Extrait du dossier de Presse de l'IRSN (Programme d'intercomparaison internationale de dosimetrie d'accident, 10 - 21 juin 2002)

 

Quelques exemples d'accidents de criticité qui ont provoqué une irradiation aiguë

21 août 1945, Laboratoire national de Los Alamos, États-Unis : accident de criticité par erreur de manipulation. Harry Daghlian Jr. laisse tomber une brique de carbure de tungstène réfléchissant les neutrons sur un bloc de plutonium. En plus de la forme habituelle du syndrome il présente de graves brûlures aux mains dès les premiers jours suivant l'irradiation (200-400 Gy sur la main droite). Il décède trois semaines après.

 unités

 définition

 symbole

 facteur de conversion

 Dose d'énergie
Gray
1Gy=1J/kg

 Quantité d'énergie délivrée par rayonnement à l'unité de masse du corps irradié

 rad

 1Gy=100rad

 Équivalent de dose
Sievert
1Sv=1J/kg

 Quantité d'énergie (Gy) multipliée par le coefficient d'efficacité biologique

 Rem

  1 Sv= 100 rem

21 mai 1946, Laboratoire national de Los Alamos, États-Unis : accident de criticité par erreur de manipulation. Le physicien canadien Louis Slotin crée par accident une masse critique de plutonium lors d'une démonstration scientifique. Il meurt une semaine après des suites d'une irradiation de 10 Gy.

15 mars 1952, Complexe nucléaire Mayak, URSS : accident de criticité par erreur de manipulation. En laboratoire deux opérateurs assemblent par mégarde une solution de plutonium critique. L'un deux reçoit 10 Gy aux parties inférieures du corps et survit malgré un syndrome d'irradiation aiguë grave.

15 mars 1953, Complexe nucléaire Mayak, URSS : accident de criticité par erreur de protocole. Un opérateur transvase un solution de nitrate de plutonium dans un réceptacle non prévu à cet effet et est soumis à une dose estimée à 10 Gy lorsque la criticité est atteinte. Il décède 35 jours après.

21 avril 1957, Complexe nucléaire Mayak, URSS : accident de criticité par erreur de conception industrielle. Un réservoir recevant un précipité provenant d'une solution d'uranium expose un opérateur à une dose de l'ordre de 30 Gy, qui meurt 12 jours après. Cinq autres survivent mais présentent un syndrome d'irradiation aiguë avec des doses allant jusqu'à 3 Gy.

2 janvier 1958, Complexe nucléaire Mayak, URSS : accident de criticité par erreur de protocole. Des opérateurs s'approchent d'un réservoir d'une solution d'uranium et réfléchissent suffisamment de neutrons pour créer une masse critique. Trois opérateurs meurent dans la semaine après avoir reçu 5 à 6 Sv ; une troisième survit au syndrome d'irradiation et devient aveugle dans les années suivantes.

16 juin 1958, Oak Ridge, États-Unis : accident de criticité par erreur de protocole. Un réservoir contenant une solution d'uranium fuit et est transvasé ; au cours de la manipulation, 5 personnes reçoivent de 2 à 4,5 Sv au cours d'un accident de criticité et tombent malades.

30 décembre 1958, Laboratoire national de Los Alamos, États-Unis : accident de criticité par erreur de manipulation. Un opérateur assemble par erreur une masse critique d'une solution de plutonium et meurt des suites d'une exposition à 90­120 Sv sur le haut du corps.

14 juillet 1961, Complexe chimique de Sibérie, URSS : accident de criticité. L'accumulation d'hexafluorure d'uranium dans une pompe à vide devient critique et soumet un employé à 2 Sv. Il développe un syndrome d'irradiation aiguë léger.

11 mars 1963, Sarov, URSS : accident de criticité par erreur de protocole. Des expérimentateurs manipulent une masse critique de plutonium et un réflecteur de neutrons créant une masse critique. Deux reçoivent 3,7 et 5,5 Sv et survivent au syndrome d'irradiation.

24 juillet 1964, Rhode Island, États-Unis : accident de criticité par erreur de protocole au United Nuclear Fuels Recovery Plant. Une masse critique de combustible fissible est atteinte dans la Wood River Junction facility lors de la manipulation de solutions d'uranium. L'opérateur meurt deux jours après des suites l'irradiation de 10 Sv.

5 avril 1968, URSS : accident de criticité par erreur de protocole. Deux experts en criticité assemblent un coeur d'uranium avec des réflecteurs de neutrons sans suivre les procédures de sécurité. Ils s'exposent respectivement à 20­40 Gy et 5­10 Gy et meurent 3 et 54 jours après l'accident.

10 décembre 1968, URSS : accident de criticité par erreur de protocole. Un employé de la Mayak Enterprise crée temporairement une solution critique de plutonium en transvasant un réservoir et quitte les lieux aussitôt. Un superviseur décide alors de bouger le conteneur incriminé et s'expose à un second accident de criticité ; il meurt un mois plus tard d'une exposition de 24,5 Sv. L'expérimentateur (7 Sv) tombe malade et survit après amputation des deux jambes.

26 mai 1971, Moscou, URSS : accident de criticité par erreur de calcul à l'Institut Kurchatov. Des expériences sont menées sur la criticité de barres d'uranium plongées dans l'eau. L'insuffisance des calculs mène à une masse surcritique à la fin d'une expérience lorsque l'eau est pompée. Deux expérimentateurs reçoivent 60 et 20 Sv et meurent 5 et 15 jours après. Deux autres reçoivent des doses de 6 à 7 Sv et survivent, avec des problèmes de santé chronique.

13 décembre 1978, Complexe chimique de Sibérie, URSS : accident de criticité par erreur de protocole. Deux employés stockent quatre lingots de plutonium dans un même conteneur créant une masse critique ; l'un deux reçoit 2,5 Gy.

17 juin et 19 juin 1997, Sarov, Russie : accident de criticité par erreur de protocole. Un expérimentateur seul assemble un coeur de plutonium avec un réflecteur de neutrons en cuivre. L'expérimentateur est soumis à 45 Gy de neutrons et 3,5 Gy de gammas lors du second accident et meurt dans la nuit.

30 septembre 1999, Tokaimura, Japon : accident de criticité par erreur de protocole. Des employés assemblent par négligence une masse critique d'une solution d'uranium dans le centre nucléaire de Tokaimura. Deux employés sont exposés à une dose létale.

Extrait de l'encyclopédie libre Wikipédia.

 

Rappel: Les effets du nucléaire sur le vivant

Hiroshima et Nagasaki ont permis de préciser l'échelle des effets en fonction de la dose. Le tableau (d'après H. Jammet dans Revue Générale Nucléaire n°5 en 1977) résume l'évolution pathologique à court terme pour différents niveaux d'irradiation homogène de l'ensemble du corps. Si la dose de rayonnement reçue est forte, un très grand nombre de cellules sont endommagées et il en résulte des troubles dont les symptômes dépendent de la dose reçue:

- 30 à 100 rem: Fatigue, formule sanguine altérée
- 100 à 250 rem: Troubles sanguins, troubles digestifs
- 250 à 400 rem: Vomissements, vertiges, formule sanguine modifiée, destruction des barrières immunologiques
- 400 à 800 rem: Symptômes identiques mais plus intenses. Mort de 50 % des irradiés.
- Supérieur à 800 rem: Mêmes symptômes encore plus intenses, la mort est quasi inévitable pour 90 % des irradiés.