Tchernobyl/Norvège: les rennes trop radioactifs

Le Figaro, 09/10/2014 :

Près de trois décennies après la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, des rennes de Norvège affichent une poussée de radioactivitéqui les rend actuellement impropres à la consommation, indique une chercheuse norvégienne. Le niveau de césium 137, isotope radioactif pouvant découler d'un accident dans une centrale atomique, mesuré chez des rennes d'élevage a atteint jusqu'à 8200 becquerels (Bq) par kilo cette année dans le centre de la Norvège. Cette région a été la plus touchée du pays par le nuage radioactif dégagé lors du désastre, survenu à des milliers de kilomètres de là, qui avait fait des milliers de morts en 1986.

"C'est bien au-dessus de la limite fixée pour autoriser l'abattage des animaux", à savoir 3000 Bq par kilo, et très au-delà du niveau mesuré il y a deux ans (entre 1.500 et 2.500 Bq), a déclaré une porte-parole de l'Autorité norvégienne de protection contre les rayonnements. Résultat: l'abattage de quelques centaines d'animaux n'a pu avoir lieu fin septembre, la saison traditionnellement fatale au cervidé. "Nous observons une décrue du césium dans l'écosystème depuis plusieurs années et l'on pensait que les rennes seraient désormais sous les plafonds autorisés", a souligné la porte-parole.

Le rebond de radioactivité observé cette année s'explique en fait, selon les chercheurs, par l'abondance de champignons -dont raffolent les rennes, les moutons et autres animaux de pâture- en raison d'un été long, humide et chaud. Or, les champignons se nourrissent de nutriments trouvés sur les couches les plus élevées du sol, celles où reposent les particules de césium 137 retombées du nuage de Tchernobyl.

L'épisode ne devrait cependant offrir qu'un court répit aux rennes. La porte-parole précise que le niveau de radioactivitédu césium ingéré par un renne est divisé de moitié après deux ou trois semaines pour peu qu'il consomme d'autres aliments que les champignons, lesquels devraient naturellement disparaître avec les premières gelées. À défaut, les éleveurs peuvent aussi rassembler leurs animaux dans des enclos et les nourrir en prévision d'un abattage.

 


Tchernobyl : le dossier norvégien

Traduction du dossier officiel sur les problèmes norvégiens des années 86, 87, 88 - nous soupçonnons que les problèmes n'ont pas dût être terminés avec l'année 89, en particulier à cause des nouvelles venant de Russie. Il est intéressant de faire le point de toutes les façons possibles. L'approche norvégienne qui essaie de chiffrer un peu le préjudice n'est pas sans intérêt. L'autre côté intéressant est le fait que la radioactivité ne s'est pas laissée tordre le cou ce que confirme les appels au secours émanant de Bielorussie et de l'Ukraine. La Norvège est un bon exemple car assez loin du lieu de l'accident. L'incidence est loin d'être négligeable car il a fallu prendre des mesures pour éliminer les aliments contaminés, pour trouver de la nourriture pour animaux.

 

Conséquences économiques de l'accident de Tchernobyl, en Norvège pour les années 1986 et 1987

Introduction

Après Tchernobyl, les premières mesures de radioactivité en Norvège ont été faites par l'Institut de Technologie pour l'Energie (I.F.E.) et l'Institut National d'Hygiène des Radiations (S.I.S.). Les deux instituts avaient été prévenus par téléphone, (dès le lundi 28 avril) par l'Institut Suédois de protection contre les radiations, des niveaux anormalement élevés mesurés en Suède et des conclusions tirées par la Finlande et la Suède : un accident sérieux vient d'arriver sur un réacteur russe. La station de pompage d'air de l'I.F.E. venait de déceler le saut de la radioactivité vers 8h le même jour. Ce fut alors le début d'une période très critique où tous les équipements disponibles furent utilisés au maximum de leur capacité. Un grand nombre d'échantillons de types très variés ont été mesurés. On a stocké ou congelé de nombreux échantillons pour les mesurer plus tard, dans une période plus calme. Certains n'ont toujours pas été mesurés. Il y avait trop peu de temps pour planifier la prise de données de façon à pouvoir utiliser le résultat pour la prédiction de la contamination. Ce qui primait c'était la protection. Durant l'été 1986, le S.I.S. a collecté les échantillons venant de toute la Norvège. La Norvège a, probablement, été la région la plus contaminée de l'Europe de l'Ouest. L'activité tournait autour de 100 kBq/m2 (environ 6 % du Césium total est arrivé sur la Norvège). Les zones où la contamination au sol est la plus élevée sont les zones montagneuses : zones que personne n'habite mais qui sont très importantes parce qu'elles servent de pâture : moutons, chèvres, rennes et poissons. Le but de ce rapport est de faire le bilan des conséquences économiques de la radioactivité déposée, pour l'agriculture dans les années 1986 - 1987, ou plus exactement, pour les périodes d'abattage de 86/87 et 87/88.

