A propos de Démantèlement...

 

Annulation du démantèlement de la centrale de Brennilis recommandée en Conseil d'Etat

14/5/2007 - L'annulation du décret gouvernemental du 9 février 2006 autorisant le démantèlement complet de la centrale nucléaire de Brennilis (Finistère), l'une des plus anciennes du parc nucléaire français, a été recommandée lundi devant le Conseil d'Etat.

Le commissaire du gouvernement, magistrat indépendant chargé de dire le droit, a demandé l'annulation du décret en raison de "l'absence de mise à disposition du public d'une étude d'impact" des travaux de démantèlement de la centrale située dans les Monts d'Arrée, qui a fonctionné de 1967 à 1985. Le Conseil d'Etat doit rendre sa décision dans quelques semaines.

Le décret de 2006, permettant un "démantèlement complet" de la centrale, faisait suite à celui de 1996, qui autorisait un démantèlement partiel. Le texte du 9 février 2006, signé par le Premier ministre Dominique de Villepin et les ministres de l'Economie, de l'Industrie et de l'Ecologie, a été attaqué par le réseau Sortir du nucléaire.

Le commissaire du gouvernement Yann Aguila a estimé recevable l'un des motifs d'annulation soulevés par l'association écologiste, mettant en évidence "l'absence de mise à disposition du public d'une étude d'impact" des travaux. "Les centrales nucléaires, y compris leur démantèlement, sont soumises" à cette obligation prévue par une directive européenne de 1985, a rappelé le magistrat.

Réalisée par le maître d'ouvrage, en l'occurence EDF, l'étude d'impact doit contenir un descriptif du projet et de ses conséquences sur l'environnement. Il s'agit "d'offrir au public concerné la possibilité de donner son avis avant que l'autorisation ne soit donnée", a insisté le commissaire du gouvernement.

Or, dans le cas de la centrale de Brennilis, "le démantèlement a bien fait l'objet d'une étude d'impact mais celle-ci n'a pas été mise à la disposition du public avant que l'autorisation de démantèlement ne soit donnée", a fait valoir Yann Aguila, qui a rappelé que 700.000 habitants vivaient dans un rayon de 50 km autour de la centrale.

En conséquence, le décret attaqué doit être jugé "contraire au droit communautaire" et annulé par le Conseil d'Etat. Le magistrat a en outre recommandé à la plus haute juridiction administrative de condamner l'Etat à verser 2.200 euros à Sortir du nucléaire au titre des frais de procédure.

La centrale nucléaire des Monts d'Arrée, à Brennilis, fait partie des réacteurs français de la première génération. Unique exemplaire industriel français de la filière nucléaire à eau lourde, elle a alimenté la Bretagne en électricité de 1967 à 1985. Les opérations de démantèlement doivent durer jusqu'en 2018.

 

 

Greenpeace, ven 28 janvier 2005:
Déchets nucléaires et démantèlement: La Facture nucléaire se creuse !

 

Ouest-France du jeudi 27 janvier 2005

Les inquiétudes de la Cour des comptes

Le coût « explosif » des déchets nucléaires

Le démantèlement d'un réacteur nucléaire coûte beaucoup plus cher que prévu, a révélé hier la Cour des comptes. À Brennilis, en Bretagne, la facture est multipliée par cinq. L'industrie nucléaire pourra-t-elle toujours assumer ces coûts ?

Le prix réel du kilowattheure nucléaire est-il sous-évalué ? Sous la houlette impérieuse de Philippe Séguin, son nouveau premier président, la Cour des comptes vient de mettre les pieds dans un plat qui a trop longtemps relevé du secret d'État : celui du financement du démantèlement des vieilles installations nucléaires et de la gestion des déchets radioactifs. Elle y consacre un rapport entier

Actuellement, EDF facture au consommateur le futur démantèlement de ses réacteurs. Areva, le ministère de la Défense, la Cogema, ont également fait des provisions. Mais l'exemple de Brennilis est quelque peu inquiétant. Le coût de cette « déconstruction », qui va générer 110 000 tonnes de déchets à été très sous-estimé. La facture finale serait de 482 millions d'euros. Au moins cinq fois plus que prévu.

