Vingt mille tonnes de déchets dorment près de Paris


Le Bouchet en 1961, voir: La plaquette de présentation du centre du Bouchet en Pdf, 4,2 Mo (1961),
lire:
Le Bouchet, berceau du nucléaire,

 

 

Le Bouchet: où en est-on ?
Se conformant à un arrêté préfectoral, le CEA a recouvert le site en 1993 d'argile compactée, de gravier, et de terre arable. Lire: A propos du Bouchet (Gazette Nucléaire n°161/162, 1997).

 

 

Le Monde, 15 novembre 1990:
Pour limiter les émissions radioactives du radon
Des experts recommandent de recouvrir le site du Bouchet d'une couche de terre (en Pdf)

 

 

Le Parisien, 6 novembre 1991:
Le préfet met les pieds dans la décharge radioactive

 

 

Le Républicain de l'Essonne, 19 septembre 1991:
Décharge radioactive du Bouchet, vers un réaménagement du site ?

 

 

 

Libération, 14 novembre 1990:

Après la remise d'un rapport sur le site du Bouchet dans l'Essonne

Discorde sur une décharge nucléaire

Faut-il recouvrir de terre la décharge nucléaire du Bouchet ou procéder à des fouilles en sous-sol ? Le CEA et la Crii-rad divergent. En attendant du radon, gaz radioactif, s'en échappe toujours.

La polémique rebondit à propos de la décharge nucléaire du Bouchet près d'Itteville dans l'Essonne (voir Libération 6/9/90), où 20 000 tonnes de déchets radioactifs ont été enterrés naguère par le CEA (Commissariat à l'énergie atomique) et d'où se dégage une quantité anormale de radon, du gaz radioactif, issu de résidus de radium (1).

Un rapport établi par Henri Sergolle, directeur de l'institut de physique nucléaire d'Orsay, a été remis au Premier ministre et au ministre de l'Environnement. Sa recommandation principale est claire: « La solution envisageable consiste à abaisser le flux du radon et donc l'émanation de radioactivité, en recouvrant le terrain d'une couche suffisante de matériau adapté (terre, argile...) ». Il devrait alors être possible de faire « chuter le taux de diffusion (du gaz radon) d'un facteur de l'ordre de 100. écartant ainsi tout danger ».

Pas d'accord, estime la Crii-Rad (Commission de recherche et d'information indépendante sur la radioactivité). « Ce site doit être considéré comme un stockage de substances radioactives et rangé parmi les installations classées pour la protection de l'environnement » (loi du 19 juillet 1976). « II doit être soumis au minimum à un régime de déclaration, avec toutes les astreintes afférentes: dispositifs de contrôle, conditionnement des substances radioactives, bâtiments appropriés, etc. ». La réhabilitation, envisagée en recouvrant simplement l'endroit d'une couche de terre ne lui semble vraiment pas adéquate. « Il y a des déchets dans cette décharge avec des activités telles qu'il faut les reconditionner. Du radium, très radiotoxique, ce n'est pas acceptable ! » Et de réclamer (ce qui est d'ailleurs mentionné dans le rapport) une « expertise par carottage du sol ».

Autrement dit. il faudrait se décider à aller véritablement fouiller les terrains. avec une méthodologie rigoureuse, en particulier un « bassin de décantation » et le « parc des hydroxydes », deux zones particulièrement radioactives. Mais, selon le rapport Sergolle. « l'exigence des carottages n'est pas retenue ». La Crii-Rad, associée aux réunions de travail ayant donné naissance à ce rapport, regrette que ce dernier ait été publié « sans qu'on nous ait demandé notre avis. Cette commission n'a pas le droit de statuer sur la réhabilitation du site. Il faut appliquer la loi ». En l'occurrence, on peut se demander au jourd'hui comment va réagir le ministère de l'Environnement sur cette affaire.

(1) Lire notre grande enquête sur Gif-sur-Yvette (Essonne) parue hier, où l'on voit que le radium cause décidément de nombreux problèmes.

Dominique Leglu

 

 

Le Parisien, 13 novembre 1990:

RADIOACTIVITE

Décharge d'Itteville: le danger est réel, affirme la commission d'enquête

La décharge radioactive d'Itteville devrait être bientôt recouverte de terre. Mais la polémique rebondit sur le danger actuel du site.

Bien curieux, l'empressement du Commissariat à l'énergie atomique à récupérer les conclusions de Henri Sergolle.

Le directeur de l'Institut de physique nucléaire d'Orsay présidait la commission chargée de faire la lumière sur la décharge radioactive d'Itteville (Essonne). Son rapport a été rendu public hier. Immédiatement, le C.E.A. a livré son interprétation: « Les conclusions du professeur Sergolle confirment que le terrain ne présente aucun risque sanitaire pour la population et valident les solutions proposées par le C.E.A. pour son réaménagement », affirme Yves Romestan, chef du service information presse.
« Je n'ai jamais dit ça ! », réplique Henri Sergolle, étonné par cette affirmation du C.E.A. « Le danger actuel du site n'est pas anodin », poursuit le scientifique, mettant les responsables du nucléaire français en porte à faux. En effet, Henri Sergolle n'a jamais conclu sur l'absence de danger. Il écrit dans son rapport: « La solution consiste à abaisser le flux de radon et donc l'émanation de radioactivité, en recouvrant le terrain d'une couche suffisante de matériau adapté. Il est raisonnable d'espérer faire chuter le taux de diffusion d'un facteur de l'ordre de 100, écartant ainsi tout danger. » Une formulation qui n'a pas grand chose à voir avec celle du C.E.A.
Il reste que le terrain devrait être tout de même recouvert sans avoir livré tous ses mystères. « Une fois encore, le C.E.A. se place au dessus des lois. On doit avant tout se livrer à des carottages, de nouvelles mesures avant de se prononcer sur la dangerosité du site », affirme Michèle Rivasi, présidente de la CRIIRAD, un laboratoire indépendant qui a effectué des mesures sur le site. Quant au maire d'Itteville, Michel Fayolle, il affirme que « les taux de radon dans les habitations sont dix fois sous les normes ».

