Echange de courriers avec l'autorité de sûreté nucléaire

Comme à son habitude, il aura fallu 9 mois de gestation à l'ASN pour répondre à notre dernier courrier. Il est à noter un léger progrès dans la qualité de la réponse mais, la précision et l'exactitude ne sont pas encore la règle. Ci après, nos questions, les réponses et nos commentaires sur les réponses.

 

Monsieur Alain Schmitt
Directeur-adjoint de la DSIN

Paris, le mardi 5 février 2002.

Monsieur,

Dans l'attente d'une réponse à mon précédent courrier, je souhaiterais disposer de quelques informations sur 3 secteurs très divers.

1 ­ Sur l'inconel 600 : la décision DSIN-BCCN/MP/AR n° 010067 du 5 mars 2001 signale des supports "M" ; je souhaite donc être informé sur ces supports dont je ne connais l'existence et ignore l'emplacement et l'utilité. D'autre part, des incidents antérieurs ont à plusieurs reprises signalé des fissurations sur les brides de fixation des barrières thermiques des pompes primaires et je ne trouve pas trace de ces éléments dans le rapport cité ci-dessus.

2 ­ la DSIN-GRE/SD2/N° 261 ­ 2002 du 9 janvier sur Belleville est on ne peut plus floue sur les rejets chimiques. Ainsi quand il est question de "flux journalier en zinc atteignait 82,4 kg pour une limite de 30 kg", comme j'ai une bonne expérience des rejets des Nogent, je sais que le zinc provient de la corrosion et de l'abrasion des tubes de condenseurs, que pour une valeur donnée de zinc on a environ le double en cuivre et qu'à ces valeurs la centrale doit perdre environ de 20 à 25 tonnes de laiton par an en rivière pour un poids total des condenseurs des deux tranches (tubes seuls) de 800 tonnes. Quand on parle de "phosphore", il doit probablement s'agir de phosphate dont il est possible qu'il soit utilisé en substitut de l'acide sulfurique pour éviter l'entartrage. Je souhaite donc avoir des informations nettement plus détaillées sur ces rejets et sur l'état actuel des condenseurs.

3 ­ Quel est le circuit de recyclage des joints de cuve en argent et quel en est le contrôle ? Des informations me sont parvenues ces dernières semaines faisant état d'une refonte que l'on peut qualifier de "douteuse" [].

Je vous serais reconnaissant de me fournir une réponse rapide pour ces questions qui ne devraient pas nécessiter de grandes recherches, et de me préciser sous quel délai je peux espérer obtenir une réponse à mon courrier précédent.

Cordialement

Comité Stop-Nogent.
Claude Boyer


DGSNR/SD2 N° 1235 du 12 novembre 2002
Le directeur général
6, place du Colonel Bourgoin ­ 75572 Paris cedex 12

Monsieur,
Par lettre du 5 février 2002, vous avez posé à l'autorité de Sûreté Nucléaire diverses questions relatives aux réacteurs nucléaires à eau sous pression, notamment concernant les décisions de l'ASN en date du 5 mars 2001 et du 9 janvier 2002. Je vous prie de trouver ci-joint des éléments de réponse à vos interrogations.

Les supports de guidage radial des inférieurs ­ dits "supports M" - assurent le guidage et le calage radial des internes inférieurs des cuves des réacteurs à eau sous pression. Ils ne supportent pas les internes inférieurs puisque ceux-ci sont suspendus à la bride supérieure de la cuve. Au nombre de quatre sur le palier 900 MWe et de six sur les paliers 1300 MWe et 1450 Mwe, les supports M en alliage "Inconel600" sont soudés sur la paroi interne de la cuve au moyen d'alliage "Inconel 82" ou "Inconel 182".
La bride de fixation des barrières thermiques des pompes primaires des réacteurs à eau sous pression est forgée en acier inoxydable austénitique. C'est pourquoi les cas de fissuration de cette bride ne sont pas abordés dans la décision du 5 mars 2001, relative à la corrosion sous contrainte de l'alliage "Inconel 600".
Les fissures observées à partir de 1992 sur la face intérieure de certaines brides ont pour origine la fatigue thermique et non la corrosion sous contrainte. Par ailleurs, des fissures de fatigue ont été détectées en racine de la soudure entre la bride et l'enveloppe de barrière thermique.
Ces phénomènes de fissuration ont fait l'objet d'un examen par l'Autorité de Sûreté Nucléaire qui s'est achevé en 1998 par :
- un engagement d'EDF d'équiper l'ensemble du parc nucléaire avant fin 2004 avec des barrières thermiques de nouvelle conception, dont la sensibilité à la fatigue thermique est beaucoup plus faible et dont le mode de liaison avec l'enveloppe a été revu,
- la mise en place d'un programme de contrôle en vue de vérifier périodiquement l'absence de fissures. A ce jour, les contrôles n'ont révélé aucune fissure.
Le programme de rénovation des brides de barrière thermique est suivi de près par l'Autorité de Sûreté Nucléaire. Son état d'avancement est le suivant : sur 102 barrières thermiques, 82 auront été rénovées à la fin de l'année ; les 20 restantes seront traitées au rythme de 15 en 2003 et de 5 en 2004.