À Marcoule, dans le Gard, autre très mauvaise surprise. On y démantèle une vieille usine de production de plutonium. Le coût final serait de 6 milliards d'euros. Quant au futur centre de stockage profond des déchets ultimes, à Bure dans la Meuse, il a pris du retard et a doublé son prix initial de 60 millions d'euros.

La France compte actuellement 122 installations nucléaires. Vingt-deux sont à l'arrêt, dont le célèbre « Superphénix ». Toutes devront être démantelées. La loi le prévoit. Mais les financements seront-ils au rendez-vous ? Didier Gasse, l'un des auteurs du rapport, s'inquiète : « La stratégie financière d'EDF n'est pas très claire ». Le premier producteur mondial d'électricité nucléaire a pourtant déjà accumulé 24 milliards d'euros de provisions. Mais ces fonds ne sont pas spécifiquement dédiés au démantèlement. Ce que lui reproche vertement la Cour des comptes. Le comble serait qu'en effet, les Français payent plusieurs fois le démantèlement : en tant que consommateurs d'hier et de demain, et puis en tant que contribuables, si l'entreprise était un jour incapable de tenir ses engagements.

Seule la société Areva serait « dans les clous », selon Didier Gasse. La Défense, le CEA, doivent encore créer un fonds spécifique. La Cour donne en exemple la Grande-Bretagne et les États-Unis où ce sont les pouvoirs publics qui gèrent ces fonds et non pas les entreprises. Mais cette question est « taboue » à EDF. L'électricien ne veut pas se priver de cette manne au moment où il projette d'ouvrir son capital.

Ce sera au Parlement de trancher la controverse. Un débat est prévu en 2006, un an avant la présidentielle. « Cette échéance doit être respectée, dit Philippe Séguin, car c'est la crédibilité de l'ensemble de notre politique nucléaire qui est en jeu. » Beaucoup de Français pensent, en effet, qu'en matière de déchets radioactifs, on leur cache des choses.

Bernard LE SOLLEU



Libération, 27 janvier 2005: 

Le coût des déchets du nucléaire inquiète la Cour des comptes

Elle craint que deux opérateurs (CEA et EDF) n'aient pas économisé suffisamment.

Comment appliquer le sain principe «pollueur-payeur» à l'échelle de décennies ? C'est la question posée par «le démantèlement des installations nucléaires et la gestion des déchets radioactifs», titre du dernier rapport de la Cour des comptes présidée par Philippe Séguin.

Vérifier. Les magistrats de la dite cour, malgré leur dextérité juridique - et un document précieux pour un débat public «éléments sur la table», insiste Seguin -, montrent un réel embarras devant le sujet. Compatissons. Ils sont en effet pronucléaires, comme l'essentiel des couches dirigeantes. Mais, fonction oblige, ils doivent vérifier que les chiffres correspondent aux promesses : que les provisions mises au passif des grands opérateurs de l'électronucléaire - Areva, CEA et EDF - pour financer démantèlement et gestion des déchets ne se révéleront pas monnaie de singe lorsqu'il faudra les «décaisser». Outre cette vertu financière, ils voudraient même que la «transparence» produise la «confiance du citoyen» qu'ils trouvent «morose».

Sous la conduite de Bertrand Fragonard, ils ont donc peint un tableau curieux. D'abord en effaçant une vieille toile : le démantèlement en cours des premières installations (Marcoule, Brennilis...). Certes, admettent-ils, il a coûté «beaucoup plus cher que prévu». Ces installations ont essuyé les plâtres d'activités nouvelles. Et le mode de calcul utilisé n'était valable que pour les centrales du parc actuel d'EDF. Du coup, ils avalisent les provisions actuelles, estimant que les trois opérateurs «calculent scrupuleusement le coût du démantèlement des centrales aux environs de 15 % de celui de leur construction».

Ce satisfecit ne s'étend pas à celui du stockage des déchets les plus radioactifs en couches géologiques dont le laboratoire souterrain de Bures (Meuse) est censé démontrer la faisabilité (1). Entre l'estimation d'EDF et celle de l'Andra, le coût final variant de «5 à 18 milliards d'euros», une commission de conciliation doit y mettre un peu d'ordre.

