La découverte de piles radioactives en Géorgie inquiète les experts

VIENNE, 4 fév - Les experts s'inquiétaient lundi des dangers de terrorisme nucléaire après la récente découverte de piles radioactives près d'une région séparatiste de Géorgie et récupérées dimanche par une agence de l'ONU.

L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), basée à Vienne, a confirmé qu'elle avait récupéré dimanche près de la région séparatiste d'Abkhazie deux cylindres contenant du strontium-90, un matériau nucléaire pouvant être utilisé par des terroristes avec des explosifs conventionnels pour fabriquer une bombe atomique clandestine.

Pour éviter que, à l'avenir, des terroristes ne trouvent des cyclindres semblables, des experts français, allemands, russes et américains doivent se réunir cette semaine à Tbilissi pour s'entretenir de l'incident, qui succède à une découverte semblable faite en 1998. Un pêcheur géorgien avait alors trouvé un objet radioactif dans le lit d'une rivière de la même région géorgienne.

"Nous rencontrons cette semaine les autorités géorgiennes pour discuter de cet incident et de ce qui peut être fait à l'avenir pour trouver et mettre en sécurité de telles sources de radioactivité", a déclaré un
porte-parole de l'AIEA Lothar Wedekind.

Les deux cyclindres, longs d'environ 15 cm, sont apparemment des piles abandonnées après la chute de l'Union soviétique. Ils émettent une radioactivité de quelque 40.000 curies, soit 20 fois plus que la radioactivité utilisée dans les hôpitaux pour soigner les cancers.

Après les attentats du 11 septembre aux Etats-Unis, l'AIEA avait fait une série de propositions destinées à "réduire les dangers d'actes potentiels de terrorisme nucléaire", incluant l'amélioration de la
sécurité de sources radioactives, a indiqué l'agence dans un communiqué publié à Vienne.

Selon l'agence, diverses sources radioactives ont été découvertes en Géorgie au cours de la décennie passée et l'incident de ce week-end ne devrait pas être le dernier.

"Des experts estiment qu'un certain nombre d'objets semblables sont perdus, abandonnés ou échappent d'une autre manière aux contrôles réguliers", indique le communiqué.

La récupération des deux piles "a bien marché", a déclaré M. Wedekind. "C'était une opération difficile en raison de la configuration du terrain, des intempéries et de la puissance des radiations", a-t-il ajouté.

Les cyclindres avaient été découverts début décembre par trois bûcherons du village de Lia, près de la frontière abkhazo-géorgienne. Les trois hommes ont depuis été contaminés, le plus sérieusement touché devant être transféré dans un hôpital à l'étranger.

L'AIEA redoute que, avec des piles de ce genre, des terroristes ne puissent construire une bombe susceptible de causer une catastrophe si elle explosait dans une grande ville occidentale.

Le porte-parole de l'agence a refusé lundi de donner des précisions sur le lieu de stockage des deux cylindres qui devaient être transportés à Tbilissi. "Nous ne communiquons pas de détails pour des raisons de sécurité", a-t-il dit.

Selon des sources géorgiennes informées, les conteneurs ont été transportés sur le site de l'ancien réacteur nucléaire expérimental de Mtskheta, à quelque huit kilomètres à l'ouest de Tbilissi.

 

Libération vendredi 01 février 2002

L'héritage radioactif de l'armée Rouge en Géorgie

Trois hommes ont été gravement irradiés en décembre par des engins nucléaires laissés par les Russes.

Les ordures nucléaires aban données par l'armée Rouge ont encore frappé. En Géorgie, trois hommes ont été gravement irradiés le 2 décembre dernier, après avoir manipulé deux sources radioactives à Lia, un petit village situé à 370 km de la capitale Tbilissi. Des sources léguées par l'armée Rouge à la fin des années 80. Ce sont deux cylindres d'une dizaine de centimètres de long qui étaient utilisés comme batterie nucléaire portative pour alimenter des balises radio (lire ci-dessous). Selon la revue Science, qui publie aujourd'hui l'enquête d'un journaliste britannique, ces cylindres ont été repérés par les victimes en dépit de l'épaisse couche de neige qui recouvrait le sol: la chaleur dégagée par la radioactivité fait fondre la neige et dégage de la vapeur d'eau.