Concernant les rejets de la centrale de Belleville-sur-Loire, il convient de rappeler que la protection de l'environnement et des populations vivant à proximité des centrales nucléaires fait l'objet d'une attention particulière des pouvoirs publics. En particulier les rejets liés au fonctionnement normal des installations font l'objet d'une étude d'impact soumise à enquête publique, sont réglementés et sont soumis au contrôle de l'Autorité de Sûreté Nucléaire.
Les rejets en cuivre et en zinc n'échappent pas à la règle. Ces substances proviennent effectivement de l'usure des tubes en laiton des condenseurs qui est attribuée aux phénomènes de corrosion et d'abrasion dus entre autres à la présence de matières en suspension abrasives dans l'eau de refroidissement. Ces rejets proviennent donc du fonctionnement normal de l'installation.
L'arrêté d'autorisation de prélèvement d'eau et de rejets de la centrale nucléaire de Belleville-sur-Loire prévoit des limites de rejets journalières en cuivre et en zinc respectivement de 70 et 30 kg. Après avoir constaté des dépassements, l'Autorité de sûreté nucléaire a mis en demeure, le 21 décembre 2001, la centrale nucléaire de Belleville-sur-Loire de respecter ces normes de rejet en flux avant le 31 juillet 2002 ou de formuler le cas échéant, sous trois mois, une demande de modification de l'arrêté.
L'exploitant a déposé en juillet 2002, une demande de modification de son arrêté. Compte tenu des lacunes du dossier présenté, l'Autorité de sûreté nucléaire a, par décision du 16 septembre 2002, demandé à l'exploitant, sous deux mois, de compléter son dossier et d'engager un programme d'études visant à la recherche de solutions alternatives, notamment en ce qui concerne les rejets de cuivre et de zinc. Les conclusions de ce programme d'étude devront être rendues sous neuf mois.
Il convient d'indiquer que les méthodes de prélèvement et d'analyse des échantillons, en vue du dosage du cuivre et du zinc, ont été améliorées depuis l'instruction de l'autorisation en vigueur , et permettent d'apprécier les quantités ajoutées au milieu.
A l'issue du retour d'expérience des mesures disponibles, il s'avère que les rejets annuels en cuivre et en zinc représentent des rejets moyens journaliers inférieurs aux limites autorisées (respectivement 70 et 30 kg). Les dépassements observés sur les rejets journaliers sont ponctuels et sont constitués par des pics.
Par ailleurs, les investigations menées par l'exploitant montrent que les tubes en laiton des condenseurs de la centrale de Belleville-sur-Loire ne présentent pas d'usure anormale et que leur état est similaire à celui des autres centrales nucléaires du val de Loire disposant de ce même type de condenseurs.
Concernant le phosphore, ainsi que vous le mentionnez, il est effectivement mesuré dans les rejets à partir de la détermination de la teneur en phosphates selon la norme NFT 90 023.
Les phosphates sont utilisés dans le circuit secondaire en tant qu'inhibiteurs de corrosion et proviennent également du fonctionnement normal de la station d'épuration de la centrale nucléaire de Belleville-sur-Loire, bien que dans ce dernier cas les rejets soient minimes en comparaison avec ceux provenant du circuit secondaire.
Au cours de l'année 2001, des anomalies sur les rejets de phosphates provenant de la station d'épuration ont été constatées. Toutefois, l'exploitant a procédé aux modifications lui permettant de respecter les limites imposées par l'arrêté d'autorisation des rejets.

