Irradiations et pathologies radioinduites

Le 20 février 2002 le dossier Liberté pour Youri Bandazhevsky a été envoyé à M. Vladimir Senko Ambassadeur du Bélarus en France qui l'a transmis à Minsk pour étude. Il a été publié in extenso dans la Gazette Nucléaire 197/198, mai 2002. La première partie a été publiée dans le Bulletin 91/92 mars-juin 2002. Nous donnons la suite de ce dossier par la publication de l'Annexe "Irradiation et pathologies radioinduites".

LES EXPERTS INTERNATIONAUX NE SONT
PAS INFAILLIBLES. L'EXEMPLE DU CANCER
DE LA THYROÏDE ET LES DOGMES DE BASE.

Le monde médical et scientifique a été sceptique et les réactions ont été virulentes lorsque ont été publiées en 1992 les données sur l'augmentation spectaculaire de l'incidence des cancers thyroïdiens chez les enfants du Bélarus (7). La controverse a été vive: les experts ont nié la réalité des faits car cette augmentation ne pouvait pas être due à Tchernobyl :
1) le temps de latence était trop court et l'iode 131 était réputé moins cancérogène que le rayonnement externe vis-à-vis de la thyroïde
2) une augmentation de leucémie n'était pas observée 1.
Il a bien fallu se rendre à l'évidence, ces cancers des enfants de moins de 15 ans étaient dus aux rejets d'iodes radioactifs de Tchernobyl (iode 131 et iodes à vie courte), ils ont été aussi observés en Ukraine et en Russie mais en moins grand nombre. Désormais ce sont les adolescents qui sont le plus atteints.
Chez les adultes le nombre de cancers de la thyroïde continue à augmenter surtout chez les femmes.
Il n'y a pas que le cancer, d'autres pathologies thyroïdiennes (thyroïdites, goitres, adénomes) ont été en augmentation chez les enfants et affectent désormais les adolescents (8).

Il faut analyser les dogmes qui ont permis l'aveuglement des experts car ils sont tenaces.
Le dogme de base : la leucémie, seul effet précoce de l'irradiation. Les études sur les survivants japonais des bombes atomiques.

Le suivi épidémiologique LSS (Life Span Study) d'une cohorte de 120 000 survivants d'Hiroshima et Nagasaki n'a commencé qu'en 1950, cinq ans après les explosions d'août 1945 et, au départ, cette étude de mortalité par cancer n'a montré qu'un accroissement de mortalité par leucémie. D'où le dogme que le seul effet précoce d'une exposition aux rayonnements est l'apparition de leucémie et rien d'autre. Rappelons qu'il s'agit essentiellement de rayonnement externe, flash en un temps très court.

Les études de morbidité grâce au registre AHS (Adult Health Study) ont concerné moins de personnes au départ (environ 20 000 en 1950, 11 000 en 1985 à cause des migrations). Elles montraient, mais sans signification statistique, sur un suivi de 1958-1971 (13 à 26 ans après l'exposition) que la thyroïde des enfants et adolescents était plus radiosensible que celle des adultes (9) avec d'autres pathologies que le cancer et une sensibilité des femmes plus élevée, la cancérogenèse étant toujours présente 40 ans après l'exposition (10).
Ce n'est qu'en 1993 et 1994 que seront publiées les études d'incidence de cancer et autres pathologies du suivi LSS sur la période 1958-1987 montrant sans ambiguïté une augmentation de l'incidence des cancers thyroïdiens et de pathologies thyroïdiennes autres que cancéreuses en fonction de la dose reçue, avec un risque accru chez ceux qui ont été irradiés avant l'âge de 20 ans (11) (12).
Conclusions
1)
Dans les deux situations, survivants japonais et victimes de Tchernobyl, ce sont les individus qui ont été exposés dans leur jeune âge qui sont les plus touchés. Tout se passe donc comme s'il y avait un décalage temporel de 20 ans, voire davantage entre les pathologies affectant les survivants de Hiroshima et Nagasaki et les affections thyroïdiennes observées chez les habitants du Bélarus qui ont été exposés au panache radioactif et vivent dans des zones contaminées par les retombées de Tchernobyl comme s'il y avait compression du temps de latence dans l'expression des pathologies liées à Tchernobyl.
2) Contrairement aux affirmations initiales des experts internationaux la contamination interne par les iodes radioactifs est aussi efficace que l'irradiation externe, non seulement dans la cancérogénèse mais aussi dans des pathologies non cancéreuses. La population du Bélarus qui a été exposée aux iodes radioactifs est numériquement sans précédent ­ par rapport aux victimes des retombées des essais nucléaires des Iles Marshall- et les niveaux d'irradiation ont pu être très élevés. Il ne faut pas oublier que la contamination en iode 131 du lait a dépassé 1 million de becquerels par litre au mois de mai 1986 en Biélorussie méridionale et qu'elle a duré plus de 3 mois dans certaines zones (l'activité est divisée par 1000 au bout de 80 jours).