Menace. Mais si provisions il y a dans les comptes - 12 milliards pour Areva, 11 pour le CEA et 48 pour EDF -, l'argent sera-t-il disponible dans «quarante ou quatre-vingts ans», s'interroge la cour, qui traite différemment les trois opérateurs. Areva semble n'avoir aucun souci, assis sur un tas d'or, sans dettes, et doté d'un portefeuille d'actifs dédiés pour le démantèlement de ses installations déjà supérieur à 2 milliards. Le CEA, lui, doit encore constituer un fonds suffisant, surtout que le ministère de la Défense ne s'acquitte pas de ses devoirs pour les installations militaires à démanteler. Mais c'est surtout EDF qui suscite l'«inquiétude» des magistrats. Du fait de son endettement, elle ne dispose que d'«un embryon d'actifs dédiés par rapport à la masse à financer». Aussi, alertent-ils : «Sans mécanisme de sécurisation, le risque existe, dans le cadre d'une ouverture du capital d'Areva et d'EDF dans des marchés devenus fortement concurrentiels, que les conséquences financières de leurs obligations de démantèlement et de gestion de leurs déchets soient mal assurées et que la charge en rejaillisse in fine sur l'Etat.» Ils réclament des garanties - par des «règles dures» - qu'EDF ne gaspille pas ces provisions où qu'elle ne les mise pas sur des opérations douteuses.

Ils en arrivent même à agiter la menace de la «création de fonds externalisés». Par exemple en les confiant à la Caisse des dépôts. Bien sûr, cette menace vise juste à faire peur. Mais elle pourrait être prise au mot par des associations, des partis ou des députés courageux. Afin d'éviter que les consommateurs paient deux fois - aujourd'hui et dans un demi-siècle - le vrai prix de l'électricité nucléaire.

(1) Libération du 15 janvier.

Sylvestre HUET



Le Figaro, 27/01/2005 : 

Comment EDF a joué sur le nucléaire pour sauver son bilan
La Cour des comptes juge insuffisant le financement du démantèlement

Comment EDF a joué sur le nucléaire pour sauver son bilan

Chez EDF, le dossier sensible de la facture, et surtout du financement du démantèlement du parc nucléaire, a toujours été entouré d'une véritable opacité. A l'occasion de l'un de ses précédents rapports, la Cour des comptes avait d'ailleurs souligné que dans le domaine du nucléaire, «les dotations aux provisions apparaissent plus comme une technique destinée à peser sur le résultat que comme un moyen d'étaler les charges afférentes sur les différents exercices».

Les décaissements liés au démantèlement s'inscrivent dans un avenir lointain ­ pas avant 2015 ­ et EDF a déjà utilisé cette arme du temps pour améliorer sensiblement ses comptes. Lors de la présentation de ses premiers comptes semestriels à l'automne 2003, le premier électricien avait réussi à annoncer un résultat net positif en procédant à une reprise d'une partie de ses dotations aux provisions justifiée à ses yeux par l'allongement de la durée de vie de ses centrales nucléaires.

Cet allongement de 30 à 40 ans s'était traduit, dans le compte de résultat, par une augmentation de 1,8 milliard d'euros du bénéfice net semestriel 2003.

Au bilan, les effets de cette prolongation s'avéraient encore plus marquants puisque le changement du mode d'amortissement des installations nucléaires décidé conjointement (passage d'un système dégressif à un système linaire) se traduisait par une augmentation des fonds propres de l'ordre de 5,4 milliards d'euros. Une opération d'autant moins anodine que depuis plusieurs années EDF se plaint de son manque cruel de capitaux propres.

A l'époque, un certain nombre d'observateurs s'étaient émus de ce jeu d'écritures, arguant que si aucun texte en France ne limite la durée de vie des centrales, la prudence aurait dû conduire à neutraliser l'impact de cette reprise de provisions sur le résultat. Il est vrai que cette astuce comptable ne faisait rentrer aucun euro supplémentaire dans les caisses d'EDF.

Depuis, aussi bien pour les provisions pour le démantèlement que pour la gestion des déchets, la création de fonds dédiés ­ comme cela se pratique dans d'autres pays ­ est régulièrement réclamée, mais sans succès particulier. Car même si EDF a bien créé un fonds spécifique pour les opérations de démantèlement, cette structure est bien loin, de l'avis général, de contenir les sommes évoquées.

Un autre épisode directement lié au nucléaire avait également permis à EDF de sauver ses comptes en 2001. Il s'agissait alors de la renégociation du contrat passé avec Cogema pour la gestion des combustibles usés issus des centrales nucléaires.