Concernant le devenir des joints de cuve de la centrale nucléaire de Saint-Laurent-des-Eaux, il y a lieu de préciser que les joints métalliques ont pour fonction d'assurer l'étanchéité entre le couvercle de cuve et la cuve. Afin de maintenir l'intégrité de la fonction qu'ils assurent, il est nécessaire de procéder à leur remplacement périodique.
Les joints de cuves usagés sont des déchets dits "nucléaires". Leur gestion, comme celle de tous déchets provenant des centrales nucléaires, doit faire l'objet d'un suivi particulier. Une fois découpés en morceaux puis placés soit dans des coques en béton, soit dans des fûts métalliques, ils sont expédiés vers le Centre de Stockage de l'Aube dûment autorisé à recevoir ce type de déchets.

Je vous prie d'agréer, Monsieur, l'expression de ma considération distinguée.
Le Directeur Général de la Sûreté Nucléaire et de la Radioprotection

André-Claude Lacoste.

 

Commentaires sur les réponses

Les rejets en cuivre et zinc :

Ces rejets sont similaires à ceux de la centrale de Nogent vers le milieu des années 90, alors que les condenseurs perdaient 20 à 22 tonnes de laiton par an (deux tiers de cuivre pour un tiers de zinc), pour un poids total des tubes des condenseurs de 400 tonnes par tranche. Ce site était à l'époque le plus gros pollueur en cuivre du bassin de Seine à l'amont de Rouen. Cette usure due à la corrosion et à l'abrasion, consécutive à la mauvaise qualité de l'eau de Seine et l'emploi massif d'acide sulfurique comme détartrant (37 tonnes/jour de rejet de sulfates en Seine) avait nécessité le remplacement des condenseurs des tranches 1 et 2 en 1998 et 1999, par de l'acier inox, avec pour inconvénient la multiplication d'amibes pathogènes et surtout mortelles ; l'effet biocide du cuivre ayant disparu.
Ces rejets n'étant pas maîtrisables, la direction de l'ASN demande à l'exploitant de Belleville, par décision du 16/9/02, de formuler une nouvelle autorisation de rejet en conformité avec ses besoins et l'étude d'impact.
Autre curiosité pour cette centrale construite en même temps que celle de Nogent, sa sur jumelle, le nouvel arrêté d'autorisation de prise d'eau et rejets d'effluents radioactifs et chimiques du 4/1/01 ne comporte pas d'autorisation de rejet de sulfates ; la cerise sur le gâteau.


Le devenir des joints de cuves :

Ces joints plats qui assurent l'étanchéité entre la cuve et son couvercle sont en argent massif. Leur diamètre est d'un peu plus de 4 mètres pour une largeur de 5 centimètres environ et 1 centimètre d'épaisseur. Ils doivent être changés à chaque ouverture du couvercle. Etant donné la valeur commerciale de l'argent et les masses impliquées, on peut s'inquiéter des risques de détournement. Ces joints sont radioactifs ; bien évidemment, ils doivent être stockés en tant que déchets et ne doivent en aucun cas se retrouver dans le circuit commercial, ce qui apporterait un risque d'irradiation pour les utilisateurs. La réponse du directeur de l'Autorité de Sûreté Nucléaire n'est pas très convaincante ; un inventaire des joints déposés des réacteurs, corroboré par celui des joints stockés par l'Andra à Soulaines aurait été plus convaincant.

C.B.


A propos des fissurations des protections thermiques des pompes primaires des réacteurs 900 mwe :

