Le site de Japan Nuclear Fuels Conversion Company (JCO) à Tokaï-Mura
où s'est produit l'accident de criticité du 30 septembre 1999.


Tokaï-Mura

I
D'après le communiqué de nos amis japonais du CNIC
(Citizens' Nuclear Information Center), l'accident de criticité s'est produit dans l'usine d'élaboration de poudre d'oxyde d'uranium (UO2) à partir d'hexafluorure d'uranium UF6 gazeux fortement enrichi (La fabrication des pastilles de combustible à partir de la poudre d'UO2 se fait dans une autre installation peu éloignée).
Les causes de la criticité : au cours d'une opération de raffinage pour obtenir de l'uranium très enrichi devant servir à fabriquer du combustible pour le réacteur à neutrons rapides expérimental "JOYO", au lieu de mettre 2,4kg dans un récipient c'est 16kg d'uranium très enrichi qui ont été introduits d'où la criticité (réaction en chaîne). Il y a donc eu violation de toutes les règles de sûreté.
Cette usine de Tokai est dans la préfecture d'Ibaraki, à 160 km de Tokyo. Au cours de la journée: l'accident démarre à 10h35. Le débit de dose était alors de 0,84 millisievert par heure, voisin de 1 mSv correspondant au rayonnement naturel d'une année au même endroit (soit 7500 fois plus élevé que la normale). Les habitants du voisinage n'ont été prévenus qu'1 heure après le début de l'accident.

- Trois travailleurs blessés dont 2 dans un état grave (syndrome d'irradiation aiguë).
- Zone interdite de 200m.
- Evacuation des habitants dans un périmètre de 350m.
- Confinement des habitants au-delà de 350m. Enfants confinés dans les écoles.
- Confinement dans la ville de Naka-machi proche de Tokai.

A la télé japonaise infos de 18h, (donc 8 heures après) conférence de presse du maire du village de Tokai : le débit de dose n'a pas baissé, ce qui suggère que les réactions de fission continuent. La structure de l'installation est intacte. Le CNIC indique que le débit de dose est toujours très élevé et les travailleurs ne peuvent pas pénétrer sur le site. Personne ne connaît la situation à l'intérieur de l'usine et rien n'est fait

A 21h (heure japonaise) la préfecture [de la région] d'Ibaraki décrète le confinement dans un rayon de 10 km. Une cellule de crise gouvernementale se met en place. 160 villageois sont évacués dans un centre communautaire. D'après le communiqué en anglais du CNIC du 1er octobre, 3 travailleurs seraient atteints de syndrome d'irradiation aiguë. Une grande quantité de radioactivité a été libérée dans l'atmosphère. Le débit de dose de rayonnement aurait été 16000 fois supérieur au débit de dose normal. Un tel accident de criticité ne s'était jamais produit au Japon. Les scientifiques du CNIC insistent sur le manque de sûreté de cette installation nucléaire révélé par cet accident. Cela pose entre autres problèmes qu'on a autorisé une telle usine près de lieux d'habitations. Les règles de sûreté sont encore plus laxistes que pour les réacteurs nucléaires. Ils demandent une enquête minutieuse et que l'usine soit fermée. Ils insistent sur le fait que 12 h après le début de l'accident le débit de dose était encore très élevé ce qui signifie que la réaction en chaîne continue.
La survenue d'un tel accident met en cause non seulement l'industrie mais les autorités de sûreté.
Evacuation d'un employé gravement irradié.

Cet accident met en lumière qu'il n'y a pas de nucléaire "sûr", que c'est un mythe, qu'il faut ouvertement mettre sur la table les dangers et les problèmes liés à l'utilisation de l'énergie nucléaire, qu'il faut examiner la politique énergétique.

A signaler que nous avons en France une usine d'enrichissement d'hexafluorure d'uranium et de fabrication de combustible UO2 à uranium enrichi.
Qu'on a encore "amélioré" la situation en faisant du combustible Mox avec de l'oxyde de plutonium. Tout cela dans la vallée du Rhône, région chatouilleuse du point de vue sismique...

II
Informations sur France Culture 1/10/99 12h30 en QuickTime
(avec Roger Belbéoch)

1er octobre 1999, 15h45 heure locale.
Centre d'information des citoyens sur le nucléaire (CNIC).
" Pour le CNIC l'accident n'est pas fini. Il a été indiqué que la condition de criticité a cessé ce matin après que tout le liquide ait été extrait [de la cuve contenant les 16 kg d'uranium enrichi]. Cependant nous ne pensons pas que l'accident soit terminé. Des produits radioactifs sont toujours rejetés dans l'atmosphère et le CNIC pense que cela va continuer pendant un certain temps. De plus des mesures efficaces n'ont pas été prises pour parer à cette situation. Il semble nécessaire de rester très prudent ".
Le CNIC édite une revue en anglais " Nuke Info ".


Contrôle de radioactivité des habitants.

III
4 octobre 1999
Echelle internationale des événements nucléaires (INES).
Cette échelle
[médiatique] comporte 7 niveaux de gravité croissante, de l'incident à l'accident majeur (le niveau 7 correspond à l'accident de Tchernobyl). Le ministère de la science et technologie japonais déclare que l'accident est de niveau 4. Or, d'après cette échelle (voir " Contrôle " numéro 114 de décembre 1996, Dominique Lagarde) :
Niveau 4, accident avec rejet mineur et exposition du public de l'ordre des limites prescrites.
Niveau 5, accident avec rejet limité susceptible d'exiger l'application partielle des contre-mesures prévues.
C'est donc bien d'un accident de niveau 5 dont il s'agit puisqu'il y a eu évacuation des résidents à proximité du site et confinement des habitants dans un rayon de 10 km, en contradiction avec l'affirmation des autorités officielles japonaises. (Ce point est souligné par le Centre d'information des citoyens sur le nucléaire CNIC dans leur communiqué du 2 octobre ).

Beaucoup d'inconnues dans cet accident : finalement de façon certaine on sait seulement qu'il y avait 16 kg d'un composé (lequel ?) d'uranium enrichi à environ 20% et qu'une réaction en chaîne s'est déclenchée. Qu'il a fallu plus de 20 heures pour la maîtriser. Que du personnel a été irradié dont quelques uns gravement (3 personnes ?) avec un syndrome d'irradiation aiguë. Que 150 habitants ont été évacués (mais pas tout de suite) et qu'environ 310 000 habitants ont été confinés dans un rayon de 10 km (mais pas tout de suite).

Remarquons que seuls des débits de dose en rayonnement gamma ont été donnés (rien sur les neutrons) mais pas en fonction de la distance au site et qu'aucune donnée d'activité atmosphérique n'a été fournie ni pour l'intérieur du site nucléaire, ni pour l'extérieur. On ignore quelle a pu être l'exposition des habitants avant que la décision de confinement ait été prise. Les rejets gazeux ont pénétré dans les maisons avant que le confinement soit effectif. Les habitants sont donc peut-être restés confinés en atmosphère contaminée ?

Vu à la télé française : après la fin du confinement on a montré des tests effectués sur quelques uns des 310 000 habitants confinés. Ces tests ont vérifié qu'ils n'avaient pas de contamination surfacique sur leurs vêtements. Cela ne dit rien ni sur la dose externe à laquelle ils ont pu être exposés avant leur confinement ni sur la dose interne susceptible d'avoir été reçue par inhalation (et ingestion) des rejets radioactifs.

En résumé :

1) Il y a eu des rejets gazeux à l'extérieur du site nucléaire (gaz rares, iodes, césiums etc.) Il est faux de croire que toute la radioactivité a disparu car les radioéléments émis n'ont pas que des périodes très courtes. Rappelons qu'il faut 8 jours pour que l'activité de l'iode 131 diminue de moitié et 30 ans pour le césium 137).

