Communiqué de presse de Stop Civaux 6/07/2004
Stop-Civaux s'indigne de la "désinvolture" (et
c'est un euphémisme) qui accompagne les rejets radioactifs
de la centrale Civaux et tient à le faire savoir.
Les faits :
A quelques semaines d'intervalle, alors que la centrale effectuait des rejets radioactifs, des appareils de mesure sont restés, comme par hasard, indisponibles.
- Le 25 mai, la centrale relève " une indisponibilité des mesures de contrôle " et précise que " dès la découverte de l'indisponibilité, le rejet a été arrêté ". On ne sait pas de quels effluents il s'agit, ni quelle était leur activité, ni pendant combien de temps les rejets ont été effectués sans contrôle, ni si l'anomalie n'a été découverte qu'une fois le rejet fini.... Le public est simplement prié de bien vouloir croire qu'il n'y aurait pas eu dépassement des seuils fixés par arrêté.
- Le 3 juillet on apprend par la presse, que des rejets ont eu lieu les jours précédents. Cette fois c'était les capteurs de débit de la Vienne qui indiquaient 27m3/seconde (limite en-dessous de laquelle la centrale n'a plus le droit de rejeter des effluents radioactifs), alors que le débit de la rivière était en réalité inférieur (21,3m3/s) au moment de l'opération. Les rejets n'auraient donc pas dû avoir lieu.
Le CNPE a une de fois de plus franchi la ligne jaune, en toute innocence, la faute incombant à des appareils de contrôle mal étalonnés. Une fois encore, le public est prié de croire qu'il n'y a " pas eu de conséquences sur l'environnement". C'est beaucoup demander lorsque le contrôleur s'auto-contrôle (avec, en plus, des appareils opportunément défaillants !)
Faut-il croire au hasard ?
- L'an passé en avril, à cause
d'un défaut d'étalonnage, l'appareil de mesure de
l'activité en tritium des rejets, dans des circonstances
très semblables à celles d'aujourdhui, sous-estimait
d'un tiers l'activité de ces rejets (44Bq/l au lieu de
130). Or l'incident avait été connu grâce
à une visite inopinée des inspecteurs de la Sûreté
nucléaire.
Que se passe-t-il en l'absence de témoins ? Rend-on publics
les " malaises " des appareils de mesure si personne
n'est là pour constater les anomalies ? Comment avoir confiance
dans les assurances données par le CNPE, alors que les
incidents de même type se renouvellent avec insistance ?
Quelle importance et pourquoi s'insurger ?
Ces incidents déclarés sans fanfare, nous paraîssent très symptomatiques de la façon dont fonctionne le nucléaire et ils mettent en évidence quelques problèmes qui ne sont pas seulement liés à Civaux. En quelques remarques :
- Un problème insoluble : le dimensionnement des installations : dès que la centrale de Civaux a existé à l'état de projet, son dimensionnement par rapport aux capacités de refroidissement et de dilution de la rivière Vienne a fait problème. EDF a donc revu sa copie réduisant à deux le nombre de réacteurs initialement prévus, en augmentant la puissance. Mais le problème est resté entier.
- L'année passée particulièrement sévère a montré qu'il était impossible de faire fonctionner simultanément les deux réacteurs en été, et qu'un soutien d'étiage était nécessaire même pour un seul réacteur.
- Le prélèvement d'eau (consommation/évaporation) n'est pas la seule difficulté : un débit suffisant pour la dilution des rejets est crucial, la centrale ne pouvant pas stocker indéfiniment ses effluents. Il est en effet impossible de procéder à des rejets en dessous de 27m3/s. Or cette année l'été est en avance, les débits sont déjà inférieurs à la limite et vont considérablement baisser comme tous les étés. Pourtant la centrale doit vidanger ses bâches pour pouvoir continuer de fonctionner et avoir une réserve de rétention suffisante en cas de pépin. D'où peut-être la hâte de s'en débarrasser ?
