On saura bientôt,
que les installations ne sont pour l'instant pas sécurisées.
Les dangers du terrorisme aérien sur
les installations nucléaires étudiés
(On saura bientôt, que les installations
ne sont pour l'instant pas sécurisées)
PARIS, 15 nov - Des études sont en cours
pour évaluer la menace qui pèse sur les installations
nucléaires françaises en cas d'attaques terroristes
du type de celles du 11 septembre aux Etats-Unis, a annoncé
jeudi le directeur de l'Autorité de sûreté
nucléaire André-Claude Lacoste.
"Nous avons lancé des études sur les conséquences
éventuelles d'un acte de terrorisme aérien (sur
les installations nucléaires)", a précisé
devant la presse M. Lacoste.
Des études ont également été demandées
aux exploitants de ces installations (EDF, COGEMA...) et un premier
point doit être fait d'ici la fin de l'année, a-t-il
ajouté.
Le risque d'un attentat suicide avec un avion de ligne contre
une centrale nucléaire n'a jamais été envisagé.
Seule la chute accidentelle d'un petit avion d'affaires a été
pris en compte dans la conception des centrales, le risque de
crash accidentel d'un avion de ligne étant considéré
comme trop faible.
La situation est identique dans tous les pays, sauf en Allemagne
où ont également été pris en compte
les risques de chute d'un avion militaire, a précisé
le directeur de l'Autorité de sûreté.
Selon un rapport au parlement européen de WISE, un
organisme d'études réputé pour ses positions
anti-nucléaires, un attentat contre les installations
de retraitement de la COGEMA à La Hague (Manche) pourrait
avoir des conséquences catastrophiques, "l'équivalent
de 67 Tchernobyl". "L'étude de WISE semble exagérée",
a estimé M. Lacoste. (Très
fort puisqu'il reconnaît qu'il n'a pas fait les études...)
L'AIEA étudie les scénarios
d'apocalypse du terrorisme nucléaire
VIENNE, 2 nov - L'Agence Internationale de l'Energie
Atomique a consacré vendredi une session d'experts aux
menaces terroristes qui pèsent sur le nucléaire,
y compris le "scénario d'apocalypse" de l'explosion
d'une bombe atomique.
A l'ouverture de la session, le directeur général
de l'AIEA Mohamed ElBaradei a qualifié "d'improbable"
l'hypothèse que des terroristes mettent la main sur une
bombe atomique. Mais "rien ne peut être exclu",
a-t-il dit.
Il a cependant exposé d'autres dangers, comme celui
d'une "bombe radiologique". Faite d'explosifs conventionnels
et de matériaux radioactifs utilisés dans les hôpitaux
et l'industrie, cette "bombe sale" pourrait irradier
dans un rayon limité, mais assez pour semer la panique
dans une ville et exiger son évacuation.
Le scenario d'un avion de ligne lancé sur une centrale
nucléaire, plausible depuis les attaques du 11 septembre
contre New York et Washington, est un autre des risques étudiés
par les experts réunis au siège de l'AIEA à
Vienne.
"Les risques du terrorisme nucléaire ont été
propulsés au premier plan", a déclaré
le directeur général.
L'AIEA, qui surveille les centrales nucléaires dans
le monde entier, a prévenu les gouvernements qu'ils devraient
payer pour renforcer la sécurité, demandant une
augmentation de son budget de 15%, soit 50 millions de dollars.
"Nous devons prendre des mesures préventives.
Nous n'essayons pas de provoquer la panique... mais nous devons
être prêts", a poursuivi M. ElBaradei.
"Ce sont des menaces non conventionnelles qui demandent
des réponses non conventionnelles. Nous ne pouvons évidemment
pas éliminer les risques mais nous nous devons de les
réduire". (Après avoir
menti pendant des années en garantissant qu'il n'y avait
aucun risque, c'est à nous de nous habituer à l'idée
que tout est possible, mais heureusement, les experts veillent!).
La menace nucléaire a pris "une
autre dimension" après les attentats
LONDRES, 1er nov - La menace nucléaire
"a pris une autre dimension" depuis les attentats du
11 septembre aux Etats-Unis et réclame "une réponse
non conventionnelle", a estimé jeudi sur la BBC (radio)
Mohamed El Baradei, directeur de l'Agence internationale de l'énergie
atomique (AIEA).
