Le Figaro et la santé au Bélarus

Dans Le Figaro du 12 octobre 2004, une page entière sous le gros titre " Bandajevsky, le relégué de Tchernobyl " et pour chapeau " NUCLEAIRE Rencontre avec le savant biélorusse, condamné pour ses travaux dérangeants sur les effets sanitaires de la catastrophe de 1986 ".
Fabrice Nodé-Langlois indique que les journalistes avaient eu la permission de l'interviewer sur son lieu de relégation mais fin septembre Youri Bandajevsky a été transféré à Minsk, pour soins médicaux et c'est à Minsk qu'ont eu lieu les entretiens. Il décrit les conditions d'emprisonnement puis la relégation et laisse filtrer une réelle sympathie pour Bandajevsky. Il donne des informations claires sur les raisons de sa condamnation : " Outre ses recherches iconoclastes sur la contamination des populations, ses prises de position sur la mauvaise utilisation des fonds publics consacrés à la gestion de la catastrophe de Tchernobyl sont assurément la cause de ses ennuis ".
Son second article " Faibles doses et contamination chronique
" précise " Le chercheur a été le premier à remettre en question le dogme hérité d'Hiroshima ". " (...) Qu'a donc trouvé Bandajevsky ? Il affirme qu'il existe une dépendance proportionnelle entre la quantité de césium incorporé dans l'organisme et la fréquence de lésions et de pathologies sur le muscle cardiaque, mais aussi le foie, les reins, les systèmes endocriniens et immunitaires " (...)" même des petites doses provoquent des pathologies ou des lésions observables au microscope sur les tissus (...) ".
Chez les enfants il a été montré que la fréquence des anomalies cardiologiques -et celle des opacités du cristallin- augmente proportionnellement à leur activité corporelle en césium 137 (par kg de poids). Dans les autopsies ce qui a été trouvé par Bandajevsky en mesurant l'activité des différents organes, rapportée en Bq/kg (ce qui n'avait jamais été fait auparavant) c'est que la répartition du césium 137 dans le corps est très hétérogène, contrairement à ce qui était admis, et cela explique les lésions observées sur les organes qui concentrent le plus le Cs137.
La suite de l'article contient des griefs insidieux, " jamais il n'a publié dans des revues internationales " puis l'opinion quasiment injurieuse de Koenigsberg, directeur de la commission de radioprotection du Bélarus " il y a bien des gens qui croient encore que la Terre est plate ". Le même Koenigsberg nie la concentration du césium dans des organes particuliers. Pour Gourmelon de l'IRSN " C'est un chercheur sincère mais sa démonstration n'est pas bonne " et on est étonné de lire que pour ce spécialiste " la science de la radioprotection, (...) fondée sur les constatations tirées des bombes atomiques d'Hiroshima et Nagasaki (...) a établi que les faibles doses sont sans effet sur la santé ". Sans effet ? Certes, c'est le point de vue de notre académie des sciences mais ce n'est pas celui de la CIPR (commission internationale de protection radiologique). Rappelons que les études ont d'abord porté sur la mortalité par cancers et leucémies et les derniers résultats montrent un excès de mortalité par cancers jusqu'aux faibles doses. Pas de seuil en dessous duquel il n'y aurait pas d'effet.
Il n'empêche qu'il semble bien que, grâce à Bandajevsky, on étudie désormais à l'IRSN les irradiations chroniques " cela ne veut pas dire que ce que Bandajevsky a trouvé sur le césium est vrai, mais cela montre que l'effet des faibles doses chroniques existe ". Et Nodé-Langlois de conclure " Venant d'un institut aussi peu suspect d'être antinucléaire que l'IRSN, il s'agit là d'une atteinte historique au dogme " (c'est moi qui souligne).
Un encart d'Yves Miserey intitulé " Trois mille enfants sous surveillance " donne quelques précisions sur la façon dont l'IRSN envisage son action au sein du programme CORE. C'est " une étude sur l'état de santé des enfants du district de Tchetchersk. Il s'agit de décrire avec précision les multiples pathologies non cancéreuses rapportées par les médecins locaux : ulcères, cataractes, gastrites ". Catherine Luccioni indique : " C'est le début d'une amorce. Ce n'est pas un programme scientifique à proprement parler. On se situe aux frontières de l'humanitaire ". L'IRSN va consacrer 3 ans à ce programme qui va toucher 3000 enfants. 60 000 euros par an. " Si, à l'issue de ce travail, on a des indices forts que la contamination chronique à de faibles doses a d'autres conséquences sur la santé que les cancers, il faudra se lancer dans un programme plus ambitieux ".
Fort curieusement les pathologies cardiaques ne figurent pas dans ce programme. Mais toutes ces " multiples pathologies " ont déjà été décrites et bien d'autres comme l'augmentation des allergies, des maladies infectieuses, des troubles endocriniens, la fatigabilité des enfants etc.
" Les indices forts " de Catherine Luccioni c'est quoi ? Les maladies dont souffrent actuellement les enfants, ce ne sont pas des " indices " mais des certitudes. En somme l'IRSN veut refaire ce qui a été déjà fait depuis 1986 par les médecins du Bélarus. C'est nier les observations faites par les médecins locaux !
Les enfants sont malades. Pas question pour l'IRSN et CORE de soigner, d'améliorer dès aujourd'hui l'état de santé des enfants. Pas question de donner de la pectine aux enfants pour aider à éliminer le Cs137. De 3 ans en 3 ans ils vont aller de mal en pis. De quel " humanitaire " Catherine Luccioni parle-t-elle ? C'est vraiment considérer les enfants du Bélarus comme des cobayes.

Bella Belbéoch, novembre 2004

 Association Enfants Tchernobyl-Bélarus
20 rue Principale, 68480 Biederthal.
L'aide aux enfants continue. Un nouveau programme est lancé avec BELRAD pour financer des cures de pectine aux enfants, mesurer leur charge en césium137 avant et après les cures, mesurer la contamination de leur nourriture.
L'aide à la famille Bandajevsky continue.
Adhésions, 15 euros et Dons.
Une quittance fiscale est renvoyée.
s.m.fernex@wanadoo.fr