Sérieusement brûlés. Il s'agit de deux sources de Strontium-90 jugées très puissantes par les spécialistes. Contactée par les autorités géorgien nes, l'Agence inter na tionale de l'énergie atomique (AIEA) a dépêché ses experts sur place. Une équipe de radioprotection géorgienne a pu filmer les sources à bonne distance. L'expert français Patrick Gourmelon, de l'Institut de protection et de sécurité nucléaire (IPSN), s'est rendu les 21 et 22 janvier à Tbilissi pour examiner l'état des trois irradiés. «Le premier est sorti de l'hôpital, raconte le radiopathologiste. L'état clinique du second est sous contrôle, mais celui du troisième est très préoccupant.» Tous trois ont été sérieusement brûlés par les rayons X émis par la source de Strontium, notamment aux mains et aux jambes.

Les autorités géorgiennes espèrent sécuriser les sources d'ici à samedi pour rassurer la population. «Ils ont un conteneur épais pour bloquer la radioactivité, explique Jean-François Bottolier-Depois, physicien à l'IPSN. La source sera manipulée à distance à l'aide d'un dispositif artisanal. Mais il faudra beaucoup de monde pour limiter les durées d'exposition.»

Selon Patrick Gourmelon, les trois blessés affirment être restés plusieurs heures à proximité et ne les avoir transportées que sur quelques mètres. Mais leurs témoignages ne collent pas avec le constat des scientifiques. «Les sources ont été déplacées sur une distance bien plus importante. De plus, l'activité de ces sources est telle qu'à un mètre, les vomissements apparaissent au bout d'une heure et demie. S'ils étaient restés plusieurs heures, ils seraient déjà morts.» L'un des trois irradiés a raconté comment il a transporté la source nue au bout d'un fil de fer d'une cinquantaine de centimètres. «Il a de graves lésions au genou», conclut Patrick Gourmelon, qui doit repartir à Tbilissi la semaine prochaine. Une réunion d'experts géorgiens, américains, français et russes de l'AIEA s'y tiendra lundi pour évaluer la situation.

Trafics de substances. Cet accident, le premier du genre avec une source de strontium, repose la question des trafics de substances radioactives héritées de l'ère soviétique. S'il n'est pas question de fabriquer de bombe nucléaire avec du strontium, le mélange du matériau avec un explosif classique donne une arme susceptible de contaminer et d'ir radier un large périmètre. Les enquêteurs ont retrouvé six sources. Mais deux manqueraient à l'appel. «Les recherches se poursuivent, confirme une porte-parole de l'AIEA. En mai et juin 2000, des militaires français avaient survolé plusieurs régions habitées de Géorgie avec des hélicoptères équipés pour la détection de radioactivité. Ils ont pu mettre la main sur une petite source.» Reste une hypothèse, sur la présence de sources nues. Pour Patrick Gourmelon, «il est fort possible que des villageois aient démonté les sources pour récupérer le plomb qu'elles contiennent». Une pratique à très haut risque pour un objectif dérisoire: la confection de plombs de chasse.

 

Une centrale nucléaire portative

Le strontium découvert en Géorgie servait de source d'électricité pour des balises radio. C'est la première fois qu'on en découvre à base de strontium-90, un puissant émetteur de rayons bêta (des électrons) et de rayons X. Chacune comportait deux «batteries nucléaires». Bloqués par un épais conteneur métallique, les électrons provoquent un fort échauffement du boîtier. Un dispositif appelé thermocouple (souvent utilisé comme thermomètre électrique) transforme la différence de température avec l'extérieur en courant électrique. Comme le strontium-90 dispose d'une demi-vie (1) de 29 ans, ces batteries ont une très longue autonomie et ne tombent jamais en panne.

