Le soleil et la mort - Tchernobyl, et
après... de Bernard Debord,
France 2006 82 min. Vingt après Tchernobyl, le réalisateur
s'insurge contre la " conspiration du silence "
dans un film qui détaille, preuves à l'appui, les
répercutions terribles de cette catastrophe nucléaire.
Débat: Nuage (d'intoxication) nucléaire
Intervenants : Annie Thébaud-Mony Sociologue, directrice
de recherche Inserm
Xavier Renou (Réseau "Sortir du nucléaire")
Martial Mazars (CRIIRAD)
Modérateur : Ivan Du Roi (Témoignage Chrétien)
Parmi les débats de société qu'il semble
impossibles de poser avec l'honnêteté que requiert
la vie démocratique "la question nucléaire"
tient une place de choix. La proclamation, régulièrement
ressassée, de la différence entre nucléaire
civil et nucléaire militaire n'entraîne pas que le
premier soit traité avec transparence quand le second doit
rester "discret".
Dans sa dimension énergétique, le nucléaire
est un système centralisé et policier dont la stratégie
est menée de manière omnipotente par de "grands
acteurs" au mépris de l'information et de la consultation
des citoyens alors même qu'elle engage durablement et coûteusement
l'avenir de la société. Face à cette insuffisance
démocratique, il convient d'analyser le double "mensonge
nucléaire" par lequel on fait de cette source d'énergie
la solution des problèmes économique et écologique
d'une part, et grâce auquel les pouvoirs en place minimisent
dramatiquement le risque sanitaire pour les populations exposées
d'autre part.
Le premier bienfait prétendu du nucléaire est l'indépendance
énergétique qu'il apporte à la France. Pourtant,
avec 58 réacteurs l'atome couvre péniblement 17 %
de notre consommation d'énergie. De plus, 100 % de l'uranium,
le combustible indispensable aux centrales, est importé.
L'idée d'indépendance est donc une fadaise.
Un autre argument fallacieux est souvent présenté :
le recours à l'atome serait une solution contre le réchauffement
climatique. Or, il ne couvre que 2 % de la consommation mondiale
d'énergie. Ainsi, le rapport " Facteur 4 ",
remis au gouvernement en octobre 2006, est sans ambiguïté :
l'apport du nucléaire dans la lutte contre l'effet de serre
est marginal. Ces arguments sont cependant répercutés
à l'envi par la plupart des médias tout comme celui
de la sécurité optimale des installations gérées
par EDF. Cette dernière affirme que le réacteur
EPR, dont l'une des implantations est prévue à Flamanville
en Normandie, est parfaitement sûr et que son fonctionnement,
même affecté par un accident très grave ou
une attaque terroriste, n'entraînerait pas de graves conséquences
pour les communautés environnantes, la France et l'Europe.
Une étude réalisée par John Large, expert
britannique de renommée internationale, vient contredire
cette thèse en affirmant que l'EPR est le réacteur
le plus dangereux au monde. Enfin, si on ajoute l'embarras des
déchets radioactifs et le coût de démantèlement
des anciennes centrales, le fardeau que représente le système
électronucléaire est donc bien lourd a porter.
Le second mensonge consiste en la dédramatisations - quand
il ne s'agit pas de dénégation - des conséquences
de l'exposition des individus ou des populations aux radiations
nucléaires. Entre 1960 et 1996, la France a procédé
à 210 essais atomiques aériens, souterrains et sous-marins,
au Sahara puis en Polynésie. À ce jour, il n'est
toujours pas permis de faire toute la lumière sur les conséquences
pour la santé et la vie des 150.000 militaires qui ont
participé à ces essais pas plus que pour les populations
proches des atolls de Mururoa et Fangataufa. La même posture
longtemps adoptée par les autorités politiques à
propos du "nuage de Tchernobyl" est désormais
battue en brèche par des laboratoires indépendants
- comme la CRIIRAD - ou des organismes officiels obligés
de se rendre à l'évidence. l'Institut de radioprotection
et de sûreté nucléaire, organisme d'État
a récemment réévalué les retombées
en France du nuage radioactif. Les chiffres, d'aujourd'hui montrent
une "différence d'un facteur parfois supérieur
à 1.000" par rapport aux premières informations
diffusées par le gouvernement français à
l'époque de l'accident.
Dans un tel contexte de légèreté - le
mot est faible - comment lancer enfin le débat qui
convient aux questions engageant le sort des générations
à venir ?
Il est temps de ne plus attendre !