Libération, 28/8/2008: 

Incidents en chaîne dans les centrales espagnoles

Outre-Pyrénées, la sortie du nucléaire prévue en 2028 n'incite pas à investir dans la sécurité. [???]

«Il faut mettre un terme au manque de sécurité dans les centrales nucléaires espagnoles.» Le Conseil de sûreté nucléaire (CSN) a perdu patience. Devant la réitération d'incidents dans les centrales (une trentaine depuis le début d'année), les exploitants des huit réacteurs espagnols ont été sévèrement réprimandés. Et convoqués, début septembre, à une réunion extraordinaire. «Nous allons faire un inventaire complet et approfondi des incidents et des risques qui persistent. Nous seront intraitables», a commenté le CSN. En outre, les quatre groupes électriques, propriétaires des centrales (Iberdrola, Union Fenosa, Endesa et HC Energia), sont sommés d'investir massivement dans la prévention : le CSN est persuadé que la majorité des incidents déclarés auraient pu être évités si les «dispositifs humains et matériels» avaient été plus «conséquents».

Incendie. La dernière frayeur en date remonte au week-end dernier. Un incendie s'est déclaré dans la salle des générateurs de la centrale de Vandellos II, au sud de la Catalogne. L'incident a heureusement eu lieu hors du réacteur (arrêté jusqu'à nouvel ordre), sans avoir de conséquence radiologique. Endesa et Iberdrola qui contrôlent le consortium qui gère la centrale assurent que l'incendie ayant endommagé un générateur est dû à la vibration excessive dans l'alternateur. Soupçonneux, le CSN a envoyé trois inspecteurs sur place afin de déterminer si la cause de l'incident est liée à des failles techniques connues de ses services depuis des mois. Les écologistes, Greenpeace en tête, affirment que l'incendie est dû à une fuite d'hydrogène qui a explosé au contact de l'air, ce qui augmenterait la gravité de l'incident.

Les revers de ce type se multiplient. La semaine dernière, le réacteur de la centrale de Garoña, près de Burgos, a aussi dû être arrêté. Plus grave : la centrale de Cofrentes, dans la région de Valence, totalise dix incidents cette année. Et en avril, le CSN avait annoncé qu'une fuite radioactive s'était produite dans la centrale d'Asco I (Catalogne). La presse indique que les propriétaires d'Asco I ont caché cette fuite au CSN pendant six mois. Fou de rage face à cette «opacité irresponsable», l'autorité recommande au gouvernement d'infliger aux gérants du réacteur une amende record pouvant aller jusqu'à 22,5 millions d'euros.

Perspective. Ce débat sur la sécurité nucléaire survient dans une conjoncture difficile. Le gouvernement Zapatero est déterminé à abandonner progressivement l'option nucléaire - qui produit 18 % de l'électricité consommée en Espagne. Ainsi, en 2028, si le plan est maintenu, le dernier réacteur espagnol aura cessé de fonctionner. Comme le notent divers experts, une telle perspective n'est pas faite pour encourager les exploitants à investir pour le renforcement de la sécurité dans les centrales. [Sauf que les accidents et incidents graves n'attendent pas la sortie progressive du nucléaire pour avoir lieu !!!]

 


RIA-Novosti, 7/5/2008: 

Espagne: fuite radioactive dans une usine de combustible de Salamanque (radio)