La décharge, elle, va bientôt être recouverte par plusieurs mètres de terre, et emporter pour toujours son secret...

Gilles Verdez

 

 

Extrait de La Gazette Nucléaire, n°105/106:

Le Bouchet a priori gérés par le CEA à été laissés sans surveillance pendant une quinzaine d'années. Le Bouchet situé sur la commune d'Itteville envoie ses émanations sur Ballancourt. Ce centre a traité le minerai d'uranium nécessaire pour les réacteurs et les bombes de 1946 à 1971. Ce qui reste à traiter: le bassin de décantation et le parc à hydroxyde (10.000 m2), ce qui reste à vérifier: tout le site qui a été rendu à la SNPE (Société Nationale des Poudres et Explosifs, l'armée en un mot).


Le Bouchet interventions GSIEN
(Si vous voulez les dossiers critiques, demandez-les et la Gazette vous les enverra).

 

 

Orsay, le 9.11.1990

Monique SENÉ
Présidente du GSIEN
2, rue François Villon
91400 ORSAY 

Monsieur le Maire 91760
ITTEVILLE

Objet: Réhabilitation du site du Bouchet.
Référence: Lettre du 6 novembre 1990

     Monsieur,
     J'ai recu votre courrier du 6 novembre 1990 cité en référence. Il appelle les remarques suivantes:
     Les règles de fonctionnement du groupe de travail n'ont pas du être comprises de la même façon par tous les participants. A la suite d'une remarque justifiée des représentants du CEA lors de la réunion du 19 octobre 1990, il avait été clairement décidé que les comptes rendus seraient relus et acceptés par TOUS les membres avant diffusion. Aucune réunion à laquelle les représentants des associations auraient été conviés n'a permis une telle relecture et donc, une acceptation de ce compte rendu.
     Je considère ce texte, signé par Mr Sergolle, comme, à la rigueur, un document de travail mais certainement pas comme un rapport définitif et je ne m'associe en aucun cas aux conclusions de ce document.
     Dans ces conditions, j'estime qu'il était prématuré d'envoyer un tel rapport à Monsieur le Premier Ministre et à Monsieur le Ministre de l'Environnement. En faisant cet envoi, vous avez trahi la confiance des Associations et vous avez induit en erreur les instances officielles.
     En tant qu'expert agissant à la demande des associations, j'estime que le dossier est loin d'être clos et qu'il est indispensable d'en continuer l'instruction en respectant un minimum de règles tant sur le plan scientifique que sur celui de la démocratie.
     Espérant une prompte réponse, recevez, Monsieur le Maire, mes salutations.

La Présidente
Monique Sené

Copie: Monsieur le Premier Ministre
Monsieur le Ministre de l'Environnement
Associations

-------------------------------------------------------------------------------------------

 

Orsay, le 11.11.1990

GSIEN
La Gazette Nucléaire
2, rue François Villon
91400 ORSAY

Monsieur le Professeur J. TEILLAC
Haut-Commissaire
31-33, rue de la Fédération
75015 PARIS

     Monsieur,
     Lors de la réunion du Conseil Supérieur de la Sûreté et de l'Information Nucléaire du 10 octobre, il nous a été remis une fiche d'information concernant le site de l'ancienne usine du Bouchet.
     Pour compléter mon information, j'ai consulté la note technique remise aux membres de la commission réunie autour de Monsieur le Maire d'Itteville.
     Cette «Note technique relative aux dépôts de résidus de l'ancienne usine CEA du Bouchet» (DCENS/SPR/ 90-329 JM/cj) datée du 2 octobre 1990 appelle de ma part de nombreuses remarques, mais dans un premier temps je me contenterai de vous citer ce qui me semble le plus inacceptable dans un rapport provenant d'un service du Commissariat chargé de la radioprotection.
     Le tableau 2, page 16, donne une récapitulation des prélèvements effectués dans les zones de dépôts entre 1970 et le mois de juillet 1990:
     - 87 échantillons sont dénombrés provenant de 75 points de prélèvement
     - 58 de ces points de prélèvement ne sont pas localisés, ni en position, ni en profondeur.
     Ceci pourrait donner à penser que, dans le passé, le suivi environnement des déchets n'était pas effectué par le CEA avec tout le sérieux scientifique auquel nous aurions pu nous attendre. Malheureusement, la lecture de cette récapitulation fait apparaître que ces errements datent des années 1970 à 1981. Il ne s'agit plus de l'époque héroïque des balbutiements de l'énergie nucléaire.
     Cet état de chose est inacceptable de la part d'un organisme qui se doit d'être irréprochable puisqu'il est le support technique des services édictant les réglementations.
     D'autre part, je m'étonne que les autorités de santé n'aient jamais relevé ces carences.
     Je vous joins une analyse détaillée de ce dossier effectué par le GSIEN et remise le 19 octobre 1990 au groupe de travail réuni autour de Monsieur le Maire d'Itteville.
     Je reste à votre disposition pour tous renseignements complémentaires.
     Je vous prie d'agréer, Monsieur le Haut-Commissaire, l'expression de mes sentiments les meilleurs.