Cette reprise de provisions, qui s'élevait à 1,1 milliard d'euros, avait été passée en totalité dans les comptes de l'exercice 2001, alors que le contrat avec Cogema courait déjà à cette époque jusqu'en 2007.

Frédéric de Monicault

 

 

Le Monde, 18/1/05:

Les comptes incertains de la fin de vie du nucléaire

Une analyse des coûts de gestion des déchets et de démantèlement des centrales.

L'industrie nucléaire ne risque-t-elle pas de faire peser sur les générations futures le coût de son démantèlement et de la gestion des déchets qu'elle produit ? La Cour des comptes, a rendu public, mercredi 26 janvier, un rapport sur le sujet.

Au 31 décembre 2003, la France comptait 125 installations nucléaires de base (INB) civiles. Parmi les 22 INB déjà à l'arrêt, plusieurs permettent de mesurer la charge financière du démantèlement. L'opération en cours à la centrale de Brennilis révèle un coût effectif"très supérieur à celui attendu pour le démantèlement des centrales actuelles", souligne la Cour. Les installations anciennes seront les plus délicates à "déconstruire". "Il faut en assumer les conséquences en procédant, à des prix élevés, à l'assainissement d'installations où les exploitants ont laissé s'accumuler des déchets sans aucune vue prospective", constate la Cour, qui se veut néanmoins rassurante en soulignant l'"effet de série" dont bénéficieront les centrales actuellement en service.

Concernant la gestion des déchets radioactifs, il importe, selon les conseillers, de "sortir de l'ambiguïté" sur le statut des combustibles usés, qui ne sont pas considérés par les industriels comme des déchets, mais qui pourraient le devenir si la doctrine française évoluait sur ce sujet.

Ils invitent donc l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) et les producteurs de déchets à "résoudre -leurs- divergences" sur le coût du stockage en profondeur. Les estimations des coûts supplémentaires varient en effet de 5 à 18 milliards d'euros...

Les provisions pour le démantelement et déchets s'établissaient, fin 2003, à 71,4 milliards d'euros, répartis entre Areva (12,3 milliards), le CEA (11,1) et EDF (48). Au total, la fin de vie du cycle nucléaire représenterait, rapportée au kWh, 10 % du coût de production. Ces financements seront-ils sécurisés à long terme ? "Le risque existe, dans le cadre d'une ouverture de capital d'Areva et d'EDF dans des marchés devenus fortement concurrentiels, que les conséquences financières de leurs obligations (...) soient mal assurées et que la charge en rejaillisse in fine sur l'Etat", avertit la Cour, qui prône plus de transparence.

Hervé Morin

 

 

Les Echo, 26/11/2004 :

Démantèlement du site de Marcoule :
Areva et EDF paient une soulte de 1,5 milliard au CEA.

Où trouver de l'argent quand on s'appelle l'Etat, il suffit souvent de "demander" aux entreprises publiques. C'est ce qui vient de se passer, en toute discrétion, pour le démantèlement des sites nucléaires de Marcoule (Gard) surtout, et de Pierrelatte (drôme) dans une moindre mesure. Selon la terminologie officielle, il s'agit d'"installations nucléaires de bases secrètes". Après des mois de cafouillages, en grand en partie liés au fait que trois ministères sont parties prenantes (la Défense, l'Economie et la Recherche), l'Etat et les entreprises concernées (Areva, EDF et CEA) sont parvenus à un accord. Selon nos informations, Cogema versera 427 millions d'euros d'ici à la fin de l'année au CEA. Quand à EDF, la facture s'élève à 1,125 milliard d'euros à payer également avant la fin de l'année.
Ces deux versements considérables apparaîtront dans les comptes 2004 des deux entreprises. Un proche du dossier estime qu'ils enrichiront également le budget de l'Etat d'environ 0,1 point de PIB. Cette manne inespérée, qui permettra à l'Etat de ne rien verser avant 2008 et de préserver le budget de la défense au moins jusqu'à cette date, passe par la création d'un fonds dédié pour assurer le financement du démantèlement des installations nucléaires de défense de Marcoule et de Pierrelatte. Alimenter par les deux soultes, le fonds entraîne le transfert de la maîtrise d'ouvrage de Cogema au CEA. Le fonds doit couvrir l'intégralité des dépenses relatives aux opérations d'assainissement et de démantèlement restant à réaliser, en dehors du transport et du stockage des déchets.
Jusqu'à présent, Cogema, à hauteur de 10%, EDF (45%) et le CEA (45%) étaient parties prenantes dans un GIE appelé Codem, fondé en 1996 et chargé des opérations de démantèlement du site de Marcoule. Le GIE sera dissous dans les jours à venir, lorsque le fonds sera mis en place. Parallèlement à cette opération, le CEA va également verser une soulte à Cogema correspondant à ses engagements sur le site de La Hague.