Une fuite de substances radioactives s'est produite dans une usine de combustible de la compagnie Enusa dans le village de Jusbado (Salamanque), annonce mercredi la Radio nationale espagnole (RNE), se référant au Conseil espagnol de sécurité nucléaire (CSN). "La fuite s'est produite lors d'une vérification de routine de l'état des machines dans l'atelier de production du combustible destiné aux centrales nucléaires", lit-on dans le communiqué. Selon le CSN, "l'incident est dû à une erreur de l'opérateur, qui s'est mis à démonter un appareil, sans l'avoir déconnecté au préalable". "La fuite de particules radioactives s'est produite après que l'opérateur a ôté le couvercle de la machine. Lui et six de ses collègues ont été évacués en urgence afin de subir des analyses médicales", annonce RNE. La radio souligne que "la fuite n'a pas eu d'influence sur la santé des travailleurs, qui portaient des masques respiratoires et que la radiation ne s'est pas répandue au-delà de l'atelier". Le travail de l'usine a été suspendu pendant deux heures, et une opération de désactivation a été organisée. En Espagne, la dernière fuite de substances nucléaires avait eu lieu dans la centrale nucléaire d'Asco (Tarragone) en novembre 2007.

 


Espagne: une centrale nucléaire a minimisé l'importance d'une fuite radioactive

15/4/2008 - Une centrale nucléaire de la province espagnole de Tarragone (nord-est), appartenant au groupe Endesa, a minimisé l'importance d'une fuite radioactive et s'expose à des sanctions, a-t-on appris mardi auprès du Conseil de sécurité nucléaire (CSN) espagnol. Le CSN indique dans un communiqué qu'il pourrait sanctionner le groupe d'électricité Endesa, propriétaire de la centrale Asco I, pour avoir fourni des "informations incomplètes" et erronées à propos de cette fuite radioactive intervenue le 26 novembre lors d'une opération de maintenance. Lors d'une visite de contrôle, entre le 5 et le 7 avril, visant à faire la lumière sur cet incident révélé le 4 avril par la centrale, le CSN a constaté que la fuite avait été significativement plus importante que ce qu'Endesa lui avait communiqué. L'importance de la fuite "est cent fois supérieure à ce que la centrale a déclaré la semaine dernière", a déclaré au quotidien El Pais le sous-directeur de la protection radiologique de cet organisme, Manuel Rodriguez. "L'impact radiologique qui résulte de ces nouveaux renseignements reste presque insignifiant pour la population voisine de la centrale et en-deçà des limites légales pour le personnel de la centrale", relativise toutefois le CSN dans son communiqué. A la suite de son inspection, l'organisme de contrôle espagnol a décidé de reclasser l'incident du niveau 1 au niveau 2 de l'échelle internationale des incidents nucléaires, qui en compte sept au total. Endesa va effectuer des mesures de radioactivité auprès des personnes passées par ou à proximité de la centrale depuis l'incident, soit entre 700 et 800 personnes, employés, visiteurs et riverains. Le 4 avril, 44 élèves ont notamment visité la centrale et le directeur de leur établissement a exigé qu'ils soient soumis à des examens. Selon le CSN, Endesa a déjà réalisé des mesures auprès de 579 personnes sans rencontrer aucune trace d'assimilation de matériel radioactif. Le CSN a indiqué qu'il allait lui-même entamer dès maintenant une campagne indépendante de surveillance radiologique. "Il s'agit d'un des quatre incidents les plus graves de l'histoire nucléaire espagnole", selon le quotidien El Pais. Greenpeace avait révélé en premier l'existence de la fuite radioactive. La centrale nucléaire ASCO I l'avait détectée le 14 mars mais n'en avait informé le CSN que le 4 avril.

 


2/8/2006:

Amende record de 1,6 million d'euros pour une centrale nucléaire espagnole

Le gouvernement espagnol a annoncé mercredi avoir infligé une amende record de 1,6 million d'euros à une centrale nucléaire qui avait connu en 2004 une avarie de son système de refroidissement.
Le ministère espagnol de l'Industrie a indiqué dans un communiqué avoir imposé trois amendes d'un montant total de 1,6 million d'euros à la centrale nucléaire Vandellos II, exploitée depuis 1987 par les compagnies d'électricité espagnoles Endesa (72%) et Iberdrola (28%).
Il souligne que cette sanction, prise sur recommandation du Conseil de la sécurité nucléaire (CSN), "est la plus importante jamais infligée en Espagne à une installation de ce type", et se justifie par le "caractère prioritaire de la sécurité des centrales nucléaires".
La centrale Vandellos II, située dans la région de Tarragone (nord-est), avait subi le 25 août 2004 un incident sérieux, avec la rupture d'un joint de tuberie de son système de refroidissement liée à un problème de corrosion, qui avait été "sans conséquences pour ses employés et l'environnement".
Ses responsables sont triplement sanctionnés pour leur mauvaise maintenance à l'origine de l'accident, pour ne pas avoir effectué les réparations exigées par le CSN et pour avoir omis de signaler à ce dernier les premiers problèmes de corrosion de l'installation, qui remontaient à 1993.

 

Première en Espagne: une centrale nucléaire a été fermée

MADRID - Pour la première fois en Espagne, une centrale nucléaire a définitivement arrêté sa production dimanche, après 38 ans de fonctionnement, sur décision politique. Il s'agit du plus ancien des sept réacteurs nucléaires du pays.


Carte de 1993 extraite de l'Atlas du nucléaire civil et militaire de Gérard Chaliand et Michel Jan.

1 mai 2006 - Cet arrêt, salué comme une "victoire" par les écologistes, intervient alors que, facture pétrolière aidant, une nette inflexion en faveur de l'option nucléaire est récemment apparue dans le discours des socialistes espagnols au pouvoir.
L'arrêt définitif de la centrale José Cabrera, à Almocinad de Zorita, près de Guadalajara (centre), était prévu dimanche soir.
Il fait suite à une décision politique et aux critiques des écologistes qui la jugeaient peu sûre. Son propriétaire, le groupe Union Fenosa, assure qu'elle aurait pu boucler sans problème son cycle de 40 ans de production et fermer en 2008 comme initialement prévu.
Greenpeace a saisi l'occasion pour exiger du chef du gouvernement socialiste, José Luis Rodriguez Zapatero, qu'il tienne sa promesse électorale d'annoncer un calendrier de fermeture progressive de toute la filière nucléaire espagnole.


Extrait de l'Atlas du nucléaire civil et militaire de Gérard Chaliand et Michel Jan, 1993.

"Il existe actuellement beaucoup trop d'ambigüités sur ce thème au sein du gouvernement", a déclaré le directeur des campagnes de Greenpeace en Espagne, Mario Rodriguez à l'agence Europa Press.
La gauche espagnole, animée d'un fort courant antinucléaire et anti-Otan au début des année 1980, s'est ralliée au pragmatisme défendu par l'ancien gouvernement de Felipe Gonzalez.
L'avenir de l'énergie nucléaire fait l'objet d'un débat entre pouvoirs publics, écologistes et industriels, à l'initiative du ministère de l'Industrie qui organise des séances de travail mensuelles en vue de présenter des conclusions lors du prochain débat sur l'Etat de la nation.
Les centrales nucléaires espagnoles génèrent actuellement 22,88% de la production d'électricité. Union Fenosa prévoit de remplacer la centrale José Cabrera par une centrale électrique classique à cycle combiné, dotée de deux groupes de 400 mégawatts et cinq fois plus puissante que la précédente. (ATS)

 

Vandellos II : production ou sécurité ?

27/5/2005 - Les techniciens du Conseil de la sécurité nucléaire (CSN) en Espagne ont expliqué aux Cortès à Madrid leur version de l'incident survenu à Vandellos II, versant de nouvelles contradictions à la polémique qui ébranle l'organisme public.

Les huit experts responsables du rapport sur l'incident du mois d'août sur la centrale de Vandellos II, le plus grave depuis 1992, ont expliqué que le CSN avait depuis 1991 exempté l'installation catalane d'essais de contrôle de la canalisation dont la rupture en 2004 est à l'origine de l'incident. La présidente du CSN, María-Teresa Estevan Bolea avait affirmé, il y a un mois, devant les mêmes députés ne pas savoir pourquoi ces essais n'avait pas été effectuées dans la centrale et soutenu que ces vérifications auraient évité l'accident.

