Le Conseil européen
qui se tiendra à Nice en Décembre aura à
trancher sur le statut de la Charte européenne des droits
fondamentaux, décidée à Biarritz, et à
adopter un nouveau traité réformant les institutions
de l'Union pour les rendre compatibles avec les élargissements
projetés aux onze pays actuellement retenus comme candidats.
Tout porte à croire que cet ordre du jour ne dérogera
pas à l'orientation ultra-libérale dominante
1 . La Charte
des droits fondamentaux : un instrument de régression
sociale
Décidée
au Conseil européen de Cologne, et adoptée au Conseil
européen de Biarritz les 13 et 14 octobre, la Charte des
droits fondamentaux n'attends plus que d'être officiellement
proclamée à Nice. Ce texte pose deux problèmes
: celui de son contenu et celui de son statut. Pour
le contenu, la partie qui traite des droits économiques
et sociaux constitue une régression par rapport aux législations
de plusieurs pays, notamment la France, par rapport également
à la Charte révisée du Conseil de l'Europe,
et à certaines conventions de l'Organisation internationale
du travail (OIT). Droits syndicaux et droit de grève,
absents de la première mouture y sont largement ignorés,
le droit au travail est devenu " le droit de travailler
", il n'est pas fait mention du droit à un revenu
minimum, ni même du salaire minimum. En ce qui concerne
les conditions de travail et le droit à la retraite même
flou artistique. Ce projet de charte européenne
qui prétendait servir de modèle aux " valeurs
européennes " en ce qui concerne les droits sociaux
et les libertés représente en fait une harmonisation
par le bas des traités et des conventions existants et
se situe en deçà même de la Convention européenne
des droits de l'homme. Son contenu en fait
un véritable instrument de régression sociale.
En outre le statut de la Charte n'est pas encore défini.
Il le sera définitivement à Nice . S'agira t-il
d'un texte à valeur uniquement proclamatoire, ou bien
aura t-il une valeur contraignante ? Dans cette dernière
hypothèse la Charte risquerait de constituer un point
d'appui pour remettre en cause les droits sociaux existants dans
plusieurs pays européens.
2
. Une réforme institutionnelle pour marchandiser le monde
Tout comme les firmes multinationales
et les institutions multilatérales qui leur servent de
relais (FMI, Banque mondiale, OMC, OCDE), l'Europe institutionnelle
est un moteur de la mondialisation libérale. La Commission
européenne poursuit systématiquement son offensive
contre les services publics, pour les privatisations, et pour
la libéralisation du commerce des biens et des services
(éducation et santé en particulier). Et le Conseil
européen, où les décisions se prennent par
consensus, avec l'aval, pour la France, du Premier ministre,
est un propagandiste actif de la mondialisation libérale
au lieu d'être un rempart contre elle. C'est
dans ce contexte idéologique que le commissaire Pascal
Lamy (et les lobbies des firmes transnationales qui lui sont
proches) a entrepris une campagne pour obtenir une réforme
des institutions (et notamment de l'article 133 du Traité
d'Amsterdam) qui donnerait à la seule Commission des pouvoirs
qu'elle est encore actuellement contrainte de partager avec les
Etats membres. Une telle réforme retirerait
à un gouvernement, et donc aux citoyens qui peuvent faire
pression sur lui, toute possibilité de bloquer certaines
initiatives ultra-libérales du commissaire européen
Pascal Lamy. Ce serait la porte ouverte à
une commission totalement acquise au dogme ultra-libéral,
et aux exigences des grandes entreprises industrielles, commerciales
et financières , le règne de l'opacité,
de la centralisation et la défaite de la démocratie,
puisque les Etats membres et les Parlements nationaux seront
une fois pour toute dépouillés de leur pouvoir
de veto et de leur capacité à orienter l'action
de la Commission. Il y a urgence à se
mobiliser. En effet, le commissaire Pascal Lamy, a affirmé
en septembre devant une commission parlementaire française
"qu'il ne lui restait plus qu'à convaincre la France
et l'Espagne pour obtenir la révision de l'article 133".
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