Après les attentats du 11 septembre, "nous avons
réalisé que la menace nucléaire avait pris
une nouvelle dimension", a déclaré Mohamed
El Baradei. D'abord "parce des gens ont démontré
qu'ils étaient prêts à perdre la vie en perpétrant
un acte de terrorisme".
Ensuite, "parce que nous avons assisté à
une nouvelle forme de terrorisme, avec ces attaques aériennes
contre des bâtiments", a-t-il ajouté.
"Une attaque similaire sur une installation nucléaire
doit désormais être considérée comme
une menace sérieuse", a estimé le président
de l'AIEA.
"Il s'agit de répondre à ces menaces non
conventionnelles par des moyens non conventionnels", a-t-il
dit.
"Nous vivons une époque exceptionnelle. Les Etats-Unis
ont par exemple décrété une interdiction
de survol (des installations nucléaires), alors qu'en
France des batteries anti-aériennes sont installées
à proximité des installations nucléaires",
a dit M. El Baradei.
"Chaque pays devra évaluer les risques associés
à ses installations et prendre les mesures appropriées",
a-t-il dit.
"Nous ne pouvons éliminer tous les risques, mais
nous pouvons les minimiser", a-t-il ajouté, en précisant
qu'en matière nucléaire, le maillon faible concernait
"la possession de produits radioactifs plutôt que
les installations". (ben voyons)
"Nous voyons encore beaucoup de trafic illicite de produits
radioactifs à travers les frontières et la sécurité
doit également être renforcée (...) dans
notre vie quotidienne, l'industrie et les applications médicales",
a-t-il estimé.
"Il y a des mesures nationales à prendre, associées
à des mesures internationales", a-t-il dit, en rappelant
que l'AIEA organisait vendredi à Vienne une réunion
d'experts sur la menace terroriste pesant sur les installations
nucléaires dans le monde après les attentats du
11 septembre.
L'AIEA cherche des parades au terrorisme
nucléaire
VIENNE, 1er nov - L'AIEA cherchera, vendredi à
Vienne, des parades au terrorisme nucléaire après
les attentats du 11 septembre, estimant que des islamistes pourraient
construire de toutes pièces une bombe atomique.
Dans une réunion d'experts, l'Agence internationale
de l'énergie atomique considérera également
l'attaque par les airs de centrales nucléaires et la fabrication
d'une bombe "sale" à partir de matériaux
nucléaires volés.
"Le fait que des terroristes soient prêts à
sacrifier leur vie pour faire aboutir leurs funestes desseins
rend la menace du terrorisme nucléaire plus crédible
qu'avant les attentats de New York et de Washington", a
déclaré le directeur de l'AIEA, Mohamed ElBaradei,
lors d'un briefing de presse mercredi à Vienne.
"Le monde a déjà subi deux catastrophes
nucléaires" en temps de paix, a-t-il poursuivi. "Tchernobyl
et la découverte, par l'AIEA, que l'Irak se dotait secrètement
de l'arme nucléaire. Il est vital de faire tout ce qui
est en notre pouvoir pour en éviter une troisième",
a-t-il ajouté.
Washington a pris conscience de cette menace et, mardi, la
direction de l'Aviation civile américaine (FAA) a interdit
le survol de 86 sites nucléaires sensibles aux Etats-Unis.
Pour prévenir une nouvelle catastrophe, le directeur
de l'AIEA a demandé aux 132 pays membres d'augmenter de
55 millions d'euros (50 millions de dollars), soit de 15%, le
prochain budget de cette agence des Nations unies chargée
de surveiller les installations nucléaires dans le monde.
Le 21 septembre, dix jours après les attentats, l'AIEA
avait mis en garde contre l'utilisation de matériaux nucléaires
par des terroristes qui pourraient chercher à contaminer
des villes entières.
Dans une résolution sur la protection des matériaux
et installations nucléaires, la conférence générale
annuelle de l'agence mis en garde contre les risques d'utilisation
de matériaux nucléaires par des terroristes et
sur la nécessité de protéger les installations
nucléaires.