 

Niveaux d'intervention

Mi-mai 1986, les autorités ont fixé le seuil autour de 1000 Bq/kg en Iode 131 et 300 Bq/kg en Césium 137. Le 20 juin 1987, ces niveaux ont été ajustés à 370 Bq/kg dans le lait et les aliments pour enfants, 600 Bq/kg dans les autres aliments. Ces niveaux concernent la somme Césium 134 et 137. Le 20 novembre 1986 les autorités ont remonté la limite pour la viande de renne et le gibier (6000 Bq/kg toujours pour la somme Césium 134 et 137). En juillet 1987, la limite pour les poissons a été aussi fixée à 6000 Bq/kg (Cs 134 + Cs 137).

 

Actions de protection

Évacuation et confinement

Bien que les niveaux de radioactivité venant de Tchernobyl (air et dépôt) soient les plus élevés d'Europe de l'Ouest, ces niveaux sont encore loin de ceux ou l'évacuation devrait être envisagée, ils sont loin également de ceux où le confinement devrait être prescrit.

Voyages

Le 2 mai 1986, la direction de la Santé a, par voie de presse, suggéré que les voyages dans un rayon de 500 km autour de Tchernobyl devaient être évités.

Eau de boisson

Le 2 mai 1986 la direction de la Santé a aussi déclaré qu'il était préférable de ne pas boire l'eau des citernes collectée après l'accident dans le Sud de la Norvège. Quelques valeurs élevées d'iode furent mesurées à ce moment-là, mais les variations étaient importantes car dépendant du contenu en eau de la citerne avant l'accident. La période précédant l'accident avait cependant été une période sèche dans le Sud de la Norvège. Cette restriction a été la seule restriction en ce qui concerne l'eau de boisson.

Fruits, baies, légumes et graines

Les analyses ont montré que les fruits, baies, légumes et graines étaient contaminés largement en dessous des niveaux d'intervention. Il y a eu quelques exceptions cependant. Dans une zone (Trondelag) laitues et persil ont poussé sous le nuage. La direction de la Santé a interdit la vente de ces produits venant de la zone (23 mai 1986). Les produits ont été détruits. A partir du 2 juin, la règle a été modifiée et l'on a seulement interdit la vente des laitues et persil plantés ou sortant de terre entre le 28 avril et le 4 mai 1986. Les autres exceptions concernent les baies et les champignons. Des échantillons contenant de la radioactivité au-dessus des niveaux d'intervention ont été prélevés dans les zones les plus touchées. D'un autre côté, des échantillons prélevés dans les mêmes zones étaient peu contaminés. Comme ces aliments n'entraient pas pour une part importante dans le régime alimentaire, aucune restriction n'a été mise en place. Il y a un problème particulier de compréhension en ce qui concerne le poids de Césium dans les champignons. Généralement on se réfère au Becquerel par kg de produit sec. Or des champignons secs ne représentent quasiment rien et 1kg de champignons secs est un amoncellement de champignons. En effet dans une omelette on utilise environ 10 à 20 g de champignons. Il y a des problèmes du même type avec d'autres aliments. Quand on donne l'activité d'un échantillon, il faut impérativement savoir si on se réfère au poids sec ou frais et il faut aussi savoir comment on utilise cet aliment.