A PROPOS DE QUELQUES PATHOLOGIES
OBSERVEES AU BELARUS

Au Bélarus il n'y a pas eu que le rayonnement externe du panache et des dépôts au sol, ni que les iodes radioactifs. Les habitants des zones contaminées sont soumis en permanence aux faibles doses d'une irradiation chronique à la fois externe par les dépôts au sol mais surtout interne via la nourriture produite sur des terrains contaminés par différents radionucléides, essentiellement le Cs137 (sans toutefois oublier le Strontium 90 et les transuraniens). Le problème essentiel, du point de vue de la santé publique, est donc de connaître l'impact sanitaire de cette contamination chronique.
Comme nous l'avons indiqué précédemment, Bandazhevsky a fait une étude systématique du paramètre physique qu'est la charge corporelle en césium 137 en relation avec l'ensemble des effets observés (cliniques, biochimiques, structurels et morphologiques) et aussi par expérimentation animale.

Nous nous bornerons à un bref aperçu.

Anomalies cardiovasculaires et contamination chronique.
L'incorporation de Cs137 est un des facteurs étiologiques majeurs dans l'augmentation de la tension artérielle observée chez les enfants vivant dans les zones contaminées à plus de 15 Ci/km2 ce qui montre déjà que le Cs137 joue un rôle dans le système cardiovasculaire.
C'est une des contributions les plus importantes, me semble-t-il, du Pr. Bandazhevsky et de son équipe quant aux effets observés sur la fonction cardiaque qui montre sans ambiguïté le rôle néfaste du Césium 137 en particulier chez les enfants et qui permet, dans certains cas, d'y porter remède.
Par la pratique d'électrocardiogrammes systématiques (ECG) et la mesure conjointe de la concentration corporelle en Césium 137 Bandazhevsky a démontré la dépendance linéaire des altérations de la fonction cardiaque et de la concentration corporelle des enfants en Cs137 (exprimée en Bq par kg de poids de l'enfant, Bq/kg). La gravité augmente avec cette concentration. Des analyses biochimiques avec recherche d'enzymes du sérum sanguin reflétant l'activité métabolique sont aussi effectuées.
- Plus de 500 enfants ont été examinés (14), de cinq districts diversement contaminés en Cs 137, de moins de 1 Ci/km2 (Grodno, Minsk), à 1-5 Ci/km2 (Gomel) à 15-40 Ci/km2 (Vietka, Svietilovitch). Les enfants sont répartis pour chacun des districts en 5 sous-groupes de concentrations corporelles croissantes de 0-5 Bq/kg ; 11-25,9 ; 26-36,9 ; 37-74 et à plus de 74 Bq/kg.
En comparant les électrocardiogrammes des enfants en fonction de la concentration corporelle on constate que plus celle-ci augmente et plus le nombre d'ECG normaux diminue, avec apparition d'arythmies et de troubles de la conduction cardiaque. En-dessous de 5 Bq/kg tout est normal. Dans la gamme des 5 Bq/kg, 85% des ECG sont normaux. Quand la concentration augmente, le nombre d'ECG normaux diminue et entre 74 et 100 Bq/kg il n'y a plus que 12% d'enfants avec un électrocardiogramme normal.
- Ceci est très clair à Gomel où les électrocardiogrammes de 227 jeunes enfants d'âge préscolaire (3-7 ans) montrent déjà des anomalies fonctionnelles : le pourcentage d'enfants avec anomalies de l'ECG augmente linéairement avec la concentration corporelle de 11 à 74 Bq/kg.
Nous donnons ci-après ces pourcentages en fonction de la concentration corporelle :

 Conc. Bq/kg  0  11-25,9  26-36,9  37-74  > 74
 % ECG anormaux  -  62,8  77,6  80,7  -


