LesAfriques.com, 1/12/2009: 

Mission africaine de Fodé Sylla: un mélange des genres dénoncé

Le réseau « Sortir du nucléaire » a dénoncé un mélange des genres dans la désignation par le ministre français de l'Ecologie, Jean-Louis Borloo, de Fodé Sylla, ancien président de SOS Racisme et actuellement employé de l'entreprise Areva, pour accomplir une « mission » auprès des pays africains en vue du Sommet de Copenhague.

L'association n'apprécie guère qu'une « mission de la diplomatie française soit littéralement fusionnée avec les intérêts de la multinationale Areva ». « Il n'est pas difficile de comprendre que, quand M. Sylla suggère à un dirigeant africain de soutenir la France lors du Sommet de Copenhague, c'est en même temps la multinationale Areva qui laisse planer la menace de rétorsions économiques ou, au contraire, de récompenses. »

Fodé Sylla (43 ans) a été chargé, en octobre dernier, de lancer des programmes de développement et de formation dans les pays d'Afrique pour le groupe nucléaire Areva. Fodé Sylla s'en défend. Il a déclaré ne pas voir « ce que le nucléaire a à voir là-dedans », et il « trouve que c'est méprisant vis-à-vis de l'Afrique de le penser ».

 


Bastamag.net, 25/11/2009: 

Conflit d'intérêt - Fodé Sylla, lobbyiste du nucléaire en Afrique

En prévision du sommet de Copenhague, Jean-Louis Borloo, ministre du Développement durable, a confié le 19 novembre un travail à Fodé Sylla, ex-président de SOS Racisme et ancien député européen PS. Sa mission consiste à « appuyer l'action du ministre et entretenir les contacts avec les ministres africains de l'environnement » d'ici la conférence internationale sur le climat.

Le Réseau Sortir du nucléaire conteste fortement cette décision et demande son annulation, au motif que Fodé Sylla est salarié d'Areva depuis de nombreuses années : « Dans les faits, M. Sylla a pour mission de convaincre les dirigeants africains de soutenir les manoeuvres des autorités française qui tentent de faire inclure le nucléaire dans les options favorables au climat ». Pour l'ONG, « il est intolérable qu'une mission de la diplomatie française soit littéralement fusionnée avec les intérêts de la multinationale Areva ».

Depuis 2007, Fodé Sylla est chargé de mission pour le développement économique en Afrique, pour l'entreprise Areva. Dans une interview accordée au site Afrik.com, il déclarait en 2007 : « La direction d'Areva est tout à fait consciente de qui je suis et le respecte tout à fait. Sa volonté de s'investir toujours plus dans les questions de développement économique et durable en Afrique, rejoint complètement mon ambition personnelle de venir efficacement en aide aux populations du Sud ». Il n'hésite pas d'ailleurs à déclarer qu'une « entreprise comme Areva a besoin de l'Afrique, et l'Afrique a besoin d'une entreprise comme Areva. Mon action et celle des équipes qui sont déjà à l'oeuvre sur le terrain s'inscrivent, entre autres, dans le cadre d'un échange gagnant-gagnant. Tout le monde y trouve son compte. »

Un tel dévouement pour une entreprise qui procède au pillage de l'Afrique laisse songeur... Difficile de ne pas s'inquiéter, avec le Réseau Sortir du nucléaire, du fait que Fodé Sylla ne soit « le pion avancé des autorités françaises pour convaincre les dirigeants africains de soutenir à Copenhague l'option nucléaire pour "sauver" la planète ».

 


Developpementdurable.com, 24/11/2009: 

Copenhague: la mission de Fodé Sylla dénoncée

Le ministère du Développement durable a confié la semaine dernière à Fodé Sylla, ex-président de SOS Racisme, une mission auprès des pays africains en vue du Sommet de Copenhague : soutenir son action. Pour le réseau Sortir du Nucléaire, il s'agit surtout d'appuyer les activités du groupe Areva

Le 19 novembre, Jean-Louis Borloo, ministre de l'Ecologie et du Développement durable, a fait appel à Fodé Sylla, ancien président de l'association SOS Racisme, ex-député européen, et membre du Conseil économique et social, pour l'aider dans les négociations de Copenhague à venir. Sa mission : « Appuyer l'action du ministre et entretenir les contacts avec les ministres africains de l'environnement » d'ici la conférence de l'ONU sur le climat à Copenhague. Une tâche similaire à celle du mois dernier, lorsque M. Borloo lui avait demandé de l'accompagner au Forum mondial du développement durable, à Ouagadougou.

Mais pour le réseau Sortir du Nucléaire, il y a là matière à polémique, car M. Sylla est « présenté comme ancien président de SOS Racisme, alors qu'il est aussi ­ et surtout ­ salarié de la multinationale Areva » (depuis plusieurs années). Autrement dit, officieusement, il « a pour mission de convaincre les dirigeants africains de soutenir les manuvres des autorités françaises qui tentent de faire inclure le nucléaire dans les options favorables au climat ». Et la fédération de dénoncer une mission de la diplomatie française « littéralement fusionnée avec les intérêts de la multinationale Areva » (communiqué).

« Don't nuke the climate ! »

Le réseau anti-nucléaire conteste donc « avec la plus grande vigueur » cette nomination et demande son annulation car « il n'est pas difficile de comprendre que, quand M. Sylla suggère à un dirigeant africain de soutenir la France lors du Sommet de Copenhague, c'est en même temps la multinationale Areva qui laisse planer la menace de rétorsions économiques ou au contraire de récompenses ». Dans son communiqué, Sortir du Nucléaire cite d'ailleurs Fodé Sylla pour appuyer son argumentaire : « Une entreprise comme Areva a besoin de l'Afrique, et l'Afrique a besoin d'une entreprise comme Areva » (le groupe exploite notamment sur le continent la mine d'Imouraren, au Niger).