Le principal danger réside dans la fabrication d'une
"bombe sale" combinant des matériaux radioactifs
avec des explosifs conventionnels, avait alors expliqué
l'AIEA. Les radiations émises pourraient contaminer toute
la zone de l'explosion et dans le cas d'une ville la rendre inhabitable
jusqu'à sa décontamination, avait-elle ajouté.
(une décontamination comme à
Tchernobyl ?)
Après une accalmie entre 1995 et 1998, l'AIEA a enregistré
depuis le début 1999 six saisies d'uranium ou de plutonium
enrichi dans les anciennes républiques d'URSS et dans
les Balkans. Les quantités saisies vont de 0,4 gramme
à 6 grammes.
Il faut au minimum 8 kg de plutonium ou 25 kg d'uranium hautement
enrichi pour produire une bombe nucléaire, d'après
les experts.
"Nous ne pouvons pas exclure que des terroristes mettent
la main sur des matériaux nucléaires, même
s'il est très improbable qu'ils réussissent à
construire et à faire exploser la bombe qu'ils fabriqueraient",
a estimé M. ElBaradei. "Il ne faut toutefois écarter
aucun scénario", a-t-il ajouté.
"Après les attentats du 11 septembre, nous avons
réalisé que les installations nucléaires
et les grands équipements, comme les barrages hydroliques,
les raffineries de pétrole ou chimiques, sont vulnérables",
a souligné le directeur de l'AIEA. "Il n'existe plus
de sanctuaire", a-t-il ajouté.
L'AIEA se félicite des restrictions
au survol des installations nucléaires
VIENNE, 31 oct - L'AIEA s'est félicitée
mercredi à Vienne des restrictions imposées par
les Etats-Unis au survol de certaines installations nucléaires,
estimant qu'elles pouvaient être visées par des
terroristes.
Le directeur de l'Agence internationale de l'énergie
atomique, Mohamed El Baradei, a ajouté que les centrales
nucléaires ne constituaient pourtant qu'une cible possible
parmi d'autres.
"Toutes les mesures conservatoires sont les bienvenues",
a-t-il déclaré lors d'une conférence de
presse dans la capitale autrichienne, où l'AIEA a son
siège.
"Toutes les installations de haute technologie sont en
cours d'inspection et (...) les installations nucléaires
sont d'évidence une cible de nature à semer la
panique dans la population en raison d'une possible émission
de radioactivité" après une éventuelle
attaque, a-t-il souligné.
"Si l'on se met à la place des terroristes, le
nucléaire n'est pas une cible à exclure, loin s'en
faut", a ajouté M. El Baradei.
La direction de l'Aviation civile américaine (FAA)
a interdit mardi le survol dans un rayon de 18 km et au-dessous
de 5.480 m de 86 sites nucléaires sensibles .
"Les Etats-Unis sont actuellement vulnérables
aux attaques terroristes et ils mettent au point ce qu'ils pensent
être les meilleures parades", a affirmé le
directeur de l'AIEA.
L'AIEA organise vendredi à Vienne une réunion
d'experts sur la menace terroriste pesant sur les installations
nucléaires dans le monde après les attentats du
11 septembre.
Dans Libération le vendredi 19 octobre 2001
EDITORIAL
Principe de précaution
Par JACQUES AMALRIC
Après la maladie du charbon, les risques du nucléaire,
y compris en France. Selon certains de nos lecteurs, mieux vaudrait
ne pas évoquer le sujet pour ne pas donner de mauvaises
idées aux terroristes. L'argument relève peut-être
du fameux principe de précaution, mais il n'est guère
recevable. Imaginer un seul instant que les cerveaux pervers
qui ont planifié pendant des années et réalisé
en moins d'une heure l'évaporation du World Trade Center
puisent leurs idées de massacre dans la presse relève
de l'angélisme. Quitte à se référer
au principe de précaution, mieux vaut craindre qu'ils
n'aient déjà dans leurs cartons quelque projet
criminel d'escalade nucléaire, visant une ou plusieurs
installations de cette catégorie. Mieux vaut donc prendre
toutes les mesures nécessaires pour prévenir ce
qui serait une nouvelle catastrophe majeure.
