Three Mile Island
première partie

(Voir 2ème partie - 3ème partie)

TRANSCRIPTION DES ENTRETIENS DES MEMBRES DE LA N.R.C.

Traduction EDF d'articles de "NUCLEONICS WEEK" et "NUCLEAR FUEL"

L'accident le plus grave et le plus commenté des trente dernières années d'histoire de l'exploitation de l'énergie nucléaire s'est déclaré à Three Mile Island près de Harrisburg, Penssylvanie, dans les toutes premières heures du mercredi 28 mars 1979. La gravité réelle et virtuelle de la situation a poussé la Commission de Réglementation Nucléaire à instaurer une permanence presque aussitôt.

L'atmosphère était plutôt à la confusion. La permanence, établie du début à la fin de l'événement, n'a été qu'une succession chaotique informe et souvent interrompue d'entretiens. Par la force des circonstances, bon nombre de réunions spécifiques se sont tenues hors des salles de conférence prévues à cet effet, et où se trouvait le matériel d'enregistrement utilisé d'habitude. Les responsables de la NRC et de la centrale allaient et venaient en fonction des tâches qu'ils avaient à accomplir et de l'évolution de la situation sur le site. L'enregistrement des discussions s'est fait principalement sur magnétophone à cassettes. La transcription en est ponctuée de références faites par les transcripteurs à des passages " inaudibles " et " brouillés ". Nous avons publié le texte et éliminé certaines interruptions et répétitions n'apportant rien à l'information et afin de faciliter les transitions, tout en essayant de conserver ce qui est nécessaire pour rendre compte des impressions des interlocuteurs. Nous pensons que les larges extraits publiés permettront de mieux comprendre les événements.


30 mars 1979.

Lee Gossick (Chef des Opérations) : Bill (Dorie, de l'administration), la situation est en train de se dégrader ici, pour ce qui est des dégagements radioactifs. Le gouverneur nous demande de confirmer ce qu'il apprend de la centrale, le chef de la centrale dit qu'il y a une émission incontrôlée d'effluents qui pourrait donner jusqu'à 1200 millirems/h. Ils prévoient de...

Dorie : Mr Gossick, pouvez-vous rester en ligne une seconde, que j'aille chercher John?

Gossick : Chercher qui?

Dorie : Je veux juste aller chercher John Austin (Bureau des Etudes Spéciales), une seconde.

Gossick : Bon, dépêchez-vous.

Dorie : Bon. Allez-y. J'enregistre. D'accord?

Gossick : D'accord. Bon, j'ai téléphoné à John Ahearne et j'ai essayé de joindre le Président; il est quelque part en route. Je vais appeler Kennedy. Pouvez-vous en faire part à Gilinsky et à Bradford? Nous venons de frapper à toutes les portes à la Situation Room (Salle où peuvent se réunir les membres du Gouvernement en cas d'événement imprévu) de la Maison Blanche et au Department of Energy et à tout le monde, O.K.?

Dorie : D'accord, Monsieur, j'ai compris.

Gossick : Très bien. Pourriez-vous aussi dire au Congressional Affairs Office (Bureau des Affaires du Congrès.) de se mettre à pied d'oeuvre et de prendre contact avec nous pour qu'ils puissent commencer à avertir la Capitale?

Dorie : Bien. On va le faire.

Gossick : Merci.

(fin de la conversation téléphonique).

(Conversation téléphonique avec Harold Denton, directeur de la Réglementation des Réacteurs Nucléaires, et Lee Gossick, à 9h37 du matin).

Denton : ils en sont à 63 curies par seconde, et je ne peux pas entrer dans l'explication des calculs mathématiques, mais si ce qu'ils disent est vrai, par comparaison avec ce que nous savions être le débit de rejets au moment de l'arrêt et les mesures effectuées à la porte nord, et ceci remonte à hier, elles étaient du même ordre de grandeur qu'hier, ce qui nous amènerait à quelque chose comme 1200 mrem/h, chiffre que je viens de donner à quelqu'un, il y a un instant.

Kennedy : (Commissaire de la NRC). A quel endroit?

Denton : Bon, vous savez ce que c'est que le vent et le débit de dose va diminuer avec la distance; bien sûr, 1200

Kennedy : Ce serait 1200 au pylône?

Denton : Oui, Monsieur, c'est juste. Puis cela diminuerait, bien sûr, en s'éloignant. Nous essayons d'imaginer ce que nous pourrions dire au gouverneur (Thornburg de Pennsylvanie), qui insiste pour avoir des informations précises de la part de la NRC sur les mesures d'évacuation qu'il doit prendre.

Gilinsky; (Commissaire de la N.R.C.) Bien, il faut que je vous demande, le fait que vous multipliez (le niveau de rejets) par 20, cela veut-il dire que le niveau de rejets touchant les communes les plus proches soit 20 fois supérieur à ce qu'il était hier dans la centrale?

Gossick : Oui, c'est ce qu'ils disent.

Gilinsky : Eh bien, c'est beaucoup.

Gossick : Je ne sais pas si le débit de décharge (Sur le CCV) 1 est bien de 10 Gallon (38 l/min) mais je pense que les 63 curies sont comparables avec ce que l'on savait du rejet d'hier.

Bradfort : (Commissaire de la N.R.C.). Quelles mesures avez-vous exactement?

Gossick : Je ne peux vous en donner aucune pour le moment. L'avion de l'ARMS (Contrôle d'Activité de l'Environnement) est en train de faire des relevés, mais je n'ai rien de très actuel depuis que ça s'est produit, vous comprenez. Les relâchements ont été interrompus encore une fois et je pense que les dégagements ont eu lieu pendant une heure ou deux. Nous ne savons pas, cependant, si cela est vrai pour la durée

Gilinsky : A-t-on des relevés au sol pris aux alentours du site?

Gossick : Je n'en ai aucun pour l'instant.

Denton : Nous n'avons reçu aucune donnée nouvelle, il s'agissait de calculs établis en fonction des kilomètres, et d'ailleurs, je pense que Lee a déjà dû vous les remettre.

Gilinsky : Bon, si jamais nous voulions nous en procurer, avons-nous du matériel de surveillance?

Denton : Il y en a beaucoup là-bas, mais ça prend un moment pour que (les informations) nous reviennent.

Gilinsky : Bien, peut-on se mettre rapidement en rapport avec eux?

Denton : Chronologiquement, Vic, il faut une heure entre le moment où l'agent prend la mesure et celui où il parvient à nous la communiquer.

Hendrie : (Président de la N.R.C.). Harold, avez-vous parlé à Richard Vollmer (Directeur-adjoint à l'Analyse du Site) au cours des dernières quinze minutes?

Denton : Non

Hendrie : Est-ce qu'il est au courant?

Denton : J'espère bien, mais je n'ai pas réussi à le joindre par téléphone.

Joseph Fouchard : (Affaires Publiques). C'est Joe à l'appareil, Monsieur le Président. Je viens de recevoir une communication de mon correspondant, au bureau du Gouverneur; les informations que celui-ci obtient de la centrale sont ambiguës et il aurait besoin des recommandations de la NRC.

Denton : C'est vraiment difficile d'obtenir des données. On a l'impression de les recevoir après coup. Ils ont ouvert les soupapes ce matin, ou le circuit de décharge (du CCV) et ils laissaient s'échapper une activité de 6 curies/sec, avant que quelqu'un ait été informé. Au moment où nous étions prêts à régler le débit, ils avaient apparemment arrêté; il y avait eu un possible relâchement durant environ une heure à une heure et demie.

Gilinsky : Ce, à partir de l'enceinte de confinement?

Denton : Disons, c'était de l'eau du réfrigérant primaire provenant de l'enceinte elle a apparemment été rejetée dans la station de traitement des effluents radioactifs ou le bâtiment des auxiliaires nucléaires et elle s'est dégazée avec rejet par le circuit normal. Nous calculons des doses de 170 mrem/h à 1,5 km, de la moitié à 3 km, et d'environ 17 à 8 km. Les rejets ont apparemment cessé maintenant; je dirai pourtant qu'une bouffée de rejets se dirige vers le nord-est; il faut attendre pour voir. Nous avons bien conseillé à la police locale d'évacuer la population à 8 km, mais quant à savoir s'ils y sont vraiment parvenus, il nous faudra

Fouchard : Bon, il faut que le Gouverneur donne son autorisation et il attend de nous des recommandations.