Raymond Sené

-------------------------------------------------------------------------------------------

 

Interventions CRII-RAD
Valence le 12.11.1990

La réhabilitation illégale du site du Bouchet

     M. Sergolle a remis un rapport final sur le site d'Itteville au nom de la Commission Scientifique mise en place par le Maire. Ce rapport prétend refléter la position unanime des différents membres de cette commission.
     Les conclusions de ce rapport n'ont même pas été discutées avec les membres de la commission. Rappelons que la CRII-RAD avait souligné que les chiffres du CEA ne permettaient pas une appréciation correcte de la contamination du site et demandé instamment qu'une évaluation par carottage soit menée méthodiquement pour évaluer les déchets stockés.
     Quoiqu'il en soit, la CRII-RAD est en total désaccord avec les conclusions de ce rapport. En effet:
     - d'une part, de l'avis même du Ministre de l'Environnement et aux termes de la loi du 19 juillet 1976, ce site doit être considéré comme un stockage de substances radioactives et rangé parmi les Installations Classées pour la Protection de l'Environnement. Les activités stockées étant supérieures à 3,7 millions de becquerels de radioéléments du groupe 1, le site doit être soumis au MINIMUM à un régime de déclaration, avec toutes les astreintes afférentes (dispositifs de contrôle, conditionnement des substances radioactives, bâtiments appropriés...).
     - d'autre part, si l'on s'en tient aux chiffres fournis par le CEA concernant les 2.000 tonnes de déchets stockés dans le bassin de décantation et 2.500 tonnes de déchets stockés dans le parc à hydroxydes, on constate que les limites régissant les centres de stockage en surface (370.000 Bq/kg pour les émetteurs a), sont largement dépassées.
     En conséquence, la Commission n'a aucunement le droit de statuer sur une quelconque réhabilitation du site: la contamination est telle que le site doit être géré comme un centre de stockage et astreint à toutes les dispositions prévues par la loi pour assurer la protection des populations.

Michèle Rivasi
Présidente de la CRlI-RAD
Valence, le 9.10.1990

-------------------------------------------------------------------------------------------

 

Décharge d'Itteville
Des déchets soit disant «faiblement radioactifs»

et pourtant HORS NORMES du point de vue
de la réglementation des centres de stockage.

     La réglementation concernant les centres de stockage à long terme de déchets radioactifs stipule que l'activité moyenne des colis de stockage ne doit pas dépasser 370 MBq d'émetteurs a par tonne.

MBq/t: lire Mégabecquerel par tonne. 1 MBq = 1.000.000 Bq
GBq/t: lire Gigabecquerel par tonne. 1 GBq = 1.000.000.000 Bq

     Or, les activités massiques des «stériles de minerais» ainsi que les appelle improprement le CEA, sont de 413 MBq/t de radium 226, soit, étant donné la présence de 4 émetteurs a, descendants du radium 226 et en équilibre avec lui: 413 x 5 = 2.065 MBq/t de matière sèche soit 1.038,5 MBq d'émetteurs a par tonne de poids humide. Et ceci concerne 2.000 tonnes de déchets stockés dans le bassin de décantation.
     Dans le parc à hydroxydes, sont stockés 2.500 tonnes dont l'activité massique en radium 226 est de 156 MBq/t. On a donc, pour les mêmes raisons que précédemment: 156 MBq/t x 5 = 780 MBq/t d'émetteurs a par tonne de poids sec, soit 390 MBq d'émetteurs a par tonne de poids humide. Il faut ajouter, l'uranium 235 et ses descendants, ce qui donne: 56 MBq/t x 5 = 280 MBq/t de poids sec, soit 140 MBq d'émetteurs a par tonne de poids humide.
     On a donc, au total, pour le parc à hydroxydes: 1.060 MBq/t de poids sec d'émetteur a, soit 530 MBq/t en poids humide. La limite maximale est donc là aussi dépassée, alors qu'en outre, en ce qui concerne la chaîne de l'uranium 238, l'activité est sous estimée puisque le calcul ne concerne que le radium 226 et ses 4 descendants émetteurs a, les précurseurs du radium n'ayant pas été mesurés par le CEA.
     Une autre limite est fixée concernant l'activité maximale en émetteurs a: elle est de 3,7 CBq/t. Or un calcul identique au précédent indique pour l'échantillon n° 67 (cf. tableau 5 page 22) une activité massique en émetteurs a de 2,5 GBq/t. Ce qui donne: 2,5 x 5 = 12,5 GBq/t de poids sec, soit 6,5 GBq d'émetteurs a par tonne de poids humide. Le dépassement de la limite aurait dû entraîner une procédure exceptionnelle et obtenir l'agrément spécifique de l'exploitant du centre de stockage.
     On est donc loin des déchets annoncés «faiblement radioactifs» il y a 6 mois par le responsable de la décharge. Ce d'autant plus que cette réglementation correspond au stockage de colis de déchets, enrobés et conditionnés, entreposés dans des centres de stockage à long terme (cf. Règle Fondamentale de Sécurité 8 novembre 1982 révision 1: 19 juin 1984). Il est à noter que l'absence d'enrobage des déchets ne peut être envisagée que pour des «déchets de très faible activité» (cf. Art. 6.4), ce qui n'est évidemment pas le cas, puisque l'on est en dépassement des limites.
     L'absence de gestion de cette décharge est un bon révélateur de ce qu'il faut absolument éviter dans les futurs laboratoires souterrains - soumis aux contrôles des mêmes organismes de tutelle - et d'une manière plus générale dans tous ce qui concerne la gestion des déchets radioactifs.

François Mosnier
Responsable du Laboratoire

-------------------------------------------------------------------------------------------

 