C'est dire, de ce point de vue, que la décision du
gouvernement visant à renforcer la protection des sites
industriels à risque est plus que bienvenue. On serait
même en droit de s'étonner qu'elle n'ait pas été
prise plus tôt, tous les experts s'accordant à reconnaître
qu'aucune de la vingtaine de centrales nucléaires françaises
n'a été conçue pour résister au choc
d'un avion de ligne détourné par des terroristes
kamikazes. Le cas de l'usine de retraitement de La Hague est
encore plus critique puisque ce sont 7 500 tonnes de combustibles
nucléaires qui y sont stockées - des dizaines de
Tchernobyl en puissance! - et que cette installation est trop
éloignée d'une base de l'armée de l'air
pour que la chasse ait le temps d'intervenir en cas de violation
de son espace aérien préservé.
Souvent invoqué à tort et à travers avant
le 11 septembre, le principe de précaution doit être
redéfini avec discernement depuis. On doit dorénavant
y intégrer une bonne dose d'imagination, faute de quoi
il ne servira pas à grand-chose dans la lutte contre des
terroristes qui ont toutes les audaces imaginatives et qui sont
parvenus à matérialiser le plus fou des cauchemars.
Et, n'en doutons pas, le cauchemar nucléaire, sous une
forme ou sous une autre, fait partie de leurs rêves.
------> Crash au USA: et si une centrale nucléaire
avait été touchée
Face aux nouvelles menaces apparues depuis les attentats
du 11 septembre
L'armée française les yeux rivés
au ciel
La sécurité, surtout aérienne, des «sites
d'intérêt national» va être renforcée.
Par JEAN-DOMINIQUE MERCHET
L'armée de l'air devrait rapidement déployer
une batterie de missiles sol-air pour protéger l'usine
de retraitement nucléaire de La Hague (Manche). Les militaires
n'ont pas encore reçu l'ordre d'installer leurs missiles
Crotale dans le Cotentin, mais des reconnaissances ont déjà
eu lieu sur place, comme l'annonçait hier le quotidien
Ouest-France. Une décision devrait être prise
«dans les jours à venir», a indiqué
hier le porte-parole du ministère de la Défense,
Jean-François Bureau. Cette mesure spectaculaire ne sera
qu'un des éléments d'un plan renforcement de la
sécurité de «certains sites d'intérêt
national» demandé mercredi soir par le Premier
ministre. La menace aérienne - celle d'avions kamikazes
- est prise très au sérieux par le gouvernement.
Hier, l'entreprise publique Cogema a indiqué hier avoir
été «informée par le ministère
de la Défense que l'usine de traitement de La Hague était
incluse dans la liste» des sites sensibles.
Kourou. L'usine de La Hague ne sera pas la seule concernée.
En fait, le contrôle de l'ensemble de l'espace aérien
français va être renforcé. Dès le
11 septembre, des mesures ont été prises, puis
durcies après le début des frappes américaines
le 7 octobre. «Des moyens de protection complémentaires
sont à l'étude, assure le colonel Patrick Dutartre,
responsable de communication de l'armée de l'air. Ce
seront des dispositifs évolutifs. Nous n'allons pas nous
focaliser sur un seul endroit.» D'autres «points
sensibles» pourraient bénéficier d'une telle
défense antiaérienne. Sur LCI, le ministre de la
Défense Alain Richard a évoqué hier l'exemple
«de grandes installations industrielles, de grands sites
urbains, d'un grand barrage».
Jusqu'à présent, un seul site bénéficie
en permanence d'une défense sol-air: le centre spatial
de Kourou (Guyane), avec des missiles Mistral à très
courte portée. Mais les armées installent ponctuellement
de telles défenses, par exemple lors de sommets internationaux,
du Salon du Bourget ou de visite du pape en France. Les militaires
appellent cela des «bulles» au sein desquelles la
circulation aérienne est totalement interdite. Ces dispositifs
temporaires sont très coûteux en hommes, en matériel
de détection et en avions ou hélicoptères
d'interception. Pour l'instant, le ministère de la Défense
ne prévoit pas de multiplier ces dispositifs. «Nous
sommes dans une posture de dissuasion, destinée à
durer et qui sera ajustée en fonction de l'évolution
de la situation», a expliqué le porte-parole
du ministère.