- Des rejets radioactifs en quantités inédites : On constate pour la première fois en janvier et en avril de cette année que la quantité de tritium liquide mensuelle rejetée a dépassé les 6000 GigaBecquerels. Même chose pour le mois d'avril. Or jamais à Civaux de tels chiffres n'avaient été atteints. A cela deux raisons ;
- Les deux réacteurs ont fonctionné cet hiver pour la première fois simultanément et à pleine puissance, dépassant souvent leur capacité nominale de 1450Mwe (ce que nous estimons d'ailleurs aussi être un dépassement abusif !)
- Comparé aux centrales de type antérieur, il s'avère que le palier N4 produit une quantité de rejets liquides très supérieure en tritium aux autres centrales. Ce tritium qui est rejeté en Vienne doit être dilué et doit poser des problèmes inédits, voire imprévus, à l'exploitant .
- Quelle qualité d'eau pour le consommateur ? Nous sommes surtout soucieux devant ces rejets, car sur son trajet la Vienne sert à recharger des nappes phréatiques et alimente des agglomérations en eau censée être potable ! La population de Châtellerault n'a d'autre source d'approvisionnement que la rivière. Malgré une station de traitement ultra-moderne, nous doutons que la radioactivité de l'eau soit mesurée par une entité indépendante d'EDF . C'est pourquoi nous suggérons que le CNPE prévienne la municipalité des dates de ses rejets et que l'expérience soit faite de mesurer la teneur en radioéléments de l'eau qui arrive à Châtellerault lors de ces périodes.
- Une CLI à l'image des appareils de contrôle : enfin, lors du dernier incident , le CNPE a pris soin de dire qu'il en avait avisé le président de la CLI (Commission Locale d'Information), or celui-ci n'a pas jugé bon d'avertir ni de réunir les membres de cette commission qui ne joue d'autre rôle que celui de chambre d'enregistrement. Pourtant, la vocation d'une telle commission est de veiller au grain et d'informer le public.
Nous chanterons donc pas les louanges du nucléaire
comme le font dans la presse locale ses suppôts locaux,
alors même que des rejets incontrôlés ont lieu
!! Nous nous en tiendrons aux faits pour montrer que la ligne
jaune est souvent franchie, et ce au détriment de la santé
de la population.
Les questions que tout le monde devrait se poser sont les suivantes
: quels seront à moyen terme les effets de la consommation
d'eau de la Vienne ou le simple voisinage d'une centrale dont
les appareils de mesure tombent en panne quand cela l'arrange
? Et comme Civaux n'est pas une exception, puisque la France compte
58 réacteurs nucléaires, quels seront les effets
sur la population des rejets comptabilisés et surtout de
ceux qui échappent à tout contrôle ? ? ?
A ce sujet, le Groupe permanent des experts pour les réacteurs
nucléaires dans son rapport de mai 2004, avec beaucoup
d'indulgence, estime la valeur de l'activité rejetée
imputable aux rejets incontrôlés "à un
centième des rejets annuels réels effectués
en application des autorisations de rejets." L'incident sur
le tritium à Civaux en 2003 nous montre que c'est sans
doute très loin de la vérité. Si tout était
à l'aune de cet incident, les rejets réels seraient
trois fois supérieurs aux rejets déclarés.
Les anomalies récentes nous confortent dans nos doutes.
Ceci n'est qu'un des scandales de la production d'électricité nucléaire que nous entendons dénoncer.
Stop-Civaux -Contact presse : stopcivaux@free.fr
Com. presse : CLI
de Civaux 26.XI.02
Nous intervenons pour que personne ne puisse prétendre
que le nucléaire est une industrie propre, sûre,
idéale et transparente.
Les associations Stop-Civaux et UFC-86 se sont émues à
la lecture de communiqués de l'Autorité de Sûreté
portant sur une série d'incidents
- qui ont eu lieu à la centrale de Civaux depuis le début
de cette année 2002,
- et qui, par leur nature, nous paraissent mériter toute
notre attention.
