Manifestation anti-EPR de Greenpeace pour la venue de Villepin à Helsinki

5/6/2006 - Greenpeace a manifesté lundi à Helsinki à l'occasion de la venue du Premier ministre français Dominique de Villepin, contre la construction en Finlande d'un réacteur nucléaire de troisième génération EPR de fabrication franco-allemande.

L'organisation écologiste a déployé un réacteur nucléaire gonfable surmonté d'un missile devant l'Eduskunta, le parlement finlandais dont le président, Paavo Lipponen, recevait Dominique de Villepin.

A l'issue de leur entretien, M. Lipponen a raccompagné le chef du gouvernement français au bas des marches du parlement où des militants de Greenpeace brandissaient des banderoles "Stop EPR", "EPR non merci" et "Nucléaire français = désastre".

Greenpeace dénonce la relance de l'énergie nucléaire au détriment des énergies renouvelables, les "subventions à l'export illégales" obtenues selon l'organisation par Areva (Framatome) pour l'EPR finlandais, le coût suppporté par le contribuable français en cas de retard du chantier et les risques liés à une attaque terroriste sur la centrale.

Dominique de Villepin est arrivé dimanche soir en Finlande. Outre le président du parlement finlandais, il a rencontré lundi matin le patron de Nokia, Olli-Pekka Kallasavuo, la présidente Tarja Halonen et le Premier ministre Matti Vahnanen.

Il devait se rendre dans l'après-midi sur le chantier de l'EPR, à Pori, sur la côte sud-ouest de la Finlande, avant de regagner Paris dans la soirée.

 

 

Libération, 5/6/2006: 

En Finlande, le chantier du premier EPR à la traîne

Les autorités locales et Areva se renvoient la responsabilité.

La construction du premier réacteur de troisième génération prend du retard à Olkiluoto, dans le sud-ouest de la Finlande. En visite officielle à Helsinki, le Premier ministre français, Dominique de Villepin, devrait en profiter aujourd'hui pour se rendre sur le chantier dirigé par Areva NP, filiale d'Areva et de Siemens. Les travaux de construction du réacteur européen à eau pressurisée (EPR), dont le coût s'élève à 3 milliards d'euros, ont débuté en février 2005. Mais, si l'électricien Teollisuunden Voima Oy (TVO) espérait une mise en service du réacteur dès 2009, le calendrier risque d'être difficile à tenir. Le chantier accuse déjà un retard de huit ou neuf mois.

Dépendance. La compagnie TVO, qui fournit de l'électricité à prix coûtant à ses actionnaires (des collectivités locales et une soixantaine d'industriels, dont la moitié sont des papetiers), exploite déjà deux des quatre réacteurs finlandais. Mais la Finlande, dont la consommation d'électricité par habitant est l'une des plus élevées au monde, importe 70 % de son énergie. La construction d'«Olkiluoto 3» devrait donc permettre de réduire la dépendance énergétique du pays.
A la direction d'Areva à Paris, on relativise le retard : «Il ne s'agit que de quelques mois pour un réacteur qui sera en activité pendant soixante ans, remarque un porte-parole. Ce type de décalage n'est pas inhabituel pour un projet tête de série d'une telle ampleur.» Vitrine d'Areva, le chantier Olkiluoto 3 est unique au monde. La puissance de ce réacteur nouvelle génération atteindra 1 600 mégawatts et ses besoins en uranium seront de 17 % inférieurs à ceux d'un réacteur de la génération précédente.

Béton recalé. Le retard serait dû, selon Areva, à trois facteurs : «L'examen des dossiers par l'Autorité de sûreté finlandaise (Stuk) a pris plus de temps que prévu. Ensuite, certaines pièces ont dû être refaites pour passer les contrôles de qualité et de sûreté. Enfin, il y a eu les problèmes de béton», poursuit le porte-parole. La porosité du ciment fourni par un sous-traitant finlandais pour bâtir le socle du réacteur ne répondait pas aux critères fixés. Les travaux ont donc dû être interrompus plusieurs semaines.

Mais, à Helsinki, le directeur général de l'Autorité de sûreté finlandaise met en cause le consortium franco-allemand. «Nous avons dit dès le départ que l'examen des dossiers prendrait un an et nous avons respecté notre engagement», affirme Jukka Laaksonen. Le Finlandais s'avoue «très surpris par les récentes déclarations de M. Maurel (président d'Areva NP) nous imputant le retard du chantier. C'est un non-sens». De son côté, Martin Landtman, directeur du projet pour TVO, reconnaît la responsabilité d'Areva NP, qui a tardé à fournir des plans détaillés. Mais «il est juste de dire que l'Autorité de sûreté finlandaise est particulièrement stricte», précise-t-il. En outre, le dynamisme du secteur finlandais de la construction a joué en défaveur du consortium franco-allemand, qui a eu des difficultés à recruter des sous-traitants.

Le retard pourra-t-il être comblé d'ici à 2009 ? Martin Landtman doute : «Nous produirons sûrement de l'électricité en 2009, mais je ne pense pas que la date de mise en service commerciale puisse être respectée.» Areva annonce un plan de rattrapage, refusant pour le moment d'évoquer les coûts du retard. Le groupe préfère souligner l'expérience acquise sur ce chantier. La construction du prochain EPR devrait débuter en 2007, à Flamanville (Manche).