Biocarburants: la famine en 2020 ?

Le Comité Stop-Nogent s'est illustré à plusieurs reprise dans la critique acerbe de l'usage de l'agriculture à des fins de production industrielle de carburants. Notre modeste publication rendait cette critique très marginale. Cette fois, la critique sort de la clandestinité avec la publication d'un article de George Monbiot dans The Guardian, dont le Courrier International du 23 au 29 juin dernier reproduit un extrait en français. Sous le titre « Généraliser les biocarburants, une fausse bonne idée », l'auteur fait une critique de la directive européenne qui souhaite imposer en 2020 que 20% du carburant [consommé par la circulation routière] soit d'origine végétale. Et de conclure que pour ce faire, le Royaume-Uni devrait y consacrer la totalité de ses terres agricoles. L'article semble quelque peu optimiste sur le rendement à l'hectare et néglige de prendre en compte les intrants énergétiques qui peuvent consommer de 40 à 45% de la production finale. De plus, le Royaume-Uni ne consomme annuellement que 37,6 millions de tonnes d'équivalent pétrole, contre 80 Mtep pour la France.

Les instances de Bruxelles et leurs experts, les gouvernements des nations d'Europe, seraient-ils à ce point stupides et incompétents en prenant une décision qui placerait les peuples européens en situation de famine d'ici 10 ou 15 ans ? Ou bien prévoient-ils que l'agriculture des pays développés sera trop coûteuse, non compétitive et que le tiers-monde, déjà en situation de famine, devra en plus satisfaire la presque totalité de nos besoins alimentaires ?

A moins que, prise de conscience des limites énergétiques planétaires aidant, nos dirigeants n'aient déjà prévu que la maîtrise de l'énergie se fera par la réduction drastique du nombre des consommateurs, en réduisant significativement leurs revenus (salaires, retraites, allocations, etc.). Les accès à la voiture, aux transports, au chauffage, et même à la nourriture et à la santé, seraient de fait réservés à une petite élite minoritaire peu partageuse, qui pour préserver les ressources convoitées gouvernerait par des procédés totalitaires. Dans ce sens, les actuels discours sur le « développement durable » serviraient alors de « cache sexe » à la future « régression sociale durable »

Dans ce sens, on comprendrait mieux l'objectif de la propagande scientiste autour du projet Iter, véritable leurre d'une abondance énergétique à venir, dont l'état actuel des connaissances de la science permet d'affirmer que le mini soleil sur terre par fusion thermonucléaire contrôlée en plasma électromagnétiquement confiné, ne fonctionnera jamais.
L'électronucléaire en est au même rang des fausses bonnes solutions, avec l'uranium qui constitue environ 3% des réserves fossiles (4% au mieux en utilisant totalement l'uranium et le plutonium issus du retraitement), et dont l'épuisement des ressources est envisageable à l'horizon d'un demi-siècle, il ne peut prétendre satisfaire quantitativement la demande ; pas plus que moralement, en tenant compte des catastrophes à venir et de l'insurmontable problème des déchets.

Restent les énergies renouvelables, dont le potentiel énergétique à venir restera limité ; le comportement aléatoire de ces énergies imposant la conversion pour stockage avec des pertes de rendement considérables et des coûts de l'énergie finale très élevés. Elles ne seront consommables que par une minorité financièrement privilégiée. On ne peut prétendre à ce qu'elles deviennent « l'énergie des pauvres ».

Maîtriser les consommations d'énergies permettrait de détendre la situation, mais ne changera rien au problème de fond qui sera à l'évidence reporté dans le futur. Une bonne réduction des consommations nécessite de s'appliquer en priorité à ceux qui consomment le plus, les riches et les privilégiés. Le problème est qu'ils sont aussi les décideurs. Ils trouvent dès à présent, sans difficulté dans les discours écologiques (maîtrise, renouvelables, effet de serre...), les bases idéologiques motivant l'élaboration de la future société totalitaire. Une grande catastrophe du genre Tchernobyl peut, dès aujourd'hui, en précipiter l'avènement.

Claude Boyer - août 2005.