(1) Le temps au bout duquel la radioactivité a diminué de moitié.

Par Denis DELBECQ

Des experts de l'AIEA pour récupérer des containers radioactifs en Georgie

VIENNE, 1er fev - Des experts de l'Agence Internationale de l'Energie Atomique vont intervenir ce week-end pour récupérer des conteneurs radioactifs dangereux découverts en Georgie, a indiqué vendredi un porte-parole de l'AIEA.

Des paysans avaient trouvés ces conteneurs, loin de toute habitation dans une forêt de la région de Tselenzhikhi, et les avaient utilisés pour se chauffer à la chaleur qu'ils émettaient.

Trois paysans ont été hospitalisés, soufrant de brûlures et de malaises dus aux radiations, émises selon les autorités de Georgie par du strontium-90. L'un d'eux, dans un état critique, pourrait être hospitalisé en France, a indiqué le porte-parole Melissa Fleming.

L'AIEA en envoyé la semaine dernière deux experts à Tbilissi, où ils se préparent à aider une équipe georgienne dans cette "très difficile opération de récupération dimanche", a ajouté Mme Fleming.

Les spécialistes georgiens n'ont pas encore pu s'approcher des conteneurs radioactifs en raison de la neige, et la construction d'une piste par les autorités locales a été arrêtée en raison du manque de fonds, a-t-elle ajouté.

L'équipe de récupération portera des vêtements anti-radiations et utilisera des bras de "télémanipulation" pour saisir et transporter les conteneurs de 10 cm sur 15 cm jusqu'à Tbilissi où ils seront stockés en lieu sûr.

"Le problème est que leur enveloppe a été retirée et qu'ils ne peuvent pas être pris à mains nues", a expliqué Mme Fleming.

Des experts russes, américains et français doivent se réunir mardi à Tbilissi pour discuter de cette découverte, qui n'est pas la première dans la région, et des questions de sécurité qu'elle soulève.

Un médecin français, Patrick Gourmelon, de l'Institut pour la Protection et la Sécurité Nucléaire, s'est déjà rendu à Tbilissi les 22 et 23 janvier pour examiner les blessés, a ajouté Mme Fleming.



Trois irradiés au strontium-90 examinés à Tbilissi par un expert français

PARIS, 25 jan - Un expert français de l'Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN) s'est rendu cette semaine au chevet de trois Géorgiens, à Tbilissi, "gravement irradiés" début décembre, par deux sources de strontium-90, a-t-on appris vendredi auprès de cet organisme, à Fontenay-aux-Roses (Hauts-de-Seine).

Les trois hommes ont reçu des doses de l'ordre de 2 à 3 grays (Gy) par irradiation globale et jusqu'à 20 Gy en irradiation localisée de la peau, a précisé à l'AFP le Dr Patrick Gourmelon, de retour de Géorgie. (A titre indicatif, une dose d'irradiation de 3 grays suffit à atteindre la moelle osseuse; la probabilité de mortalité est de 50 % en un à deux mois (sans traitement). Une des victimes a quitté l'hôpital au début de cette semaine, la santé des deux autres demeurant stable, a-t-on déclaré de source officielle. Plus de 700 personnes avaient été examinées par les médecins à la suite de cet incident. Les autorités ont affirmé que les conteneurs, qui se trouvent dans une forêt à 25 km de toute habitation, ne posent aucun danger au-delà d'un rayon de 500 mètres.)

L'un des malades, tous âgés d'une cinquantaine d'années et originaires du village de Lia, à 370 km à l'est de la capitale, a pu quitter l'hôpital de l'Institut d'hématologie et de transfusion de Tbilissi. Les deux autres, atteints de "brûlures étendues", restent hospitalisés. Le premier peut être traité sur place, mais le second devra subir une greffe de peau artificielle, qui ne pourra être pratiquée qu'en Europe de l'Ouest.