2) Les habitants des environs immédiats ont été exposés aux rayons gammas et neutrons et exposition interne avant que leur évacuation ne soit décidée. Des analyses de sang ont elles été effectuées ? Quel est leur état de santé actuel ?

3) On ne peut pas affirmer que les 310 000 habitants confinés dans un rayon de 10 km n'ont pas été exposés aux rayonnements et subi une irradiation externe et interne. Rappelons que toute dose de rayonnement comporte un risque cancérigène et génétique.

Personne n'a donné, et aucun journaliste n'a réclamé, la composition et l'activité des rejets atmosphériques. Est-ce à la suite de mesures d'activité atmosphérique (en becquerels par mètre cube d'air) en fonction de la distance à l'usine que la décision de confinement dans les 10 km a été prise ? L'activité à 11 km était-elle nulle?


IV
5 octobre 1999.
Commentaire sur les informations publiées par les médias ou les responsables du nucléaire (Agence Internationale de l'Energie Atomique, IPSN etc.)
La physique est le domaine de la mesure. En ce qui concerne l'accident de criticité de Tokai-mura aucune mesure physique concernant la contamination n'a été publiée (contamination atmosphérique, contamination du sol). Pire, aucune mesure de cette contamination n'a été exigée par les médias. Les informations fournies relèvent plus du fantasme que de données réelles objectives. Il paraît évident que s'il a été décidé de confiner 310 000 habitants dans un rayon de 10 km c'est que le niveau de rayonnement dans la région n'était probablement pas négligeable.
Il faut remarquer que cette décision de confinement (en France, le mot confinement est désormais abandonné au profit d'une expression plus "nucléairement correcte" : la "mise à l'abri") a été prise plusieurs heures après le début de l'accident. Il n'est pas déraisonnable de penser que les habitants ont été confinés chez eux alors que l'atmosphère de leur habitation renfermait des radioéléments.
Que va-t-il se passer ? L'expérience de Tchernobyl nous a appris le rôle que joue l'AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique). Rappelons que cette agence a été chargée par l'ONU de développer l'énergie nucléaire, c'est donc une agence de promotion de l'énergie nucléaire. Plusieurs années après Tchernobyl, l'AIEA a estimé que les autorités soviétiques avaient de fait "paniqué" après l'explosion du réacteur en prenant trop de contre-mesures de protection (évacuation, contrôle de la nourriture etc.). Finalement, à la lecture des textes de l'AIEA, Tchernobyl n'aurait été qu'un accident nucléaire sans grandes conséquences pour la santé des populations alors que Tchernobyl est considéré comme l'accident le plus grave ayant jamais eu lieu. Il est donc raisonnable de penser que dans quelques semaines, mois ou années, l'AIEA considérera que cet accident de criticité de Tokai-mura ne justifiait pas du tout les mesures de protection prises : l'évacuation des résidents du voisinage et le confinement des 310 000 habitants de la zone des 10 km. On peut prédire que pour cette agence ces décisions seront considérées comme non fondées objectivement et relevant du fantasme.
Dernier point : des travailleurs ont été durement irradiés. Leur chance de survie est très faible. Les dirigeants de l'entreprise seront-ils poursuivis pour mise en danger d'autrui et éventuellement poursuivis pour homicide si ces travailleurs décèdent ?
Contrôle de radioactivité des habitants.

VI
6 octobre 1999.
Quelques compléments d'information et rectificatifs.
Le détail des manipulations ayant conduit à la criticité est encore peu clair y compris pour des spécialistes français en criticité. Les procédés chimiques utilisés dans l'atelier dédié aux combustibles destinés aux réacteurs expérimentaux où s'est produit l'accident ont été sommairement décrits dans un texte " le point sur l'accident de criticité à Tokaï-Mura " publié par l'IPSN (1/10/99). D'après les renseignements fournis on peut supposer qu'il s'agissait d'obtenir, au stade final, une poudre de dioxyde d'uranium UO2 (uranium enrichi à 18,8% en Uranium 235) ayant de bonnes caractéristiques physico-chimiques pour permettre ensuite sa transformation en pastille compacte de combustible, une opération appelée " frittage ", effectuée dans un atelier voisin. Dans un premier stade on dissout, dans de l'acide nitrique, des poudres d'oxydes d'uranium (dont la composition n'est pas précisée) dans un réservoir de petite taille. (C'est le seul point clair : on obtient du nitrate d'uranyle). Un transfert de la solution dans une cuve sert à contrôler (il n'est pas dit comment) la masse d'uranium qui doit subir, après transfert dans une grande cuve cette fois, un traitement par l'ammoniaque entraînant la précipitation en diuranate d'ammonium (en réalité c'est plus complexe si l'on en croit le Nouveau traité de chimie minérale, tome XV, de Paul Pascal, éd. Masson 1967). La cuve est équipée d'une double enveloppe de refroidissement à l'eau.
Dans cette cuve de précipitation-décantation la masse maximale d'uranium autorisée doit être inférieure à 2 kg (on a appris qu'en fait il n'y avait aucune règle de sûreté dans l'entreprise depuis plusieurs années et qu'elle n'était pas sous le contrôle des autorités japonaises de sûreté). Pour un taux d'enrichissement de 18,8% en uranium 235 la masse critique, en présence d'eau, serait d'environ 5,5 kg d'après ce texte de l'IPSN. "D'après les informations disponibles les opérateurs de l'atelier auraient effectué directement la dissolution de l'uranium dans la cuve de précipitation-décantation. La masse d'uranium introduite dans cette cuve (16 kg) a été bien supérieure à la masse maximale autorisée (.) C'est ce dépassement de masse, dans la solution aqueuse de la cuve, qui a conduit à l'accident de criticité ".
D'après une autre source d'information, la dissolution aurait été effectuée en 2 temps, d'abord 8,9 kg auraient été introduits dans la grande cuve le mercredi (on dépassait donc déjà la masse critique de 5,5 kg si toute la poudre s'est dissoute) et le jeudi auraient été introduits encore 6,9 kg avec pour résultat l'accident de criticité.
Les informations dont on dispose ne permettent pas de savoir si l'accident a eu lieu en milieu complètement liquide (tout l'oxyde -16 kg- complètement dissout) ou en milieu hétérogène avec un restant de poudre non dissoute. Pendant toute la durée de l'accident de criticité avec persistance de la réaction en chaîne, des rayonnements intenses de rayons gamma et de neutrons sont émis en même temps que des produits de fission. Les produits de fission rejetés sont essentiellement des gaz, c'est à dire les gaz rares (tels que le krypton et le xénon) et tous les isotopes gazeux de l'iode. Les césiums et autres radionucléides ne sont pas volatils. Cependant une certaine fraction de ces radioéléments a pu aussi contaminer l'environnement en étant entraînée par les flux de gaz et vapeur d'eau. Les propriétés de transport sont complexes, que l'on ait été en phase liquide homogène, ou en mélange de phases liquide + solide si tout l'oxyde n'était pas dissout (auquel cas il pourrait en résulter des aérosols contenant des particules d'oxyde d'uranium enrichi). Seules des analyses d'air et de sol pourraient le montrer. Pour l'instant ces données quantitatives, si elles existent, n'ont pas été rendues publiques. Le dossier IPSN indique seulement " en outre, il semble que des traces de césium aient été décelées dans l'environnement ". C'est une situation très différente de celle de l'accident beaucoup plus grave de Tchernobyl, où l'explosion du réacteur et l'incendie du graphite ont entraîné la dispersion massive des radioéléments non seulement gazeux mais de tous les autres ainsi que des fragments de combustible avec des transuraniens. Dans le cas de Tokaï-Mura la réaction de criticité a duré très longtemps par rapport aux accidents de criticité ayant déjà eu lieu mais trop peu pour qu'il se forme une quantité notable de transuraniens. Les accidents de criticité antérieurs ont tous été suivis d'explosion ce qui entraînait la dispersion immédiate du matériau fissile et stoppait ainsi la réaction de criticité. Les seules victimes étaient les opérateurs proches. Ici, à Tokaï-Mura il n'y a pas eu explosion mais une réaction continue de criticité. C'est une " expérience " nouvelle dans ce domaine des accidents de criticité. Elle est nouvelle aussi parce qu'elle n'a pas concerné que les opérateurs proches mais également la population. L'analyse de cet accident ne fait que commencer.
Mr Koji Kitani, PDG de JOC Co, faisant ses excuses samedi devant les résidents de la communauté du centre de Tokaï-Mura réunis à la préfecture