Décharge d'Itteville: synthèse de la CRII-RAD
Valence, le 6.09.1990

     A la demande de l'association «Les Amis de la Terre» et des «Verts Ile-de-France», la CRII-RAD a procédé à différentes analyses à proximité du site de stockage d'Itteville dans l'Essonne.
     Deux séries de trois mesures de radon 222 à l'air libre ont été effectuées, respectivement du 20 au 22 mai 90 et du 24 au 26 juin 90 (cf. carte de localisation des points de prélèvement).
     Les niveaux mesurés varient de 171 Bq/m3 à 14.110 Bq/m3 (cf. fiche de résultats d'analyses). Ces niveaux sont très élevés, notamment ceux mesurés à promimité du parc à hydroxydes (point de prélèvement n°63).
     A titre de comparaison, le taux de radon extérieur en région parisienne, bien que fluctuant avec le lieu, l'heure et la saison, est généralement inférieur à 10 Bq/m3. Une heure d'inhalation d'air à 10.000 Bq/m3 entraîne une dose de 7 mRem (Réf. NRPB GS-6) ce qui correspond à la dose reçue habituellement pendant un an par la population de la région parisienne qui passerait 3 heures par jour à l'extérieur. Sur un site minier en exploitation (St-Sylvestre), évalué en juillet 89 par notre laboratoire, le niveau de radon variait entre 100 et 1;080 Bq/m3; sur un site minier non-exploité (Nègremont), évalué au même moment, il variait de 22 à 200 Bq/m3.
     Les points de mesures du radon ne correspondent pas à des zones de passage. Toutefois, cette zone est accessible au public, alors qu'aucune indication ne fait état de son insalubrité. D'autre part, il reste à évaluer les niveaux de radon présents dans l'environnement plus lointain et plus passant. En tout état de cause, il paraît peu sérieux de la part du CEA d'envisager une restitution du site à usage domestique moyennant simplement quelques travaux de terrassement. Rappelons que plus les quantités de radon inhalées sont importantes, plus grand est le risque de développer un cancer du poumon.
     Le radon 222 est un gaz radioactif qui provient de la désintégration du radium 226. Un taux de radon très élevé (10.000 Bq/m3) est donc un indicateur de quantités de radium 226 très importantes présentes dans la décharge.
     Le point le plus important nous semble donc l'évaluation des quantités exactes de radioéléments stockées dans la décharge et notamment les quantités de radium 226. En effet, ce corps radioactif très radiotoxique (plus que le plutonium) est très soluble dans l'eau. Tout stockage est donc susceptible de donner lieu à des phénomènes de lessivage du radium qui va ainsi se trouver dans les eaux de ruissellement ou de nappe et contaminer l'environnement.
     Deux mesures ont été effectuées dans l'eau, à promixité du site (cf. fiche de résultats d'analyses). Elles ne montrent pas de présence de radium 226. Cependant, deux autres analyses effectuées sur des sédiments et des mousses montrent qu'à certaines occasions, il y a bien contamination en radium 226 par lessivage ou par phénomène éolien (cf. fiche de résultats d'analyses). Il est donc nécessaire de faire un bilan plus global, et plus systématique dans le temps, de la contamination en radium 226 de l'environnement.
     En effet, lorsqu'il est ingéré, ce corps radioactif très radiotoxique se fixe à la surface des os, provoquant ainsi leucémie et cancer des os. Lorsqu'il est inhalé (par exemple après mise en suspension éolienne), il provoque le cancer du poumon. A titre indicatif, l'absorption d'une eau qui serait contaminée à 1 Bq/l de radium 226 consommée régulièrement entraînerait une dose annuelle de:
     - 66,4 mRem chez un enfant de 1 an
     - 26,4 mRem chez un enfant de 10 ans
     - 21,7 mRem chez un adulte
(Ref. ISH 1985)
     En conclusion, les niveaux mesurés en radon 222 par le laboratoire de la CRII-RAD sont en contradiction avec les valeurs données dans la publication du CEA de mai 1990. Le CEA n'a donc pas fait un contrôle rigoureux et précis de la décharge d'Itteville, qui est pourtant sous sa responsabilité.
     Il nous paraît donc urgent de procéder à une contre-expertise pour déterminer tous les radioéléments présents et leur quantité. Seule une étude plus poussées permettrait de voir s'il existe des points d'accumulation plus importants et d'apprécier l'impact de la décharge sur la chaîne alimentaire et l'environnement.

Michèle Rivasi
Présidente de la CRII-RAD

-------------------------------------------------------------------------------------------

 

Dossier CEA

     Pour éviter tout commentaire sur le dossier d'Itteville destiné à acréditer l'idée que les associations ont grossi leurs problèmes d'accès au dossier, voici la présentation des dossiers CEA successifs. Bien sûr, le dernier en date d'octobre 90 n'est pas présenté parce que trop épais (80 pages), mais il y a un commentaire à son sujet (la note remise au Conseil Supérieur tenait sur un ticket de métro d'où la nécessité de consulter d'autres notes). Mais de notes en notes, on constate une constance remarquable du CEA dans la non présentation des archives du site.
     Il y a également un problème d'interprétation de la loi à propos des dépôts et décharges.
     Et il y a un problème de suivi du site. 58 points sont non localisés, ce qui exclut de faire une véritable étude de la radioactivité.
     Les deux derniers points sont:
     - on ne peut pas faire de travaux si on ne connaît pas la cartographie du site. D'une part, on risque d'irradier et contaminer le personnel, d'autre part que va-t-il se passer pour l'environnement?
     - on ne peut pas rendre un site avec des restrictions du genre «ne pas faire de construction nécessitant des fouilles de plus de 50 cm». On a vu le résultat à Gif-sur- Yvette où on a dû décontaminer des pavillons construits dans le coin de la route du radium.
     Quant au planning des travaux, il était déjà tout prêt.
     L'inconvénient est que les mesures de la radioactivité fournies jusqu'à ce jour sont inexploitables et ne permettent aucun suivi. On ne voit pas pourquoi les mesures qui seraient fournies maintenant seraient mieux. Sans la CRI/-RAD, le dossier serait resté vide. Il nous faut continuer à exiger un véritable assainissement du site.

Centre du Bouchet
Aménagement de l'aire de stockage de résidus résultant de la fabrication de combustible

1. Généralités
     - Date de création du Centre: 1946
     - Mission: fournir l'oxyde d'uranium destiné à la préparation du combustible de ZOE (premier réacteur expérimentaI français), traitement des concentrés uranifères et mise au point des procédés de fabrication des combustibles des centrales uranium naturel - graphite gaz.
     - Fermeture du Centre: 1er octobre 1971.
     Les terrains et bâtiments constituant le Centre ont fait l'objet d'un bail passé en 1948 entre la Direction Administrative du Commissariat à l'Energie Atomique (CEA) et la Direction des Poudres au Sous-Secrétariat d'Etat à la Défense Nationale.