Mais la contradiction vient de l'intérieur, la directrice technique à la sécurité nucléaire du conseil, Isabel Medallo, considérant ledit examen «n'est pas le moyen le plus adéquate pour détecter ce genre de problème. Il aurait même pu ne pas servir à détecter la corrosion de la conduite», a-t-elle déclaré au sortir de sa comparution, lundi. I.Medallo estime également que les services de Vandellos II «ont préféré la production à la sécurité», le redémarrage du réacteur en août «s'est effectué dans des conditions de sécurité qui n'étaient pas les plus adéquates», a-t-elle insisté.

Un des experts a y compris déclaré aux groupes de l'Assemblé que l'incident du 25 août pourrait être reclassé de niveau 3, ce qui ne s'est plus vu depuis 1989, lors d'un incident sur Vandellos I. Les députés des Cortès sont sortis sceptiques de l'audience des experts qui contredisent leur présidente, le groupe socialiste réitérant son intention de réformer le CSN.

 

 

La production d'un tiers des centrales nucléaires en Espagne paralysée

18/3/2005 - La production d'un tiers des neuf centrales nucléaires en fonctionnement en Espagne se trouve paralysée à la suite de différentes pannes, a-t-on appris vendredi auprès du Conseil supérieur du Nucléaire (CSN). Deux des réacteurs de la centrale d'Asco I (Tarragone, nord-est) ont dûs être arrêtés à la suite d'une panne dans les transformateurs électriques de sortie qui ne devrait pas être réparée avant deux semaines. Une fuite d'huile s'est produite, sans provoquer de risques pour la population, selon le CSN. La centrale de Vandellos, située également dans la région de Catalogne, a suspendu ses activités pour recharger son combustible après la détection d'un problème dans le système d'eau de "services essentiels" de la centrale. Elle devrait reprendre ses activités dans un peu plus d'un mois. Enfin, la production de la centrale de Garona, près de Burgos (centre-nord de l'Espagne) a été arrêtée pour une recharge de combustible prévue depuis deux mois, mais au cours d'une inspection, une anomalie dans le système de ventilation a été repérée. Le responsable du nucléaire de l'organisation écologiste Greenpeace, Carlos Bravo, a dénoncé le "mauvais fonctionnement" des centrales nucléaires catalanes et "le manque de sécurité de la technologie nucléaire espagnole, intrinséquement dangereuse". Il existe neuf centrales nucléaires en fonctionnement en Espagne, peu en comparaison à d'autres pays européens comme la France, le Royaume-Uni ou même l'Allemagne.

 




Wise Amsterdam n°320, 3/11/89:
(Référence 320.2207, Wise Tarragone)

Le feu à Vandellos 1

Les maires de quatre municipalités proches de Vandellos (Mont Roig, Tivissa, Pradip et l'Ametlla) demandent l'arrêt des réacteurs 1 et 2 jusqu'à ce que les niveaux de sécurité soient conformes aux directives du Conseil de Sûreté nucléaire (en 1988 il y a eu trois incendies à Vandellos 2 en l'espace de cinq mois, voir WISE 305.3048).

D'après un article de "El Pais" du 25 octobre, l'AIEA a dit que l'accident de Vandellos 1 était l'incident le plus grave dans une installation nucléaire depuis Tchernobyl. Mais l'AIEA démentirait.

Les causes de l'accident du 19 octobre proviennent de l'arrêt de brusque (pour des raisons encore inconnues) d'une turbine. Le poids de la machine (cinq tonnes) a réchauffé l'huile de lubrification, qui s'est décomposée et a dégagé de l'hydrogène qui à son tour a explosé. La turbine a alors pris feu.