Ahearne (Commissaire de la NRC) : Harold, les renseignements que vous avez indiquent qu'il y a eu dégagement pendant deux heures environ et que vous avez mesuré l'activité en curie de l'eau et que tous vos autres calculs sont

Denton : Non, l'activité en curie de l'eau est déduite d'autres mesures, mais le débit de décharge Il est très difficile de savoir quelle quantité d'eau a véritablement été rejetée ou quelle en était la radioactivité. Vu l'eau répandue là-bas, vous pouvez vous attendre à ce que le rejet en résulte.

Hendrie : Harold, en guise de bouffée, c'est un panache oblong qui se profile. Savez-vous où il se trouve maintenant? C'est-à-dire, si nous allons suggérer au Gouverneur de faire évacuer les lieux dans cette direction, à 8 km est-ce que cela doit se faire après le passage du nuage.

Denton : Bien, s'ils n'ont pas commencé, ça pourrait être après le passage du nuage. Il y a des gens habitant à proximité de la direction nord-est. J'imagine que le panache y est déjà passé?

Gilinsky : Quelle est la vitesse du vent, en avez-vous une idée?

Denton : Nous sommes en train d'essayer de le savoir.

Gilinsky : Et quand ce panache - cette bouffée a-t-elle été émise?

Denton : Au cours des deux dernières heures.

Hendrie : Si je comprends bien, cela vient juste de cesser.

Denton : Nous ne savons pas depuis combien de temps, mais s'il s'agissait d'un rejet continu sur une période d'une heure ou d'une heure et demie, c'est du moins ce que j'ai compris, cela fait une grosse bouffée.

Hendrie : Un vent de deux noeuds et ce foutu truc - la tête a déjà dépassé la ligne des 8 km; mais vous ne pouvez pas en faire grand cas

Kennedy : Harold, les autres données météorologiques ont-elles été vérifiées? J'ai l'impression, en regardant la carte météorologique, qu'il va pleuvoir à cet endroit, si ce n'est déjà fait.

Denton : Je n'ai pas le bulletin météo à portée de la main.

Une voix : On nous dit qu'il y a pour l'instant un vent très, très léger, moins de 8 km/h.

Denton : Il est très léger dans la direction nord-est, mais il ne pleut pas encore.

Hendrie : Il a été suggéré d'évacuer la population dans une zone de 8 km dans la direction nord-est, j'accepte.

Denton : 8 bons Kilomètres, je dirais à la première impression, et les chiffres (inaudible) environ 17.

Hendrie : millirems par heure?

Denton : Oui, je pense que l'important en matière d'évacuation de population pour devancer le panache serait de s'y mettre au lieu de rester ici à attendre la mort. Même si nous ne pouvons minimiser la dose de rayonnements par individu, il y a peut-être encore une chance de limiter la dose pour la population globale.

Gilinsky : Que leur ont-ils dit; c'était pour le secteur nord-est?

Hendrie : Oui.

Bradford : Il faudrait préciser que vous ne parlez pas de doses léthales.

Hendrie : Harold, la recommandation en matière d'évacuation était bien pour cette direction, non? Nord-est?

Gossick : Oui, mais avec un vent très, très léger, il faudrait y regarder de plus près pour trouver de quel secteur il s'agit.

Denton : Mais les gens du site sont manifestement mieux placés que nous pour diriger et mettre en oeuvre des mesures d'urgence et j'espère bien que les agents de la centrale et nos collaborateurs surveillent vraiment ce qui se passe là-bas et passent aux actes à tout instant. Le chiffre que nous avons donné était estimé avec un facteur de 60 et établi avec certaines caractéristiques de la centrale. J'ai tout l'impression que nous travaillons toujours en seconde ou troisième main, que nous avons toujours une longueur de retard sur eux. Il faudrait presque envisager que le Président parle au propriétaire de la boutique et trouver quelqu'un de la société qui nous informe des événements à l'avance, s'il est en mesure de le faire, et nous dise quelles mesures il va prendre.

Gilinsky : J'ai l'impression que nous aurions intérêt à faire en sorte d'obtenir des renseignements plus précis.

Fouchard : Le Gouverneur compte bien là-dessus, Monsieur le Président. Je pense que vous devriez appeler le Gouverneur Thornburg pour lui dire ce que nous savons. Je ne sais pas si vous êtes d'ores et déjà prêts à faire une recommandation de la Commission ou non. Les envoyés de la Protection Civile sur les lieux disent que les responsables des State Programs (Programmes d'Etat) ont conseillé l'évacuation sur une distance de 8 km dans la trajectoire du panache. Je pense que la Commission aurait tout intérêt à se mettre en rapport avec le Gouverneur et ce très rapidement.

Denton : Il peut paraître excessif de le faire maintenant, puisque ça s'est arrêté - ça pourrait tout changer; mais on a l'impression que c'est quelque chose bon, autre point il faudrait savoir ce qu'ils auraient l'intention de faire, au cas où la situation se représenterait, ce qui n'est pas du tout exclu, d'ici une heure ou deux (inaudible).

Gilinsky : Bien, il faut avant toutes choses obtenir des renseignements plus précis. Faites en sorte d'établir une liaison avec : l'hélicoptère pour être assurés dès maintenant d'avoir : des indications exactes rapidement.

Fouchard : Mais, il me semble que vous avez à prendre promptement une décision.

Gilinsky : C'est juste, mais cela m'étonnerait qu'on en finisse par simple décision prise au téléphone.

Denton : A mon avis, nous allons devoir agir en partant du fait que le taux des gaz dissous dans le réfrigérant primaire est très élevé, la durée de vie en est de cinq jours et demi, et cette situation va persister longtemps, jusqu'à ce qu'ils atteignent le point où il n'y aura plus lieu de sortir le réfrigérant primaire hors de l'enceinte. Tant qu'ils joueront avec le niveau du pressuriseur, par remplissage ou vidange, cette situation persistera en permanence. J'aimerais vraiment bien avoir des renseignements plus précis.

Hendrie : Oui. - Notre liaison actuelle avec le site ne fonctionne pas, que se passe-t-il? Et avec qui parlez-vous là-bas; y-a-t'il une ligne disponible là-bas?

Denton : Je n'en suis pas sûr. Je vais demander. Quelle est notre ligne sur le site? Nous discutons avec notre correspondant de la salle de commande qui se met en quatre pour poser des questions tandis que nous lui parlons au téléphone. Nos correspondants sont donc bien dans la salle de contrôle à chercher les réponses. Pourtant, eu égard aux chiffres réels ou relatifs à l'émission, aux taux, aux curies, aux quantités, aux doses hors du site, cette façon de faire semble devoir prendre des heures.

Fouchard : Ne croyez-vous pas que par précaution, il vaudrait mieux évacuer un peu les lieux?

Hendrie : Sans doute, mais je dois avouer que c'est agir totalement à l'aveuglette, et je ne crois pas le moins du monde que, si nous ordonnons une évacuation de la population d'un endroit où ils ont déjà absorbé une dose, les gens aient à se déplacer vers une zone où ils n'en auraient reçu qu'un dixième, mais où ils seront susceptibles d'en recevoir ultérieurement dix fois plus.

Gilinsky : Doit-on estimer qu'il faille continuer de procéder à des relâchements répétés, maintenant encore?

Denton : J'ai sans doute tendance à penser que si vraiment ils n'ont pas mis un terme aux émissions de gaz il y a une demi-heure, il est probablement préférable de s'en remettre aux opérateurs du site - le panache n'a-t-il pas eu l'occasion de redescendre à ces niveaux

Ahearne : Mais, Harold - comment peut-on être assuré qu'ils ne s'embarqueront pas dans la même affaire?

Denton : Rien ne m'autorise à croire que ce scénario ne puisse se reproduire. Et pourtant je ne comprends pas la raison de ce qui se passe actuellement.