Le CNIC (centre d'information japonais pour l'information des citoyens) a fait une estimation de l'activité rejetée compte tenu de la quantité d'uranium et de son taux d'enrichissement. Leurs calculs, bien qu'approximatifs, aboutissent à une activité libérée correspondant bien à un accident de niveau 5 dans l'échelle [médiatique] internationale INES et non pas de niveau 4.

 


ACCIDENT DE CRITICITITÉ À L'USINE DE CONVERSION D'URANIUM DE TOKAI-MURA

WISE-Paris, 20 octobre 1999:

Note: les informations suivantes ont été compilées par WISE-Paris à partir de sources diverses. A chaque fois que cela a été possible ces informations ont été vérifiées auprès de sources scientifiques et de sources locales. Une bonne partie de l'information reste toutefois toujours à confirmer. Nous tenons à souligner la qualité et la rapidité des informations transmises par courrier électronique au cours des 48 heures qui ont suivi l'accident par le Dr. H Hosokawa, de l'Université de Saga. Ce texte est en grande partie basé sur ses informations et souvent même directement tiré de sa liste de diffusion électronique "MagPieNews".

" Si l'énergie nucléaire est appelée à jouer un rôle important dans nos économies à l'avenir, il importe que les matières fissiles soient manipulées de façon sûre dans l'ensemble des opérations du cycle du combustible nucléaire (...) L'objectif est de parvenir à éviter les accidents compte tenu des répercussions que pourrait avoir une excursion de criticité. " Philippe Savelli, Directeur Adjoint, Sciences, Informatique et Développement de l'Agence de l'Energie Nucleaire (AEN) de l'OCDE, Allocution d'ouverture de la conférence Internationale sur le risque de criticité dans les installations nucléaires, qui s'est tenue à Versailles tout juste dix jours avant l'accident.

LA CHRONOLOGIE

Note: les heures sont indiquées de 0h00 à 24h00, heure de Tokai, sauf indication contraire ; entre parenthèse (format + 0:00) est indiqué le temps écoulé depuis le déclenchement de l'accident.

30 SEPTEMBRE 1999 :

Vers 10h35, un accident grave commence dans l'usine de conversion d'uranium de JCO à Tokai Mura, à environ 130 km au nord-est de Tokyo. JCO est une filiale de Sumitomo Metalic Mining Company, une des géants économiques japonais. JCO (JCO, Inc n'est apparemment pas une abréviation, mais le véritable nom de la compagnie, connue précédemment sous le nom de Japan Atomic Fuel Conversion Company) est une des deux seules compagnies au Japon, avec Mitsubishi Nuclear Fuel Co., Ltd., à fabriquer des combustibles nucléaires. Mitsubishi est spécialisé dans la fabrication de combustible pour réacteurs à eau sous pression, et JCO fabrique des combustibles pour les réacteurs à eau légère et les surgénérateurs depuis 1980. Selon le JAIF (Japan Atomic Industrial Forum ­ Forum Atomique Japonais), l'usine JCO de Tokai peut traiter 715 tonnes par an d'uranium destiné à des combustibles pour réacteur à eau légère et 3 tonnes par an d'uranium destiné à des combustibles surgénérateur. La conversion de l'uranium pour le combustible destiné au surgénérateur de Joyo était la première de ce type en trois ans de fonctionnement. Elle avait commencé le 22 septembre 1999. JCO emploie 154 personnes.

Il semble que l'on ait versé dans une cuve de précipitation 16 kg, au lieu d'un maximum de 2,4 kg, d'uranium enrichi à 18,8 % d'uranium 235. La masse critique a été atteinte, provoquant une réaction en chaîne incontrôlée. Une des causes possibles de l'erreur de dosage des ouvriers est qu'ils aient utilisé une liste de contrôle s'appliquant au combustible pour réacteur à eau légère alors qu'il s'agissait de combustible pour surgénérateur.

On utilise dans les réacteurs à eau légère, les réacteurs à eau bouillante et les réacteurs à eau sous pression de l'uranium faiblement enrichi, c'est à dire de l'uranium contenant de 3 à 5 % d'uranium 235 fissile, pour lequel la masse limite de contrôle de criticité pourrait se situer autour de 16 kg. Les responsables de JCO ont par la suite déclaré que, pour des raisons inconnues, les opérateurs avaient versé l'uranium manuellement au lieu d'utiliser le système mécanique qui aurait permis de contrôler la concentration en U-235. Cependant, selon d'autres sources, les autorités de sûreté nucléaire n'auraient jamais expertisé cette installation du point de vue de la criticité avant d'accorder leur autorisation à JCO. On a même évoqué le fait que les manuels étaient incomplets, et que la compagnie n'était pas du tout préparée à l'éventualité d'un accident de criticité.

Cet uranium a été versé dans une solution. On ne sait toujours pas sous quelle forme était l'uranium ni ce que contenait exactement cette solution. Il semble établi que la présence d'eau soit due à un système de refroidissement dans l'enveloppe externe de la cuve de précipitation à double paroi. La circulation d'eau entre les deux parois permettait d'évacuer la chaleur produite par la réaction chimique.

Les indications concernant la nature de la solution et le procédé chimique sont contradictoires. Il s'agit probablement d'oxyde d'uranium (reconverti en U3O8) que l'on dissolvait dans de l'acide nitrique pour obtenir du nitrate d'uranyle qu'il faut remettre sous forme d'UO2 avant de fabriquer les pastilles de combustible. L'installation produit du combustible pour le surgénérateur expérimental de Joyo qui peut utiliser des combustibles à uranium ou des combustibles oxydes mixtes uranium-plutonium (MOX). L'installation de production de combustible à uranium aurait une capacité de deux à trois tonnes de combustible par an.

On ne connaît pas encore précisément les événements qui ont conduit à l'accident. Nous avons étudié de nombreuses descriptions de l'accident ; aucune n'est cohérente du début à la fin. C'est pourquoi nous avons décidé de ne pas donner de détails tant qu'ils ne peuvent être confirmés. Toutefois, les points suivants semblent établis :

1. l'accident s'est produit dans une cuve de précipitation ;

2. l'intervention des opérateurs impliquait l'introduction manuelle de l'uranium;

3. les opérateurs étaient pressés par la direction de l'usine d'accélérer les opérations ;

4. les opérateurs étaient insuffisamment ou pas du tout formés et les opérations qu'ils effectuaient ne respectaient pas les spécifications internes et légales ;

5. la prévention contre les accidents de criticité n'était pas étudiée dans le cadre de la procédures d'autorisation et il n'existait pas de procédure en cas d'accident de criticité ;

6. il n'y avait pas de compteur neutronique sur place et il a fallut en apporter un d'une autre partie des installations, alors que sa présence aurait pu réellement accélérer l'identification de l'accident de criticité, et donc les mesure de protection des travailleurs et des populations.