Lait de vache 1986

Les autorités de la Santé et de l'Agriculture se sont mises d'accord pour ne pas enfermer les bêtes car il y avait peu d'herbe à ce moment de l'année. Des mesures ont montré que la contamination par l'iode n'a pas été un problème. Le Césium n'a été décelé dans le lait qu'à la fin mai. Les niveaux de radioactivité sont restés en dessous des niveaux d'intervention sauf à Valdrés. Le lait de cette région a été utilisé comme aliment pour les bêtes. Suivant des pratiques ancestrales d'agriculture, beaucoup de vaches se trouvent dans les montagnes pendant les mois d'été, le lait de ces bêtes a dépassé les niveaux permis. A la fin de l'été, quand le bétail est redescendu, le niveau a baissé à Valdrés.

Lait de vache 1987

En 1987, des problèmes sont apparus dans différentes zones ; dans certains cas, il a même fallu administrer de la bentonite. Le lait de vache n'a pas été interdit (référence Olav Osteras - Norske Meiereir).

Lait et fromages de chèvres 1986

Dans le lait de chèvre, la proportion de Césium s'est accrue quand on a envoyé les chèvres paître dans les pâturages de montagne, mais le niveau a rarement dépassé le niveau d'intervention. Cependant, le lait de chèvre est principalement utilisé pour produire un fromage brun très spécial et très populaire (techniquement ce n'est pas vraiment un fromage) qui lui, par contre, est beaucoup plus contaminé. Il fut alors décidé d'utiliser le lait de chèvre de certains endroits comme aliment pour bêtes à la place de fromage.

Lait et fromages de chèvres 1987

La production du chèvre brun a été affectée en 1987 comme en 1986, mais sur des surfaces plus faibles.

Beurre et fromages ordinaires

Sur toutes les périodes, le beurre et le fromage ordinaire ont été peu contaminés.

Poisson de mer

La contamination des poissons et autres organismes marins a été faible. Les autorités des Etats Unis ont, cependant, rapidement après l'accident, demandé un contrôle des aliments en provenance de différents pays ; la Norvège faisait partie de ces pays. Ceci était d'une importance extrême à cause des exportations de saumon, produit perdant très vite ses qualités. Les premiers contrôles ont été effectués à l'I.F.E. le 7 mai 1986. A partir de cette date, quatre échantillons par semaine ont été mesurés jusque fin septembre. Les autorités américaines ont également imposé un contrôle effectué par leurs services. Ce n'était pas facile car les plus importants marchés sont sur la côte Ouest et le contrôle est à Boston. Cependant, l'Association des producteurs de poisson n'a relevé aucune perte due à l'accident de Tchernobyl car le contrôle américain a été vite arrêté (avant la fin mai) dès qu'il est apparu qu'il y avait accord entre les mesures. Et, comme déjà mentionné, ces mesures se sont arrêté fin septembre. (De plus amples informations sur la situation aux USA peuvent être obtenues auprès de Sacmund Remoy à l'ambassade de Norvège à Washington si nécessaire).

Poisson d'eau douce 1986

Les niveaux de contamination du poisson d'eau douce sont souvent assez élevés et dans quelques cas ont dépassé 60000 Bq/Kg. Ces niveaux ont été mesurés à la fin de l'été 1986. Ces niveaux sont à peu près les niveaux de l'activité déposée. Le 4 juillet 1986, la direction de la Santé a interdit la vente de poissons en provenance de 29 municipalités et le 4 août en provenance de 8 autres.

Poisson d'eau douce 1987

Les niveaux du printemps 1987 n'ont pas baissé significativement en comparaison des niveaux de 1986. Actuellement, il y a même un pic en juin 1987 (bien sûr moins élevé que celui de juin 1986).