Fouchard : Je pense que, par précaution

Hendrie : A mon avis, il vaudrait mieux Harold, essayer de voir si on ne peut pas obtenir une meilleure liaison.

Denton : Nous essayons de prendre contact avec Marbury, d'établir un semblant de communication avec quelqu'un qui s'occupe d'estimation et non pas de transmettre l'information. Il nous faut trouver un moyen tel que, lorsque nous posons une question, on finisse quand même par obtenir une réponse. Mais tous ceux qui supervisent les opérations là-bas font tout autre chose. De plus, nous ne savons pas ce qu'ils sont en train de faire; il se peut qu'ils prennent les mesures appropriées.

Hendrie : Cela nous rendrait sûrement service si Vollmer pouvait mettre la main sur le haut Responsable de la Société de construction présent sur les lieux qui dirige l'exploitation de la centrale et s'il pouvait rester suffisamment à proximité de lui; puis qu'il vienne nous faire un rapport régulier, au fur et à mesure que les décisions seraient prises, afin que nous ne soyons pas comme hier, appelés au sujet de l'eau répandue; de façon que, s'il nous faut de nouveau procéder à un transfert de l'eau du circuit primaire pour une raison quelconque : a) nous comprenions que c'est indispensable, b) que nous puissions y aller et fassions évacuer la population à l'avance.

Denton : Les gens, qui y vont, se mettent les pieds dans un bourbier, dont apparemment ils n'avaient jamais entendu parler. Vous pourriez peut-être envisager d'organiser des équipes tournantes de hauts responsables dans la salle de commande, ou dans une salle distincte, avec lesquels nous pourrions être en rapport directement; je me ferais un plaisir de me porter volontaire pour assister au déroulement des opérations pendant un moment.

Hendrie : A vous de décider si vous devez en être, Harold, mais, à mon avis, il faudrait aider Vollmer à diffuser l'information, puisque la situation pourrait continuer ainsi durant les deux prochains jours. Je ne sais pas ce que vous pouvez faire pour améliorer la communication, mais elle est vraiment mauvaise. Bon Joe, je crois qu'il faut que j'appelle le Gouverneur.

Fouchard : Oui, je crois effectivement que tu ferais bien de l'appeler dès maintenant

Hendrie : - de lui téléphoner immédiatement. Nous agissons presque entièrement à l'aveuglette : ses informations sont ambiguës; pour ma part, je n'en ai aucune, et je ne sais pas, j'ai l'impression que nous sommes des aveugles prenant des décisions par tâtonnements. Je vais

Denton : Une mise à jour vient de parvenir au sujet des dernières mesures relevées. Il arrive

Brian Grimes (Division de l'exploitation des réacteurs) : Ce que nous avons est une mesure hors site.

Bradford : A quel endroit?

Grimes : Je pense que c'est aux portes, à l'intérieur du site.

Kennedy : 25 mrem/h - à proximité des portes?

Grimes : Ces mesures ont été prises par nos agents peut-être à un moment où la soupape de décharge située sur le réservoir de désactivation des gaz s'ouvrait et se fermait.

Bradford : Ils ne savent pas à quel moment ça c'est passé?

Grimes : Ils n'en sont pas sûrs, ils ne savent pas l'heure exacte.

Hendrie : Donc, vous ne pouvez pas dire qu'elles sont représentatives d'une période de dégagement importante?

Grimes : C'est juste, parce que l'hélicoptère de l'ARMS se dirige maintenant dans cette direction et ses occupants sont en rapport avec notre camionnette; un membre de cette équipe devrait nous faire part des effets sanitaires sous peu.

Hendrie : Dans combien de temps?

Grimes : Dans 10 à 15 minutes.

Fouchard : Monsieur le Président, je ne crois pas y-a-t'il quelqu'un qui ne soit pas d'accord sur le fait que nous devrions conseiller au Gouverneur ce qu'il y a lieu de faire?

Denton : Pour ma part, je suis d'accord. Simplement à partir de ce que nous savons. C'est une bonne première mesure.

Hendrie : On commence à évacuer?

Fouchard : A mon avis, vous et les autres membres de la Commission, devriez entrer en rapport avec le Gouverneur, Monsieur.

Ahearne : Harold et Ed, qu'est-ce que vous recommandez, alors?

Hendrie : Y-a t'il consensus sur le fait que nous devrions recommander au Gouverneur de faire évacuer les lieux dans le secteur des 8 km?

Denton : C'est bien ce que j'ai recommandé quand nous avons pris la parole, Hendrie. Puisqu'il a cessé de pleuvoir et que le panache s'éloigne Je crois qu'il serait quand même bon, par précaution, d'évacuer les lieux devant et sous le panache. Et si cette mesure s'avère trop prudente

Grimes : A mon avis, cela aurait peut-être été utile tout à fait à proximité du site, mais, maintenant, la radioactivité a baissé au - dessous du seuil fixé par l'E.P.A. (Environmental Protection Agency : Agence pour la protection de l'environnement), donc ce qu'il faudrait faire au plus, à mon avis, serait de dire aux gens de rester chez eux ce matin.

Ahearne : Brian, comment déterminez-vous la pollution?

Grimes : Eh bien, tout simplement, à partir des calculs météorologiques, en faisant une évaluation, et en minorant d'un facteur de 10 environ.

Hendrie : Voyons si nous pouvons joindre le Gouverneur au téléphone.

Fouchard : D'accord, voici le numéro de téléphone du Gouverneur code local : 717.

Hendrie : Ne quittez pas, un instant - 717.

Fouchard : 787-2500

Hendrie : 2500

Fouchard : J'ai réussi à trouver une ligne libre au bureau du Gouverneur, à partir d'ici; mon correspondant est au bureau de l'attaché de presse. Est-ce que je peux dire - toucher un mot au Gouverneur - qu'il aura de vos nouvelles très bientôt?

Hendrie : Nous essayons précisément de le joindre.

(A Gilinsky, pendant qu'il attend). Il semble que c'est ça, ne pas partir avec l'idée en tête : qu'ils vont appeler; mais ils surveillent la rame nous sommes presque arrivés au niveau de débordement sur tel ou tel réservoir; ils jettent un coup d'oeil alentour et disent : " bon, transférez-en une partie ici " et le type ouvre la vanne; ce n'est que plus tard que quelqu'un de là-bas lui dit : pourquoi est-ce que j'ai les pieds mouillés? et cela s'avère se passer dans le bâtiment des auxiliaires nucléaires, et bien sûr, il y a quelques effluents gazeux et des gaz rares qui s'échappent; quelqu'un dit " pourquoi avez-vous fait cela? Je n'ai pas l'impression qu'ils aient les choses bien en main.

Ahearne : J'allais vous demander ce qu'il faut faire des femmes enceintes et des enfants?

Stenglass : (inaudible).

Gilinsky : Brian dit qu'on peut gagner un facteur de dix en restant à l'intérieur. Quoi qu'il en soit, je pense qu'il vaut la peine d'y consacrer cette demi-heure pour en avoir le coeur net, avant toute chose; vous allez alerter les gens qu'ils vont devoir faire quelque chose, et de toute façon, il ne pourront rien faire dans la prochaine demi-heure.

Ahearne : J'ai alerté la police de l'Etat, pourtant.

Gilinsky : Il faut se préparer à l'éventualité.

Bradford : Combien le niveau bas personne ne sait, non?

(On arrive enfin à joindre le Gouverneur Thornburg par téléphone : 1047).

Thornburg : Président Hendrie.

Hendrie : Gouverneur Thornburg, heureux de pouvoir enfin vous joindre. Je suis ici avec les membres de la Commission. Je dois avouer que la qualité de nos informations n'est pas bien meilleure que la vôtre, si j'ai bien compris. Il nous semble qu'il serait souhaitable de suggérer aux gens habitant dans le secteur nord-est, dans un rayon de 8 km à partir de la centrale, de rester chez eux dans la demi-heure qui vient. Nous avons un avion de surveillance à l'oeuvre et il semble que nous ayons une ligne disponible pour le joindre nous devrions donc avoir des informations dans les dix ou quinze minutes à venir. Ils pourront nous dire s'il serait avisé de faire procéder à une évacuation de la population dans cette direction.