On s'est donc retrouvé en présence d'une sorte de petit réacteur, l'eau réfléchissant les neutrons et se comportant alors comme un modérateur entretenant la réaction en chaîne. Mais à la différence d'un réacteur, à Tokai, la réaction en chaîne n'était pas contrôlée, le combustible n'était pas enfermé dans une gaine (première barrière), la réaction ne se produisait pas dans une cuve appropriée (deuxième barrière) et le bâtiment (troisième barrière) ne permettait pas de contenir les effets de matières fissiles formant une masse critique. Cela concerne en particulier les émissions de gaz radioactifs qui ne pouvaient être confinées à l'intérieur de l'installation. Au moins deux des trois opérateurs ont été exposés à des doses léthales de radiation. Les doses reçues par les trois travailleurs les plus exposés, ré-évaluées sur la base des analyses de sang et de vomi, s'établissent à 17 Sv (travailleur de 35 ans), 10 Sv (travailleur de 39 ans) et 3 Sv (travailleur de 54 ans).

Ces doses sont équivalente, et même supérieures, aux doses au point d'impact des bombes d'Hiroshima et Nagasaki. Plusieurs équipes médicales font actuellement leur possible pour sauver ces trois hommes. Le calcul de la dose a été fait à partir des concentration de sodium-24 dans le sang et le vomi des trois hommes. Le travailleur de 35 ans a été transféré à l'Hôpital de l'Université de Tokyo, où il est arrivé à 16h30 le 2 octobre.

De plus, trois ambulanciers venus secourir les trois travailleurs ont également reçu des doses élevées. Le nombre total de personnes exposées augmente au fur et à mesure des opération de gestion de l'accident, et atteint le 2 octobre 1999, 55 personnes, dont 39 employés de JCO ou sous-traitants, les 3 ambulanciers et 7 ouvriers qui travaillaient sur un terrain de golf directement adjacent à l'usine de JCO.

Le nombre de personnes exposées continue à augmenter et atteignait 63 le 9 octobre 1999.

A 11h15 le 30 septembre 1999 (soit 40 minutes après le début de l'accident, + 0:40), JCO mentionne la possibilité d'un accident de criticité dans la première note concernant l'événement qu'elle fait parvenir à l'Agence de la Science et de la Technologie (STA).

A 11h33 le 30 septembre 1999 (+0:58), la JCO informe la municipalité de Tokaimura de l'accident.

A 12h19, le 30 septembre 1999 (+1:44), JCO demande dans sa troisième note, l'évacuation des populations autours de l'usine. La ville de Tokaimura met en place un PC de « gestion de catastrophe ».

A 12h30 le 30 septembre 1999 (+1:55), le chef de cabinet du Premier Ministre reçoit le premier rapport sur l'accident. Il se passe environ une heure avant qu'il ne réagisse. Au même moment, les autorités du village de Tokaimura informent les villageois de l'accident via la radio et leurs demandent de rester chez eux.

A 12h41 le 30 septembre 1999 (+2:06), la police bloque l'accès à l'usine dans un rayon de 200 m.
Une unité des forces terrestres (Ground Self-Defense Forces) équipée pour la guerre chimique, stationnée à Omiya, préfecture de Saitama, est mobilisée et envoyée à Tokaimura. Selon les aveux mêmes du chef de cabinet, « l'unité, toutefois, n'est pas capable de lutter contre ce genre d'accident nucléaire », rapporte le quotidien Yomiuri Shimbun.

A 13h35 le 30 septembre 1999 (+3:00), la commune de Tokaimura arrête de puiser de l'eau dans la rivière Kuji.

A 13h50 le 30 septembre 1999 (+3:25), la Direction des entreprises de la municipalité de Tokaimura augmente le débit de pompage au niveau de la rivière Naka, de1440m3 à 7560m3.

A 14h50 le 30 septembre 1999 (+4:25), la commune de Naka-machi ne s'alimente plus en eau par la rivière Kuji, en attendant le résultat des contrôles.

A 15h00 le 30 septembre 1999 (+4:25), la municipalité de Tokaimura demande l'évacuation des personnes résidant dans une zone de 350 m autour de l'installation.

A 15h30 le 30 septembre 1999 (+4:55), l'ordre d'évacuer est effectivement donné aux quelques 150 habitants de 39 maisons dans un rayon de 350 mètres (il ne s'agit pas vraiment d'un cercle, mais la zone concerne plutôt les personnes que l'on pense être « sous le vent »). Ils sont emmenés dans 9 bus vers la salle municipale de Funaishikawa à 1,5 km de là. Le niveau de radioactivité à la clôture atteint 0,84 mSv/h.

A 16h00 le 30 septembre (+5:25), la préfecture d'Ibaraki constitue une cellule de crise pour faire face à l'accident alors que les experts de la STA et du JAERI (Japan Atomic Energy Research Institute) sont sur le site et commencent leurs mesures. Des traces de césium-138 sont détectées sur le sol dans le complexe du JAERI, attenant au site de l'accident.

A 17 h00, le 30 septembre 1999 (+6:25) le niveau de radioactivité en bordure du site atteignait 4 mSv/h.

A 17h45 le 30 septembre (+7:10), la cellule de crise d'Ibaraki se réunit pour la première fois.

A 18h00 le 30 septembre (+7:25), la Direction des entreprises de la municipalité de Naka-machi augmente le débit de pompage au niveau de la rivière Naka, de 1 500 m3 à 4 800 m3.

A 18h30, le 30 septembre 1999 (+7:55), on annonce que le débit de dose neutronique au dessus du site a été de 4,5 mSv.

A 22h30, le 30 septembre 1999 (+11:55), on demande pour la première fois (par quel moyen ?) aux 310.000 personnes vivant dans un rayon de 10 km autour de l'usine de rester confinés chez eux ou à l'endroit où ils se trouvent.

A 2h00, le 1er octobre 1999 (+15:25), le niveau de radioactivité a légèrement baissé (3,3 mSv/h). Des experts de la Scientific and Technology Agency (STA), département responsable du nucléaire au sein du Ministère de l'Industrie et du Commerce (MITI), estiment que la criticité non contrôlée se poursuit, ou au mois qu'elle se répète de façon intermittente.

Le chef de cabinet du Premier Ministre, Hiromu Nonaka, estime que le pays est confronté à une crise sans précédent. Le gouvernement envisage de demander l'aide des forces militaires américaines stationnées au Japon pour faire face à la situation. Le Premier Ministre, M. Obuchi, décide de reporter le remaniement de son cabinet, prévu pour ce 1er octobre.
"dans la nuit de jeudi [du 30 septembre au 1er octobre], on détectait 3,1 millisievert de neutrons par heures, ou environ 15.000 fois le niveau normal de radioactivité, à 2 km du lieu de l'accident" écrit Reuters en se basant sur les informations que lui a fournies un représentant de la préfecture d'Ibaraki.

A 2h58 le 1er octobre 1999 (+16:33), selon la STA, les employés de JCO commencent les opérations nécessaires pour retirer l'eau de l'enveloppe extérieure de la cuve. L'eau, réfléchissant les neutrons vers l'intérieur, entretient la réaction en chaîne. A cause des niveaux élevés de radioactivités, les employés essayant d'ouvrir les vannes, sont obligés de se relayer toutes les trois minutes.