2. Assainissement radioactif du Centre
     Après quelques travaux effectués par la Direction des Productions en 1971, l'assainissement est entrepris à partir du 1.1.1972 sous la responsabilité du Directeur du CEA-CEN/SACLAY*; il s'achèvera en mai 1979, par la remise des locaux et terrains à la Société Nationale des Poudres et Explosifs (SNPE).
     Cette remise à disposition effectuée après contrôle du Service Central de Protection contre les Rayonnements lonisants (SCPRI) est assortie d'une convention qui prévoit en particulier l'intervention du Service de Protection contre les Rayonnements (SPR) du CEA-CEN/SACLAY en cas de travaux d'affouillement; cette clause a été mise en application à plusieurs reprises (avril 77, juin 78, juin 79, juillet 83).

Bilan général d'assainissement:
     Décontamination de 10.400 m2 de surfaces verticales ou horizontales de bâtiments et de 28.000 m2 de terrains ou de surfaces aménagées.

3. Dépôt de résidus extérieur au Centre, pour lequel la consultation du SCPRI est en cours

     Si les travaux d'assainissement du Centre sont terminés, il subsiste à proximité un dépôt annexe constitué par le bassin de décantation et le parc à hydroxydes.

3.1. Bassin de décantation
     · Surface du terrain: 10.500 m2 (appartenant à la SNPE)
     · Surface utile: 5.000 m2
     · Contenu: 15.000 tonnes environ de boues et terres (activité totale en Ra226**: 15 curies).

3.2. Parc à hydroxydes
     · Surface: 3.500 m2 (appartenant à la SNPE)
     · Sont entreposés environ 2.000 tonnes d'hydroxydes et 2.500 tonnes de terres (activité totale en 226 Ra: 5 curies).

4. Surveillance de l'environnement

4.1. Surveillance des eaux - 226 Ra
     Les eaux de surface font l'objet de prélèvements et de mesures tous les 3 mois depuis 1982. Points de prélèvements: 122/amont et 125/aval (Juine) et P5 (Ruisseau Centre de Recherche du Bouchet).
     Les 3 points de prélèvements sont indiqués sur la figure 1: la valeur moyenne se situe au niveau du 2/1.000 de la valeur admise pour le public (limite dérivée de la concentration dans l'eau pour le public) et la valeur maximale est de l'ordre de 1% de cette même limite. Ces valeurs correspondent à l'activité moyenne des eaux de surface en France.

4.2. Mesures de rayonnements
     Les valeurs indiquées sur le schéma joint (figure 2) montrent que l'irradiation en limite de site est toujours sensiblement inférieure à la limite d'exposition pour une personne du public qui y séjournerait en permanence.

     Les aménagements prévus réduiront encore ces valeurs pour les amener au niveau de la radioactivité naturelle de la région.

4.3. Mesures du radon
     Des mesures récentes faites par l'Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire (IPSN) ont montré que pour le point le plus exposé, c'est-à-dire le poste de garde du Centre de Recherche du Bouchet, la valeur atteinte correspond à l'activité moyenne du radon dans les habitations françaises. Elle sera encore réduite après les aménagements projetés.

     Commentaire Gazette: L'activité de 1 millicurie par tonne classe ce dépôt dans la catégorie installation soumise à autorisation, d'autant plus que la quantité totale «stockée» sur le site est de l'ordre de 50 Curies.


* CEN/SACLAY: Centre d'Etudes Nucléaires de Saclay.
** Le radium 226 est un élément naturel présent dans tous les minerais uraniféres. Rapportée au tonnage, cette activité est de 1 millième de Curie par tonne, ce qui est considéré comme faible.

 

 

ASSAINISSEMENT DU TERRAIN ANNEXE DE L'ANCIENNE USINE DU BOUCHET

     L'assainissement de l'ancienne usine CEA du Bouchet s'est terminé en 1979 par la remise à disposition de la SNPE de différents terrains et bâtiments situés au nord de l'Avenue de la Gare, reliant Itteville à Ballancourt.
     Un terrain annexe, situé de l'autre côté de cette Avenue de la Gare, va faire à son tour l'objet d'une opération de remise en état.
     Ce terrain de 14.000 m2 est occupé, d'une part par un ancien bassin de décantation et, d'autre part, par un stockage de résidus de traitement de minerai d'uranium.
     Les matériaux ainsi stockés sont stables chimiquement mais présentent une radioactivité naturelle résiduelle. Cette radioactivité est assez faible pour que l'on ait pu garantir l'innocuité du terrain vis-à-vis de l'environnement, des contrôles[1] précis, effectués régulièrement depuis 1982, ont permis de le vérifier.
     Par ailleurs, des relevés systématiques effectués dans les cours d'eau avoisinant donnent un taux de radioactivité 10 à 1.000 fois inférieur aux normes tolérées pour la fréquentation humaine permanente[1].
     Mais ce terrain est inutilisable dans son état actuel (présence de monticules, dépression de la fosse de décantation ... ). Par ailleurs, des progrès ont été accomplis pour améliorer encore les conditions de stockage de déchets faiblement radioactifs tels que ceux qui sont ici à prendre en compte. Le CEA va donc entreprendre les travaux nécessaires pour rendre le terrain à la SNPE dans un état proche de son état initial, tout en réduisant encore sa radioactivité pour la ramener au niveau de celle des terrains environnants.
     La solution technique retenue a été proposée aux autorités de sûreté (SCPRl). Elle se décompose en deux temps: disposer uniformément les résidus dans le bassin de décantation, et recouvrir l'ensemble de matériaux essentiels naturels (argile, sable, terre végétale).
     Des restrictions d'utilisation sont, au demeurant, à envisager:
     - pas de construction sur la partie bassin de décantation, une évidence, ne serait-ce qu'en terme de stabilité,
     - pas de construction nécessitant des fouilles de plus de 50 cm sur le reste du terrain.
     La SNPE les a formellement acceptées.
     Les conditions techniques et juridiques sont donc actuellement réunies pour entreprendre à mener à bien l'assainissement final de ce terrain en vue de sa restitution à la SNPE.
     La durée des travaux est prévue sur une année, période durant laquelle le CEA poursuivra ses contrôles avec la même régularité que ceux effectués depuis 1982, mettant en place parallèlement des mesures spécifiques complémentaires, assurant de cette manière une pleine sécurité.
     Enfin, à l'achèvement des travaux, un dispositif de surveillance de l'environnement, au plan de la radioactivité et de son évolution, sera mis en place selon les directives du service central de protection contre les rayonnements ionisants (SCPRl).