Thornburg : Bon, ce que vous recommandez pour l'immédiat serait que les gens restent chez eux?

Hendrie : Oui, pour ceux qui se trouvent dans la direction nord-est de la centrale.

Thornburg : La direction nord-est de la centrale sur une distance de?

Hendrie : Sur une distance d'environ 8 km.

Dorie : Gossick est en ligne, il a les tous derniers renseignements.

Hendrie : Gouverneur, je viens d'avoir une communication de notre Centre de renseignements. Si nous pouvions rester en communication avec vous, un instant, laissez cette ligne libre pendant que je me branche sur une autre pour voir ce qui arrive.

Thornburg : Bien sûr.

Hendrie : Oui, bien, vous êtes arrivé juste à temps.

Gossick : Nous venons de prendre contact avec le site à propos de certaines mesures; je vous passe Brian Grimes qui vous fera le point exact de ce que nous savons pour le moment.

Grimes : Les vents sont faibles et variables et tandis qu'ils étaient orientés vers le sud, nous avons enregistré des mesures d'environ 25 mrems/h; l'une des mesures a été relevée à 180 m au-dessus de la centrale et a indiqué un débit de dose de 1200 mrems/h, ceci au-dessus de la centrale. Le temps que les effluents quittent le site, la mesure aura baissé d'un facteur 3 ou 4. L'une des mesures, relevée sur la rive est de la rivière, indique 20 mrems/h de radioactivité maximale qui a, du reste, rapidement baissé; ou cela provenait de la diffusion du panache, ou c'était peut-être une partie de ce qui s'est dégagé ce matin. Si on se fonde sur les 1200 mrems/h relevés juste au-dessus de la centrale, on a au plus deux cents millirems sur le site. Mais il s'agit là d'une estimation réaliste.

Hendrie : Oui, bon, ces mesures sont valables pour une zone très proche. A quelle distance nous faut-il nous éloigner pour obtenir cette mesure divisée par 10?

Grimes : Pour un facteur de 10, dans ces conditions de vent, il faut probablement 1,5 km. Il faudra que je vérifie.

Hendrie : D'accord Ils ont dû arrêter les rejets depuis assez longtemps, pour qu'il n'y ait plus rien à 1,5 km.

Grimes : Les mesures ont été relevées à 6h40 et à 11 heures Ils ont fermé une soupape et les mesures ont été relevées pendant ce temps.

Hendrie : Bon, Brian, s'ils ont une radioactivité de 1,3 rem par heure dans le panache

Grimes : Nous avions bel et bien une radioactivité de 1,2 rem par heure dans le panache.

Hendrie : Vraiment? Cela nous amènerait à quelque chose de l'ordre du mrem/h au sol?

Grimes : Oui, au sol, hors de l'enceinte.

Hendrie : Soit probablement sous le panache quand il s'amincit, soit au moment où le panache touche le sol

Grimes : La mesure de 11 heures a été relevée au moment où ils avaient ouvert la soupape de sûreté sur le réservoir de stockage, avec ventilation de ce réservoir par le système de ventilation. Nous n'avons aucun renseignement sur la durée, mais nous pensons qu'il s'agit d'une mesure de 1200 mrem/h pendant que cette ventilation était en fonctionnement.

Ahearne : Mais Brian, quand cela s'est-il passé, il y a une heure ou deux?

Grimes : Il y a maintenant à peu près deux heures que le panache s'est formé.

Hendrie : D'accord, c'est à peu près sa taille pour le moment?

Grimes : C'est cela. Joe Fouchard veut savoir si nous allons faire part au Gouverneur de nos recommandations.

Hendrie : Oui, et je reprends contact avec vous.

(Hendrie reprend sa conversation téléphonique avec Thornburg, 10h14).

Hendrie : Gouverneur, nous avons quelques nouveaux chiffres.

Thornburg : Nous aussi.

Hendrie : Bien, comparons-les.

Thornburg : J'espère qu'ils sont identiques.

Hendrie : J'ai une mesure. Au cours de l'un de ces dégagements en bouffée au-dessus de la centrale, il y a plusieurs heures, au-dessus de la centrale, la radioactivité était d'environ 1200 mrem/h; ce qui semble donner, par le calcul, au moment où le panache arrive au sol et que les gens sont susceptibles d'être atteints, une radioactivité d'environ 120 mrem/h. Bon, nous sommes encore au-dessous du seuil critique d'évacuation fixé par l'EPA; d'autre part, c'est certainement un taux plutôt fort pour une dose hors site. De toute façon, j'ai peur que nous ne soyons devancés par les événements, de sorte que cette dose n'est plus actuelle puisqu'elle date probablement d'une heure. Les émissions de gaz hors de la centrale, du moins pour l'instant, ont apparemment cessé. Je suis d'avis de continuer à conseiller aux gens de rester chez eux ce matin. Et à moins que nos informations s'améliorent - j'espère que tel sera bien le cas - nous pourrons voir sur quelles bases nous pouvons agir.

Thornburg : Je vais vous faire part du rapport que nous venons de recevoir de notre Department of Environnmental Resources (Département des Ressources de l'Environnement) qui, je crois, émane de vos collègues à la centrale, et nous allons voir si nous parlons bien de la même chose. Paul Coitchlow est présent, pouvez-vous résumer cette information?

Coitchlow : Oui, Tom Jarowsky a déclaré qu'il était apparu une bouffée, il y a environ une heure, et que les doses hors site étaient au maximum de 14 mrem/h. Ces chiffres sont maintenant au dessous de 1,5 mrem/h et continuent à diminuer. Il déclare que les autorités de Washington ont peut-être été mal informées lorsque - avez-vous quelqu'un dans votre entourage du nom de Collins qui a conseillé à notre Directeur de la Protection Civile de faire évacuer la population à 9h15 du matin? Le vent reprend de la force maintenant, selon Jarowsky, et le panache devrait se dissiper pour le moment, il n'estime pas nécessaire d'évacuer. Il nous a déclaré qu'il était maintenant indifférent que les gens restent chez eux ou non. Je crois que c'est la fin.

Hendrie : Bien, je pense que vous n'avez sans doute pas tort. Suggérer aux gens de rester chez eux relève sans doute plus de la précaution que de l'impression d'un danger réel.

Thornburg : Puis-je vous demander, nous sommes donc aussi sur la même piste ici. Nos renseignements vous viennent-ils d'un certain Dr Galinna du site?

Hendrie : Je ne saurais pas vous dire. Je n'ai pas demandé qui c'était en particulier, Monsieur le Gouverneur. Ce rapport envoyé à nos correspondants sur le site à partir d'un vol de l'ARMS, a été retransféré par une liaison itinérante que notre équipe d'inspection s'était assurée auparavant. Il est passé entre plusieurs mains et je n'ai pas entrepris d'en rechercher le cheminement et d'en retrouver la source.

Thornburg : Je crois que nous pourrions l'utiliser parce que nous pouvons nous assurer de ce que nous avançons. Notre agent, Tom Jarowsky, chef de nos opérations de contrôle ici, et le Dr Galinna, votre agent sur ces lieux, ont été en rapports presque permanent. Si leur évaluation respective est en accord avec la nôtre, je pense que nous pourrons de part et d'autre avoir un peu plus confiance en cette évaluation.

Hendrie : Oui, et je me sentirais mieux aussi si je pouvais être en rapport direct avec les Personnes du site, qui ont sans doute une idée plus juste et plus précise.

Thornburg : Monsieur, quel est le relevé hors site le plus élevé que vous avez, le savez-vous?

Hendrie : Nous en avons un dans un communiqué qui vient de nous arriver et que je vous fais parvenir, et j'en ai un pris sur la rive est de la rivière de 20 mrem/h. Au sud, à la limite du site, 25 mrem/h, mesure apparemment relevée au moment des émissions de gaz, et enfin celui-ci, qui nous vient de l'appareil de surveillance monté dans le panache juste au-dessus de la centrale, indique un chiffre manifestement plus élevé. Nous sommes en train de faire une estimation de ce que serait approximativement le maximum dans la direction du vent quand le panache aura touché terre. Bien sûr, il ne s'agit là que d'une situation passagère et l'émission de substances radioactives a apparemment cessé depuis assez longtemps, suffisamment longtemps pour que ce panache se dissipe et soit quelque part dans la direction du vent.

