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10 février 2003, Michel Chossudovsky, lautjournal.info
Une enquête-bidon sur le
11 septembre
On pourrait penser que le fait d'avoir des liens commerciaux
avec le beau-frère et présumé bailleur de
fonds de l'«Ennemi numéro un» constitue
un véritable «conflit d'intérêts»,
surtout pour qui a le mandat, dans le cadre des travaux de la
Commission d'enquête sur le 11 septembre, d'enquêter
sur l'«Ennemi numéro un».
Peu de gens savent que le partenaire d'Unocal dans le consortium
CentGas touchant le pipeline transafghan, la pétrolière
saoudienne Delta Oil, appartient aux clans ben Mahfouz et Al-Amoudi
qui seraient liés à Oussama ben Laden d'al-Qaïda.
D'après le témoignage rendu en 1998 au Sénat
par l'ancien directeur de la CIA, James Woolsey, la jeune soeur
du puissant homme d'affaires Khalid ben Mahfouz est mariée
à Oussama ben Laden.
Ben Mahfouz est soupçonné d'avoir canalisé
des millions de dollars vers le réseau al-Qaïda.
Par «pure coïncidence», voici que l'ancien
gouverneur du New Jersey, Thomas Kean, l'homme que le président
Bush a choisi pour diriger la Commission d'enquête sur
le 11 septembre, a lui aussi des liens d'affaires avec ben Mahfouz
et Al-Amoudi.
Thomas Kean est directeur (et actionnaire) d'Amerada Hess Corporation
qui participe à la coentreprise Delta-Hess avec Delta
Oil d'Arabie saoudite, laquelle appartient aux clans ben Mahfouz
et Al-Amoudi. Delta-Hess a été créée
en 1998 pour la mise en valeur et la prospection de champs pétrolifères
dans la région de la mer Caspienne. En Azerbaïdjan,
Delta-Hess a une participation de 2,72 % dans la société
Azeri-Chirag-Gunashli et une autre de 20 % dans la société
Garabaghki-Hursangi. Elle détient aussi des actions dans
le pipeline Bakou-Tbilisi-Ceyhan (BTC).
Selon Energy Compass du 15 novembre 2002, «une aura
de mystère entoure Delta-Hess, enregistrée aux
îles Caïmans. Hess n'est pas pressée de révéler
les conditions de l'alliance car elles revêtent, affirme-t-elle,
un caractère confidentiel. Un porte-parole de la société
estime que rien ne l'oblige à rendre ces conditions publiques.»
Par pur hasard, l'ancien gouverneur du New Jersey fait en
outre partie du Conseil des relations étrangères
avec un autre membre en vue du conseil d'administration d'Amerada
Hess, l'ancien secrétaire au Trésor Nicholas Brady.
Autrement dit, la saoudienne Delta Oil, l'un des pôles
de l'alliance Delta-Hess, est contrôlée en partie
par Khalid ben Mafhouz, beau-frère de ben Laden.
Et non seulement l'ex-gouverneur Thomas Kean siège au
conseil d'administration d'une compagnie qui fait affaire avec
Khalid ben Mahfouz, mais il dirige la Commission d'enquête
sur le 11 septembre qui est chargée d'enquêter sur
le beau-frère de Khalid, Oussama ben Laden.
Henry Kissinger était en conflit d'intérêts
et il a démissionné ! Le vice-président
de la Commission, l'ancien sénateur George Mitchell du
Maine, a démissionné lui aussi pour la même
raison.
On pourrait penser que le fait d'avoir des liens commerciaux
avec le beau-frère et présumé bailleur de
fonds de l'«Ennemi numéro un» constitue
un véritable «conflit d'intérêts»,
surtout pour qui a le mandat, dans le cadre des travaux de la
Commission d'enquête sur le 11 septembre, d'enquêter
sur l'«Ennemi numéro un».
Et les médias inféodés à la grande
entreprise d'applaudir. Sans mentionner ses liens d'affaires
saoudiens, ils font l'éloge de Thomas Kean, «un
homme d'une probité exceptionnelle et d'une grande force
intellectuelle». Pour le Baltimore Sun, «rien
ne prouve qu'il soit en conflit d'intérêts»
(26 décembre 2002). De quelles autres preuves aurait-on
encore besoin!
Signalons de plus que Thomas Kean est coprésident du Projet
de sécurité intérieure (Homeland Security
Project) sous les auspices de la Fondation Century. À
ce titre, Kean a joué un rôle essentiel dans la
mise au point des recommandations de la fondation, lesquelles
ont inspiré la loi américaine créant le
Bureau de la sécurité intérieure.
La connexion saoudienne
Thomas Kean, décrit comme un «républicain
modéré», n'est pas le seul à entretenir
des liens d'affaires avec des Saoudiens. Nombre de documents
montrent que d'autres personnalités du Parti républicain,
y compris la famille Bush, ont transigé avec des membres
de la famille ben Laden. (Voir le dossier du Centre de recherche
sur la mondialisation au sujet des tractations financières
de George W. Bush.)
Il semble en outre que les responsables de Delta (membre du consortium
d'Unocal touchant le pipeline transafghan) aient joué
un rôle crucial lors des négociations avec les Talibans.
Par ailleurs, Enron, la géante énergétique
de fâcheuse mémoire et dont l'ex-PDG, Ken Lay, était
un proche de la famille Bush, avait conclu un marché intéressant
en vue d'entreprendre une étude de faisabilité
pour le compte du consortium Unocal-Delta. Enron Corporation
s'était également vu confier, de concert avec Delta,
le soin de négocier avec le gouvernement taliban le projet
de pipeline.