Comme la centrale n'a pas d'équipement contre l'incendie, elle a fait appel à des pompiers des environs (jusqu'à ceux de Bella Terra, située à 100 km). L'incendie a duré quatre heures et demi et sérieusement affecté deux des quatres liaisons entre la turbine et le système de réfroidissement de la centrale.

Le Conseil de Sûreté nationale et le gouvernement ont d'abord déclaré qu'il n'y avait pas eu de fuite radioactive, mais les autorités ont contredit par la suite cette affirmation en disant qu'il n'y avait pas de niveau de radiation significatif et que les populations des environs ne couraient aucun risque. WISE Tarragone a publiquement demandé aux autorités de Catalogne de rendre publiques les mesures qu'elles fait faire près de la centrale.

Les Commissions ouvrières, syndicat auquel sont rattachées des organisations de pompiers, dit que les pompiers ont risqué leur vie parce qu'ils ne disposaient pas des équipements prévus par le plan d'urgence nucléaire et qu'ils n'avaient été, prévenus des risques de radioactivité. Ils ont ainsi commis des erreurs : ils ont d'abord utilisé de l'eau parce qu'ils ne connaissaient pas la nature du sinistre (ce qui a provoqué des courts-circuits supplémentaires dans le système électrique). La fumée importante qui s'est dégagée au-dessus du site serait venue des isolateurs électriques (d'après Carlos Fernandes Palomero).

Les pompiers ont ensuite été emmenés à Vandellos 2, où on a vérifié leur niveau de contamination, les analyses se sont révélées négatives, mais Ils ont demandé, lors une conférence de presse, qu'il soit procédé à un nouvel examen par des médecins indépendants de l'industrie nucléaire.

Vandellos 1 est arrêtée, sans doute pour six mois au moins. L'Hifrensa, consortium franco-espagnol qui exploite la centrale, envisage de refaire démarrer ce réacteur avec une seule turbine, à 50% de ses capacités. Le réacteur de Chinon A 3, de même nature que Vandellos et qui connaît des problèmes de corrosion analogue, doit être démantelé. Une de ses turbines pourrait être transportée à Vandellos.

Le prototype de Vandellos 1, la centrale de St-Laurent-des-Eaux a également connu de nombreux incidents. Le 13 mars il a été le théâtre de l'accident connu le plus grave dans une installation française. L'unité 1 de St. Laurent doit être démantelée en avril 1990, et l'unité 2 en 1992.

Vandellos 1 a une longue histoire de surchauffe et de corrosions (de son système de refroidissement, justement). Le réacteur n'était qu'à 80-85 % de sa capacité quand l'accident s'est produit. Après l'accident de Tchernobyl, le Conseil de Sûreté national a ordonné cinq modifications, mais deux seulement avaient été menées à bien. L'une de celles qui n'ont pas été accomplies est directement liée à l'accident : le CSN avait demandé que les quatre alimentations du système de refroidissement soient rendues plus indépendantes les unes des autres. Une cinquième liaison aurait été rendue impossible par suite de son coût. Si le système de refroidissement avait cessé de fonctionner, les 3000 tonnes de graphite auraient pris feu.

Le CSN a admis que cet accident était le pire jamais survenu dans une centrale espagnole, mais le public n'a pas été depuis tenu au courant des investigations sur ses causes. D'après WISE Tarragone, l'incendie aurait pu être évité parce que le même type d'accident était déjà arrivé à l'un des deux réacteurs d'Asco (autre centrale nucléaire espagnole). Les opérateurs de Vandellos n'en avaient pas tiré d'enseignement. Toujours d'après WISE Tarragone, le système de défense incendie de Vandellos 1 ne répondrait pas aux normes de l 'AIEA.

Des organisations antinucléaires de la région ont appelé à une manifestation le vendredi 27 octobre devant le siège de l'Hifrensa à Barcelone. Une manifestation devant la centrale a été appelée par les municipalités voisines de Vandellos pour le 4 novembre.