Thornburg : Monsieur Collins, votre agent du centre d'Exploitation avait-il de bonnes raisons de donner l'ordre d'évacuer la population à 9h15 du matin et de le recommander, ou tout ceci n'est-il le fruit que d'informations erronées? Il est vraiment très important que nous le sachions.

Hendrie : Je peux retourner vérifier, Monsieur le Gouverneur, mais je ne peux pas vous répondre pour l'instant. Je ne sais pas.

Thornburg : Oui. Nous ne vous demandons pas de porter un jugement.

Hendrie : Oui, je ne sais pas.

Thornburg : D'accord. Cela nous serait d'un grand secours, car si nous recevons d'autres recommandations de ce genre, il nous faut vraiment savoir sur quoi elle sont fondées. Sait-on l'heure exacte de l'émission de gaz?

Hendrie : Je doute que nous ayons beaucoup de précisions. Cela a dû se passer ici vers 6h40 ce matin. Il y a eu une série de onze ouvertures de soupapes de sûreté et un relâchement par le système de ventilation; au total, tout ceci a constitué les dégagements qui se sont produits. Je pense qu'ils sont censés avoir pris fin depuis quelque chose comme une demi-heure, une heure.

Thornburg : Donc, à partir de 6h40, jusqu'à?

Hendrie : Peut-être 8h30 ou quelque chose de ce genre.

Thornburg : Avons-nous l'assurance qu'il n'y aura plus du tout d'émissions radioactives?

Hendrie : Non, et c'est là un point particulièrement important dont je voudrais vous parler. Pour autant que je puisse en juger à partir du type d'informations qui m'arrivent de la centrale, il n'est pas établi clairement qu'on ne puisse pas se retrouver dans la même situation. Je pense que la situation ne se représentera pas sans que nous le sachions tous à l'avance et soyons prêts à imaginer ce qu'il pourrait y avoir à faire. Mais à mon avis, il n'est pas du tout exclu que cela se reproduise.

Thornburg : Mais vous êtes toujours d'avis qu'il n'est ni indispensable, ni préférable, de donner un ordre d'évacuation préventive, dans la seule hypothèse d'avoir de nouvelles bouffées?

Hendrie : Je crois qu'il serait tout aussi judicieux d'attendre de savoir s'il va falloir procéder à une sorte de transfert d'eau, et s'il peut se produire des dégagements. Et alors, à ce moment-là, se mettre à faire évacuer par précaution.

Bradford : Autre façon de s'exprimer pour le rassurer

Thornburg : Je pense que cela devrait suffire pour l'instant. Un instant, S'il vous plaît.

Voix dans le bureau du Gouverneur : Avez-vous des relevés hors site qui confirmeraient votre évaluation de dose maximale hors site à 120 mrem/h?

Hendrie : Non. Tout ce que nous avons, c'est simplement ce relevé qui nous a été rapporté de l'appareil qui survole la centrale, probablement pris dans le panache à environ 120-180 m, au moment du dégagement; et enfin un calcul fondé sur les données météorologiques.

Voix : Dernier point, si vous pouviez vérifier la question de cette recommandation qui nous a été faite à 9h15; ce sera sans doute une source de problèmes pour nous. Et si cela ne vous dérangeait pas, de bien vouloir téléphoner au Gouverneur dès que possible; nous vous en serions très obligés.

Hendrie : C'est d'accord.

(Fin de la conversation téléphonique entre Hendrie et Thornburg)

Gilinsky : Où en sommes-nous de la coordination du personnel de la centrale?

Kennedy : J'ai l'impression que la meilleure façon d'y parvenir, c'est d'appeler le Président (de la Compagnie d'Electricité) et de dire que c'est ce qu'il nous faut faire. Je crois qu'il faut donner le mot d'ordre - vous savez, parler au chef de la centrale, vous avez raison, c'est un type plutôt occupé. Mais si son chef décrète qu'il doit en être ainsi, il en sera ainsi.

Hendrie : D'ailleurs, je ne crois pas que nous soyons en mesure d'établir une liaison directe avec le site, car c'est justement ce à quoi nous nous évertuons en vain depuis au moins 24 heures.

(conversation téléphonique entre la Commission et Gossick).

Hendrie : Lee, j'ai parlé au Gouverneur; nous n'allons pas donner l'ordre d'évacuer pour le moment. Nous lui avons suggéré de recommander aux gens de rester chez eux dans la demi-heure environ qui vient, jusqu'à ce que les informations s'améliorent un peu. Le Gouverneur a de toute façon un rapport de ses délégués du corps médical indiquant une dose maximale hors site de 14 mrem/h; il est donc fort inquiet de l'absence de liaison pour essayer de comparer ses chiffres avec les nôtres. Autre point qui l'intéresse ou l'inquiète, c'est notre recommandation de procéder à une évacuation à 9h15?

Gossick : Eh bien, je crois que cette décision émane de notre bureau d'Etat - l'Office of State Programs (Bureau des Programmes d'Etat) a recommandé (inaudible) et si je comprends bien, de façon continue

Hendrie : Oui, et tâchez de pouvoir nommer quelques-unes de ces personnes et demander pourquoi mes informations me parvenaient par l'intermédiaire de quelqu'un qui était en rapport avec eux; évidemment, je ne savais pas et ne pouvais pas leur dire.

Gossick : Avez-vous le nom de la Personne qui lui fournit des informations?

Ahearne : C'est Tom Jarowsky, et il est en conversation avec Galinna.

Hendrie : A-t-on un nommé Galinna là-bas?

Voix : Oui.

Gossick : O.K. Jarowsky est l'envoyé de l'Etat fédéral?

Hendrie : D'accord, il leur serait utile de s'informer mutuellement de sorte que nous aurons des chiffres comparables. Et, vu ce que nous savions, nous aurions quand même recommandé d'évacuer à 9h15?

Gossick : Eh, bien, on a beaucoup parlementé ces dix dernières minutes à ce sujet, nous ne savons pas si le même scénario ne va pas se représenter, ni quand.

Hendrie : Voyons, sur la base des renseignements obtenus par mesures aériennes - des relevés dans le panache, la radioactivité devant bien baisser au moment où il touchera le sol - vous auriez persisté à recommander d'évacuer, vous pensez?

Bradford : ... Difficile de savoir si la source était fermée

Hendrie : Oui, et saviez-vous si la source était fermée à ce moment là, ou non? Sait-on quand la source a été fermée et à quel moment on a su qu'elle l'était?

Denton : Cela a commencé à environ 8 heures et a duré pendant environ une heure ou une heure et demie. Nous avons bien appris par les gars de l'ARMS qu'ils trouvaient en moyenne quelque chose de l'ordre de 1 rem/h à environ 180 m au-dessus de la centrale. A ce moment-là, cependant, la camionnette d'instruments et certains de nos correspondants relevaient des mesures tournant autour de 25 mrem/h.

Hendrie : N'y-a-t'il pas moyen d'opérer une décharge à l'intérieur même de l'enceinte? Et pour quelle raison y-a-t'il lieu de faire une décharge?

Denton : Il faut maintenir le niveau du pressuriseur et continuer de faire fonctionner les pompes du circuit primaire (inaudible) laisser l'eau s'écouler au dehors

Ahearne : Harold, vu la façon dont ça se passe à l'instant précis, à combien évaluez-vous la probabilité pour que des dégagements se reproduisent?

Denton : On m'a dit peut-être d'ici trois heures.

Bradford : Pas si l'incident va se reproduire, mais quand?

Ahearne : Estimez-vous qu'il leur faudra probablement procéder à des dégagements?

Denton : Eh bien, on essaye de trouver des moyens de trafiquer un système pour mettre ce qui se trouve dans ces réservoirs : [du CCV] dans une cuve de la tranche 1, pour pouvoir, en quelque sorte, purger davantage ici.