Attrait boursier

"Tout le monde est content : EDF et la Cogema ne paient pas cher et l'Etat ne paie rien, résume un expert du dossier. Mais qui peut savoir aujourd'hui quel sera le coût du démantèlement de telles installations dans vingt, trente ou quarante ans ? Les soultes libératoires sans clauses de revoyures entraînent le désengagement total des entreprises concernées et un report sur le CEA, autrement dit l'Etat, donc le contribuable, des charges qui n'auront pas été prévues et sous estimées".

Du côté des syndicats, on estime que le transfert de responsabilité vers le CEA est essentiellement motivé par la perspective d'ouverture du capital d'Areva et d'EDF. "L'attrait boursier de ces entreprises serait fortement réduit si devaient se présenter aux futurs actionnaires des comptes où seraient provisionnées des charges pour assainissement et démantèlement sur une période de trente ans", estime la CFDT. Un artisan du montage estime, à l'inverse, que "l'on a une bonne visibilité du coût jusqu'en 2012 et que, pour tenir compte des aspects moins prévisibles, le devis a été majoré de 20%, correspondant à une marge d'incertitude et à une prime de risque".

Par ailleurs, les syndicats expriment de nombreuses craintes quant à la reconversion de ces sites dont les opérations de démantèlement ont été estimées, en 1996, par le GIE Codem à 6 milliards d'euros pour la totalité, y compris le transport et le stockage des déchets.
A Pierrelatte, la mise à l'arrêt de l'usine d'enrichissement d'uranium a été achevée fin 2000. Les grands travaux devraient être terminés en 2007, pour un coût total évalué à 500 millions d'euros. A Marcoule, l'enjeu est beaucoup plus lourd : 5,6 milliard d'euros pour démanteler l'usine UP1, qui assurait la production de plutonium militaire, mais aussi le retraitement des combustibles de réacteurs civils. Mise en service en 1958, elle a été arrêtée en 1997.

Renaud Czarnes

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Les deux chantiers en cours :

- Pierrelatte : démantèlement des usines de diffusion gazeuses produisant de l'uranium très enrichi arrêtées en 1996. Les travaux industriels ont commencé en juillet 2002 et devraient s'achever en 2007. Coût estimé : 500 millions d'euros.
- Marcoule : démantèlement de l'usine UP1 dédiée à l'extraction de plutonium par séparation chimique. Mise en service en 1958, l'unité a été arrêtée en 1997. Les travaux devraient durer environ quarante ans. Coût estimé : 5,6 milliards d'euros.
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EDF et Areva : fonds propres et prélèvements
En milliards d'euros
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EDF
Total des fonds propres : 20,3
Retraites : - 15
Assurance-Maladie : - 4,5
Soulte du démantèlement : - 1,1
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AREVA
Total des fonds propres : 4,1
Soulte du démantèlement : - 0,427

----> Le recyclage, mythes et réalités, PDF

----> Manifestation contre le retraitement de ferrailles radioactives (voir: Magouilles radioactives à Feurs ! et le site: A.D.S.E.)