Certaines arythmies sont si sévères à Gomel que des enfants doivent recourir à une stabilisation médicamenteuse du rythme (autrefois on n'observait ce genre d'altération que chez les adultes, pas chez les enfants ! ).
- Dans le village de Svietilovitch (contamination surfacique de 15-40 Ci/km2) sur 55 enfants âgés de 7 à 16 ans il n'y a que 3 enfants avec un ECG normal. Des enfants ayant une concentration en Cs137 de 100 Bq/kg ressentent des douleurs dans la région cardiaque. Murmure systolique et son sourd sont perçus durant l'auscultation.
- Des dysfonctionnements cardiaques sont observées chez 155 bébés (âgés de 14 jours à 14 mois) dans 98,1% des cas et chez leur mère dans 90,3% des cas. Mères et bébés sont en résidence permanente à Gomel où ils sont soignés à l'hôpital clinique des enfants. Seuls 3 bébés avaient un électrocardiogramme normal.
La prescription d'un entérosorbant pendant 5-6 jours a fait baisser la concentration moyenne en Cs137 de 34,93 (+/-3,30) Bq/kg à 25,43 (+/-2,54) Bq/kg ce qui est significatif et en même temps a fait baisser les anomalies (14). Ceci est très important car cela ne peut que modifier le devenir de l'enfant dans un sens favorable. Cette amélioration des symptômes quand du césium est éliminé 2 est une preuve complémentaire du rôle du Cs 137 dans l'atteinte cardiaque.
- Les autopsies de 408 enfants et adultes de la région de Gomel décédés pour raisons diverses montrent dans 99% des cas des altérations des myofibres et nécroses du tissu cardiaque. Le myocarde apparaît comme un des organes qui concentre le plus de Cs137 qui serait ainsi une des causes essentielles du décès.
Les modifications structurelles sont analogues à celles qui sont observées sur les coupes effectuées sur des animaux de laboratoire nourris avec du grain contaminé ou auxquels on a fait ingérer une solution contenant du Cs137.

Tout ceci dresse un bilan assez sombre de la situation (auquel on doit ajouter les décès de bébés par cardiopathies congénitales).
Ce bilan n'est pas accepté par les experts : pour une concentration moyenne du corps en Cs137 de 70 Bq/kg la dose annuelle efficace d'un enfant de 10 ans est de 0,2 mSv d'après les modèles officiels discutés dans la première partie. Trop faible pour avoir un effet, disent les experts. Mais les faits sont là, les ECG présentent des anomalies et des enfants ne vont pas bien.

Altérations de la vision chez l'enfant
L'il est très sensibles à l'action du Cs137 comme le révèlent les examens effectués en 1996 et 1997 chez les enfants des zones très contaminées de Vietka et Svietilovitch (15-40 Ci/km2). Cataractes à Vietka : les enfants sont répartis en 3 groupes selon leur concentration corporelle en Cs 137 (0-20 ;21-50 ;>50 Bq/kg). Comme nous l'avons constaté précédemment pour les anomalies cardiologiques, là aussi l'incidence de la cataracte augmente linéairement en fonction de la concentration corporelle en Cs 137. Elle est de 5% pour les enfants à concentration moyenne en Cs137 la plus faible, passe à 17% pour le groupe médian et atteint 23% pour les enfants ayant le plus de Cs 137 dans le corps.

Remarque : les instances internationales reconnaissent la cataracte comme étant un effet déterministe des rayonnements lors d'une irradiation externe aiguë mais le seuil de dose est très élevé (~ 2 grays) et plus élevé encore s'il s'agit d'une irradiation chronique externe.
Or voici qu'un article récent (16) indique l'apparition à Taïwan d'opacités du cristallin chez les enfants et les jeunes de moins de 20 ans exposés à une irradiation chronique externe, à faible débit de dose, par du rayonnement gamma émis par le cobalt 60 de recyclage présent dans l'acier des bâtiments où ils résident. Le nombre d'altérations du cristallin augmente d'une façon significative avec la dose et les auteurs soulignent la nécessité d'un suivi à long terme.