Etude d'impact. Le cas de La Hague est particulièrement
sensible. Avant les attentats, l'organisation Wise - animée
par des militants antinucléaires - a réalisé
pour le compte de l'Union européenne une étude sur l'impact qu'aurait la chute
d'un avion sur l'usine de retraitement. «Un accident
majeur aurait jusqu'à 67 fois l'impact dû au relâchement
de césium à Tchernobyl», écrivent
les experts de Wise. Près de 7 500 tonnes de combustibles
nucléaires divers y sont en effet immergées dans
cinq piscines et 55 tonnes de plutonium stockées sous
forme de poudre. La Cogema a estimé ce scénario
«dénué de tout fondement scientifique».
Dans ce site «hautement protégé,
explique l'industriel, les combustibles sont contenus dans
des gaines elles-mêmes assemblées dans des alvéoles
métalliques, le tout placé sous quatre mètres
d'eau.» Des parois de béton armé épaisses
«de 0,80 à 1,60 mètre» résisteraient-elles
toutefois à la chute d'un avion de ligne? Personne ne
le croit, pas même le porte-parole de la Cogema, qui affirmait
hier qu'«aucun site industriel n'est conçu en
fonction d'un tel impact». Toutes les études
l'ont été sur la base de la chute d'un Cessna 210
(1,5 tonne) ou d'un Learjet 23 (5,7 tonnes), pas d'un Airbus
de 250 tonnes!
«La Défense nationale aurait le temps d'intervenir
si une infraction à la règle d'interdiction permanente
de survol était suspectée», assure-t-on
à la Cogema. Mais cette interdiction ne concerne que les
avions volant en dessous de 1 000 mètres d'altitude. De
nombreuses lignes transatlantiques passent par le sud du Cotentin,
à moins de cinq minutes de vol! C'est le temps donné
à l'armée de l'air pour réagir entre le
moment où le contrôle aérien diagnostique
un problème et l'éventuelle ouverture du feu.
«Deux minutes». Une dizaine de Mirage 2000
sont en état d'alerte «à deux minutes»,
mais les bases aériennes sont situées surtout dans
l'est et le sud de la France. Mission impossible pour la chasse,
sauf à installer des intercepteurs dans l'ouest. Il faut
donc se résoudre à déployer des missiles
sol-air. Fabriqué par Thomson, le Crotale a été
conçu pour défendre les bases aériennes.
L'armée de l'air possède dix batteries, toutes
mobiles et dotées d'un radar de 18 kilomètres de
portée. Le Crotale tire un missile à courte portée
- entre trois et cinq kilomètres d'altitude. Les habitants
des villages du cap de La Hague risquent de devoir s'habituer
à cette présence.
Et si Ben Laden utilisait le nucléaire?
Des déchets atomiques circulent clandestinement.
Par PIERRE DAUM
Vienne de notre correspondant
Même si aucune preuve formelle n'a été
apportée que Ben Laden et son organisation, Al-Qaeda,
se soient déjà procurés des substances radioactives,
base d'une potentielle «bombe nucléaire artisanale»,
plusieurs indices pourraient le laisser penser.
Le premier repose sur le témoignage de Djamal Ahmed
al-Fadl. Devant le tribunal de Manhattan, qui a condamné
hier quatre personnes pour les attentats antiaméricains
de 1998 en Afrique (lire page 6), ce membre du réseau
Ben Laden a affirmé avoir servi d'intermédiaire,
en 1993, dans l'achat d'un cylindre d'uranium enrichi. «On
ne sait même pas si la transaction a, ou non, abouti»,
tempère David Kyd, porte-parole de l'AIEA (Agence internationale
de l'énergie atomique), dont le siège est à
Vienne. «Il se peut très bien que ces aveux soient
faux et n'aient servi qu'à obtenir la clémence
des juges.» Dans son édition du 14 octobre,
le Times de Londres rapportait de son côté
le témoignage d'un négociant bulgare qui aurait
été approché, au début de l'année,
«par un comparse de Ben Laden cherchant à obtenir
des matériaux hautement radioactifs».
------> Le marché clandestin de substances radioactives
Géorgie. A l'heure du terrorisme planétaire,
d'autres incidents font froid dans le dos. Ainsi celui de Batumi.
Dans cette petite ville frontalière du sud de la Géorgie,
le 19 avril 2000, les douaniers inspectent une pile de colis
à destination de la Turquie. Dans l'un d'eux, des sacs
de pastilles d'une étrange couleur attirent leur attention.