L'abandon du nucléaire se concrétise avec l'arrêt de la 1ère centrale

14/11/03 - La première des 19 centrales nucléaires allemandes a été débranchée vendredi, deux ans après le vote en 2001 de la loi sur l'abandon de l'atome civil, mais le mouvement antinucléaire sait que le nucléaire civil a encore de belles années devant lui en Allemagne.
En service depuis 1972, Stade, près de Hambourg (nord), est la deuxième plus vieille centrale nucléaire allemande. La plus ancienne, celle d'Obrigheim (sud-ouest), devrait cesser son activité d'ici 2005, en vertu de l'accord négocié à l'arraché en 2000-2001 entre le ministre de l'Environnement, l'écologiste Juergen Trittin, et les industriels du secteur, sous les auspices du chancelier social-démocrate Gerhard Schroeder.
"A Stade, l'abandon du nucléaire est pris au sérieux", s'est félicité M. Trittin, qui célébrait vendredi l'événement dans un restaurant à la mode de Berlin. L'ambiance est moins à la fête dans cette ville de 45.000 habitants qui vit depuis 30 ans de sa centrale nucléaire. Elle ne fournit pas uniquement une taxe professionnelle conséquente, mais aussi des emplois pour de nombreux sous-traitants de la région. Aucun des 300 employés de la centrale ne perdra toutefois son travail, assure l'exploitant, le numéro un mondial de l'énergie E.ON: 150 d'entre eux seront appelés à participer au démantèlement des installations, le reste étant redéployé en interne.
A Stade commence à présent un chantier titanesque, évalué à quelque 500 millions d'euros --alors que la construction n'avait coûté que 153 millions d'euros--. Dans un premier temps, d'ici 2005, les combustibles usés doivent être envoyés pour retraitement à l'usine de La Hague (nord-ouest de la France).
Commencera ensuite le démantèlement effectif, qui ne devrait pas s'achever avant 2015. Ne restera alors de la centrale qu'une halle de stockage provisoire de déchets faiblement ou moyennement radioactifs, qui ne disparaîtra que lorsque l'Allemagne aura décidé de créer un centre de stockage définitif pour ses déchets nucléaires. Ce qui pourrait encore durer des années...
C'est, aux yeux des antinucléaires allemands, le fruit le plus amer du compromis sur l'abandon de l'atome: le nucléaire civil a encore de belles années devant lui en Allemagne.
Les convois de déchets radioactifs rapatriés des usines françaises et britannique de La Hague et Sellafield vers le centre de stockage de Gorleben, qui suscitent des manifestations d'antinucléaires, continueront encore pendant au moins dix ans, en dépit de l'arrêt des livraisons à destination des usines de retraitement à partir de 2005.
En outre, l'accord conclu avec les industriels impose certes pour chaque centrale des quotas de production à ne pas dépasser qui équivalent à une durée de vie de 32 ans, ce qui reviendrait à fermer la dernière centrale allemande d'ici à 2021. Mais il donne aussi la possibilité aux industriels de reporter les quotas d'une centrale à l'autre, prolongeant ainsi la durée de vie des centrales les plus rentables.
Un procédé qu'E.ON met d'ores et déjà en application en fermant Stade un an avant sa date de fermeture théorique (2004). La raison avancée est d'ailleurs économique : la vieille centrale n'était plus très rentable.
"La vraie fête, nous la célébrerons lorsque la dernière centrale allemande sera fermée", souligne Suzanne Ochse, de l'organisation écologiste Greenpeace. "D'ici là, nous aurons deux fois plus de déchets nucléaires qu'aujourd'hui. Et personne ne sait qu'en faire".
Pour déconnecter du réseau la centrale de Stade, aucun câble spécifique n'a dû être coupé, aucun bouton rouge spécial enclenché, précise une porte-parole de E.ON. "Comme pour un contrôle de routine", le réacteur a été éteint.


Démantèlement des installations nucléaires: des procédures plus rapides

15/05/03 - Le démantèlement des installations nucléaires, un problème qui deviendra crucial lorsque les centrales EDF arriveront en fin de vie, devra se faire dans des délais beaucoup plus courts que ce qui était prévu jusqu'à présent, selon l'Autorité de sûreté, le "gendarme du nucléaire".

Un nouveau cadre réglementaire vient d'être mis en place pour le démantèlement de ces installations, obligeant les exploitants à engager immédiatement les opérations sans attendre des décennies, a annoncé jeudi l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

"Cette nouvelle réglementation ne constitue pas une rupture, mais prend en compte les expériences passées", a précisé devant la presse Jérémie Averous, responsable de ce dossier à l'ASN.

Les installations nucléaires en cours de démantèlement sont diverses; réacteurs EDF de centrales de première génération arrêtées définitivement, centres du Commissariat à l'énergie atomique en voie de dénucléarisation, ateliers de fabrication de combustible...