Ayant constaté qu'à aucun moment la CLI n'avait
fait le point sur ces incidents, nous avons demandé qu'elle
se réunisse avant la fin de l'année pour les éclairer
et apporter des réponses à nos questions. Au vu
de l'ordre du jour, nous doutons avoir le temps de même
les poser.
Ces incidents concernent
-1- l'exploitation des réacteurs (leur pilotage) et la
gestion des incidents.
-2- les rejets gazeux et liquides
1) Nous ne citerons volontairement que 3 incidents qui nous semblent
suffisamment éloquents . Rappelons d'abord les faits :
- le 7 janvier au redémarrage de la tranche 1, il y a eu
échec du couplage de la tranche au réseau. L'intervention
de dépannage tourne mal et entraîne une série
de problèmes qui conduisent à la perte des pompes
primaire et à l'arrêt automatique du réacteur
et au démarrage de l'injection de sécurité.
- le 16 mars, au moment du raccordement de la tranche 2 au réseau,
la montée en puissance s'est effectuée trop vite,
le risque étant une dégradation de la gaine des
barres de combustible. Ce réacteur a connu le même
mois deux autres arrêts automatiques qui laissent supposer
qu'il a connu d'autres ennuis le même mois.
- le 5 septembre, la tranche 1 fait un essai de démarrage
d'un diesel de secours. S'ensuit un démarrage intempestif
d'une pompe, qui mal géré, a conduit à une
pressurisation excessive d'une ligne d'aspiration de la pompe
qui aurait pu être endommagée.
Le couplage d'une tranche au réseau semble être
une opération particulièrement délicate,
certes. Un redémarrage de diésel aussi. Mais puisque
le risque est connu, la vigilance et le respect des consignes
ne sont-ils pas de mise ?
C'est sur le commentaire de l'Autorité de Sûreté,
dans des communiqués qui ont été publiés
6 mois ou plus après les incidents ( ! ! !), que nous voudrions
attirer votre attention :
- pour le 7 janvier l'analyse de l'incident publiée par
l'Autorité de Sûreté (le 9 août 20032
!) met en question « l'accumulation d'erreurs humaines »,
« l'évaluation incomplète des enjeux de sûreté
», « le manque de coordination des tâches »
entre information et analyse, des « écarts dans le
processus d'assurance qualité » (ce qui veut dire
rejets dans le langage politiquement correct de la centrale).
Nos questions sont les suivantes : Que se passera-t-il lorsque les équipes se trouveront
non pas dans des situations délicates courantes mais seront
confrontées -comme ce fut le cas à Blayais- à
la conjonction d'événements extérieurs imprévus,
difficiles à gérer et qu'on ne peut exclure (perte
d'alimentation électrique due à un orage ou une
tempête, inondation, etc) ? Qui peut garantir qu'elles
sauront quoi faire ?
- Le 16 mars, l'incident sur la tranche 2 , a pour origine
« le choix fait par les agents de conduite de s'affranchir
de certaines dispositions prévues dans deux consignes d'exploitation
du réacteur ».
Nos questions sont les suivantes : Quelle a été l'incidence de ce non respect
des procédures ? Les gaines ont-elles souffert de l'emballement
de la réaction ? Cette dernière est-elle à
l'origine du changement de sondes de température du circuit
primaire ?
- Quant au 5 septembre, l'ASN attribue l'incident au fait
que les opérateurs ont « privilégié
le maintien de la production du réacteur » plutôt
que le respect de la consigne
Un arrêt ou un ralentissement
de la production aurait-il fait tache dans le tableau d'exploitation
? Y a-t-il des objectifs de rendement imposés ? S'agit-il
de limiter le nombre des arrêts d'urgence sachant que la
centrale en compte déjà beaucoup et que chaque réacteur
n'a droit qu'à un certain nombre ?
Enfin, et c'est ce qui est le plus préoccupant, à
quoi servent les normes de sûreté si on peut impunément
s'en affranchir ?
***
2) Des incidents d'autre nature ont été signalés.