Après analyse en laboratoire, il s'avère qu'ils
ont mis la main sur 920 g d'uranium enrichi destinés à
on ne sait quel marché noir. Dans les trois dernières
années, six cas de ce genre ont été recensés:
10 g d'uranium saisis en Bulgarie, 1,5 g de plutonium au Kirghizistan
et 6 autres en Lettonie. Des quantités nettement insuffisantes
pour fabriquer de véritables bombes atomiques (pour lesquelles
25 kg d'uranium enrichi ou 8 kg de plutonium sont nécessaires).
Mais on songe immédiatement à ces bombes dites
«sales», c'est-à-dire composées d'un
explosif classique auquel on accolerait des matériaux
radioactifs afin de contaminer les populations alentour.
«Ce genre de bombes, dites aussi radiologiques, ne
sont pas forcément d'une très grande efficacité»
(?????), s'empresse de souligner
Abel Gonzales, directeur de la division de sûreté
radiologique à l'AIEA. Avant d'ajouter: «L'effet
de terreur psychologique, lié aux
fantasmes développés par les images de Hiroshima
ou de Tchernobyl, serait certainement très fort. Même
si ces choses n'ont en vérité rien à
voir entre elles.» Et de prendre l'exemple d'une valise
bourrée d'explosifs et d'un peu d'uranium déposée
à une heure de pointe dans une grande gare d'une capitale
occidentale. «Il est très compliqué de
calculer les effets exacts d'une telle bombe», explique
Gonzales avec une prudence extrême, comme s'il avait peur
que ses propos n'inspirent des lecteurs malveillants. «Cela
dépend de la quantité d'uranium placée dans
la valise, de son degré d'enrichissement (qui peut
aller de 20 à 80 %, ndlr), mais aussi de la façon
dont l'explosif arrive à diffuser l'uranium.»
(l'effet serait redoutable avec du plutonium,
car 1 millionième de gramme ingéré suffit
à provoquer un cancer)
Contact. Car pour être contaminé, il ne
suffit pas d'être à proximité de l'explosion,
il faut que le corps entre en contact avec des particules irradiantes.
Sur les milliers de voyageurs en attente de leur train, très
peu seraient touchés (non).
«Avec, par exemple, 100 g de substance radiologique,
le nombre de personnes éventuellement contaminées
- sans même parler de tuées - ne dépassera
pas la centaine», assure-t-il.
Les fonctionnaires de l'AIEA ont certainement pour consigne
de ne pas ajouter à l'affolement général.
Cependant, plusieurs éléments les inquiètent.
On dit souvent que le faible attrait pour les armes radiologiques,
comparées aux chimiques ou aux biologiques, réside
dans la difficulté pour les terroristes de se procurer
les matériaux radioactifs. Mais «il en existe
sous des formes très diverses, autres que l'uranium et
le plutonium», avoue un attaché nucléaire
français. Par exemple le cobalt, le césium ou le
strontium. Utilisés dans les hôpitaux et dans de
nombreuses industries, ces produits ont l'«avantage»
de se trouver dans des lieux beaucoup moins surveillés
que les laboratoires de recherche nucléaire.
A Goiania
(Brésil), un pauvre bougre s'était ainsi introduit
dans un hôpital afin de chaparder quelques bouts de ferraille
pour les revendre à la casse. En guise de «ferraille»,
des barres de césium. Une fois chez lui, il entreprit
de les scier et découvrit en leur centre une pâte
étrange aux reflets bleuâtres fluorescents. Dont
il s'amusa à se couvrir le corps, ainsi qu'à ses
amis. Quatre personnes trouvèrent la mort, quatorze furent
contaminées, comme des centaines d'hectares aux alentours
de sa maison.
Ex-URSS. L'étendue du trafic illicite de matériaux
radiologiques est une autre source d'inquiétude. Depuis
1993, l'AIEA dispose d'une base de données qui rassemble
tous les cas de commerce de ce genre - environ 600 en huit ans
- découverts par Interpol, des services de douanes, des
médias... Avec deux réserves importantes: d'une
part, ne sont inscrits que les cas confirmés par les autorités
du pays concerné (or, on peut imaginer que certains refusent
de rendre publiques des malversations opérées sur
leur territoire). D'autre part, on n'a aucune idée de
la quantité des ventes échappant à la surveillance
policière.