Dans les années 90, les exploitants du nucléaire, encadrés par des procédures administratives complexes, privilégiaient une stratégie d'attente: on met l'installation en sommeil pendant une cinquantaine d'années, en attendant que la radioactivité décroisse, avant d'entamer la démolition. C'est aussi la stratégie adoptée en Grande-Bretagne, où les installations arrêtées sont mises sous cocon pendant une centaine d'années.

"Aujourd'hui, les exploitants sont à même d'avoir une vision industrielle du démantèlement", a estimé M. Averous. "Le démantèlement immédiat est préférable", a-t-il ajouté. Selon le "gendarme du nucléaire", les inconvénients de la "solution attentiste" sont nombreux: risques de pertes de compétences des personnels, dangers liés au vieillissement des installations, difficultés pour garantir le financement des opérations.

Délicat et couteux

La nouvelle réglementation, qui fait l'objet d'une note du 17 février (www.asn.gouv.fr), permet de déclencher sans attendre les opérations de démantèlement, avec un démontage qui s'étale sur une période de 15 à 25 ans, selon l'ASN.

Quels que soient les choix énérgétiques qui seront faits par la France (maintien du nucléaire, réduction ou abandon), le démantèlement des installations reste un processus délicat et couteux. A partir de 2020, les premiers des 58 réacteurs en service dans le parc EDF, prévus pour un fonctionnement d'une quarantaine d'années, arriveront en fin de vie et devront être démantelés.

"Les démantèlements d'installations nucléaires effectués dans le passé ont montré que l'opération ne présentait pas de difficultés techniques insurmontables", a estimé l'expert de l'ASN. A condition toutefois que le démantèlement soit prévu dès la conception et que les filières d'élimination des déchets -radioactifs et conventionnels- soient mises en place.

Selon le "gendarme du nucléaire", le coût du démantèlement d'un réacteur est de l'ordre de 15% du coût de construction, soit environ 15 milliards d'euros pour l'ensemble du parc EDF.

Les experts de l'ASN estiment qu'un démantèlement immédiat permet notamment de vérifier si ces sommes ont été correctement provisionnées par l'exploitant. Un problème qui peut s'avérer crucial si tout ou partie de la production d'électricité est un jour privatisée en France.



Des montres radioactives: recyclage de cobalt 60 produit par les réacteurs nucléaires

Les déchets de faible activité


Greenpeace: baisse alarmante des réserves d'EDF pour démanteler les centrales


Centrale de Brennilis : le bâtiment du réacteur démantelé à partir de 2005

BRENNILIS (Finistère), 27 mars 03 - La déconstruction du bâtiment abritant le réacteur de la centrale nucléaire de Brennilis débutera en 2005 pour une libération totale du site en 2018, a annoncé jeudi Alain Ensuque, chef du site EDF des Monts d'Arrée.

Il s'exprimait lors d'une conférence de presse à l'issue d'une réunion de l'observatoire du démantèlement de la centrale.

Le démantèlement de cette centrale de 70 mégawatts qui doit servir de modèle aux futures déconstructions des centrales nucléaires françaises coûtera 480 millions d'euros au total.

Prototype industriel conçu en 1962 et destiné à prouver la fiabilité de la filière à "eau lourde", Brennilis a alimenté la Bretagne en électricité de 1967 à 1985.

D'ici 2004, quatre bâtiments auront été démolis notamment celui ayant abrité les déchets solides, un autre réservé au combustible irradié ainsi que la station de traitement des effluents liquides.

150 personnes appartenant pour la plupart à des entreprises sous-traitantes spécialisées travaillent actuellement sur le site.

Une étude menée par un laboratoire privé montre un "très léger marquage sur l'environnement" du fait de la centrale, un marquage qualifié de "très léger, bien inférieur aux seuils réglementaires", a-t-on précisé de même source.

Déconstruction de 48 cheminées de Superphénix

GRENOBLE, 6 sept 02 - La déconstruction de 48 cheminées, situées sur les générateurs de vapeur du surgénérateur nucléaire Superphénix de Creys-Malville (Isère), a commencé et devrait s'achever dans trois mois, a annoncé vendredi la direction de la centrale.

Ces cheminées représentent un total de 950 tonnes d'acier. Certaines avaient une hauteur de 75 et 80 m et leur démontage va changer la physionomie de la centrale.

