de gestion insuffisante au sein de l'université d'Aix-Marseille II". Constatant "des négligences" dans le contrôle des sources radioactives utilisées dans ses locaux, notamment à Saint-Jérôme, les inspecteurs de l'ASN ont obtenu "avec retard" des actions pour y remédier. Plus grave encore, une information judiciaire a été ouverte en 2008 par le parquet de Marseille. Explosive à bien des égards, elle s'est traduite par la mise en examen des responsables d'un laboratoire "Innovation et chimie fine", situé sur le campus marseillais de Saint-Jérôme. Mis à l'index par l'ASN, ils sont soupçonnés d'avoir importé et exporté sans autorisation illégalement du carbone 14, matière radioactive dangereuse. L'un d'eux avait déjà été condamné dans l'affaire de Ganagobie dans les années 1990. Les deux mis en cause ont même été détenus plusieurs mois.

7/ Tchernobyl, le nuage qui a évité la France...
Officiellement, le nuage de Tchernobyl s'est arrêté aux frontières de la France. Pourtant, plus de 20 ans après, on relève dans les Alpes-de-Haute-Provence et dans les Hautes-Alpes de nombreux sites montagneux toujours contaminés au césium 137 par... les retombées de l'explosion de la centrale nucléaire ukrainienne, le 26 avril 1986.