Les militants rappellent en outre qu'ils sont totalement opposés à « l'idée que le nucléaire permette de lutter contre le changement climatique », qui progresse de plus en plus à l'approche de Copenhague. L'association anime pour cela la campagne internationale « Don't nuke the climate » (« N'atomisez pas le climat »).

 


Rue89, 24/11/2009: 


Fode Sylla en 1995 lors d'une manifestation devant le ministère de l'Intérieur.

Fodé Sylla, de SOS Racisme aux bons offices africains d'Areva

L'ancien président de SOS Racisme, Fodé Sylla, ne chôme pas. Salarié d'Areva en charge du développement et de la formation en Afrique, membre du Conseil économique et social et environnemental, il vient de décrocher une mission auprès du ministre de l'Environnement pour « développer les échanges » avec l'Afrique. De là à imaginer qu'il serait chargé de défendre les intérêts du nucléaire français, voilà qui est, selon lui, « méprisant ».

Grâce au réseau Sortir du nucléaire, je dois dire que j'ai appris une nouvelle qui m'a fait un peu bondir : le Réseau demande « l'annulation de la mission confiée par Borloo à Fodé Sylla, salarié d'Areva ».

Ah bon ? L'ancien président de SOS, proche du PS et candidat pour le Parti Radical de Gauche aux législatives de 2007 en Seine-Saint-Denis, fait dans le nucléaire ? Titulaire d'une licence d'histoire et d'une maîtrise de science politique, il n'a pas le profil de l'ingénieur...

Non, non, à Areva il fait dans le social : chargé de mission pour le développement économique et social et la formation de l'Afrique depuis deux ans, après avoir été responsable des questions de diversité.

« Des contacts importants avec les ministres de l'Environnement »

Interrogé sur le contenu de son travail, Fodé Sylla explique qu'il monte des projets de centres de microfinance pour les femmes, d'accès à l'eau pour les populations vivant dans les déserts rien à voir avec le nucléaire.
Quand je le contacte pour mieux cerner les contours de la mission que lui a confiée Borloo, dont la lettre d'embauche est pour le moins floue, il explique que les choses sont simples :

"Au nom du Conseil économique et social environnemental, je suis allé au septième Forum sur le développement durable à Ouagadougou, avec Borloo. A cette occasion, on a eu à discuter de la position des Africains à Copenhague, et le ministre, suite à cette mission, a estimé que j'avais établi des contacts importants avec les ministres de l'Environnement.

Chacun sait que la France a la vocation de rassembler les pays pauvres pour tenter de sortir du sommet de Copenhague avec des objectifs chiffrés. Ma mission, c'est de voir avec eux comment le plan justice-climat proné par le ministre peut se réaliser de façon concrète à Copenhague.

Je ne vois pas ce que le nucléaire a à voir là-dedans et je trouve que c'est méprisant vis-à-vis de l'Afrique de le penser. Croire qu'il suffit de nommer un noir pour imposer quelque production que ce soit aux dirigeants africains, c'est mal connaître l'Afrique d'aujourd'hui."

« Deux casquettes, celle du commercial et du politique »

On sait à quel point les affaires d'Areva sont des affaires d'Etat. Et, alors que l'entreprise accumule les critiques sur ses centrales de troisième génération, le président de la République en personne est le VRP de cette technologie française. Stéphane Lhomme, porte-parole du réseau Sortir du nucléaire en est certain, Fodé Sylla a « deux casquettes, celle du commercial et du politique » :

« La France tente actuellement de convaincre les dirigeants africains pour qu'ils incluent le nucléaire dans les solutions au changement climatique. Tout se joue justement avant Copenhague, en coulisse.

Bien sûr que sa mission officielle n'est pas de pousser au nucléaire, c'est sa mission officieuse. S'il ne s'agit pas de vendre des centrales à l'Afrique, cela peut être pour exploiter les mines d'uranium ou pour refaire leurs réseaux électriques »

On se souvient par exemple qu'Areva exploite au Niger la plus grande mine d'uranium d'Afrique et que les relations avec ce pays sont parfois tendues, par exemple lorsque le patron local d'Areva, accusé de financer les rebelles touaregs, avait été expulsé par le pays.

« L'Afrique c'est pas un terrain de jeu »

Mais quand on demande à Fodé Sylla si son activité pour le géant français du nucléaire pourrait l'influencer dans sa mission auprès des dirigeants africains, il s'énerve carrément :

"Les discussions de Ouagadougou n'ont fait à aucun moment référence au nucléaire mais à l'accès à l'énergie. Il s'agit de faire que les propositions des Africains trouvent un écho, notamment l'accès à l'énergie et à l'eau, rien d'autre. Je vais d'ailleurs réunir les ministres de l'Environnement à Deauville avec Borloo prochainement.

Si on pense qu'on ne peut aller s'asseoir avec des Africains pour parler d'autre chose que de vendre des centrales nucléaires, l'Afrique n'est pas un terrain de jeu."

On veut bien croire, en bonne langue de bois, que l'Afrique « n'est pas un terrain de jeu », et que le nucléaire c'est « la transparence », mais on a du mal. C'est toute la spécificité de cette énergie, dont les entreprises sont publiques, les commandes d'Etat, et les budgets colossaux.