L'accident est dû à la découverte de deux sources radioactives (des cylindres de 14 cm de haut sur 12 de large) d'une batterie d'alimentation électrique prélevée sur une balise radio utilisée pour l'approche d'aérodrome, abandonnée par l'armée rouge dans cette ex-république soviétique.

Classé en France parmi les "produits à forte toxicité", le strontium-90 est "ostéotrope" : en cas de contamination, il se fixe sur les os et risque de causer des leucémies. "Mais les trois Géorgiens n'ont pas été contaminés. Ils ont été irradiés aux rayons X", insiste le Dr Gourmelon. "Dans les circonstances actuelles, le risque de contamination de l'environnement est nul".

Les conditions de l'accident restent vagues. Les villageois ont affirmé être allés chercher du bois et s'être chauffés, la nuit, sous un rocher, à l'aide de cette source qui dégage une forte chaleur.

Si tel était le cas, ils auraient succombé en quelques jours à cette irradiation, commente le Dr Gourmelon, pour lequel un autre scénario semble plus plausible : les hommes auraient transporté les sources, peut-être pour essayer de les vendre, avant de les abandonner sous le rocher où elles se trouvent toujours.

Leurs brûlures les ont poussés à se présenter à un hôpital local qui les a transférés vers Tbilissi. Dans le cadre de la convention sur l'assistance internationale en cas d'accident radiologique, la Géorgie a saisi l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), qui a révélé cet accident le 5 janvier.

Une mission de cet organisme s'est rendue sur place, mais la neige l'a empêchée d'examiner les sources. C'est à la demande de l'AIEA que le Dr Gourmelon s'est rendu à Tbilissi.

L'expert de l'IPSN avait déjà effectué deux voyages en Géorgie après la découverte de sources radioactives abandonnées par les Soviétiques. Le cas le plus grave d'irradiation est à ce jour celui de onze gardes-frontières exposés en 1997 à des sources de césium-137. Quatre des victimes les plus atteintes ont été traitées en France.

Le blindage des sources est apprécié par les chasseurs qui en font du plomb de cartouche.

 

Géorgie: radioactivité 200 fois supérieure à la norme sur une ex-base russe (Tbilissi)

TBILISSI, 26 juin - Des déchets nucléaires, dont la radioactivité est jusqu'à 200 fois supérieure à la norme, ont été découverts sur la base russe de Vaziani, en Géorgie, qui vient d'être évacuée par les forces fédérales, a affirmé mardi le ministère géorgien de l'Environnement.

"Six sources radioactives, provenant de déchets abandonnés et d'une intensité de 300 à 600 microroentgen/heure, ont été détectés sur la base. Deux autres sources émettant jusqu'à 2000 microroentgen/heure ont été enregistrées dans la zone d'entraînement", indique le ministère géorgien dans un communiqué.

La norme de radioactivité est de 13/16 microroentgen par heure.

"Répandue sur un rayon de 400 mètres, la radioactivité du césium-137 est identique à celle enregistrée en 1997 dans la ville militaire de Lilo, qui avait touché 12 soldats géorgiens", ajoute le ministère.

La Russie doit évacuer avant le 1er juillet, conformément à un accord avec l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), deux de ses quatre bases militaires déployées dans cette ex-république soviétique.

En septembre dernier, les autorités ukrainiennes avaient découvert un dépôt de déchets militaires radioactifs, émettant jusqu'à 300 microroentgen/heure, enfouis dans une ancienne base soviétique de la région de Donetsk (est), à quelques kilomètres d'un village où s'était déclaré une mystérieuse épidémie.

La question de l'évacuation des bases russes a tendu les relations entre Tbilissi et Moscou, déjà envenimées par le conflit en Tchétchénie.

 


Un produit hautement radioactif trouve dans la capitale de Georgie

TBILISSI, 14 nov - Un recipient contenant un produit hautement radioactif a ete trouve dans la capitale de la Georgie, Tbilissi, grace a un coup de telephone anonyme, ont declare mardi des responsables du ministere de l'Ecologie.