Ahearne : N'y-a-t'il qu'une seule petite canalisation entre cuves des tranches 2 et 1?

Denton : Je ne sais pas. Je dirais trois heures ferme, et peut-être disent-ils cela pour gagner du temps. Le débit de décharge, pour l'instant, c'est ce que je comprends, à l'amont (inaudible) va continuer à (inaudible) Si donc nous pouvions trouver un moyen d'évacuer et l'eau et les gaz et qu'ils retournent à (l'intérieur de l'enceinte)

Hendrie : Bon, attachez-vous à cette tâche. Si vous arrivez à joindre Vollmer, je vais essayer de joindre le responsable principal de la Met Ed (Metropolitan Edison). Il faut que nous sachions à quel moment il va falloir opérer un de ces transferts, et que nous le sachions à l'avance pour en informer les autres. Je pense que nous aimerions le savoir suffisamment à l'avance de façon à pouvoir en faire part au Gouverneur et recommander des mesures de protection pour une évacuation préventive etc. dans la direction où le vent souffle et cela sur une certaine distance. Ce qui veut dire, je suppose, qu'il nous faudrait une heure ou plus de préavis, si possible. Tout préavis que nous puissions avoir, mais ce sera peut-être difficile.

Gossick : Le relevé de 10 h 25, pris à environ 1,5 km au sud-est de la centrale, est de 3 mrem/h. La vitesse du vent est de zéro à la salle de commande pour le moment. Je pense que nous pourrions continuer à discuter de ce genre de problème, et je crois que ce dont nous devons discuter avec les autres là-bas, c'est l'opportunité ou la possibilité de vidanger et passer à un autre mode pour purger cette chose dans de meilleures conditions.

(conversation téléphonique entre la Commission et ...)

Voix au téléphone : Il y a quelques minutes, nous n'avions encore remarqué aucune modification dans le dispositif de surveillance de la ventilation par rapport à ce qui était indiqué avant de commencer le changement ou le transfert de gaz radioactif (inaudible)- Bon, autre point (inaudible) nous sommes entrés en rapport avec le personnel de la centrale les membres de la NRC ont demandé à Babcock et Wilcox pourquoi Harrisburg serait évacué si un autre dégagement se produisait, et je ne sais pas si c'est vrai ou non, mais je ne crois pas que nous en soyons à ce point.

Hendrie : Vous m'apprenez quelque chose.

Voix au téléphone : Voulez-vous rester en ligne pendant que nous allons voir

Hendrie : Bob, pendant que je vous ai au bout du fil

(manifestement une autre conversation téléphonique entre le Président et Robert Wallace)

Hendrie : Je viens de parler au Gouverneur, il y a quelques minutes, et lui ai recommandé, puisqu'on ne sait toujours pas si les émissions radioactives vont se poursuivre, si des explosions sont possibles, etc. d'évacuer par précaution les enfants d'âge préscolaire et les femmes enceintes, etc. ce qui pourrait être utile sur, ah, disons, 8 km, à partir de la centrale. Et je crois qu'ils vont probablement passer aux actes. Ils avaient déjà demandé aux gens de la région de rester chez eux ce matin et arrivaient à un point où ils leur a fallu modifier l'instruction et donner le choix, entre sortir et rester à l'intérieur. J'ai recommandé qu'ils fassent déplacer les enfants et les femmes enceintes et que les autres restent dans leur maison. Donc vous êtes au courant. Vous n'avez rien à faire en la matière, mais

Wallace : O.K. nous essayerons de remettre ça dans quelques minutes.

(conversation téléphonique entre Denton et les Membres de la Commission).

Denton : A regarder la quantité de renseignements quand vous vous éloignez de la centrale de 1,5 km environ, les chiffres sont très bas; le rapport de la vitesse du vent y indique une dispersion verticale mais non horizontale.

Ahearne : Pouvez-vous me répéter quelle était la mesure relevée il y a une demi-heure?

Denton : 450 mrem/h à 180 m au-dessus de la centrale, selon les mesures de l'ARMS (Aerial Radiological Measurement Surveys : Etudes des Mesures Radiologiques aériennes). On trouve aussi des chiffres à l'autre bout de l'île; ce doit être quelque chose comme 14 mrem/h, et sur la terre ferme au sud de l'île, 9 mrem/h, et puis cet autre chiffre qui vient de nous parvenir 1 à 3 mrem/h.

Gossick : Dites aux moyens d'information qu'il y a eu une émission incontrôlée de matières radioactives tôt dans la matinée. La persistance de ces émissions semble avoir été arrêtée. Le Président a parlé au Gouverneur et lui a recommandé de donner l'ordre à la population de rester à l'intérieur des maisons pour le moment.

Ahearne : Sur une distance d'environ 8 km.

Gossick : Est-ce juste, Monsieur le Président?

Kennedy : C'est juste.

Ahearne : Monsieur le Président n'est pas là, mais c'est juste. Les deux d'entre nous ici présents disent que c'est juste.

Gossick : Très bien, il y a eu une émission incontrôlée de matières radioactives tôt aujourd'hui, mais nous ne sommes pas certains de la durée. Il nous semble que cela a cessé.

Kennedy : Ne sait-on pas si on y a mis fin?

Fouchard : Mr Herbuin, Vice-Président de la Sécurité (Metropolitan Edison) nous informe que cela a cessé. Le Président Hendrie a parlé au Gouverneur et lui a recommandé de conseiller aux gens de rester chez eux, ce sur une distance d'environ 8 km pour le moment.

Kennedy : Joe?

Fouchard : Oui, Monsieur.

Kennedy : Voulez-vous que le Gouverneur ait connaissance de nos décisions avant que nous ne les annoncions?

Fouchard : (inaudible)

Kennedy : Vous feriez mieux de savoir si le Gouverneur veut que nous disions que nous l'avons conseillé dans cette voie.

(voix inaudibles)

Ahearne : Joe, vous êtes en rapport avec l'attaché de presse, n'est ce pas?

Fouchard : Si je peux disposer de la ligne oui. Mais

Ahearne : Ce qui nous inquiète, c'est que nous venons de conseiller maintenant au Gouverneur ce que vous disiez. Auparavant, Collins (Harold Collins, Office of State Programms) a conseillé au bureau du Gouverneur de faire évacuer et il n'en a pas pipé mot. Nous ne lui disons pas dans notre communiqué de presse que nous avons bel et bien conseillé aux gens de rester chez eux. Si nous rendons officiels un de nos quelconques conseils, il faudrait nous assurer que le Gouverneur en est informé.

Fouchard : Attendez, je vais voir si je peux joindre le Bureau du Gouverneur.

(Il est maintenant 10 h 40 du matin).

Denton : Il y a d'autres points dont il faut que je vous parle. Selon les prévisions, la vitesse du vent devrait remonter. Direction nord, nord-est; il n'y a pas tellement d'habitants dans cette direction, sur les deux premiers kilomètres, il n'y en a qu'une centaine, mais nous finirons peut-être par pouvoir identifier les doses potentielles à cet endroit et obtenir une évaluation plus juste de (inaudible) on nous donne les prévisions météorologiques, et nous avons des populations dans ce secteur, et si je pouvais avoir un chiffre que nous puissions mettre en rapport avec la réalité, nous aurions une impression plus juste de ce que (inaudible).

Edson Case (Nuclear Reactor Regulation Office : Réglementation des Réacteur Nucléaires) : Le quartier général de la Société Herbuin, c'est A.J. Herbuin le Président, voulez-vous le numéro 1 (inaudible), il n'est pas sur le site, son numéro est le 215, 929-3601. Aucun d'entre eux ne se trouve dans les parages. Le Président de la société est W.M. Creitz et il se trouve au numéro que je vous ai donné.

Kennedy : Harold?

Case : Ed Case à l'appareil. Je voudrais simplement vous faire part de mon opinion; vous devriez fonder vos considération sur le fait que les renseignements que vous aurez dans l'heure qui vient risquent d'être aussi sommaires ou encore plus réduits que la dernière fois. Les responsables de la centrale sont dans une situation délicate, ne sachant pas vraiment ce qu'ils font et je n'ai pas le sentiment qu'ils le sauront davantage le prochain

Kennedy : Ed, Harold dit que le panache est au-dessus de la centrale, quasi immobile, donc, avec peu de dispersion horizontale, seulement verticale pour l'instant.

