Déchets nucléaires : 200 kilomètres de galeries ?

Dans son édition du 11 octobre 2002, "Le Figaro" se faisait l'écho des inquiétudes de la Commission Nationale d'Evaluation (CNE) qui présentait la veille, devant les parlementaires, son huitième rapport sur l'état d'avancement des travaux. À quatre ans de la prise de décision, la CNE s'inquiète du retard pris notamment sur "le second axe de la loi (laboratoires souterrains) et peut-être, à terme, le premier axe (transmutation". Le quotidien compare la situation avec celle de plusieurs pays où les décisions sont déjà prises comme la Finlande qui aurait "une longueur d'avance sur le reste de la planète". Sur le site de la centrale nucléaire d'Olkiluoto, les travaux ont commencé pour la construction d'une galerie souterraine à 500 mètres de profondeur, sur une longueur de 10 kilomètres. C'est en effet l'espace nécessaire pour stocker les déchets à vie longue des 2 réacteurs à eau bouillante de 800 MWe et des 2 autres à eau pressurisée de 500 MWe finlandais après 60 ans d'exploitation ; compte tenu de l'espace de 8 mètres entre chaque conteneur en cuivre, nécessaire au refroidissement. En reportant ce "volume" aux besoins du parc nucléaire français, il est donc aisé d'évaluer les besoins à plus de 200 kilomètres de galeries qu'il faudrait creuser. La propagande des experts a toujours porté sur le "faible" volume des déchets de haute activité, se gardant bien d'établir un rapport avec la réalité ; les comités anti-déchets semblent avoir aussi négligé cet "argument". On comprend ainsi mieux le "retard" pris dans ce pays, car il sera très difficile à quelque gouvernement qu'il soit de prendre une pareille décision.
D'où l'intérêt du retour au plan "B" préconisé par la CNE : reprendre les études sur la transmutation avec le redémarrage du réacteur à neutrons rapides "Phénix" de Marcoule. Cette vieille casserole à bout de souffle qui a déjà fonctionné un quart de siècle et connu de nombreux incidents très problématiques, avait déjà livré, avec Rapsodie, les secrets de la capture de neutrons par les actinides mineurs. Ce point le plus épineux des déchets nucléaires est pourtant connu depuis les années 70 comme sans solution ; la transmutation ne s'opére pas avec un rendement suffisant pour développer un procédé industriel.

La politique de la France en matière de déchets nucléaires est donc claire : dépenser des fortunes pour faire semblant de chercher une solution qui n'existe pas, afin de retarder au maximum l'aveu inavouable : l'inexistence d'une solution acceptable.

C.B.