Bref aperçu d'autres pathologies et anomalies
Les autopsies
d'habitants de la région de Gomel montrent que la répartition du Cs137 n'est pas homogène dans le corps car Bandazhevsky mesure par spectrométrie gamma le Cs137 contenu dans les différents organes. Il trouve que le Cs137 se concentre davantage dans les organes vitaux3 tels que le cur, le foie, les reins, les glandes endocrines. Là encore Bandazhevsky constate que les altérations des fonctions et structures de ces organes sont liées à leur concentration en Cs137.
- L'examen des coupes révèle des altérations du myocarde dans 98,6% des décès par causes multiples. Qu'il s'agisse d'adultes ou d'enfants les modifications morphologiques et structurelles sont identiques à celles relevées chez les animaux de laboratoire soumis à une alimentation riche en Cs137.
- Des dommages prononcés aux reins sont rencontrés dans 88,8% des cas de mort subite et dans les décès enregistrés à l'hôpital de Gomel alors que les personnes ne souffraient pas d'affection rénale de leur vivant.
Sur certains sujets il a été observé une destruction partielle des glomérules.
-Le foie est atteint de stéatose et de cirrhose dans 43% des cas.
-Les glandes endocrines sont altérées

Troubles du métabolisme chez l'enfant
Ce sont des résultats de tests sanguins chez les enfants d'âge préscolaire (3-7 ans) de Gomel (1-5 Ci/km2) qui sont résumés ici.
Lorsque la concentration moyenne du corps dépasse 30 Bq/kg en Cs137 on note une diminution statistiquement significative de protéines, albumine, créatinine, cholestérol dans le sang en même temps que la concentration en ions calcium augmente ce qui montre une détérioration des fonctions de synthèse effectuées par le foie. Les dysfonctionnements atteignent aussi le pancréas car une diminution du glucose est observée.

Dégradation du système immunitaire chez l'enfant
Chez les enfants de Gomel l'activité phagocytaire des neutrophiles lymphocytaires est diminuée de même que le taux des IgA (immunoglobulines) alors que les IgM augmentent par rapport à ce qui est observé dans la région plus "propre" de Grodno. Par contre les taux d'IgM sont comparables. Pour Bandazhevsky ces modifications des indicateurs immunitaires expliquent que les maladies infectieuses enregistrées au Bélarus soient plus nombreuses récemment, notamment dans les régions les plus contaminées en Cs137 (tuberculose, hépatite virale, affections respiratoires aiguës).
Normalement il y a des corrélations spécifiques entre les hormones thyroïdiennes, les immunoglobulines et les indicateurs du métabolisme (urée, créatinine etc.). Les enfants des zones contaminées à plus de 15 Ci/km2 et dont la concentration corporelle en Cs137 est très élevée perdent ces corrélations. On voit apparaître des allergies au lait de vache chez des enfants d'âge scolaire de Svietilovitch.

Modifications du système hématopoïétique dans les zones contaminées
A Gomel, Vietka et Svietilovitch on observe chez les enfants de ces zones contaminées une anémie macrocytaire. A Vietka et Svietilovitch où les concentrations corporelles sont les plus élevées le sang est appauvri en leucocytes (neutrophiles et monocytes) alors que le nombre de lymphocytes est augmenté et que les plaquettes diminuent. (Les comparaisons sont faites par rapport à la zone moins contaminée de Grodno).

Système reproducteur
Il s'avère que le système reproducteur féminin est très sensible à l'incorporation du Cs137 qui modifie complètement le processus de l'ovulation et du cycle menstruel.
L'incorporation de Cs137 chez les jeunes femmes conduit à une inversion du cycle hormonal : ainsi pour une concentration corporelle en Cs137 dépassant 40 Bq/kg c'est une réduction de progestérone et une augmentation d'estradiol qui sont observées dans la seconde moitié du cycle et l'inverse dans la première moitié conduisant au bouleversement du cycle menstruel et à la stérilité.
Le Cs137 incorporé d'une façon chronique a donc un rôle beaucoup plus perturbant que le rayonnement externe qui provoque une stérilité temporaire pour des doses aux ovaires élevées (environ 3 gray).