A 3h30 le 1er Octobre 1999 (+16:55), au cours d'une conférence de presse, la préfecture d'Ibaraki donne aux plus de 310.000 personnes résidant dans un rayon de 10 km autours de l'installation, périmètre incluant le village de Tokai (Tokai-Mura), les villes et villages de Mito, Hitachi, Hitachi-Ohta, Hitachi-Naka, Naka, Urigura, Ohmiya et Kana, les conseils et les indications suivantes :
· Rester confiné à domicile. Fermer toutes les fenêtres et débrancher toutes les sources de ventilation;
· En cas d'obligation de se déplacer en voiture, garder toutes les fenêtres fermées et ne pas utiliser la ventilation;
· L'eau de robinet est potable, les sources d'alimentation ayant été changées;
· Ne pas boire d'eau de pluie ou d'eau de puits;
· On recommande aux personnes ayant pris refuge dans un abri situé sous le vent à changer d'abri et à quitter la zone placée sous le vent.

Selon Reuters, "Tokaimura, avec ses 34.000 habitants et ses 15 installations nucléaires s'est transformée en ville fantôme, où la police revêtue d'habits de radioprotection blancs hante les rues".

Un cas de contamination externe est détecté parmi les personnes évacuées. Les autorités locales se préparent à la distribution de pastille d'iode.

La SDF (Self Defense Forces, Force d'Auto-défense, c'est à dire l'armée japonaise) est mobilisée pour contrôler la circulation et maintenir l'ordre public. L'unité de protection chimique de la SDF est consignée sur la base militaire de Katsuta.

A 5h40 le 1er octobre 1999 (+19:05), la STA admet lors d'une conférence de presse que l'on risque d'étendre la zone d'évacuation (alors située dans un rayon de 350 mètres) si la situation de s'améliore pas. La STA annonce que la radioactivité mesurée sur le site de JCO a atteint 18 mSv/h (neutrons) et 20 mSv/h (gamma), soit environ 5 fois plus que les valeurs mesurées 12 heures plus tôt à la clôture.

La STA révèle également que les opérations de vidange de l'eau entourant la cuve ont échoué à cause d'un problème de vanne, et que pour pouvoir évacuer l'eau, il a fallut détruire la tuyauterie. 18 ouvriers ont participé à ces opérations qui ont duré 3 heures. Ils ont reçu des doses estimées entre 20 et 103 mSv. La limite annuelle pour les travailleurs au Japon est de 50 mSv par an. En cas d'urgence, la limite peut exceptionnellement atteindre 100 mSv par opération.

A 7h00, le 1er octobre 1999 (+20:25), la STA indique que la situation de criticité est terminée. De l'eau borée a été injectée dans la cuve (comment ?) permettant de ralentir la réaction en chaîne. Les compteurs neutroniques sur le site montrent désormais une décroissance rapide du niveau de radioactivité.

A peu près au même moment, les autorités japonaises transmettent des informations à l'Agence Internationale de l'Energie Atomique (AIEA) de Vienne. Sur la base de ces informations, l'AIEA déclare : "on sait qu'il [l'accident] s'est produit lorsque des travailleurs ont transporté un mélange d'acide nitrique liquide contenant 19 % d'uranium enrichi dans une cuve de précipitation". Personne d'autre ne parle de "transporter un mélange". Toutes les autres sources indiquent que la réaction en chaîne a commencé dans la cuve. Dans son communiqué de presse, l'AIEA indique aussi que "à son point culminant, le débit de dose mesuré à la clôture était de 4 millisievert/heure. A 4 heures du matin heure locale, le débit de dose mesuré était en baisse". Ceci est également contradictoire avec les déclarations des représentants de la STA lors de leur conférence de presse de 6h00 au Japon.

A 9h00, le 1er octobre 1999 (+22:25), les représentants de JCO déclarent que les travailleurs ont manipulé la solution de nitrate d'uranium « de façon incompatible avec les règles de sûreté ».

AUTRES MESURES EN VIGUEUR AU PETIT MATIN DU 1er OCTOBRE 1999

La totalité des 135 écoles situées dans le rayon de 10 km restent fermées pour la journée.

Toutes les routes situées dans un rayon d'un kilomètre ont été fermées. La circulation y est totalement interdite, sauf pour les véhicules de secours.

Les chemins de fer japonais (Japan Railway, JR) suspendent toute liaison ferroviaire entre Miko et Hitachi. Ibaraki Kohtsuh, la plus importante compagnie de car de la région a décidé de suspendre toutes ses lignes dans le rayon de 10 km.

La compagnie des autoroutes a fermé la portion Mito/Hitachiminami-Ohta de l'autoroute Joban, qui relie Tokyo à la région de Tokai.

La préfecture recommande aux fermiers de la région de Tokai-Naka de ne rien récolter tant que la non contamination du sol n'a pas été confirmée. La récole de riz dans la région est pratiquement finie, et c'est la période de la récolte de la patate douce.

Toutes les usines de la région de Tokai-Mito décident de suspendre leur activité, mettant 8.700 personnes au chômage technique.

Le village de Tokai (environ 34.000 habitants) ne s'approvisionne plus en eau potable dans la rivière Kuji, pour éviter les risques de contamination radiologique. L'eau provient désormais de la rivière Naka, plus éloignée et qui a donc moins de chance d'être contaminée.

La totalité des 50 bureaux de poste de la région est fermée pour la journée. Les grandes compagnies de transport, comme Kuroneko Yamato ou d'autres, ont suspendu leurs services pour la journée.

Le quartier général de la Région-3 de l'Agence de Sécurité Maritime à Yukohama envoie des avertissements aux bateaux pénétrant dans les eaux au large des côtes de Tokai.
L'Agence des Ressources et de l'Energie du MITI a mis en place une cellule de crise et a envoyé 14 experts sur le site.

Le Ministère de l'Agriculture, de la Forêt et de la Pêche a également mis en place sa cellule de crise pour procéder à des mesure de la contamination des produits alimentaires.

La Fédération des Pêcheries d'Ibaraki, regroupement des syndicats de pêcheurs dans la Préfecture, a émis une interdiction de pêche en zone côtière pour une durée indéterminée. Les syndicats tiendront une réunion au sommet le 2 octobre 1999 pour discuter de mesures supplémentaires.

Le Ministre des Affaires Etrangères, M. Kohmura, demande aux USA et à la Russie d'envoyer une équipe d'experts au Japon pour aider les équipes locales à gérer la situation et à enquêter sur les causes de l'accident. Le secrétaire d'Etat à l'Energie américain, qui se trouve alors à Moscou, déclare qu'ils sont d'accord pour se préparer à intervenir.

La police de la préfecture dispose désormais d'un groupe d'intervention d'urgence de 3.000 personnes pour contrôler la situation.

Les coopératives agricoles du village de Tokai et de la ville de Naka ont rappelé les produits agricoles déjà expédiés aux halles de Tokyo (Tsukiji - Tokyo Central Food Market). Au total 8,7 tonnes de produits récoltés dans cette région sont récupérées. Il s'agit, entre autres, de patates douces, d'épinards et de poireaux. La branche d'Ibaraki de JAC (Japan Agricultural Cooperation) a décidé de ne pas lever l'interdiction de nouvelles récoltes dans la région.

La préfecture de Fucus (à l'ouest du pays), où sont implantés 15 réacteurs nucléaires, a décidé d'envoyer son propre personnel équipé de matériel de détection pour réaliser une investigation indépendante.

Le véhicule de l'unité de décontamination des SDF est en stand-by à l'hôpital de la Croix Rouge de Mito.

Plus de 4.500 personnes se sont rendues dans les hôpitaux de la préfecture d'Ibaraki pour y subir une détection radiologique et des examens. Bien qu'aucun cas de contamination n'est été révélé, un climat de panique prévaut.

Plusieurs cas de contamination parmi les réfugiés provenant de la zone de 350 mètres ont été constatés. On ne parle pas de problème de santé. Les examens médicaux se poursuivent.