Case : Oui, pour l'instant.

Kennedy : Si cette situation dure encore quelques heures, quel sera alors l'effet si le vent reprend et que le panache commence à se déplacer?

Case : Il faudra que je demande la dose - comme une source ponctuelle diffuse s'étale davantage si le vent reprend

Gilinsky : Attendez que je comprenne, avons-nous en permanence des mesures prises par ces hélicoptères ou

Case : Non, nous ne (inaudible) - Ne quittez pas, une seconde.

La réponse que j'ai est qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter pour ces émissions radioactives.

Gilinsky : Parce que c'est terminé?

Case : Oui.

Gilinsky : Pourquoi ne peut-on obtenir de meilleurs renseignements de cet hélicoptères. Est-il en vol ou non?

Case : Je ne sais pas (inaudible). On les a par radiotéléphone.

Gilinsky : Et ils les donnent à qui, à nos correspondants au sol?

Une voix : Oui, à notre camionnette.

Gilinsky : Et nous sommes en contact avec notre camionnette?

Voix : Oui, nous sommes en contact avec eux.

Gilinsky : Alors, pourquoi ne peut-on obtenir directement des relevés au fur et à mesure qu'ils circulent?

Voix : Nous ne sommes pas en liaison directe avec l'avion. Mais nous obtenons les renseignements de la camionnette. Nous les dégrossissons, les inscrivons sur un morceau de papier et nous nous les téléphonons.

Gilinsky : Bon, je crois que je vous demandais pourquoi Ed estime que nous n'allons pas recevoir ces informations (inaudible).

Case : (inaudible) perdu contact avec la salle de commande. C'est rompu, on ne les a plus.

Gilinsky : Il faut que je vous demande quel est l'état du réacteur, à propos?

Case : Le même qu'il y a une heure, j'imagine.

Gilinsky : Quel système de refroidissement ont-ils adopté?

Gossick : Pourriez-vous également dire au Président que nous envoyons un message à Herbuin pour qu'il l'appelle (inaudible), il est sorti faire le tour du site. Nous venons de recevoir un message à son intention lui demandant d'appeler le Président. Nous envoyons un messager à M. Herbuin, il est sans doute dans la salle de commande ou quelque chose comme cela, mais de toute façon, nous lui faisons porter le message pour qu'il appelle le Président Hendrie. Faites en part au Président. Il a peut-être du mal à le trouver. D'accord?

Gilinsky : Oui.

Gossick : Je pense que nous en sommes au point où les relevés nous sont renvoyés aussi exacts et aussi rapidement que possible. Cependant, ce dont nous ne sommes pas sûrs, j'imagine, en ce moment - la liaison avec la salle de commande est coupée - c'est si nous recevons des informations à jour aussi rapidement sur tout ce qui est fait et par quelles Personnes de la Compagnie d'Electricité et si nos agents sont attachés à bon nombre de ces activités.

Case : (inaudible) il y a une heure et demie, ou quelque chose comme ça, ils essayent de procéder à ce rafistolage et (inaudible) - Nous ne savons pas où ils en sont ni ce qu'ils ont fait.

Gilinsky : Pourriez-vous m'expliquer ainsi qu'aux autres pourquoi l'émission de matières radioactives s'est produite?

Case : Ils ont eu une fuite du fluide de refroidissement à l'une des pompes et il faut qu'ils réalimentent en eau le réacteur. Cette opération technique, si je comprends bien, implique que l'on évacue les gaz du système, ce par l'intermédiaire d'un système, en les faisant passer d'un réservoir de dégazage vers un autre réservoir qui se trouve plein.

Gilinsky : Evacuer les gaz de quelle eau?

Case : De l'eau du réfrigérant primaire.

Gilinsky : Je vois. Qui fuit quelque part?

Case : Oui, Donc, à moins que la situation ne s'améliore, vous allez cracher comme cela dans le système de refroidissement toutes les deux heures.

Gilinsky : Bon, et que se passera-t-il s'il n'y a pas de nouvelles

Case : Les purges se font d'elles-mêmes. Le réservoir atteint un niveau de pression excessif - c'est ce que je comprends - la soupape s'ouvre.

Kennedy : Par où se ferait la ventilation si le relâchement ne s'effectuait pas de lui-même?

Case : Je crois que c'est justement ce qui s'est passé il y a une heure.

Gilinsky : Dans quel état se trouve le coeur?

Case : Eh bien, il est à peu près comme hier. La température est environ de 280°, la pression remonte (inaudible).

Gilinsky : Est-ce qu'ils font encore fonctionner le générateur de vapeur?

Case : Oui. Nous avons diverses températures anormales pour les différents éléments combustibles. Elles baissent lentement, mais très, très lentement.

L'idée qui prévaut actuellement est que nous ne pouvons pas endurer cette situation très longtemps. Nous avons demandé (inaudible) de passer à un autre mode d'exploitation, et la discussion va porter sur le choix, ou bien utiliser le système RHR (circuit d'évacuation de la chaleur résiduelle), et nous ne sommes pas sûrs du résultat si nous optons pour cette solution du fait de la bulle de gaz qui pourrait s'en trouver affectée, ou bien utiliser directement le système de circuit de refroidissement de secours du coeur et ouvrir une soupape de décharge au sommet du pressuriseur et faire refroidir.

Kennedy : Et quel serait le résultat?

Case : Le problème, c'est que le coeur de votre réacteur est très endommagé et il va être soumis à de nombreuses forces hydrauliques.

Kennedy : Et vous ne savez pas ce qui va en résulter pour tous les autres éléments?

Case : Exactement.

Gilinsky : Pourquoi les forces sont-elles plus grandes si vous passez à un autre mode de refroidissement?

Case : Parce que vous ouvrez la soupape de décharge et que vous introduisez autant d'eau que possible là-dedans. Or, l'un des problèmes est de savoir dans quelle mesure vous pourriez commander ce mode de fonctionnement. Il n'est pas prévu pour être commandé; il est conçu pour fonctionner à plein débit. Le mode choisi pour le coeur n'est pas celui pour lequel il a été conçu.

Ahearne : Attendez une minute, Ed, Joe vient d'entrer. (S'adressant au Président Hendrie).

Hendrie : Ed, Harold est-il là?

Case : Il est dans les parages, Joe, voulez-vous que j'aille le chercher?

Hendrie : Oui, Ed, en attendant qu'il arrive - Allô

Case : Il arrive, une seconde.

Hendrie : Je pense que la communication va s'améliorer dans un instant. Nous sommes sur le point de joindre la Maison Blanche, on peut donc joindre tout le monde et parler à tout le monde. Harold?

Denton : J'écoute (Il est maintenant 11 h 03 du matin).

Hendrie : Ici, le Président, de nouveau. O.K. J'ai parlé au Président (Carter) et je crois que vous devriez vous rendre sur le site. Il va y envoyer immédiatement une sorte de système de communications qu'il emporte avec lui en voyage. Il déléguera quelqu'un par la même occasion et veut être en mesure de joindre directement le site dès qu'il décroche le téléphone, et de pouvoir parler à son correspondant sur place pour en obtenir les informations et recommandations sur la marche à suivre. Nous pourrons également faire une synthèse entre ici et l'opérateur de la Maison Blanche, et notre communication avec le site s'en trouvera peut-être améliorée.

(Puis une discussion eut lieu entre diverses personnes pour savoir qui se rendrait sur le site de Three Mile Island par hélicoptère ou par avion, et qui serait le plus apte à prendre les dispositions pour le transport).

(Début d'une autre conversation téléphonique entre la Commission et le Directeur de la Division des Systèmes de Sécurité, Roger Mattson, 12 h 40).

Hendrie : Roger!

Mattson : J'ai Ed (Case) sur une autre ligne. Allez-y.

Hendrie : Bon, vous pouvez me dire ce que c'est que ce transfert?