Conclusion : rappelons ici quelques études récentes sur les survivants d'Hiroshima et Nagasaki qui peuvent donner des pistes pour les pathologies radioinduites.`
Dans une publication de 1999 l'étude de mortalité sur un suivi de 40 ans (1950-1990) montre une association avec le rayonnement qui est significative pour les affections suivantes : maladies cardiovasculaires, attaques cérébrales, maladies digestives et respiratoires, affections des systèmes hématopoïétiques (15). Il n'y a pas que la mortalité : le suivi clinique des survivants (morbidité) montrent que sont corrélés à la dose reçue lors du "flash" les infarctus du myocarde, les attaques cérébrales, des indicateurs d'athérosclérose, l'hypertension, ainsi que les maladies chroniques du foie (11).
Ainsi nombre d'affections du système cardiovasculaire et du foie décrites par Bandazhevsky s'avèrent être radioinduites chez les survivants des bombes quand le suivi est prolongé suffisamment.
Pour expliquer leurs résultats les auteurs (15) font plusieurs hypothèses et évoquent un mécanisme qui pourrait être la cause de ces affections, celui des déficiences du système immunitaire.
Signalons que les travaux de Titov ont montré des variations importantes des immunoglobulines chez les enfants du Bélarus dès les premiers mois après Tchernobyl et désormais constate l'augmentation des allergies (17). Bandazhevsky trouve chez les enfants vivant dans les zones contaminées un système immunitaire perturbé.
Avant de nier a priori la réalité des observations du Pr. Bandazhevsky, il serait important de reconnaître que même dans le cas simple d'une irradiation externe, les mécanismes de développement des maladies sont mal connus mais que sont invoquées des déficiences du système immunitaire. Les experts peuvent-ils prouver que le système immunitaire des enfants n'est pas atteint par la l'irradiation interne chronique qu'ils subissent ?

Bella Belbéoch, mars 2002.

Additif :
Remarque à propos des cancers autres que thyroïdiens
En 1994 ont été publiés les résultats du suivi 1958-1987 des survivants japonais. Un excès de risque significatif où l'incidence croît linéairement avec la dose est trouvé pour de nombreux cancers solides : sein, estomac, colon, poumon, ovaire, vessie, thyroïde, foie, cancer de la peau autre que le mélanome, glandes salivaires (12).
Au Bélarus, le rapport de 1996 de l'Académie des sciences donne la dynamique de l'incidence de certains cancers. Pour les hommes on observe une augmentation des cancers du rein, de la vessie, colon. Pour les femmes colon, rein et surtout thyroïde dont l'incidence a été multipliée par 6 entre 1986 et 1994.
Cancer du sein : le suivi commencé en 1950 de la cohorte des femmes japonaises ayant survécu aux bombes atomiques a montré vers les années 70 une augmentation de l'incidence du cancer du sein, linéaire en fonction de la dose surtout pour la tranche d'âge 10-19 ans au moment de l'irradiation (pour des doses inférieures à 0,5 gray). Le fait nouveau du suivi 1950-1980 publié en 1987 a été la mise en évidence d'un excès de cancer chez les femmes ayant été exposées au flash avant l'âge de 10 ans. Ainsi la période pré-pubertaire est aussi vulnérable aux radiations (13).
Et au Bélarus ? Des rapports préliminaires indiquaient une augmentation du cancer du sein dans les zones contaminées. Il paraît très important de suivre l'évolution de l'incidence du cancer du sein parmi les femmes ayant subi les plus fortes expositions en 1986-87 en tant qu'enfants ou adolescentes mais aussi parmi les enfants et adolescentes d'aujourd'hui vivant en zone contaminée. En effet le système endocrinien est complètement perturbé comme l'indiquent les retards de puberté observés (3). De plus, Bandazhevsky souligne le rôle du Cs137 incorporé dans les anomalies du cycle menstruel avec déséquilibre du couple d'hormones progestérone/estradiol chez les adolescentes et les jeunes femmes (4) et qui peut être un facteur clé de la stérilité. Il ne serait pas surprenant que les radionucléides incorporés d'une façon chronique puissent induire une augmentation de l'incidence de cancer du sein.


---- Notes ----

1
Il faudrait dire : n'était pas "documentée comme les cancers de la thyroïde" car des médecins locaux ont observé une augmentation de leucémies. D'autre part si le système immunitaire est amoindri, les enfants peuvent décéder d'affections ­pulmonaires par exemple- avant que la leucémie ait pu se déclarer. C'est la raison pour laquelle les études doivent porter sur un ensemble de pathologies .
2 Il s'agit du "Belosorb 11". Des entérosorbants à base de pectine (obtenu à partir des pommes) sont aussi très efficaces pour entraîner le Cs qui est éliminé par les selles.
3 La concentration est donnée en Bq/kg