Moutons 1986

Il avait été décidé de ne pas restreindre l'utilisation des pâtures. La plupart des moutons norvégiens sont envoyés très tôt à l'été en montagne où ils restent et broutent comme ils veulent, jusqu'aux premières neiges. Il avait été affirmé que les pluies de printemps élimineraient le Césium de l'herbe. On a vite vu que ce n'était pas le cas.
Vers la fin juillet 1986, la contamination de moutons était au-dessus du niveau d'intervention dans plusieurs zones. En conséquence, le 31 juillet 1986, le Ministère de l'Agriculture avec la participation des fonctionnaires régionaux, a décidé que chaque éleveur de moutons recevrait une indemnité pour compenser les pertes dues à la radioactivité des moutons. Entre 1986 et 1987 30 000 fermiers ont reçu des informations sur les pâturages etc.
Le Ministère de l'Agriculture, en coopération avec les vétérinaires régionaux a pris la responsabilité de diviser le pays en trois types de zones. A peu près 70 % des moutons étaient en zone libre (contamination en dessous de 600 Bq/kg). L'abattage et la vente ont été comme d'habitude. Environ 3 % des moutons étaient en zone interdite (contamination au-dessus de 2 000 Bq/kg). L'abattage a été normalement effectué mais la viande a été classée impropre à la consommation. Début 1987, les autorités ont annoncé que cinq lieux serviraient de dépôt pour cette viande. Mais la situation a changé quand les producteurs de fourrure ont voulu utiliser cette viande comme nourriture pour animaux, après des expériences menées par l'Université d'Agriculture de Norvège montrant que le transfert des produits radioactifs de la nourriture à la fourrure était négligeable. Au début les autorités étaient hésitantes, craignant que cette viande ne suive le cheminement ordinaire. Finalement, avec le traitement qu'a subi cette viande, broyant tout, carcasse comprise, il est impensable que quelqu'un puisse manger le résultat.
Les zones restantes, où se trouvaient 27 % des moutons (niveaux de contamination entre 600 et 2 000 Bq/kg) ont été classées zone à mesure spéciale. Le niveau en Césium a été ramené en dessous des limites en utilisant de la nourriture sans Césium pendant des périodes de quatre à huit semaines, en fonction du niveau de contamination. De plus, des concentrés contenant de la bentonite ont été donnés aux animaux. Ces expériences menées par l'Université d'Agriculture de Norvège ont montré que le temps de vie biologique est seulement de 18 jours, beaucoup plus court que celui généralement admis. Pour être tout à fait à l'aise cependant, on a pris un temps de vie plus long (d'abord 24 jours puis 21) pour planifier le programme d'alimentation.

Mouton 1987

En 1987 on a eu le même problème qu'en 1986 mais de moindre ampleur. Aucune zone n'a été classée "interdite". Environ 77 % des moutons sont en zone libre et 23 % en zone surveillée. Dans les zones spécialement surveillées (niveau de contamination avant intervention autour de 600 Bq/kg). Le niveau de contamination en Césium a été réduit en dessous du niveau d'intervention en utilisant de la nourriture sans Cesium sur des périodes de temps données dans la table ci après :

Zones 600-1 000 Bq/kg : 3 semaines

1 000-1 500 Bq/kg 4 semaines

1 500-2 500 Bq/kg 6 semaines

2 500-5 000 Bq/kg 8 semaines

> 5 000 Bq/kg : voir après

On a estimé qu'environ 8 000 animaux s'étaient trouvés sur des zones contaminées au-dessus de 5 000 Bq/kg et quelques-uns ont été interdits pour 10 semaines. Pour la saison 87/88, c'est seulement 70 tonnes de mouton qui ont été renvoyées de l'abattage. Le programme de nourriture spéciale a concerné 280 000 moutons et a été un succès, puisqu'il n'y a eu que 10 dispenses. En 1987 les conditions sont spécialement favorables car l'automne a été très beau et la première neige exceptionnellement tardive.

Rennes 1986

Des contaminations plus élevées que 90 000 Bq/kg ont été découvertes dans les rennes de la partie montagneuse du Sud de la Norvège, au début de l'été 1986. Ce niveau a décru de juin à août, mais est remonté en septembre 1986, avec d'autres remontées durant l'hiver parce que les rennes se nourrissent surtout de lichens. Le 31 juillet 1986 le gouvernement a décidé une indemnité en cas de perte de renne, par suite de radioactivité. Au début du mois d'août 1986, il fut découvert que des rennes domestiques avaient été abattus et vendus dans la partie Nord (le Nord du Fiord Rona). La viande de renne produite dans la partie Sud (Sud du Fiord Rona) avait été classée impropre à la consommation humaine. En novembre 1986, les niveaux de contamination de la partie Nord ont été trouvés quelquefois au-dessus des niveaux d'intervention et environ 85 % de la production de 1986 ne pouvait être utilisée. A cause de l'importance de cet impact (touchant par ailleurs peu de monde) et parce que la consommation du renne n'est pas importante pour le Norvégien moyen, la direction de la Santé a décidé le 20 novembre 1986 d'augmenter le niveau d'intervention d'un facteur de 10 pour le renne. Avec cette valeur, tous les rennes produits dans le Nord du Fiord Rano pouvaient être vendus, et aussi une partie venant du Sud. Cependant le renne restait quasiment interdit. On l'a transformé en un mélange viande/os et enterré. Rappelons que les informations donnant des consignes destinées spécialement aux consommateurs de viande de renne et de poisson d'eau douce ont été distribuées en 1986, puis 1987.