Mattson : D'accord. On est apparemment stabilisé pour le moment à une pression de 1000 PSI, un peu plus, 280° pour la température d'admission. Les thermocouples sont

Hendrie : Relève-t-on les mêmes mesures à la sortie du réacteur?

Mattson : Nous n'avons pas de mesures à la sortie du réacteur et ce, depuis deux jours. Tout ce que nous avons, ce sont les thermocouples au-dessus du coeur, nous en avons 52 moins deux qui sont hors échelles. Ceux-ci, j'étais en train de vous le dire, marchent très bien, mais après avoir oscillé ils semblent s'être stabilisés au cours des douze dernières heures et nous pouvons dire que tous les thermocouples dont on a relevé les mesures, soit 50 sur 52, sont, soit en train de baisser, soit stationnaires. L'un d'eux continuait à monter, il y a encore six heures environ, et a approché le point maximum d'enregistrement du système, puis il s'est brusquement remis à osciller. Ceci demeure l'assemblage le plus chaud dont nous ayons une mesure. Ceci montre que la température mesurée par le thermocouple - et nous avons tendance à leur faire crédit - est de 100° au-dessus de la désaturation.

Hendrie : Est-ce le relevé maximal?

Mattson : oui, c'est le maximum.

Hendrie : Qu'en est-il des deux autres hors mesure. Y-a-t'il eu

Mattson : La demande faite aux agents de la centrale d'essayer de prendre des relevés potentiométriques sur ces thermocouples, cette demande est restée en suspens pendant, je ne sais pas, quinze heures, et on n'en entend plus parler.

Hendrie : Ils semblent plutôt occupés.

Mattson : Il y a un problème, entre parenthèses, pour trouver trace de ces foutues mesures sur le tableau arrière, et ils ne les retrouvent pas. On trouve donc des gens occupés à autre chose et le travail n'est pas fait. C'est le seul assemblage, pour l'instant, qui ait dépassé le niveau de saturation. Il y en a eu quelques autres, mais ils sont redescendus. Il y en a eu peut-être cinq autres au cours des douze dernières heures, ils sont redescendus. Tous ces thermocouples, sauf un, semblent stables. Ils ne sont pas erratiques. Il y a quelques températures que nous pouvons expliquer en général; la périphérie du coeur est froide, à peu près à la même température que la température d'admission du réfrigérant. Il y a un de 10 degrés qui indique qu'ils sont refroidis. Il y a environ 57 assemblages, approximativement au centre du coeur, qui présentent des températures plus élevées, quelques-unes atteignant, oh, un de 150-160 degrés, toutes comprises pourtant dans les limites de la saturation. Deux assemblages sont juste au niveau de la température de saturation. Il y a donc probablement ébullition dans ces assemblages. D'autre part, Babcock et Wilcox et nous-mêmes, avons tous conclu il y a quelques heures - peu après minuit - que le coeur est largement endommagé, ce que corroborent les rejets qui nous sont indiqués sur des TID (document d'information technique) et peut-être pire, comme me le laissent entendre les gens de la radioprotection. A mon avis, le coeur est resté découvert longtemps. Nous avons des types de défaillances qui n'ont jamais été analysés. Il ne s'agit pas d'un Loca (accident par perte de réfrigérant) - plutôt une sorte - de gonflement de rupture, d'oxydation près du sommet de l'assemblage. Nous venons d'apprendre que l'après-midi du premier jour, quelque dix heures après le transitoire, il y a eu un pic de pression dans l'enceinte à 1,93 bar. Nous pensons que cela peut résulter d'une explosion d'hydrogène. Ils n'en ont jamais fait état ici jusqu'à ce matin, pour une raison que nous ignorons. Cela nous aurait mis sur la piste, il y a quelques heures, que les indications des thermocouples étaient justes et que nous avions un coeur en partie désassemblé. Tant qu'ils en resteront au même point que maintenant, ils montrent depuis vingt-quatre heures ou plus qu'ils peuvent contrôler ces températures, et ceci généralement dans le sens de la baisse. Il faut reconnaître que l'état du coeur est stable et tend à s'améliorer si l'on s'en tient au transfert de chaleur. Il faut cependant reconnaître aussi qu'il est encore dynamique. Des altérations continuent de s'y produire avec un système habituellement stable. Il s'y produit encore certains changements de débit entre les assemblages. O.K. Le problème est le suivant comment faire baisser la pression? La meilleure estimation faite par nos agents d'exploitation consiste en un calcul simple, leurs ingénieurs et nous-mêmes avons fait les mêmes calculs, Pl V1 égalent P2 V2. Vous prenez quelques pressions et volumes, puis calculez le volume de la bulle dans cette cuve avec une approximation de 30 %, en prenant deux données et c'est tout. C'est de l'ordre de 1000 cu.ft (28m3). La seule façon dont nous puissions expliquer ce phénomène est qu'il s'agit essentiellement d'hydrogène, et bien sûr, beaucoup d'hélium, l'hydrogène étant probablement fabriqué par décomposition radiolytique, ce qui serait infime et la seule façon d'expliquer la taille de cette bulle serait une quantité phénoménale de réaction avec l'eau. Ils n'arrivent pas à faire disparaître la bulle. Ils ont essayé de recycler, de pressuriser et de dépressuriser. Ils ont essayé la convection naturelle, il y a deux jours ils ont été en circulation forcée; ils ont évacué la vapeur du pressuriseur; ils ont évacué le liquide du pressuriseur; la bulle reste. Elle n'est sans doute pas explosive, mais c'est difficile à dire. Elle serait peut-être un peu explosive du fait de la décomposition radiolytique, mais nous pensons plutôt que cela provient d'une réaction eau-métal; parce qu'il y a un bon écoulement d'eau dans le coeur, et que c'est encore un coeur à circulation libre, même s'il y a des obstructions, il n'y a probablement pas maintenant de réaction eau-métal, sans doute du fait que le coeur est en situation dynamique.

Hendrie : Où se trouve la bulle à peu près?

Mattson : La bulle est dans la partie supérieure de la cuve. Le volume de cette partie est de 1128 cu.ft. (32 M3), pour autant que nous puissions le dire. L'évaluation du gaz contenu dans ce volume est de 1000 cu.ft. (28 M3), Sous toutes réserves. Et à 1000 PSI (69 bar). Si vous faites passer l'installation à 200 PSI (14 bar), alors

Hendrie : Oui, vous allez purger complètement et vider le coeur.

Mattson : Cette bulle sera alors de 5000 cu.ft. (140 m3). Le volume disponible dans la partie supérieure et les canes à sucre - C'est-à-dire les branches chaudes - est de l'ordre de 2000 cu.ft (56 m3) au total. Il me reste 3000 cu.ft. (84 m3) en trop de gaz incondensables. J'ai comme une course de chevaux. Je suis en partie haute (du réacteur), et si je fais baisser la pression en partie basse et dans le réfrigérant, la bulle arrive dans la branche froide, descend dans la partie inférieure, passe à travers le coeur, flashe et rejoint les gaz incondensables; j'ai un coeur partiellement rempli, ou peut-être même entièrement rempli de gaz incondensables. Ceux-ci essayeront alors de s'échapper du pressuriseur et le pressuriseur a une ouverture de 2in (5 cm). C'est tout ce que vous pouvez ouvrir. En outre, l'échauffement adiabatique est d'environ 31° F (16,1 °C) par seconde à ce niveau de décroissance. Nous avons tous les ingénieurs-système que l'on puisse trouver, non compris ceux qui sont dans l'hélicoptère, qui se torturent les méninges pour savoir comment on peut bien faire sortir les gaz incondensables de là-dedans; est-ce qu'on gagne la partie ou est-ce qu'on la perd? Et si vous avez de la chance et qu'il n'y a pas beaucoup de si vous avez surestimé la quantité de gaz incondensables, vous avez peut-être des chances de gagner. Si vous n'avez pas de chance et que l'on vous ait indiqué la quantité réelle, vous risquez de perdre.

TRANSCRIPTION H. 53 DES ENTRETIENS DES MEMBRES
DE LA N.R.C. A THREE MILE ISLAND (U.S.A.)
17/09/1979