1. L'ensemble des résultats de ces contrôles peuvent être obtenus sur demande auprès du CEA/UDIN/FAR.
NDLR: N'hésitez pas à les demander, cela vous permettra de constater que les relevés ne sont pas faits sur le site des bassins.

 

RÉAMÉNAGEMENT DU TERRAIN (22 AOÛT 1990)

Le site et son environnement

     La connaissance des éléments radioactifs présents sur le site et l'expérience acquise sur les terrains comparables sur les sites miniers montrent que les nuisances potentielles sont liées d'abord au radon, ensuite au radium et de façon très secondaire à l'uranium. Ce terrain contient une vingtaine de grammes de radium.

Qu'est-ce que le RADON ?

     C'est un gaz radioactif que l'on rencontre surtout dans les sols et la basse
atmosphère.
     C'est un gaz rare de la famille des krypton, argon, xénon. Il existe depuis la nuit des temps puisqu'il est issu de la désintégration du radium, lui-même descendant de l'uranium naturel.
     Son "père", le radium, est plus ou moins présent dans les roches. Le radon, ainsi formé, se glisse par toutes les fissures, interstices et pores du sol et des matériaux de construction, pour arriver à l'air libre. On le trouve partout, même dans les eaux. Sa teneur varie suivant la nature des sols et la facilité qu'il a de pouvoir en sortir.
     Il produit lui-même des descendants radioactifs solides. Son activité est exprimée en becquerels par m3 (Bq/m3) d'air.
     A l'air libre, la teneur en radon dépend:
     - de la nature du sol: dans le bassin parisien, reglon sédimentaire pauvre en uranium, la teneur moyenne annuelle atteint, et parfois dépasse, 20 Bq/m3, tandis que dans les régions granitiques (Bretagne, Limousin, Massif Central, Vosges), elle peut aller jusqu'à 200 Bq/m3. Au-dessus des océans, la concentration du radon est à peine décelable (moins de 1 Bq/m3);
     - des conditions de diffusion dans l'atmosphère: lorsqu'elles sont défavorables, c'est-à-dire la nuit et par temps de brouillard, des teneurs 10 à 20 fois plus élevées sont mesurées.
     A l'intérieur des habitations, la teneur en radon est généralement plus élevée qu'à l'air libre. Elle dépend principalement de la nature du sol, mais d'autres facteurs interviennent: essentiellement la ventilation des locaux. Les études faites ces dernières années en France montrent que les teneurs varient de 10 à 200 Bq/m3 ; 80% d'entre elles sont inférieures à 100 Bq/m3. Des valeurs de quelques milliers de Bq/m3 ont été mesurées dans des maisons mal ventilées, en granit, sur sol granitique.
     L'inhalation est la voie d'exposition de l'homme par le radon et ses descendants radioactifs.
     Pour le public qui est soumis à de faibles doses, aucune conséquence sanitaire en relation avec l'exposition au radon n'a été mise en évidence.
     Toutefois, la Commission des Communautés Européennes propose l'adoption de mesures de réduction dans les maisons anciennes à partir de 400 Bq/m3. 
La concentration de radon qui varie de façon importante selon les conditions atmosphériques et l'heure a fait l'objet d'une surveillance sur le site et son environnement. Elle atteint les valeurs suivantes:
    · Plusieurs milliers de becquerels par m3 d'air en moyenne, sur le terrain. La concentration est proche de la limite pour les travailleurs qui y séjourneraient tout leur temps de travail.
     · Plusieurs centaines à un millier de becquerels par m3 d'air en moyenne à la clôture.
     · L'activité sur les voies de passage aux abords du terrain (avenue de la Gare et Chemin rural n°10) avoisine la limite imposée par la réglementation pour le public qui y séjournerait de façon permanente.
     Cette activité est comparable à celle que l'on trouve, à l'intérieur de maisons de régions granitiques telles le Limousin ou la Bretagne.
          · L'activité décroît ensuite très rapidement à quelques centaines de mètres pour rejoindre la valeur de la région parisienne (15 à 20 Bq/m3 d'air).
     Quant au radium et à ses descendants solides, les contrôles réguliers n'ont pas mis en évidence plus que des traces d'un passage dans les eaux de surface (Juine, bras de l'Essonne, étang des hirondelles) ou dans les eaux souterraines (stations de pompage et puits de jardin). Il faut souligner qu'il se trouve dans le terrain mélangé à la terre, sous forme quasiment insoluble.
     La radioactivité du radium mesurée dans les eaux de surface et les eaux souterraines autour du site est inférieure ou proche du seuil détectable (0,22 becquerel par litre).
     La limite de concentration pour le public est de 7,4 Bq/l. Certaines eaux minérales présentent une concentration supérieure à 1 Bq/l.
     Notons, enfin, pour être complet, que les produits radioactifs émettent un rayonnement mesurable sur le terrain lui-même. Mais il devient très faible dès les abords immédiats et il ne pose pas de problème pour l'environnement.
     Une campagne de mesures de concentration en radon à l'intérieur des habitations qui durera plusieurs mois vient de s'engager en concertation avec les mairies concernées à Itteville et à Ballancourt.
     Les résultats des surveillances effectuées par le CEA sont communiqués au Préfet, aux mairies et aux administrations.

