Communiqué de Presse: "fuites radioactives à Golfech le 27/11/98"
STOP-GOLFECH - Bazens, le 29/11/98:
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Pour EDF un "incident" de plus.
Cette fois, des travailleurs directement contaminés.
jusqu'où ira-t-on ?

"Vers 13h 15, l'alarme d'une balise de détection de la radioactivité atmosphérique s'est déclenché lors d'une intervention sur un couvercle de la cuve du réacteur n°2 de la centrale de Golfech, en cours d'arrêt de tranche" (communiqué commun DSIN-Direction de la sûreté des installations nucléaires et OPRI- Office de Protection contre les rayonnements ionisants, cité par REUTERS).

"Après confirmation d'une contamination dans la zone concernée du chantier, la décision fut prise vers 16h30 d'évacuer l'ensemble du bâtiment réacteur et de procéder à un examen anthropogammamétrique systématique des travailleurs présents." (85 personnes ont été Concernées).

EDF n'aurait-elle pas confiance dans ses balises ? Les travailleurs ont ainsi continué pendant plus de trois heures à travailler dans une ambiance contaminée.

"Cette situation est due à un défaut de fonctionnement d'un appareil de ventilation" (communiqué EDF);

Cela indique que les travailleurs ont vraisemblablement inhalé des particules radioactives. Il y a une différence majeure de risques entre irradiation externe et contamination interne, à l'image de l'impact d'une braise qu'on approche ou qu'on avale; la communication d'EDF joue régulièrement sur cette confusion.

Le cobalt 60 à une demi-vie de 5,3 ans, et se fixe prioritairement sur le foie et les ovaires; cela veut dire que les becquerels inhalés et fixés vont irradier pendant 5,3 ans les organes où ils se seront fixés, et qu'au terme de cette période, la moitié sera encore présente, et ainsi de suite.

Quel suivi y aura-t-il pour les travailleurs concernés, sachant que la sous-traitance est de plus en plus la règle pour les opérations de maintenance. Il importe que tout travailleur EDF ou privé soit suivi médicalement à vie. Rappelons que le Dr IMBERNON a été licencié par EDF (avant d'être réintégrée à un poste différent) pour avoir voulu mettre en place cette politique de suivi épidémiologique.

EDF annonce une dose max reçue de 0,16 mSv, et la compare aux limites annuelles réglementaires. Celles-ci sont aujourd'hui en France de 50 mSv pour les travailleurs de l'industrie nucléaire et de 5 mSv pour la population.

Est-il normal que les doses tolérées pour les travailleurs soient à ce point supérieures à celles des autres personnes ?

La directive EURATOM du 13 mai 1996 fixe ces limites à respectivement 20mSv et 1 mSv, il faut savoir en outre que ces doses correspondent à une nocivité jugée acceptable économiquement par les autorités, et nullement à un seuil au-dessous duquel elles seraient inoffensives. (La communauté scientifique s'accorde aujourd'hui pour reconnaître qu'il n'existe pas de seuil, et que donc toute dose se cumule).

EDF compare ces doses à celles reçues lors d'un examen radiographique des poumons.

Nous citerons Mme Gazal, vice-présidente de la Commission locale d'information (CLI) de Golfech, dans le compte rendu de la réunion plénière de la CLI du 17/10/97 : "ce n'est pas une référence parlante pour les populations auxquelles elles s'adressent... Pour reprendre la comparaison avec la radiographie pulmonaire qui est effectivement très fréquente, la dose reçue par le patient représente l'équivalent d'un tiers des limites annuelles maximales admissibles par la Commission Internationale de Protection Radiologique (CIPR), ce qui est loin d'être négligeable" et nous rajouterons que l'irradiation médicale n'est pas inoffensive (700 morts/an en France - 0,5% du nombre de décès par cancer par an - étude INSERM 1997)

Incident en cascade : jusqu'où ?

Le 28 septembre, les circuits de mesure de la réaction en chaîne du coeur ont été débranchés avec autorisation de l'autorité de sûreté, à la condition expresse qu'aucun élément important pour la sûreté ne soit indisponible au même moment; l'équipe de conduite s'est aperçu 50 minutes après la déconnexion de ce circuit qu'une vanne de déchargement de vapeur vers l'atmosphère était défaillante. Les systèmes de mesure ont alors été rebranchés. Incident classé niveau 1. Le 14 octobre 98, encore à Golfech, l'autorité de sûreté a dû reclasser à la hausse une sous-estimation de la part d'EDF d'une anomalie qui avait conduit à une sous-estimation de la puissance du réacteur de 7% pendant 30 heures. Trois "incidents" en 3 mois (8 depuis le début de l'année, à notre connaissance). Jusqu'où ira-t-on ? Qui répondra à nos questions? Localement nous demandons une réunion extraordinaire de la CLI.

Il y a eu en 1997 en France 470 incidents significatifs (soit une toutes les 19 heures). Si l'on sait qu'un accident majeur est souvent le fruit de la juxtaposition de petits "incidents", on ne peut que s'interroger devant cette inflation des problèmes dans les centrales françaises (Chooz, Civaux, Belleville, Flamanville, maintenant et encore Golfech).

Des voix s'élèvent de l'intérieur même, pour déplorer cette situation, un syndicaliste CGT nous confiait son inquiétude devant le fait que le rechargement dans les réacteurs 1300 MW est pratiqué tous les 18 mois au lieu de 12; conséquence pratique : les entretiens préventifs du matériel ne sont plus assurés actuellement comme auparavant. Même Claude-André Lacoste, directeur de la DSIN met en garde : "Nous ne voulons pas que les directeurs de tranche se lancent dans une course effrénée de la réduction des arrêts de tranche, sous prétexte de décrocher le record mondial et d'avoir leur nom dans Nucleonic weeks."

Plus que jamais, l'actualité nous conforte dans notre conviction qu'il faut sortir le plus rapidement possible du nucléaire (comme le fait le reste de l'Europe).

Gazette Nucléaire n°171/172, février 1999.