Importance pour la sûreté
La protection thermique d'une pompe primaire ­la barrière thermique- doit empêcher que le flux de chaleur qui provient du liquide primaire ne remonte vers les parties supérieures de la pompe, en particulier vers les joints d'étanchéité placés autour de l'arbre d'entraînement de la pompe.
Sans entrer dans les détails (se reporter à la Gazette Nucléaire 155/156 janvier 1997) cette barrière thermique comporte un circuit de refroidissement (un serpentin où circule l'eau venant du RRI ­circuit de refroidissement intermédiaire) qui est contenu dans une enveloppe et cette enveloppe est soudée à une bride servant à fixer sur le corps de pompe l'ensemble du système assurant l'étanchéité autour de l'arbre d'entraînement. Cette bride représente la limite du circuit primaire principal et doit résister à la pression de 155 bars.
D'après l'autorité de sûreté (Conseil supérieur de la sûreté et de l'information nucléaire CSSIN séance du 10 décembre 1996) "Les conséquences potentielles de la rupture d'une enveloppe ou de la bride de barrière thermique sont le blocage du rotor de la pompe, l'émission de corps migrants métalliques dans le circuit primaire ainsi qu'un risque d'accident de perte de réfrigérant primaire par dégradation du circuit RRI ou, dans un cas extrême, par une rupture de la bride" [c'est moi qui souligne].
Ainsi, le risque potentiel est une perte de refroidissement du cur, le plus redouté de tous les incidents graves pouvant conduire à la fusion du coeur si les systèmes de refroidissement de secours s'avèrent inopérants. Et à l'accident
L'intégrité de tout le système de barrière thermique est donc un problème essentiel du point de vue de la sûreté. Le citoyen ordinaire peut penser que si des défauts sont détectés ils seront rapidement corrigés sinon le réacteur devrait être arrêté.

Erreur de conception. Le délai entre la mise en évidence d'un problème et les solutions mises en uvre par EDF.
Nous allons examiner succinctement l'historique des fissurations ayant entraîné un programme de rénovation des barrières.
Les enveloppes de barrières thermiques. Les problèmes de fissurations dans les protections thermiques remontent en fait à 1990 lorsque ont été détectées des fissures sur l'enveloppe du réacteur 2 de Fessenheim lors de la première visite décennale. L'extension du contrôle par ultrasons montre ensuite des fissures sur la face interne de plusieurs enveloppes de barrières thermiques des réacteurs 900 MWe, "un phénomène de fatigue dû à l'existence de fortes contraintes thermiques serait à l'origine du défaut ".
Les brides. Puis, des fissurations par fatigue thermique sont trouvées en 1992 sur la face interne des brides, comme l'indique M. Lacoste. Mais il nous paraît important d'ajouter qu'elles n'ont été décelées qu'après le démontage des enveloppes en vue de leur remplacement car ces fissures étaient dans des endroits inaccessibles et non contrôlables sans démontage...
En 1996 d'autres fissures dues à la fatigue thermique ont été trouvées sur les brides, au niveau de leur soudure à l'enveloppe, et se sont avérées avoir un caractère générique (un problème commun à tous les réacteurs 900 MWe).

Qu'il s'agisse de l'enveloppe ou de la bride il y a donc eu erreur de conception au départ, les phénomènes de fatigue thermique et de vieillissement n'ayant pas été pris en compte.
Le rapport CSSIN de décembre 1996 indique que "devant le caractère générique des fissurations la DSIN [Direction de la sûreté des installations nucléaires] a demandé à EDF de lui présenter un programme de contrôles et de réparations ou remplacements ainsi qu'une étude du comportement dans le temps des fissures observées".
Ainsi, pour l'enveloppe de barrière thermique des modifications ont été envisagées par EDF, tant pour les méthodes de contrôle par ultrasons que pour la définition des dimensions critiques des défauts au-delà desquelles il faut la remplacer et, en 1996, 9 enveloppes ont été remplacées préventivement. De nouvelles pièces moins susceptibles à la fatigue thermique sont conçues qui, à terme, remplaceront les anciennes. En attendant, des études confirment l'absence de risque de "progression instable des défauts" (décryptons : qui pourrait conduire à une rupture brutale).
Pour les brides, des études sont menées afin de pouvoir détecter les fissures sans avoir besoin de démonter les barrières thermiques (ce qui est très pénalisant pour l'exploitant EDF) et aussi des études pour essayer de limiter le phénomène à l'origine du vieillissement.
D'après ce rapport CSSIN de 1996 la Direction de la sûreté des installations nucléaires (DSIN) demandait, outre les contrôles, "qu'un remplacement de l'ensemble des brides soit effectué dans un délai de 5 ans à compter des arrêts de tranche 1997". Voilà qui nous menait en 2002.
Or si le rapport d'activité de 1997 de l'Autorité de sûreté nucléaire indique qu'EDF, en 1997, a mis en uvre le contrôle par ultrasons des brides sur 8 réacteurs sans nécessité de démonter l'hydraulique, il indique aussi "la modification de la conception actuelle des brides pour supprimer le phénomène à l'origine du vieillissement sera progressivement mis en uvre à compter des arrêts de réacteurs de 1998". On est passé de 1997 à 1998.
"L'objectif d'EDF consiste à réhabiliter la quasi-totalité des barrières thermiques avant 2004 au plus tard. Ces nouvelles propositions de l'exploitant seront examinées par la Section permanente nucléaire au début de l'année 1998". On est passé de 2002 à 2004