«L'immense territoire de l'ex-URSS, avec ses centaines
d'installations nucléaires et ses milliers de techniciens
sous-payés, constitue un terrain très propice au
marché noir de matériaux nucléaires,
explique un haut responsable de l'AIEA sous couvert d'anonymat.
Mais avec seulement 200 inspecteurs de par le monde, nous
sommes incapables de contrôler toutes les anciennes républiques
soviétiques comme il le faudrait.» L'AIEA prend
donc l'alerte au sérieux. Le 2 novembre, une réunion
extraordinaire rassemblera à Vienne les spécialistes
mondiaux de la sécurité nucléaire. Thème:
«Combattre le terrorisme nucléaire.»
Une quarantaine de militaires installés
à Flottemanville-Hague
LA HAGUE 19 octobre - Une quarantaine de militaires
de l'armée de l'air, arrivés vendredi matin à
Flottemanville-Hague (Manche) avec cinq camions de transmission,
un camion radar et deux autres camions, se sont installés
dans un camping de cette commune à la position stratégique.
Le site est le point culminant du nord Cotentin à 183
mètres au-dessus du niveau de la mer avec vue sur le site
Cogema, distant d'environ cinq kilomètres.
Virulentes chez les militants antinucléaires, les réactions
face à cette protection renforcée du site en cas
d'attaque, se teintaient vendredi de fatalisme parmi la population
locale.
''Cela fait vingt ans que nous disons que si un jour un avion
s'écrase sur la Cogema, ce sera une catastrophe sans précédent'',
s'est écrié Yannick Rousselet, représentant
de l'organisation écologiste Greenpeace à Cherbourg.
De son côté, Didier Anger, conseiller régional
des Verts a estimé que ''protéger le supermarché
du plutonium et la poubelle nucléaire du monde ne suffit
pas à rassurer. Les terroristes peuvent très bien
entrer à l'intérieur du site''
Dans le village, fort de 800 habitants, la vie se poursuivait
sans modification. ''On se sent protégé maintenant.
Mais cela fait des années que nous vivions à côté
de cette usine qui, on le sait représente un danger. Alors
cela ne change pas grand chose'', a commenté une habitante
à la sortie de l'école.
L'armée de l'air en place pour protéger
le complexe nucléaire de La Hague
FLOTTEMANVILLE-HAGUE (Manche), 19 oct - Une vingtaine
de camions, un radar déployé, des militaires qui
devisent : l'armée de l'air a pris position dans la nuit
de jeudi à vendredi à Flottemanville-Hague (Manche)
dans un champ dominant la presqu'île de La Hague où
se trouve le centre de retraitement des combustibles nucléaires
que le gouvernement a décidé de protéger.
Un lieutenant du Centre de détection et de contrôle
mobile (CDCM) de la base aérienne (BA) 128 de Metz explique
que le radar en cours d'installation, dans ce champ entouré
d'un talus planté de fougères, va surveiller la
région dans un rayon de 150 km et qu'il est "optimisé"
pour détecter des engins volant à basse et moyenne
altitude.
"Dans chaque véhicule du CDCM, des techniciens
sont prêts à traiter les données reçues
avant de les transmettre au Centre de conduite des opérations
aériennes de Taverny (Val d'Oise)", dit-il.
Le lieutenant cite la présence sur place d'hommes de
l'escadron de transport 02.064 Anjou de la BA 105 d'Evreux qui
sert de "support logistique". Il se veut pédagogue
: "Ici, en cas d'incident, on sert d'alerte. On dit qu'il
y a quelque chose d'anormal et on donne à notre hiérarchie
la capacité de prendre une décision".
L'officier ne confirme pas pourtant l'arrivée de missiles
sol-air qui doivent compléter le modeste dispositif aujourd'hui
en place.
"La guerre se déplace chez nous"
Durant ses explications, un hélicoptère civil,
à bord duquel se trouvent probablement des photographes,
survole le champ. Cela a le don d'agacer un adjudant-chef : "depuis
les événements, la zone ou se trouve La Hague est
interdite de survol. Le jour où il aura un Mirage au c..,
cela lui fera drôle", lâche-t-il.