Le recipient noir et cylindrique contenant de l'iridium 92 a ete trouve dans un depotoir de l'ouest de la capitale avant d'etre envoye pour examen et neutralisation au departement de physique nucleaire de l'Universite de Tbilissi.

"Quiconque passait dix heures pres de cet objet aurait recu une dose mortelle de radiations", a indique le responsable de la commission de securite pour les rayonnements au ministere de l'Ecologie, Zourab Kerekhelidze.

Le recipient porte un numero d'identification prouvant qu'il a ete fabrique dans une usine, selon la chaine independante de television russe NTV.

La police georgienne soupconne que l'auteur du coup de telephone anonyme ayant alerte les autorites se serait debarasse du recipient apres avoir essaye de le vendre, toujours selon NTV.


------> Découverte de déchets radioactifs sur une base soviétique abandonnée

------> Quelque 50 "foyers de contamination nucléaire" à Moscou annuellement

 

 

Les risques du "petit nucléaire" trop souvent négligés

PARIS, 15 nov - Utilisé aussi bien à l'hôpital que dans l'industrie ou le bâtiment, le "petit nucléaire" présente des risques sérieux, souvent sous-estimés et mal connus, que les pouvoirs publics souhaitent mieux contrôler.
Alors que dans les grandes installations nucléaires (centrales, usines de retraitement...) le risque radiologique est connu et bien identifié, dans le "petit nucléaire", encore appelé "nucléaire diffus", le risque radiologique dû aux rayonnements ionisants est souvent méconnu, ont souligné jeudi les responsables de l'Autorité de sûreté nucléaire au cours d'un point de presse.

Selon l'Autorité, il existe quelque 300.000 sources radioactives aujourd'hui en France. Ces sources ont des utilisations extrêmement variées et peuvent se retrouver aussi bien dans les mains d'un médecin que d'un ouvrier de l'industrie ou d'un agent immobilier.

Les applications les plus connues sont médicales. Il s'agit d'abord du radiodiagnostic (radios du poumon...) qui génère de faibles doses mais touche un public nombreux mais aussi d'autres disciplines moins répandues comme la médecine nucléaire ou la radiothérapie qui impliquent des doses élevées pour les patients.

Dans le domaine industriel, le "petit nucléaire" est également très répandu. 70 % des sources sont des jauges, utilisées pour des mesures d'épaisseur, de densité ou de pesage. "Ces appareils présentent peu de risques pour les travailleurs mais le personnel qui les utilise est souvent peu formé", relève Jean-Luc Lachaume, expert sur les questions d'environnement et de radioprotection à l'Autorité de sûreté.

Une centaine de morts (au moins)
Les gammagraphes (6 % des sources), utilisés notamment pour le contrôle des soudures, sont des appareils très bien protégés, mais utilisant des sources radioactives très dangereuses, avec des risques liés au transport par la route (accident, vol du véhicule).

Enfin les analyseurs de plomb, des appareils pour lesquels il n'existe pas de normes, utilisés pour détecter la présence de plomb dans les peintures et donc les risques de saturnisme, sont employés aussi bien par des professionnels du bâtiment que par des notaires ou des agents immobiliers, peu formés à ce type de risque.

Selon l'Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN), quelque 350 accidents radiologiques, ayant fait une centaine de morts, ont été recensés dans le monde depuis 1945. Une forte proportion (41 %) de ces accidents se sont produits dans le secteur industriel (gammagraphes), ces chiffres étant toutefois à prendre avec précaution en raison d'un grand nombre d'accidents non-déclarés. L'erreur humaine est le plus souvent à l'origine de ces accidents.

Pour contrôler ces milliers d'objets qui peuvent être dangereux pour la santé, la France dispose d'un dispositif de surveillance souvent inadapté. "Il y a des inquiétudes sur la façon dont la radioprotection est contrôlée", reconnaît le directeur de la sûreté des installations nucléaires, André-Claude Lacoste.

