Enfermé
a 9 ans, dans un camp de concentration nord-coréen, Kang
Chol Hwan a été libéré à 19
ans. Il a alors fui son pays clandestinement pour s'installer
au Sud. Il vient de publier un livre témoignage, Les aquariums
de Pyongyang, et anime un site internet visant à informer
le public sur la situation des Droits de l'Homme au Nord
C'est parce
que votre grand-père critiquait trop le Parti que vous
avez été enfermé au camp de Yodok en 1977.
Connaissiez vous l'existence des camps avant d'y entrer? J'étais un enfant, j'ignorais tout des camps.
Il m'arrivait de m'interroger sur ce qu'étaient devenus
des camarades de classe qui disparaissaient soudainement, mais
cela ne retenait pas longtemps mon attention. On ne peut concevoir
la Corée du Nord sans ses camps. La vie des prisonniers
n'y est pas meilleure que celle des chiens ou des porcs, mais
il y a des camps plus durs que Yodok.
Quels souvenirs gardez-vous de votre sejour là-bas?
Chaque fois que je vois une montagne couverte
de neige, je sens mon coeur se glacer. Je garde encore le souvenir
du travail forcé auquel j'ai été soumis
pendant 10 ans dans la montagne. Les hivers étaient si
froids que j'y ai perdu mes ongles de pied. L'autre souvenir,
c'est celui des exécutions publiques dans le camp. Je
fais encore de temps en temps des cauchemars ou je vais être
exécuté.
D'après
vos informations, la réalité a-t-elle changé?
Lorsque les simples citoyens ne souffraient
pas de la faim, bien des prisonniers, eux, mouraient faim. Aujourd'hui,
ou des gens ordinaires meurent de faim, on peut imaginer ce qu'est
la situation dans les camps!
Pour
autant, y a-t-il des signes d'une évolution du système
nord-coréen? Je ne crois pas que Kim
Jong Il veuille vraiment ouvrir le pays. Le régime risquerait
de s'écrouler si l'ouverture se faisait bientôt.
D'après le témoignage des transfuges dont le nombre
s'est accru ces dernières semaines, il est aujourd'hui
impossible de contrôler la population à cause de
la pénurie alimentaire. Le pouvoir s'est ainsi affaibli
car la distribution de rations, qui était son principal
moyen de contrôle, s'est interrompue. Lui restent donc
les mesures de répression et de propagande.
Quelles sont les instruments utilisés par
le régime? Le pays tout entier est mobilisé
pour maintenir le régime en place. Les médias,
depuis des décennies, sont les véhicules du culte
de la personnalité. On répète aux gens que
sans leader, la révolution ne pourra s'accomplir, et qu'il
n'y aura pas d'avenir pour la patrie. Le Parti du Travail et
l'armée populaire sont par ailleurs entre les mains du
fils, Kim-Jong-Il, tout comme elles étaient entre les
mains du père, Kim-Il-Sung.
Comment
jugez vous l'attitude de la communauté internationale
à l'égard de la Corée du Nord? Ce
qui se passe là-bas est pire que ce qu'on a vu au Kosovo
ou au Rwanda. Ce n'est pas une guerre qui a tué pres de
3 millions de personnes. Mais je crois fermement que Kim-Jong-Il
doit être jugé par la justice internationale pour
avoir fait mourir de faim ces 3 millions d'hommes.
Kang Chol Hwan
www.chosun.com
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