(sources WISE-Tarragone, "El Pais" des 22, 24, 25, 27 et 28 octobre 1989 ;
Nuclear Power Reactors in the World, édition d'avril 1989).


Der Spiegel, 30/10/89:

"Panik im Kontrol Iraum"
Panique dans la salle de contrôle

Le jeudi 19 octobre, les habitants des environs de la centrale de Vandellos ont pu voir s'élever la fumée d'un incendie situé sur le site nucléaire. Ce n'est qu'au cours des jours suivants qu'ils ont pu apprendre ce qui s'était passé.

Une des deux turbines de la centrale a explosé et s'est enflammée. L'incendie, alimenté par huile lourde des compartiments de la turbine s'est étendu et a mis en danger le système de refroidissement du réacteur.

On n'a sans doute évité l'accident majeur que de justesse.
Les antinucléaires pensent qu'il s'agit là de l'accident de centrale le plus grave depuis Tchernobyl. Les autorités et les équipes de secours ont également sombré dans la confusion devant l'accident qui touchait ce vieux réacteur, "de l'époque de De Gaulle" (d'après le ministre de l'industrie espagnol).

Il est entré en service en 1972, utilise de l'uranium naturel et est refroidi par du dioxyde de carbone. L'eau de mer circule dans le secondaire pour évacuer la chaleur excédentaire, et 3000 tonnes de graphite servent de "modérateur". Quatre pompes fournissent le dioxyde de carbone nécessaire. L'arrêt de cette alimentation entraînerait l'incendie du graphite et produirait un accident comparable à celui de Tchernobyl. Or l'incendie de la turbine a endommagé deux des quatre pompes et menacé les deux autres. Le circuit secondaire a même connu des périodes de déséquilibre au cours de la nuit de l'accident : les deux pompes encore en état de marche ont connu des moments de dysfonctionnement.

L'accident a pris naissance "loin du réacteur" (d'après les paroles d'un représentant de la centrale) : une des turbines a dû être déconnectée par suite de problèmes techniques, ce qui a produit de violentes vibrations dans le circuit de refroidissement [...]. Une fissure est apparue, l'hydrogène est entré par là et au contact de l'air s'est enflammé. L'incendie s'est propagé jusqu'au système de cables électriques.

D'après le syndicaliste Ruiz (des Commissions Ouvrières), lorsque les pompiers sont arrivés, les techniciens étaient en pleine confusion, et prenaient la fuite. Les pompiers n'avaient pas été prévenus qu'il s'agissait d'un feu d'huile et de cables électriques, et leur premier véhicule ne contenait pas de la mousse, mais de l'eau (pour les feux de forêts). Même avec la mousse, l'incendie ne s'arrêtait pas parce qu'il était alimenté par des canalisations souterraines. Les pompiers ont finalement dû combattre directement le foyer sans vêtements de protection, et sans savoir s'ils subissaient des radiations.

L'action de sauvetage a presque causé la catastrophe : l'eau initialement déversée a envahi les sous-sols de la centrale et menacé de provoquer l'arrêt des systèmes de sécurité encore en état. Il a fallu la pomper, mais on a retiré beaucoup plus d'eau que ce qui avait été déversé. "Nous ne savions pas, à ce que dit un membre des équipes de secours, si le circuit secondaire n'avait pas explosé et libéré toute cette eau, ou si nous l'avions nous même transférée du bassin alimentation du système".

Ce n'est que le jour suivant que la température du réacteur est revenue à sa valeur normale.

Les négligences ne se sont pas arrêtées là : les pompiers n'ont n'ont été soumis à un contrôle de radioactivité que quatre jours plus tard (la poussière radioactive éventuelle ne pouvait plus être détectée).
Dans toute la Catalogne, les pompiers n'ont à leur disposition que trois combinaisons pour intervenir en milieu irradié. Ils menacent de ne pas se déplacer pour un incendie de centrale à l'avenir s'ils ne reçoivent pas d'appareil de mesure de radioactivité.