Ils concernent les rejets d'effluents radioactifs :
- 7 janvier : Que veut dire l'ASN quand elle parle (avec tant
de précautions) pour le 7 janvier « d'écarts
dans le processus d'assurance qualité » ? Est-ce
à dire que des rejets ont eu lieu quand les équipes
ont du intervenir pour le redémarrage ? Quelles en sont
la cause, la nature et l'activité ? Est-ce à
mettre en relation avec le grand nombre de dysfonctionnements
ayant affecté la ventilation de l'enceinte depuis décembre
? Et si tel est le cas, pourquoi la direction interrogée
le 28 février n'a-t-elle pas donné les explications
attendues ?
- D'après une note d'inspection d'avril, il y aurait eu
« mauvaise maîtrise des rejets dans l'environnement
», avec une discordance entre les données d'un appareil
de mesure de rejet du tritium dans la rivière et les calculs
qui faisaient apparaître une sous-estimation par l'appareil
de près des 2/3 de l'activité des effluents (44Bq/l
au lieu de 130 Bq/l).
Nous voudrions faire remarquer que le communiqué de l'ASN
ne dit pas depuis combien de temps durait cette anomalie. Nous
nous posons la question. Or, il s'agit là d'une centrale
et d'un seul radioélément. Le parc nucléaire
français compte 58 réacteurs EDF et bien d'autres
établissements de la même famille. Mais si les rejets
sont systématiquement minorés, il est urgent de reconsidérer l'impact des
établissments nucléaires sur l'environnement et
la santé.
Ce problème de sous-estimation des rejets nous paraît
fondamental étant donné l'importance du parc nucléaire.
D'autant plus que les autorisations de rejets ne prennent pas
en compte tous les radioéléments sous prétexte
que certains existent déjà dans la nature. L'impact
du parc nucléaire sur la santé doit être revu.
- Le 22 mai, l'ASN relève avec délicatesse «
une incohérence » entre des chiffres d'une analyse
concernant les iodes 131 et 133 sur un échantillon du 16
juin et les chiffres reportés sur la fiche de synthèse.
Nous souhaitons des explications. Et est-ce une pratique courante
que les chiffres reportés soient différents des
données des analyses ?
A noter que cette "incohérence"
a été relevée à l'occasion d'une visite
inopinée de l'inspection des installations nucléaires.
Que se passe-t-il quand le gendarme n'est pas là, les rejets
faisant l'objet d'une autosurveillance ?
-Nous nous interrogeons aussi sur les chiffres concernant l'activité
mesurée chaque mois sur les végétaux. Elle
est très supérieure cette année à
l'an passé et ces derniers mois (depuis mai) elle atteint
des chiffres qui sont 5 fois supérieurs à l'activité
de référence (soit 146 Bq/kg avant le démarrage
de la centrale). 885 Bq/kg pour septembre par exemple. Quelles
sont les normes fixées pour la circulation des produits
de consommation ? Faut-il y voir l'impact des dysfonctionnements
? Ne serait-il pas possible de préciser le lieu de prélèvement,
le type de végétaux et les éléments
recherchés plutôt que d'indiquer que les variations
sont normales et fonction des saisons ? Faudra-t-il attendre le mois de juin prochain et la
publication du rapport sur l'environnement pour savoir si nous
avons eu raison de manger nos salades ?
3) Enfin le problème de l'information
du public : Le premier incident de janvier n'a pas été
évoqué à la CLI du 28 février. Il
a fallu attendre jusqu'au 9 août pour voir apparaître
un communiqué ASN (Magnuc) expliquant l'incident. Nous
croyons que non seulement le public n'est pas informé malgré
les conférences de presse mensuelles données par
le CNPE (on n'a évidemment que les réponses aux
questions qu'on pose et encore) mais nous nous demandons, au vu
de ses communiqués tardifs, si l'ASN est elle-même
informée en temps voulu.
En cas d'accident serions-nous prévenus ou « évitera-t-on
de nous inquiéter » en oubliant de nous informer
?