LEVEE PARTIELLE DES MESURES ET NOUVELLES MESURES INSTAURÉES AU COURS DE LA JOURNÉE DU 1ER OCTOBRE 1999

A 8h00, le 1er octobre 1999 (+21:25), la fermeture de l'autoroute de Joban, qui passe très près du site de l'accident a été levée. Plus tard dans la journée, les liaisons ferroviaires étaient rouvertes au public.

A 15h00, le 1er octobre 1999, (+28:25), l'ordre de confinement des populations habitants dans le rayon de 10 km est levé par, M. Nonaka, chef de cabinet du Premier Ministre, représentant le quartier général de crise du gouvernement, sur la recommandation de la NCS (Nuclear Safety Commission, Commission de Sûreté Nucléaire) après analyse des nouveaux résultats de mesures de radioactivité.

Les deux victimes dans un état critique, hospitalisées à l'Institut National des Sciences Radiologiques, à Chiba, à l'est de Tokyo, souffrent d'une baisse sévère du taux de lymphocytes, moins d'1 % alors que le niveau normal se situe autours de 40 %. Ceci les rend très sensibles aux infections qui peuvent se révéler mortelles. Un des patients semble souffrir d'un dème du poumon. Il apparaît qu'ils souffrent d'exposition externe à des sources de neutron et des sources gamma élevées, plutôt que d'exposition interne.

Les traitements tentés à ce point sont des perfusion, l'injection de stéroïdes, et une dose d'antidote d'uranium. Les radiologues envisagent alors une greffe de moelle, faible espoir de les sauver.

La Croix Rouge japonaise a décidé d'envoyer des experts du Nagasaki Atomic Bomb Hospital à Tokai, pour aider les équipes médicales présentes sur place. Cette équipe est composée de médecins, d'un radiologue et d'infirmières spécialisées. Le Nagasaki A-Bomb Hospital a une longue expérience dans le traitement des " Hibakusha ", les victimes des radiations.

Les écoles ont été prévenues plus tard qu'elles pourraient rouvrir normalement le samedi.

Les véhicules militaires, déployés dans l'éventualité d'une évacuation massive, ne sont plus consignés et retournent vers leur lieu d'attache.

Les officiels indiquent que l'on peut de nouveau boire de l'eau du robinet, mais mettent en garde contre la consommation d'eau de puits, sur laquelle se poursuivent les analyses de contamination, opération qui prendra quelques jours.

A 22h00, le 1er octobre 1999 (+35:55), les mesures d'évacuation dans le rayon de 350 m ne sont toujours pas levées.

SITUATION LE 2 OCTOBRE 1999

Les écoles situées dans un rayon de 10 km rouvrent le matin. Dans certaines écoles, les enfants subissent un contrôle médicale au lieu d'aller en classe.
Les conditions de circulation, y compris celle des trains et des cars, sont redevenues normales.

A 11h00, le 2 octobre 1999 (+48:25), commence dans les locaux de la STA à Tokyo la réunion consultative des experts de la NCS qui doit décider de la levée ou non des mesures d'évacuation autour de Tokai.

A 13h15, le 2 octobre 1999 (+50:40), cette réunion à huis clos se poursuit. On parle de dissension entre les experts sur l'évaluation du danger. Il y a une possibilité de contamination par les retombées radioactives dans la région. Il se peut qu'il faille inspecter tous les bâtiments et toutes les habitations avant que les habitants puissent rentrer chez eux.

A 18h30, le 2 octobre 1999, le gouvernement japonais publie une "déclaration de sûreté" annonçant qu'il n'y a pas de contamination dans les 350 mètres autour de l'usine et lève l'ordre d'évacuation. Selon Kyodo News service, le chef de cabinet du Premier Ministre, M. Nonaka, a dit qu'il n'était pas dangereux de consommer des produits agricoles provenant de la préfecture d'Ibaraki. " La sécurité a été confirmée " a dit Nonaka lors une conférence de presse télévisée diffusée au niveau national. " Nous prions du fond de notre cur pour que leur existence puisse redevenir normale dès que possible ".

KEPCO (Kansai Electric Power Company) indique que l'accident de Tokai va retarder peut-être d'un mois ou deux l'utilisation de MOX (combustible oxyde mixte plutonium-uranium) dans ses réacteurs de Takahama. TEPCO (Tokyo Electric Power Company) décide d'interrompre les publicités qu'elle passe régulièrement à la télé, ventant les bienfaits du nucléaire.

L'ACCIDENT CLASSÉ AU NIVEAU 4 POURRAIT ÊETRE RECLASSÉ PLUS HAUT - LA PERFORMANCE DES AUTORITÉS JAPONAISES AUSSI...

Le gouvernement a déclaré qu'il s'agissait d'un accident de " niveau 4 " sur l'échelle internationale des accidents nucléaires qui en compte 7, ce qui en fait le pire accident nucléaire de l'histoire du pays. L'AIEA a déclaré que c'était l'accident le plus grave depuis la catastrophe de Tchernobyl, en 1986, ajoutant qu'à l'issue des investigations approfondies, il pourrait même être classé à un niveau supérieur.

A titre de comparaison, l'accident de Three Mile Island a été classé au niveau 5 et l'accident de Tchernobyl, le plus grave de l'histoire à ce jour, a atteint le maximum de 7.
Des calculs préliminaires d'émissions de radioactivité faits par le Dr. Jinzaburo Takagi, chimiste nucléaire et fondateur du Citizens' Nuclear Information Center (CNIC) à Tokyo, indiquent que l'accident devrait être classé au niveau 5 et non 4.

Le gouvernement japonais est sur la sellette pour sa gestion de l'accident, notamment parce qu'il s'est produit sur le site même où était survenu un accident il y a tout juste deux ans (dans l'installation de bitumation en aval de l'usine de retraitement). Himoru Nonaka, a admis en tant que porte-parole du gouvernement que le gouvernement avait été lent à répondre à l'accident. " Dans une nation moderne, il est honteux que ce type d'accident arrive ", a déclaré Nonaka, un refrain que les officiels ont servi à maintes reprises depuis que se succèdent les accidents au Japon.

Le Premier Ministre, Keizo Obuchi a déclaré que pendant l'accident, il avait dirigé les instances gouvernementales, y compris l'administration de la défense, de la police nationale, des pompiers et des secours afin de cordonner les actions de protection des populations et pour empêcher l'extension du risque radioactif.

Le Premier Ministre Keizo Obuchi a demandé pardon pour cet accident, qui, a-t-il remarquer, avait attiré l'attention internationale. « Nous n'avons pas prévu que la situation pourrait s'intensifier et c'est pourquoi nous avons tardé à réagir », a déclaré Hiromu Nonaka, porte parole du gouvernement. « Nous devons reconnaître que nous avons été négligeants ».

"L'APRÈS ACCIDENT" : IL CONTINUE

La STA et plusieurs groupes de scientifiques indépendants ont conduit des mesures autour de l'installation de la JCO à Tokai, principalement dans la zone de 350 m de rayon. Il a été confirmé des contaminations de césium-137, iode-131, strontium-91 et sodium-24 (étendue pour ce dernier).

Le 4 octobre 1999, on apprend que différents échantillons d'une plante très répandue ont été ramassés le 2 octobre dans cette zone par des citoyens, puis analysés à l'Institut du Réacteur de Recherche de l'Université de Kyoto (Research Reactor Institute). Ces échantillons contenaient entre 23 et 54 Bq/kg d'iode-131.

