PARIS (5/11/2006 ) - Cinq millions de foyers ont été privés
d'électricité samedi soir en France peu après
22h et pendant une trentaine de minutes, en raison d'incidents
sur le réseau allemand. L'Autriche, la Belgique, l'Italie
et l'Espagne ont été également affectées
par ces coupures, qui ont touché au total dix millions
de consommateurs en Europe, mais ont permis d'éviter "un
black-out européen", selon le Réseau de Transport
d'Electricité (RTE).
RTE, qui gère le réseau électrique français,
a expliqué dimanche que cet incident "trouve son origine
sur le réseau à très haute tension allemand".
Selon André Merlin, président du directoire de RTE,
le problème pourrait être "lié au passage
d'un bateau sortant des chantiers navals" dans le nord-ouest
de l'Allemagne. L'opérateur allemand E.On AG a indiqué
avoir coupé une de ses lignes à haute-tension au-dessus
d'un fleuve dans cette région pour laisser passer ce bateau
en toute sécurité.
Dans un communiqué, RTE a expliqué que "des
flux d'électricité imprévus ont provoqué
des surcharges en cascade entraînant la mise hors service
d'un grand nombre de lignes électriques internes au réseau
européen". "Celui-ci s'est trouvé coupé
en deux à 22h13, avec une ligne de séparation allant
de la mer du Nord à l'Adriatique".
Les deux parties du réseau européen ont alors connu
un brutal déséquilibre entre production et consommation
d'électricité. "La partie orientale (à
savoir la majeure partie de l'Allemagne, la Pologne, une partie
de l'Autriche et les pays d'Europe Centrale) était en surplus
de production". En revanche, la partie Ouest, dont la France,
une partie de l'Allemagne, le Benelux, la Suisse, l'Italie, l'Espagne
et le Portugal, avait une consommation très supérieure
à la production.
En France, "afin de contribuer à rétablir l'équilibre,
une partie de la consommation d'électricité (5.200
MW sur les 56.000 MW consommés à cet instant) a
été immédiatement interrompue par des automates
de sécurité dont le réseau de RTE est équipé".
Ce sont donc environ cinq millions de consommateurs qui ont été
privés d'électricité, puis progressivement
réalimentés entre 22h30 et 23h00", selon RTE.
A Paris, l'état-major des sapeurs pompiers a précisé
qu'une quarantaine d'interventions ont été effectuées
pour secourir des personnes bloquées dans des ascenseurs.
Il n'y a pas eu de blessés. L'état-major a par ailleurs
reçu plusieurs centaines d'appels de personnes qui "voulaient
savoir ce qui se passait".
Des coupures automatiques similaires ont eu lieu dans tous les
pays d'Europe de l'Ouest, permettant de compenser le déficit
de production en Allemagne et de revenir aux conditions normales
d'équilibre.
Au total, environ dix millions de consommateurs européens
ont été affectés, soit environ 10% des consommateurs
touchés dans chaque pays, a précisé André
Merlin lors d'une conférence de presse par téléphone
dimanche. Les coupures ont duré de quelques minutes à
une heure suivant les pays.
Par ailleurs, "du fait de cette baisse très importante,
l'interconnection entre l'Espagne et le Maroc a été
déconnectée", a-t-il ajouté. "Les
pays du Maghreb se sont isolés de l'Europe", mais
aucune coupure de courant n'a été signalée.
Selon le RTE, les interruptions "ont permis d'éviter
un incident beaucoup plus grave, c'est-à-dire un 'black-out'
européen". "Tous les mécanismes qu'on
a mis en place ont bien fonctionné et, encore une fois,
ont évité un écroulement complet du réseau",
a souligné André Merlin. "Les infrastructures
ne sont pas obsolètes, mais elles mériteraient d'être
renforcées".
Le ministre délégué à l'Industrie
François Loos a de son côté estimé
que cette panne "nous montre que des investissements sont
nécessaires et que au niveau européen, nous avons
intérêt à en parler".
"Ce n'était pas un incident", a affirmé
quant à lui le député-maire Verts de Bègles
(Gironde), Noël Mamère. "C'est la preuve que
l'énergie doit rester un bien public et que l'énergie
ne peut pas être privatisée au gré du capitalisme".
Dans un communiqué, le réseau "Sortir du nucléaire"
a assuré que cette panne est "la conséquence
de l'augmentation continue de la consommation" qui met "en
difficulté les réseaux de distribution". L'organisation
réclame un "'plan Marshall' pour les économies
d'énergie" et pour "développer au maximum
toutes les énergies renouvelables".