Le mardi 24 octobre, un transformateur auxiliaire de la centrale a subi un court-circuit, avec un fort relâché de fumée. L'affaire n'a pas eu de suite mais la population ne s'en est pas moins inquiétée.

Les autorités veulent remettre en marche Vandellos 1 dans quatre mois (elle est sensée fermer en 2003) en remplaçant la turbine par un appareillage venu de la centrale analogue de Saint Laurent



El Pais, 29/10/89:

Vandellos brûle

Ce sont des habitants proches de la centrale qui ont indiqué vers 21 H 40 à la police que de la fumée sortait par moments de la centrale. L'avarie s'est produite dans le turbogénérateur du groupe primaire. L'hydrogène est entré en contact avec l'air, provoquant une explosion. La salle de contrôle située à 15 m du réacteur a commencé à être envahie par une épaisse fumée. Il a fallu utiliser des masques à oxygène pour continuer à travailler. Des conduites amenant de l'eau de mer ont été rompues par l'incendie et la salle a été remplie d'un mètre d'eau (ce qui a bloqué divers systèmes de sécurité).

Le Gouvernement Civil a décidé après 22 h de déclencher le Plan d'Urgence nucléaire de Tarragone. L'anné précédente, en sept mois de fonctionnement, Vandellos 2 avait connu trois incendies. Ce n'est qu'à 22 h 21 que le Gouvernement Civil a su où était située l'avarie. L'intervention des pompiers a eu lieu dans une confusion considérable, et dans une atmosphère de peur d'une fuite radioactive. A 23 h 33, la direction de la centrale admet que la réfrigération du coeur subit des interruptions. A 23 h 36, l'incendie est contrôlé, mais non pas étouffé. Ce n'est que vers 2 h du matin que la centrale peut dire que que le feu est éteint et que le refroidissement du coeur fonctionne.

Au matin, les autorités prétendent qu'il n'y avait pas de danger (mais la Protection Civile affirme le contraire).

II est probable que le Conseil de Sûreté nucléaire va exiger des réaménagements tels que les travaux seront longs (un à trois ans) et le coût énorme.

Le réacteur s'est trouvé arrêté 32 secondes après le début de l'incendie (on ne sait pas si c'est à la suite d'une réaction automatique, ou de l'action d'un opérateur). L'EDF qui possède des parts de Vandellos a déclaré qu'elle ferait tout pour que ce réacteur reste en fonctionnement jusqu'à l'an 2003, comme prévu. Vandellos 1 est une centrale au graphite-gaz d'un type voisin de celui des quatre réacteurs français qui vont être arrêtés au cours des trois prochaines années. EDF explique que la situation en France est différente : elle possède des centrales produisant du courant moins cher, ce qui n'est pas le cas de l'Espagne (EDF n'admettrait l'arrêt que si les parois du réacteur avaient subi des dommages structurels dans l'incendie).

La conception du réacteur était défectueuse en ceci que les vents ont poussé les flammes vers l'intérieur, vers le réacteur. Les autorités centrales espagnoles sont plus sceptiques sur l'avenir de Vandellos 1 et envisagent d'en faire une poubelle nucléaire.

Un plan d'urgence contesté

L'attitude de la direction de la centrale, qui a prévenu les pompiers avant l'autorité chargée du Plan d'Urgence nucléaire de Tarragone, pouvait compromettre l'efficacité du plan (dont la Protection civile a la charge).

Par ailleurs, les groupes écologistes locaux considèrent que l'objectif réel de ce plan est d'empêcher la fuite de la population irradiée (pour qu'elle n'entre pas en contact avec les populations non contaminées). II prévoit qu'en cas de fuite radioactive, les routes passent sous contrôle de la Garde civile, et que celle-ci aurait le droit de soumettre les gens à des examens radiologiques (dans des Unités de Répartition et de Decontamination qui d'après les écologistes ressembleraient plus à des camps de concentration qu'à des services d'aide sanitaire).