 

Exemple d'accidents:

10 janvier 1956 - Milford (USA) - gammagraphie

Un employé dans un chantier de construction prend un objet métallique suspendu à une ficelle. Il le met quelques minutes dans sa poche, puis dans la boîte à gants de sa voiture. C'est une source de cobalt 60 de 1,6 Ci. Elle occasionne une dose de 25 rems et une radiodermite.

 

29 mars 1960 - Université de Madison (USA) - irradiations expérimentales

Un chercheur prend un vase dans lequel se trouvait un tube métallique dans lequel coulissait une source de 200 Ci de cobalt 60, commandée à distance. L'opération dure environ 10 mn. Une demi-heure plus tard il est pris de nausées. La dose était comprise entre 250 et 300 rems. Le 26ème jour, les symptômes de radiodermite se manifestent, le 37ème jour, les poils tombent. La radiodermite se " creuse " à la fin du 8ème mois. La stérilité totale est atteinte le 5ème mois (la dernière publication date de 1962).

 

fin 1961 - Angleterre - hôpital de Plymouth

Un opérateur utilise un appareil de radiothérapie à la tension de 50 kV au lieu de 10 kV. L'erreur de réglage persiste une semaine. Onze malades sont irradiés à des doses 60 fois plus élevées que prévues (~ 6000 rems à la peau). L'érythème apparaît entre 3 et 6 jours. Le 14ème jour, la peau est soulevée par du liquide et tombe dans la semaine suivante. La peau se reforme : sur les doigts vers la 9ème semaine, sur la face palmaire la 12ème semaine. 5 mois après, certains malades présentaient des zones ulcérées.

 

21 mars 1962 - Mexico (Mexique) - perte de source radioactive

En couchant son fils âgé de 10 ans, la mère retire un petit cylindre de métal de la poche de culotte et le met dans le tiroir du buffet de la cuisine. C'est une source de cobalt 60 de 5 curies. La mère (enceinte de 6 mois), les deux enfants et la grand-mère décèdent. Le père (30 ans) survit car son travail, hors du domicile, réduisait l'irradiation. Le tableau suivant résume ce dramatique accident :

 âge

 dose (rems)

 durée de l'exposition

 durée de survie

 10

 4700

 12,5 jours

 5 semaines

 57

 3000

 1,5 mois

 7 mois

 27

 3500

 2 mois

 4 mois

 3

 2900

 2,5 mois

 4,5 mois

 

3 mai 1968 - La Pate (Argentine) perte de source

Un ouvrier soudeur âgé de 37 ans ramasse, sur un chantier un petit cylindre de métal. Il le met dans sa poche. Le lendemain, il le montre à ses camarades, le met dans l'autre poche et le garde toute la journée. Le surlendemain (dimanche) il est hospitalisé pour des douleurs insupportables et des tuméfactions de la partie antérieure des deux cuisses. Le 24e jour, la déclaration de perte de source radioactive (13 curies de cesium 137) conduit les responsables du chantier à la retrouver, au vestiaire, dans le bleu de travail de l'ouvrier. Les doses reçues variaient de 1,7 million de rads au contact de la source à 2 000 rads aux gonades, 300 rads à la poitrine et 60 rads à la tête. Ce travailleur subissait une première amputation de la jambe gauche six mois après l'accident puis celle de la jambe droite le huitième mois. Il était en vie en 1972.

 

août 1968 - Chicago (USA) - Ecole de médecine

Une femme âgée de 73 ans reçoit par voie intraveineuse de l'or radioactif. La dose prévue pour cet examen du foie par scintigraphie était de 200 microcuries. La dose administrée fut mille fois plus importante : 200 millicuries. Elle décéda 69 jours plus tard. A un mètre de la patiente, le débit de dose était égal à 35 mrem/h. Les organes les plus contaminés (foie, rate) ont reçu environ 7 000 rems. La dose à la moelle osseuse a été de 500 rad environ.