Un dossier solidement monté par Wayne Madsen montre que
George W. Bush a aussi transigé avec le beau-frère
d'Oussama, Khalid ben Mafhouz, lorsqu'il était dans le
commerce du pétrole au Texas. George W. Bush et Khalid
ben Mahfouz ont tous deux été impliqués
dans le scandale de la Bank of Commerce and Credit International
(BCCI) :
«Des observateurs établissent d'autres liens
entre Bush et Mahfouz dans le cadre d'investissements dans le
groupe Carlyle, une société de placement américaine
gérée par un conseil d'administration dont l'ex-président
George Bush a déjà fait partie. Bush fils [George
W.] a détenu des actions dans une filiale du groupe Carlyle,
la compagnie Caterair, entre 1990 et 1994. Et Carlyle figure
parmi les principaux bailleurs de fonds de la campagne électorale
de Bush. Au conseil d'administration de Carlyle se trouve Sami
Baarma, directeur de l'institution financière pakistanaise
Prime Commercial Bank dont le siège social est à
Lahore et qui appartient à Mahfouz.» (Voir Maggie
Mulvihill, Jonathan Wells et Jack Meyers : «Slick deals;
the White House connection; Saudi 'agents' close Bush Friends»,
Boston Herald, 11 décembre 2001.)
Dans la foulée du 11 septembre
Khalid ben Mahfouz a été prudemment exclu («pure
coïncidence» encore) de l'enquête menée
par le Trésor américain dans la foulée du
11 septembre et qui a débouché sur le gel des avoirs
financiers de quelque 150 entreprises, organismes de charité
et individus d'Arabie saoudite soupçonnés de financer
le terrorisme. D'après Scotland on Sunday, l'enquête
a révélé qu'un organisme «de charité»
saoudien, Blessed Relief, aurait servi de paravent pour financer
Oussama ben Laden :
«Des hommes d'affaires saoudiens auraient transféré
des millions de dollars à ben Laden par l'entremise de
cet organisme. L'un des magnats saoudiens ainsi soupçonné
est justement Khalid ben Mahfouz, propriétaire de la National
Commercial Bank avec laquelle la famille royale saoudienne fait
affaire. Les autorités américaines et britanniques
ont également enquêté sur Mohammed Hussein
Al-Amoudi, autre milliardaire saoudien qui aurait pu avoir des
liens financiers avec ben Laden. Al-Amoudi, qui contrôle
un vaste réseau de compagnies engagées dans la
construction, les mines, les banques et le pétrole, a
nié à son tour toute relation avec ben Laden. Ses
avocats de Washington ont déclaré qu'il était
définitivement opposé au terrorisme et qu'il n'était
au courant d'aucun transfert d'argent à ben Laden par
des entreprises saoudiennes.»
Toujours selon cette source d'information, «Al-Amoudi
et ben Mahfouz ont tous deux été épargnés
par le département du Trésor américain.
Il n'existe aucune preuve contre eux ni, encore, contre le gouvernement
lui-même. Mais l'attention braquée sur l'Arabie
saoudite depuis le 11 septembre a suscité des questions
fondamentales concernant ses dirigeants.» (Scotland
on Sunday, 11 août 2002)
La poursuite des familles des victimes du 11 septembre
Une dépêche nous apprend que Thomas Kean au
contraire d'Henry Kissinger a été choisi
pour diriger la Commission d'enquête sur le 11 septembre
en raison de «ses bons rapports avec les familles des
victimes du 11 septembre, élément important pour
la Maison-Blanche qui faisait l'objet de critiques de plus en
plus vives de la part de ces familles». (Scripps
Howard News Service, 17 décembre 2002)
Mais l'ironie du sort veut que la poursuite d'un billion de dollars
entamée en août dernier par les familles des victimes
des attentats du 11 septembre cite deux partenaires commerciaux
de Thomas Kean dans la coentreprise Delta-Hess parmi les accusés,
soit Khalid ben Mahfouz (beau-frère d'Oussama ben
Laden) et Mohammed Hussein Al-Amoudi. Les deux sont étiquetés
dans la poursuite en tant que présumés «financiers»
d'al-Qaïda. Que va donc en faire Thomas Kean dans le contexte
de la Commission d'enquête ?
Le mystère entourant le bombardement des ambassades
en 1998
Le témoignage de l'ex-directeur de la CIA, James Woolsey,
confirme que la société pharmaceutique soudanaise
qui a été bombardée en 1998 sur ordre du
président Clinton appartenait à Salah Idris, associé
commercial et protégé de Khalid ben Mahfouz. Il
s'agissait de représailles pour le bombardement de deux
ambassades des États-Unis en Afrique, attribué
à al-Qaïda.
Le conglomérat Mahfouz, propriétaire de la plus
grande banque d'Arabie saoudite, la National Commercial Bank,
s'apprêtait à injecter de l'argent dans le projet
du pipeline transafghan. (Pour plus de détails voir le
chapitre VI de Guerre et mondialisation par Michel Chossudovsky.)
Delta-Hess était aussi en 1998 sur le point de se lancer
dans la prospection et la mise en valeur des ressources pétrolières
et gazières du bassin de la mer Caspienne.
On se demande bien pourquoi l'administration Clinton aurait
ordonné de bombarder une usine qui était dirigée
par un partenaire commercial d'Unocal et d'Amerada-Hess !
[Traduction l'aut' journal]
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