Le démontage du surgénérateur se poursuit et, à ce jour, 500 assemblages de combustible situés dans le coeur du réacteur, sur un total de 650, ont été évacués. Le réacteur devrait être vidé de l'ensemble de son combustible à la fin 2002 ou en janvier 2003, a indiqué le chef de cabinet de la centrale, Jean-Louis Regairaz.

Le gouvernement avait décidé en juin 1997 de fermer la centrale nucléaire Superphénix "à cause de son coût excessif".

EDF s'est donné un délai de 25 ans avant "le retour à la pelouse", c'est-à-dire la déconstruction totale de n'importe quelle centrale nucléaire de son parc.


Le démontage du surgénérateur Superphénix avance

CREYS-MALVILLE (Isère), 18 mai - Le démontage du surgénérateur Superphénix de Creys-Malville (Isère) vient de franchir une étape importante, avec le déchargement d'un tiers du combustible situé dans le coeur du réacteur, ce qui rend impossible dorénavant "la réaction en chaîne propre à un réacteur nucléaire", a annoncé la direction de la centrale.
203 assemblages fissiles, sur un total de 640, ont été retirés du coeur, et entreposés dans une piscine remplie d'eau prévue à cet effet, a précisé le directeur de la centrale, Bruno Coraça, avant l'ouverture au public vendredi et samedi, pour la première fois de son histoire, de cette usine.

Ces assemblages se présentent sous la forme de barres longues de 5,40 m et d'un poids de 580 ou 740 kilos. Ils contiennent de la matière fissible et une quinzaine de kilos de plutonium et sont immergés au sein du coeur du réacteur dans un bain de sodium. Ce métal liquide a la particularité de s'enflammer au contact de l'air ou de l'eau. Il faut donc "laver" ces éléments et enlever toute particule de sodium avant de les entreposer dans la piscine remplie d'eau.

L'opération est délicate, et on retire en moyenne 4 assemblages par jour ouvrable du coeur du réacteur à neutrons rapide d'une puissance de 1200 MW.

"Ces assemblages dégagent 700 watts, c'est à dire la moitié de la chaleur dégagée par un fer à repasser. Comme la centrale est à l'arrêt depuis 1996, ils ont le temps de refroidir" explique M. Coraça.

Le déchargement du coeur sera achevé mi 2002.

350 agents EDF et 200 salariés de prestataires de service (gardiennage, nettoyage ...) travaillent actuellement sur le site.

 

Matériel contaminés à vendre

Le passage sous le seuil de criticité de la centrale permet d'arrêter certains matériels de surveillance du coeur et de cesser leur maintenance. L'intérieur de la centrale ressemble maintenant, dans certains endroits, à un immense hangar abritant des machines d'occasion. De multiples pompes, moteurs et autres armoires électriques sont en cours "de mise hors service définitive", c'est à dire vidangés et nettoyés, avant d'être vendus ou mis à disposition d'autres centrales EDF.

"Nos diesels sont à vendre. On a trouvé preneur pour trois chaudières électriques. Les deux alternateurs de 600 MW pourraient aller l'un à la centrale du Havre (Seine-Maritime), l'autre à celle de Cordemais (Loire Atlantique). Pour EDF, ça permet d'éviter d'acheter du neuf", explique M Coraça.

Pour lui, ce travail de démontage a aussi sa noblesse, car "EDF doit savoir non seulement construire et exploiter, mais aussi déconstruire une centrale".

EDF se donne un délai de 25 ans avant "le retour de la pelouse", c'est à dire la deconstruction totale d'une centrale nucléaire, quel que soit son type.

Concernant Superphénix, dont Lionel Jospin avait annoncé en juin 1997 la fermeture "à cause de son coût excessif" et "la réussite très aléatoire" de la technologie des surgénérateurs, le retour à la pelouse pourrait prendre d'autres formes. Malgré la demande d'une commune pour du terrain, EDF cherche à garder son emprise foncière.

"Ce site, au bord du Rhône, prés des réseaux haute tension et d'un poste d'interconnexion, est stratégique. Si on veut implanter un centre de production d'électricité, pas forcement nucléaire, prés de la grande zone de consommation de Lyon, ici ça sera trés facile", explique M. Coraça.