Voici un aperçu des produits de fission détectés dans un rayon de 3 km du lieu de l'accident. Ces chiffres, proviennent de la presse écrite et télévisée, et ont été rassemblés par le CNIC (Citizens Nuclear Information Center, Tokyo) :
- strontium-91 : 0,021 Bq/m3 dans l'air, à 900 mètres au sud-est du site ;
- strontium-91 (krypton-91) : quantité inconnue, localisation non-spécifiée
- iode 131 : 54,7 Bq/kg dans des feuilles d'une herbe commune, à 100 mètres du site ;
- iode 133 (krypton-91) : quantité non communiquée, à 100 mètres du site ; - césium-137 : quantité non communiquée, en 7 endroits ;
- sodium-24 : 64 Bq/kg à 300 mètres à l'ouest du site ;
- sodium-24 : 1,7 Bq/kg, à 3 km à l'ouest du site ;
- xénon-139 : dans les vomissures des travailleurs exposés ;
- krypton-91 : dans les vomissures des travailleurs exposés.

Des mesures de Greenpeace et d'autres organisations non-gouvernementales sur des produits provenant des alentours de l'usine ­ y compris de la terre et du sel de cuisine (qui se trouve être un indicateur du flux neutronique) provenant des habitations ­ indiquent que le gouvernement a levé trop tôt son ordre d'évacuation. Selon Greenpeace, les rayonnements neutroniques semblent avoir irradié les alentours au moins sur 500 mètres autour du site, ce qui engloberait une rue importante et plus de 170 maisons, ainsi qu'un terrain de golf et des terres agricoles.

Lundi 4 octobre, le maire et le Gouverneur de la préfecture d'Ibaraki ont rencontré conjointement le Premier Ministre Obuchi. Ils ont fermement demandé la suspension des activités de la JCO, et ont également déclaré qu'une nouvelle législation garantissant la sûreté des installations nucléaires devrait être mise en place.

Au même moment, le maire de Tokaimura a ordonné la suspension totale des activités de l'installation de la JCO à Tokai (l'ensemble du travail à l'intérieur de l'installation) en se référant à l'Accord de Sécurité passé entre la compagnie et l'administration du village. C'est la première fois au Japon qu'une autorité locale sanctionne un exploitant en s'appuyant sur cet accord. Il a également été décidé que l'installation de retraitement de Tokai dont les activités avaient été suspendues depuis mars 1997, suite à une explosion et un incendie, ne redémarrerait pas pour l'instant. Cette installation de retraitement était sur le point de redémarrer. Son exploitant est l'Institut Japonais de Développement du Cycle du Combustible Nucléaire (JNC), anciennement PNC.

Le 6 octobre 1999, selon l'Agence d'Informations de Kyoto, l'Agence pour la Science et la Technologie (STA) a décidé de retirer sa licence d'exploitation à la compagnie JCO, en raison de « la gravité de l'accident ».

Selon Reuters, le 6 octobre 1999, un porte-parole de la police a affirmé que près de 200 enquêteurs perquisitionnaient le siège de la JCO à Tokyo et son bureau à Tokaimura, à la recherche des causes et des responsabilités de l'accident. Il a été rapporté que la STA et la préfecture de police d'Ibaraki participent aux enquêtes.

Des sources gouvernementales citées par Kyodo montrent que les autorités ont confirmé durant leurs enquêtes que la JCO avait changé le manuel de procédure approuvé par le gouvernement pour adopter la « procédure standard » qui est illégale. Les dirigeants de la JCO ont admis que la firme avait illégalement révisé le manuel approuvé par le gouvernement pour permettre aux travailleurs d'utiliser des seaux à la place d'une pompe pour transférer une solution d'uranium dans le réservoir. Il a été révélé que les trois travailleurs de la JCO qui ont été hospitalisés à la suite d'une exposition massive aux radiations, ne portaient pas leur badge-film qui mesure la dose de radiation. Ceci est une autre grave violation des règles de sécurité.
L'inspection de l'usine de JCO par la STA (imposée légalement) qui s'est déroulée le 3 octobre 1999 était la toute première en 10 ans. On a également appris que la STA n'avait fait aucune inspection à l'usine de retraitement de Tokai-mura, exploitée par JNC, ni à l'usine d'enrichissement de Tokkasho-mura, exploitée par JNFL, au cours des six dernières années. Selon la STA, cela serait du à une surcharge de travail.

Le responsable du gouvernement local de Tokai est également mis en question pour n'avoir conduit aucun exercice de crise nucléaire pendant ces huit dernières années.
Selon les informations publiées par les médias, il n'y avait pas, au moment de l'accident de "hot line" entre la préfecture et la mairie de Tokaimura. Les responsables de Tokai ont dû utiliser un réseau téléphonique publique encombré pour essayer d'obtenir auprès des autorités préfectorales des données sur les mesures de radioactivité après l'accident.
La cellule de crise gouvernementale a été dissoute et c'est désormais une commission d'enquête sur l'accident nucléaire qui a été mise en place. Le bureau du Premier Ministre a demandé une enquête ad hoc dans toutes les installations nucléaires, les réacteurs y compris, sur l'ensemble du territoire japonais.
Un certain nombre de manifestations et d'actions de protestation sont organisées un peu partout dans le pays par les ONG, les syndicats et les citoyens concernés.

L'uranium enrichi de Tokai-mura était d'origine militaire française

L'uranium à l'origine de l'accident de criticité de Tokai-mura du 30 septembre 1999 était d'origine française. C'est ce qu'a confirmé Norimichi Mori, porte-parole de la compagnie japonaise JCO au quotidien français "Le Monde". Selon des sources françaises, cet uranium enrichi à 18,8 % avait été exporté en décembre 1997. Ces 420 kg d'uranium ont été enrichis à l'usine militaire COGEMA de Pierrelatte (usine d'enrichissement fermée en 1996). La transaction a été opérée par la compagnie allemande NUKEM. COGEMA avait expressément déclaré après l'accident qu'elle n'avait aucun accord avec JCO. En fait, le client de la COGEMA est JNC Co, l'exploitant du surgénérateur de recherche de Joyo, qui avait confié la conversion à JCO.

Selon des informations internes, les dirigeants de la STA vont classer l'accident au niveau 5 de l'échelle internationale des incidents nucléaires (INES, International Nuclear Event Scale), et non plus au niveau 4, c'est à dire au même niveau que l'accident de Three Mile Island en 1979. « Bien qu'il puisse y avoir des fissures, puisque nous n'avons pas pu entrer sur le site, de l'extérieur, l'usine ne semble pas détruite » a déclaré la STA à l'AIEA, en ajoutant qu'elle ne connaissait pas la quantité de radioactivité qui avait pu s'échapper du bâtiment.

L'attitude des porte-parole des différentes compagnies concernées par l'accident semble avoir été guidée par la nécessité de rassurer l'opinion et de mettre en cause le rôle des employés, sans s'intéresser au rôle de la direction, en particulier des dirigeants présents sur le site, ni de leurs supérieurs, que ce soit à JCO ou à la maison mère Sumitomo Metal Mining.

Selon certaines sources rapportées par le quotidien Asahi Shimbun, les assurances couvrant les dommages en cas d'accident nucléaire risquent de ne pas dédommager le manque à gagner concernant les productions agricoles qui n'ont pu être vendues à cause de l'accident de Tokai. Les ventes devraient chuter à Tokaimura et dans les villages avoisinant de la préfecture d'Ibaraki. Les assurances risquent de ne pas couvrir non plus la totalité des pertes directs et indirects entraînées par l'accident. Il s'agit notamment des pertes liées à l'interruption des liaisons ferroviaires et la fermeture temporaire de compagnies privées. Le système d'assurance oblige les exploitants nucléaires à s'assurer contre les accidents nucléaires. De plus, il autorise l'utilisation de l'argent des contribuables ­ après approbation de la Diet ­ pour payer des compensations si l'exploitant responsable n'est pas capable de faire face à la totalité des dommages.