Rennes 1987

En 1987, la situation était similaire mais les niveaux plus faibles. Trois types d'interventions ont été mis en oeuvre. Les deux premières demandant de récupérer les animaux avant et après la période d'accouplement. Dans les deux cas, l'animal est vérifié individuellement et s'il est au-dessus du seuil d'intervention, il est abattu. Si on ne veut pas réaliser les deux opérations, on entreprend un régime d'élimination. Des enclos ont été construits. Le régime, cependant n'est pas simple à mettre en oeuvre. D'abord ces animaux sont sauvages et ne supportent pas d'être enfermés. Ils doivent être adaptés progressivement à ce nouveau type de nourriture sinon ils tombent malades. Certains animaux, parce qu'ils sont maltraités par les autres doivent être déplacés d'un pré à l'autre jusqu'à ce qu'ils trouvent leur place. Une autre action a été tentée en 1987 mais elle a échoué. Une tablette spéciale pour intestin contenant du bleu de Prusse (un capteur de Césium) avait été développée par l'Université et quelques expériences pilotes avaient été menées avec succès avant l'hiver 1986. Avant la saison d'abattage 87/88 on avait produit beaucoup de ces tablettes. Mais cette action préventive n'a pas marché et la raison est que les tablettes se dissolvaient bien plus vite qu'en labo. Une des raisons était la production simplifiée adoptée pour l'industrie. Plusieurs méthodes sont à l'étude actuellement, pour trouver la plaquette qui restera assez longtemps dans l'intestin. Après cette tentative, l'abattage 87/88 a été fait comme d'habitude. Les animaux des zones critiques ont été mesurés individuellement et éliminés si le niveau de Césium est trop élevé.

Viande de boeuf et de cheval 1986

Sur quelques échantillons de viande de boeuf ou de cheval en provenance des zones les plus touchées il a été mesuré un niveau en Césium supérieur au niveau d'intervention décidé en 1986. Ces échantillons venaient d'animaux pâturant en montagne. Il fut alors décidé que, pour l'abattage, on ne garderait que les animaux ayant pâturé dans des champs cultivés pendant au moins quatre semaines ou bien sur cette même période ayant été maintenu à l'étable. Cette décision a été prise le 8 septembre 1986. En plus d'aliments sans Césium, le bétail des zones contaminées a été nourri avec des concentrés contenant de la bentonite, une argile qui permet l'élimination du Césium chez les ruminants.

Viande de boeuf et de cheval 1987

En 1987 on a agi de façon quelque peu différente. Quelques zones ont été classées : "zones à précaution" ou "zone avec directives spéciales" mais pratiquement tout le pays n'était plus sous contrôle. Dans les zones à précaution, le bétail a été nourri avec des aliments sans Césium, avec en plus l'adjonction si possible de concentrés avec 5 % de bentonite. Aucune subvention n'a été accordée dans ces zones. Avant abattage le bétail vivant venant de ces zones est contrôlé, mais si on trouve un niveau supérieur à 600 Bq/kg on le renvoie dans sa ferme. Dans les "zones à directives spéciales" les actions de prévention sont les mêmes mais on donne une subvention de 8 Kr par jour et par bête. Une prime d'un montant égal au prix de la bête est accordée dans le cas où, toutes les actions de décontaminations échouent et où il faut abattre.

Porc et volaille

Les porcs et les volailles sont toujours nourris avec des graines et n'ont donc pas (ou peu) été contaminés par le Césium.

