Nucléaire: la sous-traitance et les insuffisances de la maintenance critiquées

18/12/2009 - Le recours accru à la sous-traitance et des problèmes dans l'organisation de la maintenance des installations nucléaires sont critiquées vendredi par l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) dans deux rapports.

"Le nombre croissant des défauts de qualité lors de la maintenance, jusqu'à présent correctement détectés, porte les germes d'une dégradation de la sûreté des installations", souligne l'IRSN, organisme chargé d'expertiser tous les sites nucléaires en France.

Le nombre des incidents déclarés à l'Autorité de sûreté nucléaire dans les installations nucléaires comme les laboratoires, les usines, les centres de retraitement et de stockage a augmenté "de l'ordre de 45%" en 2008 par rapport aux trois années précédentes, relève un des deux rapports.

Pour 2009, "on est sur les mêmes conclusions globales en terme de nombre d'incidents", a indiqué Thierry Charles, directeur de la sûreté des usines, des laboratoires, des transports et des déchets à l'IRSN.

Les erreurs humaines ou organisationnelles sont à l'origine des incidents dans 80% des cas dans les centrales nucléaires et dans plus de 60% des cas dans les autres unités nucléaires (laboratoires, usines, entreposage ou stockage des matières radioactives).

Dans cette dernière catégorie, l'IRSN relève "une augmentation continue, au cours des années 2005 à 2008, du nombre d'évènements dans lesquels des agents d'entreprises extérieures ont été impliqués", ajoutant que cette augmentation suit celle du recours à la sous-traitance dans le secteur.

"Le suivi fait par l'exploitant nucléaire des opérations effectuées par des sous-traitants est parfois insuffisant, ce qui a conduit à ce que des opérations de maintenance soient effectuées dans des conditions non prévues", explique M. Charles.

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Dans les centrales nucléaires, "EDF a mis en place un projet pour renforcer l'efficacité des prestataires", a rappelé de son côté Martial Jorel, directeur de la sûreté des réacteurs à l'IRSN, qui reconnaît qu'"il y a des questions liées aux compétences et à l'intégration des intervenants dans les chantiers EDF".

Ce haut responsable de la sûreté nucléaire estime qu'EDF a mis en place un "dispositif très efficace de contrôle interne et externe". Mais il reconnaît que les améliorations sont plus lentes à mettre en place lorsqu'il s'agit d'organisation du travail et du respect de procédures lourdes et contraignantes que lorsqu'il faut remplacer ou réparer un équipement défectueux.

"Il y a une multiplication de démarches d'amélioration qui donnent l'impression que les sites ont du mal à suivre en plus de leur travail de tous les jours: il faudrait des temps de respiration, que les gens puissent arrêter de sauter d'une dynamique à une autre", selon M. Jorel.

Se posent également les problèmes liés au vieillissement des installations. "Dans certains cas, l'état des installations n'est pas au mieux", reconnaît le directeur de la sûreté des réacteurs, qui ajoute que le parc de centrales nucléaires françaises "est toujours à la merci d'incidents compliqués comme celui du Tricastin (Drôme), qui ne sont pas important pour la sûreté [à bon ?????], mais créent des arrêts et sont longs à régler".

Dans cette centrale mise en service en 1980, des barres de combustible sont par deux fois, en septembre 2008 et novembre 2009, restées accrochées lors d'une opération de rechargement du réacteur n°2, nécessitant des longues et coûteuses interventions.