Le CNIC a revu son estimation concernant la quantité d'uranium ayant fissionné et parle de «jusqu'à plusieurs dizaines de milligrammes d'U235 ». La Commission de Sûreté Nucléaire japonaise (NSC), selon le quotidien « Asahi », maintient que les quantités seraient de l'ordre de 0,001 mg.

La NSC a confirmé dans un rapport officiel au gouvernement que l'accident de criticité s'était poursuivi pendant 17,5 heures, en se basant sur la dose neutronique relevée par différents organismes.

Six employés qui ont travaillé sur le circuit de refroidissement de la cuve accidentée ont reçu des doses neutron+gamma supérieures à la limite de 100 mSv, limite préconisée par l'AIEA pour les cas d'urgence. La NSC a décidé d'aller au-delà de cette limite. Les travailleurs devraient continuer à travailler en deça d'une limite spéciale de 200 mSv, a indiqué un membre de la Commission.

Sumitomo Metal Minining, dont JCO est une filiale à 100 %, a désormais l'intention de se retirer du secteur des combustibles nucléaires. Ceci signifie qu'un certain nombre d'exploitants japonais devront trouver des fournisseurs étrangers pour s'approvisionner en combustible (combustible standard). Par exemple, Kyushu Electric Power dépend à 70 % de JCO pour ses combustibles à uranium, et est très touché par l'interruption (et l'arrêt définitif qui semble désormais probable) des opérations de JCO.

Le Parlement Européen a adopté une résolution demandant un contrôle totale par l'AIEA de « toutes les installations nucléaires du globe». Il demande à l'AIEA d'effectuer des contrôles et des vérifications sur place à Tokaimura, et demande aux responsables japonais de revoir les procédures de sécurité. Hirofumi Nakasone, nouveau chef de la STA (Science and Technology Agency) a accepté de laisser les inspecteurs de l'AIEA venir afin « d'augmenter la transparence et regagner la confiance internationale ». Leur arrivée est prévue pour ce soir, mardi 12 octobre.

Dans le cadre de la réorganisation des Ministères et des agences dépendant du gouvernement central, qui commencera en 2001, la Commission de Sûreté Nucléaire (NCS - Nuclear Safety Commission) sera sous tutelle d'un nouveau Cabinet, et aura une plus grande autonomie - étant un organisme consultatif, la NCS n'a pas pouvoir d'autorisation. Ce sera aussi le cas de la Nuclear Energy Commission. Ces deux commissions sont à l'heure actuelle sous tutelle du Premier Ministre.

La visite de trois experts de l'AIEA au Japon a commencé le 14 octobre 1999, un jour après que le gouvernement japonais ait reconnu qu'un ventilateur de l'installation accidentée avait continué à fonctionner par erreur pendant 12 jours, permettant le relâchement de particules dans l'atmosphère. Ce ventilateur n'a été arrêté que le 11 octobre 1999, trois jours après que des niveaux élevés d'iode-131 ait été détectés autours de l'usine. Les niveaux de radioactivité sont toujours dangereusement élevés sur le site de Tokaimura, et l'on ne sait pas exactement à quelle distance l'équipe de l'AIEA pourra se rendre.

Selon des experts et des scientifiques réunis en symposium à l'Université Seika de Kyoto, le 4 octobre 1999, la responsabilité du gouvernement devait être engagée face à l'accident survenu à Tokai. Ils se sont également déclarés préoccupés par le fait que JCO, ainsi que le gouvernement, pouvait faire de la rétention d'informations ou diffuser des informations incorrectes sur le plus grave accident nucléaire du pays. Le président de l'Université Seika, Hajime Nakao a déclaré que la remise en service du surgénérateur de Joyo, toujours prévue par le gouvernement, lui laisser penser que le gouvernement voulait avoir la capacité de produire des armes nucléaires.

Le 15 octobre 1999 lors d'une conférence de presse, JCO a admis qu'une « quantité limitée » d'iode-131 radioactive (20 Bq/m3, soit deux fois la quantité autorisée) avait été relâchée dans l'atmosphère après l'accident, par le système de ventilation du bâtiment dans lequel avait eu lieu l'accident de criticité. La Préfecture et la STA avaient connaissance de ce relâchement d'iode mais n'avaient pris aucune mesure, considérant que les quantités de radioactivité relâchées étaient négligeables. Des concentrations de 0,04 Bq/m3 d'iode-131 ont été détectées à 50 mètres au sud-ouest du bâtiment (le point de mesure étant situé à l'intérieur du périmètre de JCO).

Selon une déclaration de JCO, la dose reçue par un des membres de la première équipe qui avait approché le bâtiment pour prendre des photos des canalisations sur lesquelles il fallait intervenir, avait d'abord été évaluée à 20 mSv. On a finalement appris que les ouvriers portaient des dosimètres neutrons-gamma à deux chiffres, qui se remettent à zéro après avoir atteint 99. Au lieu de « 20 mSv », il fallait donc lire « 120 mSv » (neutrons plus gamma, mais essentiellement neutrons). Ceci a été rapporté par la STA le 15 octobre 1999 à la cellule de la NSC qui enquête sur l'accident.

Dans le même rapport, la STA a confirmé que le nombre de personnes exposées se montait à 69. Ce chiffre ne prend PAS en compte les habitants qui sont restés à côté de l'usine pendant 5 heures, sous une douche de neutrons, avant d'avoir été évacués. Le Dr. Komei Hosokawa de l'Université Saga estime que 100 à 150 personnes ont été exposées de façon significative à des rayonnements neutroniques.

Mycle Schneider, Chronologie de Tokai 20/10/99.




Accident de Tokaï-Mura: le film des événements
Fuite radioactive au Japon (AFP) 1ère partie

Fuite radioactive au Japon (AFP) 2ème partie
Fuite radioactive au Japon (AFP) 3ème partie
Décès du principal irradié de l'accident nucléaire de Tokaimura


AP
jeudi 27 avril 2000, 2h28

Le pire accident nucléaire qu'ait connu le Japon fait une deuxième victime

TOKYO (AP) -- Un ouvrier qui avait été gravement irradié le 30 septembre dernier à Tokaimura, lors du pire accident nucléaire qu'ait connu le Japon, est décédé jeudi matin, a annoncé un porte-parole de l'hôpital universitaire de Tokyo où il était soigné.

Masato Shinohara, 40 ans, est mort à 7H25 (22H25 GMT mercredi), a précisé Tamotsu Watanabe. Il s'agit du deuxième décès connu au Japon dû à des radiations à la suite d'un accident dans une centrale nucléaire.

Décédé en décembre, Hisashi Ouchi, 35 ans, a été la première victime de l'accident qui s'est produit dans l'usine de traitement d'uranium de Tokaimura, à 112 kilomètres au nord-est de la capitale japonaise. Il avait exposé à un niveau de radiations environ 17.000 fois supérieur au niveau maximum d'exposition censé être toléré pour une année, selon les normes japonaises. (Il y a une grosse erreur dans ce communiqué "17.000 fois supérieur au niveau maximum d'exposition" à un tel niveau, il aurait été instantanément carbonisé.)

Hisashi Ouchi, Masato Shinohara et un autre ouvrier avaient été sérieusement irradiés le 30 septembre dernier, des dizaines d'autres ayant été exposées à des radiations moins importantes. Le troisième ouvrier gravement touché, Yutaka Yokokawa, a quitté l'hôpital en décembre.

L'enquête sur l'accident de Tokaimura a montré que les ouvriers de l'usine, gérée par l'entreprise JCO, violaient de façon régulière les procédures de sécurité, allant jusqu'à mélanger l'uranium dans des bassines pour aller plus vite.



Accident nucléaire au Japon : une radiation 15000 fois supérieure à la normale
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Des Email mis en ligne par La BBC