Gibier

Le niveau de contamination du gibier (sauf les rennes) est assez élevé dans les zones où le dépôt est élevé mais varie fortement d'une espèce à l'autre. Pour le grand gibier les plus faibles valeurs ont été trouvées dans l'élan tandis qu'il y avait de très grandes variations dans le chevreuil et le daim. Pour le petit gibier, c'est le canard qui est au-dessus des niveaux d'intervention. Le 20 novembre, le niveau d'intervention a été fixé à 6000 Bq/kg.
La consommation du gibier n'a pas été interdite mais les autorités de santé ont diffusé les avis suivants :
- Si le niveau de contamination est en dessous de 600 Bq/kg, mangez-en autant que vous le désirez.
- Si le niveau est entre 600 et 10 000 Bq/kg mangez en au plus une fois par semaine.
- Si le niveau dépasse 10 000 Bq/kg mangez-en au plus une fois par mois.

 

Impact économique 1986

Les informations, sur les coûts des actions de dédommagement, données dans ce rapport ont été aimablement fournies par le Directeur de l'Agriculture, A. Sagelvmo du ministère. Ces informations se rapportent à la période d'abattage 86/87.

Laitue

On en a environ, détruit pour 300 000 Nok (45 000 dollars en choisissant comme taux de change : 7 Nok =1 $) Il se peut que le coût soit plus élevé car les fermiers ont eu beaucoup de mal à vendre leur production jusqu'au début de l'été à cause d'une peur généralisée des radiations.

Fromage de chèvre

Les pertes s'élèvent environ à 10 millions de Nok soit 1,4 million de dollars (on a inclue la perte du lait de la région de Valdres), après avoir pris en considération la bonification due à l'utilisation du lait comme nourriture pour animaux.

Mouton

Entre 2 à 3 000 tonnes de mouton ont été interdites ce qui représente environ 100 millions de Nok (14 millions de dollars). La nourriture a représenté environ 4 Nok/jour/bête. Cette prévention a coûté de l'ordre de 30 à 35 millions de Nok (5 millions de dollars) La vente du mouton a baissé de 10 %, ce qui est environ la quantité interdite. Ceci indique que les consommateurs ont jugé les mesures adoptées correctes.

Renne

Les interdictions ont coûté 20 millions de Nok (2,9 millions de dollars). Le coût complet du contrôle et de la surveillance a ajouté un surcoût de 8 millions de Nok (1, 1 million de dollars).

Boeuf

Le programme de prévention pour décontaminer le boeuf est revenu à 5 millions de Nok (70 000 dollars) Les chasseurs et les pêcheurs n'ont pas reçu de subventions mais l'environnement a reçu des plantes. Sans aucun doute, Tchernobyl a perturbé le tourisme en 1986. Mais les autorités n'ont pas offert de compensation. La perte n'est pas encore connue actuellement.

 

Impact économique 1987

Les informations ont été fournies par A. Segelvmo du ministère de l'Agriculture pour la période 87/88.

Fromage de chèvre

La perte est autour de 7 millions de Nok (1 million de dollars) après déduction du lait utilisé comme aliment.

Moutons

73 tonnes ont été interdites (2,5 millions de nourriture est revenu au même prix qu'en 86/87 soit, 4 Nok/jour bête mais elle est montée à 8 Nok si l'animal a dû être déplacé. Généralement l'animal n'a pas changé de région, il est simplement descendu dans la vallée. Le coût global du programme s'élève à 40 millions de Nok (environ 6 milliards de dollars). Tous les instruments de mesure et de contrôle sont revenus à 12,5 millions de Nok (1,8 million de dollars).

Renne

216 tonnes ont été interdites soit environ 8,5 millions de Nok (1,2 million de dollars). Quant au programme de surveillance il est estimé à environ 10 millions de Nok

Boeuf

Ce qui a été fait en 87/88 n'a pas entraîné de coût.

 

Conclusion :

Il est très difficile d'estimer les conséquences économiques d'un accident comme celui de Tchernobyl et ce pour des raisons comme celles rapportées pour la laitue en 1986, ou pour l'exportation du saumon qui a souffert bien que le poisson ne soit pas contaminé. Et comment estimer le nombre de touristes américains qui ont annulé un voyage en Europe à cause de Tchernobyl ou bien pour d'autres raisons ? La plupart des coûts donnés dans ce rapport sont les coûts de production ou bien le coût du programme de nourriture. Dans le cas de rennes, on a aussi donné le coût de la surveillance. Cependant la plus grande partie du coût des recherches, du suivi de programmes de nourriture et des programmes de mesures n'est pas inclue dans ce rapport.

La Gazette Nucléaire n°100, mars 1990.