En conclusion : que nous apprend toute cette histoire ?
Dans sa réponse du 12 novembre 2002, M. Lacoste nous précise que c'est bien en 1998 que l'examen des phénomènes de fissuration a été terminé par l'Autorité de Sûreté Nucléaire. Les premières fissurations sur les brides ont été observées pour la première fois en 1992 il a donc fallu 6 ans ! Pas de doute, il faut que l'Autorité de sûreté puisse embaucher de toute urgence de nombreux métallurgistes ! Mais ce n'est pas si simple : dans ce phénomène de fatigue par contraintes thermiques intervient aussi le vieillissement par le facteur temps. Or l'expérimentation en laboratoire sur un matériel prototype n'est jamais de très longue durée. De plus il faudrait pouvoir simuler tous les aléas de fonctionnement, les arrêts de tranche non programmés avec les coups de bélier sur les pompes par exemple. De fait, et c'est important pour comprendre ce qu'implique la notion de sûreté nucléaire, c'est le réacteur en fonctionnement qui fournit, par l'expérimentation réelle, l'évolution des paramètres en fonction du temps de tous les matériaux et matériels utilisés et leur corrélation. C'est ainsi que, peu de temps après démarrage, Civaux-1 a inauguré les fuites sur le circuit RRA, (refroidissement du réacteur à l'arrêt) dues à des fissurations engendrées par contraintes thermiques dans les partie coudées de tuyauteries dont la géométrie avait été changée lors de la conception des nouveaux réacteurs du palier N4. Les défauts métallurgiques ont été trouvés après coup sur Chooz 1 et 2 et il a fallu décharger leur combustible.
Ceci incite à conclure que les problèmes pouvant conduire à un accident majeur ne seront finalement identifiés et compris qu'après que l'accident ait eu lieu. Sous une autre forme, M. Tanguy, alors Inspecteur Général pour la Sûreté et la Sécurité Nucléaire à la Direction Générale d'EDF, a dit publiquement que "s'il doit se produire un accident ce sera celui que l'on n'aura pas prévu" (Colloque Nucléaire, Santé Sécurité, Conseil Général du Tarn et Garonne, Montauban, 21-23 janvier 1988)

M. Lacoste confirme dans sa lettre l'engagement d'EDF de 1998 d'équiper l'ensemble du parc par les barrières de nouvelle conception avant la fin 2004. Il ajoute "Le programme de rénovation des brides de barrière thermique est suivi de près par l'Autorité de Sûreté Nucléaire. Son état d'avancement est le suivant : sur 102 barrières thermiques 82 auront été rénovées à la fin de l'année ; les 20 restantes seront traitées au rythme de 15 en 2003 et de 5 en 2004 ".
Il y a en France 34 réacteurs de 900 MWe ayant chacun 3 pompes primaires soit 102 barrières thermiques et la rénovation ne sera terminée, au mieux, qu'en 2004.
On ne peut qu'être soulagés et très heureux que des enveloppes de barrières thermiques aient été démontées et qu'on ait pu s'apercevoir à cette occasion en 1992 que des brides étaient fissurées à des endroits inaccessibles aux contrôles. Mais c'était peut-être encore le bon temps quand il n'y avait pas les impératifs liés à la libéralisation du marché de l'électricité. Qu'en serait-il de nos jours ? Il est encore trop tôt pour affirmer que les pièces de nouvelle génération tiendront beaucoup mieux que les anciennes qu'elles remplacent. Avec des arrêts de tranche plus espacés qu'autrefois, les contrôles sont espacés d'autant, ce qui peut masquer une évolution de défauts plus rapide que prévu.
Pourquoi l'Autorité de Sûreté a-t-elle accepté qu'EDF ne respecte pas le planning initial ? Entre 2002 et 2004 espérons qu'il n'y ait pas d'imprévu avec "progression instable des défauts" pour les réacteurs dont les barrières thermiques ne sont pas "rénovées" à la date d'aujourd'hui

B. B.