Le réaménagement du terrain

     Le terrain est réaménagé pour permettre sa restitution à son propriétaire, la SNPE.
     Il s'agit d'opérations de nettoyage, d'applanissement, de recouvrement par une couche d'argile puis de terre végétale.
     Ce réaménagement permettra de réduire de façon importante les émissions de radon ainsi que le rayonnement que l'on mesure sur le terrain lui-même et éliminera tout risque d'entraînement des terres par ruissellement: l'objectif recherché est de ramener sur le terrain lui même, la concentration de radon et le rayonnement aux niveaux de la région Ile de France.
     Les différentes étapes sont les suivantes:

1. Etat initial


2. Travaux préliminaires (durée 8 semaines)
     · Aménagement du chantier
     · Evacuation des ferrailles
     · Débroussaillage du terrain.
     Une cartographie des émissions de radon et de rayonnement sera réalisée à la fin de ces travaux préliminaires.

3. Mise en place de la couche d'argile
     La durée prévue pour les travaux de terrassement (non compris le temps nécessaire pour la stabilisation des sols) est de 4 mois si les conditions météorologiques sont favorables.
     · Transfert des hydroxydes dans le bassin de décantation.

     · Mise en place d'un treillis métallique et d'une membrane géotextile permettant d'éviter le mélange des matériaux par les roues des engins de travaux publics au moment de la réalisation de la couche d'argile.
     · Mise en place de la couche de 30 cm d'argile.


4. Vérification des résultats obtenus
     A l'issue de cette phase, des mesures de radon et de rayonnement seront effectuées par le Service de Protection contre les Rayonnements du Centre de Saclay et l'Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire. D'autres laboratoires qui seraient intéressés pourront y être associés.
     Si les résultats sont insuffisants, une couche d'argile supplémentaire sera mise en place.

5. Mise en place des matériaux de recouvrement
     Les matériaux de recouvrement sont constitués d'une couche drainante puis de terre végétale (épaisseur 30cm).

6. Travaux de finition
     · Engazonnement
     · Rectification du carrefour.
     Des échantillons, notamment de flore et de terre prélevés pour conservation à chacune de ces étapes pour conserver une mémoire du terrain.
     Les travaux sont réalisés sous la responsabilité du Directeur du Centre de Saclay par une unité spécialisée du CEA.
     Ils sont effectués en concertation avec l'Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire sous l'autorité du Préfet et sous le contrôle de la Direction Régionale de l'Industrie et de la Recherche (DRIR)
     Les mesures finales de radon et de rayonnement seront effectuées sous le contrôle du Service Central de Protection contre les Rayonnements lonisants du Ministère de la Santé (SCPRI).
     La restitution du terrain à la SNPE, propriétaire, se fera après l'achèvement complet des travaux de réaménagement.
     Le dossier formalisant la demande de travaux synthétisée dans ce document a été déposé en Préfecture (Bureau de l'Environnement) et fait l'objet d'une instruction dans le cadre de la réglementation relative aux Installations Classées pour la Protection de l'Environnement. Les travaux ne pourront être engagés qu'après qu'ils auront été autorisés par un arrêté préfectoral après avis du Conseil Départemental d'Hygiène.

 

 

PETIT LEXIQUE DESTINÉ À CEUX QUI ONT AFFAIRE AU CEA

Différence entre dépôt et décharge
     D'après le CEA, Itteville et Saint-Aubin sont des dépôts. C'est-à-dire que ce sont des endroits où on dépose des produits nocifs: endroit surveillé en permanence par une présence sur site et par des mesures dans l'environnement.
     Les décharges sont les endroits où on met ce qu'on veut oublier. De toute façon, les décharges doivent aussi être surveillées mais comme ce sont seulement des installations classées, on ne peut pas y mettre de produits radioactifs (aucun émetteur a par exemple). 

Différence entre assainir et réhabiliter
     D'après le CEA, assainir signifie que le site est rendu à son propriétaire mais qu'il y a des restrictions quant à son utilisation et qu'il faut encore surveiller l'environnement.
     Réhabiliter signifie que l'on rend le site sans astreinte.
     Une fois ces prémices posés, on pourrait peut-être partir des textes. Pour ne prendre que le Groupe 1 qui rassemble surtout les éléments émetteurs a, les dépôts et stockage sous forme de source non scellée sont limités à:
     - Activité totale égale ou supérieure à 0,1 Curie (3.700 mégabecquerels) mais inférieure à 1.000 Curies (37.000 gigabecquerels). L'installation est soumise à déclaration.
     - Activité totale égale ou supérieure à 1 millicurie (37 mégabecquerels) mais inférieure à 100 millicuries (3.700 mégabecquerels), l'installation est soumise à déclaration.
     Donc Itteville, site du Bouchet, ne peut pas être une décharge conventionnelle: avec une estimation entre 20 et 100 g de radium (en prenant les chiffres CEA dont on ne peut être sûr) soit entre 20 et 100 Curies, il s'agit d'une installation soumise à autorisation.