---- Références ----

(1) UNSCEAR 2000, Report to the General Assembly, with Scientific Annexes, Sources and Effects of Ionizing Radiation. Overview. The Radiological Consequences of the Chernobyl Accident. (Vol. 1, p.4, article 19).
(2) Lazjuk G. I. et al Frequency changes of inherited anomalies in the Republic of Belarus after the Chernobyl accident, Radiation Protection Dosimetry, 1995, vol. 62, n1/2, 71-74. Lazjuk G. et al, Genetic consequences of the Chernobyl Accident for Belarus Republic, Research Reactor Institute, Kyoto University, Research Activities about the Radiological Consequences of the NPS Chernobyl Accident and Social Activities to Assist the Sufferers by the Accident KURRI-KR-21, (1994) p. 174-177.
(3) Tchitchko Alexis, Conséquences de Tchernobyl : des cardiopathies congénitales chez les enfants vivant en zones contaminées par Tchernobyl ? 4ème journée de conférences médicales et rencontres hospitalières sur les conséquences médicales de l'accident de Tchernobyl sur la population biélorusse, Lille, 14 mars 2000, organisée par l'Association Avicenne avec le concours du Conseil Régional Nord - Pas de Calais.
(4) Structural and functional effects of radioisotopes incorporated by the organism, Ed. Pr. Yu. Bandazhevsky, Gomel 1997.
Medical and biological effects of radiocesium incorporated into the human organism, Minsk 2000. [Il est dommage que ces traductions en anglais soient médiocres].
(5) Kadhim M.A. et al Transmission of chromosomal instability after plutonium alpha-particule irradiation, Nature, vol. 355, 20 February 1992. Kadhim et al Long-Term Genomic Instability in Human Lymphocytes Induced by Single-Particule Irradiation, Radiation Research (2001) Vol. 155, n°1, p. 122-126.
(6) Dubrova Y. E. et al Human minisatellite mutation rate after the Chernobyl accident, Nature, vol. 380, 25 April 1996. Further evidence for elevated human minisatellite mutation rate in Belarus eight years after the Chernobyl accident, Mutation Research, 381 (1997) 267-278. Reply to a letter "Effects of radiation on children", Chlyoko Sato, Mieko Kodaira, Nature, 383, 11 sept. 1997.
(7) Thyroid cancer after Chernobyl, Scientific Correspondence, Nature, vol. 359, 3 Sept. 1992, 21-22, letter from Kazakov V. S. et al ; letter from Baverstock K. et al. Gazette Nucléaire 119/120, 1992. En Biélorussie : cancers de la thyroïde chez les enfants.
(8) Yuri Demidchik, Thyroid cancer in Bélarus after Chernobyl, Lille, mars 2000, Ibid. Conséquences médicales de l'accident de Tchernobyl sur la population biélorusse.
(9) Parker L.N. et al. Thyroid carcinoma after exposure to atomic radiation. A continuing survey of a fixed population, Hiroshima and Nagasaki, 1958-1971. ABCC-TR 5-73, in Shuji Inoue (10).
(10) Shuji Inoue et al. Thyroid diseases among A-bomb survivors in Nagasaki, (sujets examinés entre 1984-1987). TR-12-92 (1992).
(11) Wong F. L. et al. Non cancer disease incidence in the atomic bomb survivors 1958-1986, RERF TR 1-92, Radiation Research (1993) 135 :418-430.
(12) Thompson D. E. Mabuchi K. et al. Cancer incidence in atomic bomb survivors, Part II, Solid tumors 1958-1987, Radiation Research, (1994), 135 :S17-S67.
(13) Masayoshi Tokunaga et al. Incidence of female breast cancer among atomic bomb survivors (1950-1980), Hiroshima and Nagasaki. RERF TR 15-84, et Radiation Research (1987), 112, 243-272.
(14) Yu. I. Bandazhevsky, Radioactive Caesium and Heart, Minsk, 2001.
(15) Yukiko Shimizu, Donald A. Pierce et al. Studies of the Mortality of Atomic Bomb <survivors. Report 12, Part II. Non Cancer Mortality, 1950-1990, Radiation Research,152, 374-389, (1999).
(16) Wei-Li Chen et al Lenticular Opacities in Populations Exposed to Chronic Low-Dose-Rate Gamma Radiation from Radiocontaminated Buildings in Taiwan, Radiat. Res. (2001) 156, 71-77
(17) Titov L. P. Conséquences de Tchernobyl, Lille, mars 2000, Ibid. Résumé, Etude des marqueurs d'allergies chez des enfants biélorusses vivant en zones contaminées.