- L'OMC peinait
toujours dimanche, au troisième jour de sa conférence
à Doha, à arracher un accord pour lancer un nouveau
cycle de négociations multilatérales alors qu'elle
devait accueillir en son sein Taiwan, après l'entrée
triomphale la veille de son grand rival chinois.
Les 142 délégations
à la conférence ministérielle de l'Organisation
mondiale du commerce (OMC) n'ont pratiquement fait aucun progrès
depuis leur arrivée dans la capitale du Qatar, petite
monarchie du Golfe située à quelques encâblures
de l'Afghanistan où la guerre fait rage.
Les discussions pour le lancement d'un nouveau
cycle de négociations commerciales n'ont donc pas progressé
sur les dossiers comme l'agriculture, les droits de propriété
intellectuelle et les brevets des médicaments, l'antidumping
ou l'investissement.
Chacun
s'observe et tente de passer des alliances. Une première
réunion de travail s'est tenue dimanche matin sur le dossier
du TRIPS, acronyme anglais pour accord sur les aspects de la
propriété intellectuelle liée au commerce.
Les Américains devaient rencontrer plus tard dans la journée
les pays les plus pauvres pour aplanir les divergences.
L'Inde, gros producteur de médicament
générique, campe sur ses positions et réclame,
avec l'aide du Brésil, que le texte final de lancement
d'un nouveau cycle donne la possibilité aux pays de produire
des médicaments protégés par des brevets
pour des raisons de santé publique.
Sous la pression de géants de l'industrie
pharmaceutique, les Etats-Unis, mais aussi la Suisse et la Canada,
veulent protéger les fruits de la recherche et donc la
production de médicaments sous brevets vendus bien plus
chers qu'un produit générique.
Toutefois, selon un haut responsable américain,
les Etats-Unis vont mettre la pression sur leurs partenaires
pour lancer un nouveau cycle même si ce dossier des TRIPS
n'est pas résolu d'ici mardi soir, au dernier jour de
la conférence.
Ce
dossier des brevets est très sensible et les Organisations
non-gouvernementales multiplient les interventions pour défendre
l'accès à des médicaments moins chers pour
les pays pauvres afin de lutter plus efficacement contre les
pandémies comme le sida.
Plus
généralement, les pays en voie de développement
sont relativement amers et veulent une application des règles
déjà définies à l'occasion du précédent
cycle, l'Uruguay round (1986-94), avant que les plus riches imposent
de nouvelles concessions commerciales.
"Nous devons corriger l'inéquité
du passé", a réclamé en séance
plénière le ministre pakistanais du Commerce Abdul
Razak Dawood en rappelant par exemple que les pays industrialisés
rechignent à ouvrir davantage leurs marchés au
textile.
Sur l'agriculture,
rien n'a bougé avec une Europe refusant toujours une référence
à la suppression des subventions agricoles. Une position
vivement critiquée par le Canada qui dénonce le
"jeu de mots" auquel se livre l'Union européenne.
Tout se joue autour du terme
anglais "phasing out" dans le texte préparatoire
que les Européens comprennent comme suppression des subventions.
Sergio Marchi, l'ambassadeur du Canada auprès de l'OMC,
interprète ce terme comme "un procédé
qui ne préjuge pas" de la disparition totale des
subventions. Ce Canadien a cependant convenu préférer
le mot "élimination".
En accueillant en son sein Taïwan dimanche
soir, l'OMC va mettre un voile sur ses luttes intestines. Avec
moins de paillettes et sans la dimension historique de l'accession
de la Chine samedi, Taïwan va à son tour rejoindre
l'organisation chargée de veiller au bon fonctionnement
des échanges commerciaux dans le monde.
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