 Monsieur Rocard et la sûreté nucléaire

     L'Express du 11 août 1989 a publié un entretien Cousteau/Rocard. Nous avons relevé la phrase suivante de Michel Rocard: «Pour la sécurité nucléaire, nous payons quatre fois plus que les Soviétiques et deux fois plus que les Américains».
     Ceci mérite quelques commentaires: nous citerons ici des extraits d'un rapport du 15 mai 1985 du Commissariat à l'Energie Atomique (CEA) concernant les «Principaux axes de recherches et de développements en sûreté nucléaire menées sous l'égide de l'Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire».
     Au chapitre III.1.2 : Efforts budgétaires, on trouve un tableau rapportant l'évaluation faite par la NRC (USA) pour les dépenses sur la recherche de sûreté nucléaire (en millions de dollars) en 1981:
     France: 30; RFA: 102; Japon: 139; Italie: 53; Canada: 11; U.K.: 50; Suède: 11.
     Le rapport du CEA fait quelques réserves sur la validité de ces chiffres et publie sa propre analyse pour les budgets annuels récents (en millions de francs):
     France: 400 dont 200 pour les réacteurs à eau légère  - USA: 1.500 dont 1.400 pour les réacteurs à eau légère -  RFA: 640 dont 450 pour les réacteurs à eau légère -  Japon: 800 dont 460 pour les réacteurs à eau légère -  UK: 550 dont 300 pour les réacteurs à eau légère.
     Ces chiffres fournis par les responsables français de la sûreté nucléaire sont éloquents.
     Il serait intéressant d'analyser quels sont les axes de recherche en matière de sûreté nucléaire. On verrait qu'une bonne partie des crédits ont servi à financer des programmes qui tentent de montrer que la sûreté a été exagérément développée et qu'on pourrait sans danger la réduire. Ceci abaisserait notablement le coût des installations.
     Le rapport mentionne un point important concernant la conception française en matière de sûreté: «Nous avons donc acquis une position remarquée sur la scène internationale. Cela nous est nécessaire pour nous opposer à des initiatives allant à l'encontre de nos intérêts comme celles qui viseraient à promouvoir des normes de sûreté américaines pour l'ensemble du monde ou encore comme celle d'un Institut International de Sûreté à tendance supranationale».
     Cela signifie que les promoteurs français de l'industrie nucléaire craignent que l'obligation de respecter des normes internationales de sûreté soit trop contraignante et gêne les possibilités d'Exportation des réacteurs nucléaires.
     Avoir une certaine souplesse vis-à-vis des normes de sûreté permet aux fabricants français de s'adapter aux exigences des pays acheteurs, en particulier de leurs possibilités financières ou techniques.
     Monsieur Mitterrand avait-il en tête ces considérations quand il négociait la vente de réacteurs nucléaires au Pakistan et se présentait ainsi: «L'expert, c'est moi» ? (voir Le Monde du 24 février 1990).

 

 

Le Monde, 11 juillet 1990:
Taux de radon record dans l'Essonne

 

 

Le Parisien, 28-29 avril 1990:

Vingt mille tonnes de déchets dorment près de Paris

Depuis 1971, cette « poubelle » radioactive voisine avec les onze mille habitants de trois communes de l'Essonne. Mais toute la zone pourrait être assainie cette année.

Ballancourt, Itteville, Vert-le-Petit (Essonne), trois villages d'apparence paisible.

Au centre de ce triangle, un terrain vague entouré de barbelés. Onze mille habitants qui ne soupçonnent pas la présence de vingt mille tonnes de déchets radioactifs à quelques centaines de mètres de leurs pavillons ! Un secret soigneusement dissimulé depuis vingt ans...

Les déchets sont « faiblement radioactifs: des stériles de minerai dans un bassin de décantation, des hydroxydes d'uranium dans un parc contigu », précise la direction de la Société nationale des poudres et explosifs (SNPE), propriétaire du terrain, dans son document confidentiel. En clair, de source officielle: « Pas dangereux, sauf si un homme y habite pendant dix ans ! »

D'après un spécialiste de l'unité de décontamination des installations nucléaires, « l'enclos va être assaini pour le rendre au propriétaire. Il était même question d'y installer un terrain de football ! Des mesures sont effectuées fréquemment, le taux de radioactivité est faible. Mais le Commissariat à l'énergie atomique est sur le qui-vive ! »

Les déchets proviennent de la décontamination de l'ancien C.E.A. du Bouchet, fermé en 1971. Jusqu'en 1979, la « décharge » a été remplie progressivement.

C'est le symbole des débuts difficile du retraitement des déchets nucléaires en France: la terre et l'eau ont été expédiées dans les mines de La Crouzille (Massif central). Le reste, des résidus de minerai, coûtait trop cher à transporter. Alors, des camions « balancent » les déchets dans un terrain vague, en face de la S.N.P.E.. Le terrain est clôturé, le tour est joué... A 40 kilomètres du sud de Paris, la première poubelle radioactive française est née.

« Les gens dans le secret, appellent le terrain le champ de la mort. Si on creuse, des tonnes de petit matériel utilisé lors de la décontamination vont apparaître: gants, masques... », affirme Alain Coste, des Amis de la Terre, qui travaille depuis des années sur le dossier. Information impossible à confirmer pour le moment. La poubelle radioactive n'a peut-être pas livré tout son contenu. En tout cas, le maire d'Itteville, Michel Fayolle, avoue « être un peu apeuré. Mais je suis bien obligé de croire ce que le C.E.A. me dit... »

Le Bouchet: berceau du nucléaire

1947: l'usine du Bouchet (C.E.A) voit le jour. Première usine française de fabrication d'uranium. Au fil des ans, sa capacité annuelle passe de dix à cinq cents tonnes.
1959: le site de Malvesi relaye le Bouchet et fournit à son tour de l'uranium.
1971: le Bouchet ferme. Le site est décontaminé de 1973 à 1975 essentiellement. L'opération est achevée en 1979: vingt mille tonnes de déchets radioactifs sont rejetées en face.
1989: en octobre, un délégué du personnel interroge la direction de la Société nationale des poudres et explosifs sur l'avenir du terrain loué au C.E.A.
Des travaux doivent être entrepris avant le 1er décembre 1990 pour « assainir le site » sous contrôle du Service central de protection contre les rayonnements ionisants. Aucune mesure n'a été rendue publique. Sur le site, le taux de radioactivité serait « plus élevé que sur un site vierge, mais sans conséquence sur l'environnement ».

Gilles Verdez