Pour que le plan puisse fonctionner, il faudrait que l'administration centrale fournisse des moyens qui font encore défaut (amélioration des voies de communication pour rendre possible des évacuations d'urgence, installation de mégaphones pour prévenir la population de la zone).

L'Ametlla (le comité antinucléaire) appelle à la grève générale pour demain 30 octobre afin d'obtenir le démantèlement de Vardellos 1

Ametlla de Mar est une ville (d'environ 5000 habitants) située à 9 kilomètres de la centrale. Le comité antinucléaire a convoqué une grève générale de 24 heures, qui est soutenue par la municipalité.

On demande le démantèlement immédiat de Vandellos 1, et le démantèlement progressif de Vandellos 2, Asco 1 et Asco 2 (toutes situées dans la province de Tarragone). Les habitants des environs s'estiment gravement lésés par les annulations de réservations hôtelières et d'achats de résidences d'été.

Le programme de la journée de grève comprend une "cacerolada" à dix heures du matin, un hommage à 12 heures à l'attention de trois femmes qui avaient été arrêtées en 1974 pour avoir manifesté contre le projet initial des centrales nucléaires, et une manifestation à 17 heures.

Le Comité antinucléaire est soutenu par les jeunes de la localité, et a reçu des facilités de la municipalité (locaux, lignes téléphoniques). Le fait qu'un circuit pour motocyclettes soit à moins de deux kilomètres de la centrale semble une source importante de motivation.

Les municipalités de Montroig, Pratdip et Tivissa sont moins engagées (ils demandent aussi la fermeture de Vandellos 1 et le gel du second réacteur tant que les carences du Plan d'Urgence ne seront pas comblées). Une manifestation a également été appelée par les étudiants pour le lundi 30 octobre. Diverses forces syndicales essayent de constituer un mouvement de citoyens antinucléaire à Tarragone. Le CDS doit proposer à la prochaine séance de la municipalité de cette ville le démantèlement de la centrale qui a subi l'incendie.

Les pompiers se sont de leur côté indignés de l'attitude du personnel de la centrale pendant l'accident. D'après Josep Pino, chef du détachement de pompiers de Amposta (près de Tarragone) : "Les techniciens ont fui de la zone du sinistre et nous sommes restés seuls pendant qu'on entendait des cris "ça va sur le réacteur", "ça va sur le réacteur". La direction de la centrale et la société Hifrensa ont démenti ces informations, et on parle de sanctionner l'auteur de ces paroles.



El Pais, 27/10/89:

L'accident de Vandellos est "le plus grave jamais survenu dans une centrale nucléaire espagnole

Le Conseil de Sûreté nucléaire, CSN, a déclaré dans un communiqué le 26/10/89 que l'accident du 19 octobre peut être considéré comme "l'événement le plus grave jamais survenu dans une centrale nucléaire espagnole". Un court-circuit s'est encore produit le 26 (dans un autre réacteur de Vandellos, mais n'a pas provoqué d'incendie). Un turbogénérateur principal a été détruit le 19, et le problème majeur portait sur le refroidissement du réacteur, qui n'était pas direct ement concerné par l'incendie. L'article signale quelques déclarations d'un porte-parole de WISE.
(voir aussi AFP du 24/10/89 qui rapporte qu'une enquête a été ouverte en raison du retard avec lequel l'accident a été annoncé aux autorités compétentes, et que la société propriétaire de la centrale,
l'Hispano Francesa de Energia Nuclear, est pour 25 % propriété d'EDF. Selon un communiqué de WISE, World Information Service on Energie, l'accident de Vandellos 1 est le plus important depuis celui de Tchernobyl)