Les militaires se sont installés au point le plus haut
de la presqu'île, à 180 m d'altitude, à proximité
d'un observatoire astronomique. De là, ils ont une vue
dégagée sur la rade de Cherbourg et sur le centre
de retraitement de La Hague dont les installations gigantesques
contrastent avec l'aspect paisible du Bocage normand.
Dans le bourg de Flottemanville-Hague qui compte 800 habitants
et où beaucoup de familles ont un parent qui travaille
dans le nucléaire, l'arrivée des militaires est
ressentie sans état d'âme. "C'est tout à
fait normal d'utiliser de tels moyens de défense dans
la situation internationale incertaine que nous vivons",
dit Eric, 40 ans, technicien de maintenance.
Le maire de la commune Christiane Desquesnes abonde dans ce
sens. "Depuis que la nouvelle s'est répandue, je
n'ai reçu aucun coup de téléphone affolé
ou paniqué d'un habitant de Flottemanville", assure-t-elle.
Seule, Dominique, une femme au foyer de 41 ans, se montre
plus nuancée : "Il ne faut certes pas céder
à la panique mais cela veut quand même dire que
la guerre se déplace chez nous et qu'elle n'est pas que
dans l'écran de télévision à la grand-messe
du 20h00".
Protection renforcée des sites nucléaires
en Rhône-Alpes
LYON, 19 oct - La préfecture de région
et EDF ont confirmé vendredi à l'AFP que des mesures
particulières étaient prises pour la protection
des sites nucléaires en Rhône-Alpes (5 centrales
de 4 tranches de réacteurs), mais en se refusant à
donner tout détail, notamment sur une éventuelle
protection aérienne.
"L'efficacité même de la mesure est dans
son secret", a souligné la préfecture.
"A partir du moment ou le risque dépasse celui
qui ressort de l'exploitation, si c'est un risque terroriste
ou un risque de guerre, cela relève de la défense
nationale", observe de son côté Jean Fluchère,
délégué régional EDF en région
Rhône-Alpes
"Chacun assume ses responsabilités", a-t-il
ajouté, affirmant : "Je ne connais pas les mesures
qui sont prises et c'est normal. Il ne faut surtout pas les commenter
parce que cela donnerait des idées aux gens, qui, précisément,
n'attendent que cela pour faire des choses inavouables".
Il a en outre vivement critiqué "ceux qui veulent
absolument terroriser les populations avec le nucléaire"
et qui saisissent toutes les occasions de le faire".
L'armée de l'air a mis un dispositif en place pour
protéger le complexe nucléaire de La Hague. En
revanche, l'information selon laquelle des missiles sol-air seraient
déployés pour protéger plusieurs sites d'intérêt
national n'a pas été confirmée.
Les centrales nucléaires canadiennes
protégées par des gardes armés (presse)
MONTREAL, 20 oct - Des gardes armés vont
être chargés de renforcer la protection des installations
nucléaires canadiennes, a révélé
le quotidien Globe and Mail dans son édition de samedi.
La Commission canadienne de sûreté nucléaire
a ordonné jeudi aux opérateurs de huit installations
nucléaires de renforcer leurs mesures de sécurité,
après une révision de celles en place actuellement,
effectuée à la suite des attentats du 11 septembre.
Il n'y a pas de menace particulière contre ces centrales,
mais le haut risque associé au nucléaire impose
un renforcement des mesures de sécurité, notamment
avec des gardes armés, a estimé la présidente
de la commission, Linda Keen, sans donner plus de détails
sur ce dernier point.
L'introduction d'armes dans les sept installations civiles
d'énergie nucléaire canadienne est une première.
Elle s'ajoute à d'autres mesures, comme un contrôle
renforcé des personnes et des véhicules à
l'entrée ou des restrictions d'accès à certaines
zones sensibles.
"Je veux voir ces mesures mises en place rapidement",
a indiqué Mme Keen, ajoutant que certaines prenaient effet
"immédiatement".
Cinq centrales nucléaires sont basées en Ontario,
une au Québec et une au Nouveau-Brunswick (est). Les nouvelles
mesures s'appliquent aussi au centre de recherche nucléaire
de Chalk River, près d'Ottawa, dépendant de l'Agence
canadienne de l'énergie atomique.
www.multimania.com/mat66/
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