 

juin 1972 - France - chantier

Un manoeuvre de 41 ans effectue des gammagraphies sur des soudures. La source tombe au sol au cours des manipulations. L'homme croit que c'est une goupille et la met dans la poche droite de sa veste. Elle y reste 4 à 5 heures. La source avait une activité de 15 curies d'irridium 192. Le film dosimètre indiquait 120 rems. La dose à la moelle osseuse est estimée à 160 rems. Les signes de radiodermites apparurent le 10ème jour. La surveillance médicale se poursuit.

 

1975 - Italie - installation commerciale d'irradiation

Un soudeur intervient dans une installation d'irradiation industrielle. La source de Cobalte 60 supposée être dans son dispositif de stockage est en fait sortie. Pendant l'intervention, le visage est irradié à des doses comprises entre 1 400 et 2 800 rads. La dose moyenne était de 1 200 rads, 87 % de la moelle osseuse a reçu une dose supérieure à 800 rads et 13 % entre 400 et 800 rads. L'évolution a été rapide, et la mort est survenue le 13ème jour.

 

23 septembre 1977 - New Jersey (USA) - installation commerciale

Peu après minuit, un opérateur de production de 32 ans entre dans une cellule réservée à l'irradiation de différents produits médicaux et chimiques. Il pose des paquets sur la courroie du transporteur. Percevant une sensation de fourmillement (hérissement des poils dû à l'électricité statique), il lève les yeux : la source de 500 000 curies est en position " sortie " à 3 m de lui. Il sort précipitamment et rencontre deux autres travailleurs qui s'apprêtent à entrer. La dose a été estimée à 200 rads. Le patient est gardé en isolation dans un hôpital pendant un mois et demi. L'accident a été causé par des manquements graves à la radioprotection (porte en acier démontée et remplacée provisoirement par un contre-plaqué, verrouillage électrique déconnecté, avertisseur lumineux masqué).

 

début mai 1978 - Sétif (Algérie) - perte d'une source d'un appareil de gammagraphie

Deux garçons âgés de 3 et 7 ans jouent avec un petit cylindre de métal près de la fontaine du village. La grand-mère met cet objet dans un cageot avec lequel elle transporte des objets divers jusqu'à la maison. C'est un porte-source renfermant 17 curies d'irridium 192. Pendant 5 à 6 semaines, à raison parfois de 6 à 8 heures par jour, 22 personnes se feront irradier (débit de dose à 1 mètre = 8 rad/h environ). La source ne sera découverte que le 12 juin 1978. Les premières personnes sont évacuées en France le 16 juin 1978.
Parmi les 22 personnes irradiées, 7 le seront sévèrement :
A) Les deux garçons : état général en amélioration, mais radio-lésions aux mains (greffe + amputation d'un doigt) ;
B) Deux jeunes filles (17 et 19 ans) et deux jeunes femmes (20 et 22 ans) présentent un syndrome général sévère; pas de lésions locales ;
C) La grand-mère (47 ans) décède dans les 15 jours qui suivent la fin de l'irradiation (brûlure et nécrose des tissus des parois abdominales et thoraciques).
La reconstitution de l'incident est particulièrement difficile et les réactions de l'organisme ne s'apparentent pas nécessairement à celles d'une irradiation unique et limitée dans le temps. Les doses sont probablement comprises entre 500 et 1000 rads, bien que les évaluations déduites de l'analyse des cellules sanguines donnent une fourchette de doses comprises entre 230 et 550 rads pour les quatre femmes en vie et 220 à 250 rads pour les jeunes garçons. L'une des jeunes femmes (20 ans), enceinte lors de l'incident, a avorté spontanément dans les deux semaines qui ont suivi la phase de restauration.
Quatre malades ont nécessité 300 transfusions en un mois et demi.

Extrait du livre : Le dossier électronucléaire,
Syndicat CFDT de l'énergie atomique,
Edition du Seuil 1980.